Com, 6 mars 2001, Bull n° 48, N° 98-12-266
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Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Versailles, 18 décembre 1997), que la société Elicis, après
avoir été autorisée à pratiquer une saisie conservatoire au préjudice des
sociétés Buflor et Emfleur (les sociétés), a assigné celles-ci en paiement de
soldes de commissions et d'une indemnité pour rupture du contrat d'agence
commerciale dont elle se prétendait titulaire ; que la société Emfleur a
obtenu « la mainlevée » de la saisie moyennant remise d'une certaine somme à un
séquestre et qu'en cours d'instance les sociétés ont été mises en redressement
puis liquidation judiciaires ;
Sur le premier
moyen, pris en ses trois branches, après avis de la deuxième chambre civile de
la Cour de cassation
Attendu que la
société Elicis fait grief à l'arrêt, après avoir fixé sa créance au passif de
la liquidation judiciaire des sociétés à la somme de 745 840,12 francs,
d'avoir rejeté sa demande tendant à ce que lui fût attribuée une somme de 181
709,90 francs versée entre les mains d'un séquestre en exécution d'une
ordonnance de référé du 21 décembre 1994, antérieure à l'ouverture de la
procédure collective, et d'avoir dit que le séquestre devait se dessaisir de cette
somme entre les mains du liquidateur, alors, selon le moyen
1° que la mesure
« propre à .sauvegarder les intérêts des partie » ordonnée par lé juge de
l'exécution, à la demande du débiteur et dans le seul intérêt de celui-ci. en
contrepartie de la « mainlevée » de la mesure conservatoire initialement
prise, confère au créancier un droit définitivement acquis à bénéficier de la
garantie judiciaire ainsi constituée à son profit, et dès la date de sa
constitution, à la seule condition qu'ultérieurement sa créance .soit
constatée par le juge du principal ; qu'ayant consacré la réalité de la
créance revendiquée au titre des commissions impayées, l'arrêt ne pouvait
refuser d'ordonner la remise au créancier de la .somme ayant fait l'objet du
séquestre judiciaire .substitué à la .saisie conservatoire initialement
diligentée, qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé l'article
72, alinéa 2, de la loi du 9 juillet 1991 ;
2° que la règle
de la suspension des poursuites, qui interdit .seulement de condamner un
débiteur en liquidation judiciaire à des restitutions, est .sans application
lorsqu'il s'agit de savoir à qui doit être remise une somme qui a été déposée
entre les mains d'un .séquestre, contrat dont le propre est précisément de
réserver ce qui en fait l'objet à la partie qui sera jugée devoir
l'obtenir ; qu'ayant fixé la créance de la .société Elicis à la somme de
730 840,12 francs en principal, et en décidant néanmoins que la somme
.séquestrée de 181 709,90.francs devrait être remise entre les mains du liquidateur,
la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 47, 48 et 33 de
la loi du 25 janvier 1985, ainsi que, par refus d'application, les articles
1956, 1963 et 2075-I du Code civil,
3" que le
dépôt, tel le séquestre, ordonné judiciairement emporte affectation spéciale et
privilège du créancier gagiste et est opposable à la procédure collective de
celui qui l'a fait ou au préjudice duquel il a été fait dès lors qu'il l'a été
en vertu d'une décision de justice ayant acquis ,force de chose jugée avant la
date de cessation des paiements ; qu'en érigeant en principe que le droit
de la société Elicis, dont elle a constaté la créance contre les sociétés, de
demander l'attribution à son profit des sommes séquestrées n'était pas fondé à
partir du moment où sa créance n'avait pas été judiciairement reconnue avant
l'ouverture de la procédure collective, en ,sorte qu'elle ne pouvait se
prévaloir d'un droit acquis avant le prononcé de celle-ci, tandis qu'il
convenait seulement de vérifier si l'ordonnance de référé ayant ordonné le
séquestre était passée en force de chose jugée, avant la date de cessation des
paiements, la cour d'appel a violé les articles 33, 47, 48 et 107.5° de la loi
du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que
la substitution d'un séquestre judiciaire à une saisie conservatoire n'a pas
pour conséquence de faire échapper la créance séquestrée au régime juridique de
la saisie conservatoire dont les effets sont maintenus ; qu'il résulte de
la combinaison des articles 47 de la loi du 25 janvier 1985 et 240 à 242 du
décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, instituant de nouvelles règles relatives
aux procédures civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9
juillet 1991, que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête
toute voie d'exécution, tant sur les meubles que les immeubles, de la part des
créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement, et
qu'une saisie conservatoire qui n'a pas été convertie en saisie-attribution avant
le jugement d'ouverture ou toute autre mesure que le juge peut lui substituer
en application de l'article 72 de la loi précitée, n'emporte plus, dès lors,
affectation spéciale et privilège au profit du créancier saisissant ;
que, par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision
déférée, quia relevé que la saisie conservatoire au préjudice de la société
Emfleur, mise en redressement judiciaire le 1°, février 1995, avait été
effectuée le 13 décembre 1994, se trouve légalement justifiée ; que le
moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le second
moyen, pris en ses trois branches : (Publication sans intérêt) ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le
pourvoi.