Com, 15 mai 2001, Bull n° 89, N° 98-14-965

 

_________________________________

                                                          l

 

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches

 

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 6 février 1998), que la société Literie Paloise (la société) a assigné la société Eurobail (Eurobail) en annulation des contrats de crédit-bail immobilier consentis par celle-ci ; que la société ayant été mise en liquida­tion judiciaire le 23 janvier 1996, son liquidateur, M. Roche est intervenu aux débats et a demandé à la cour d'appel de dire que les contrats étaient inopposables à la procédure collective pour n'avoir pas fait l'objet d'une publicité ;

 

Attendu que le liquidateur et la société reprochent à l'arrêt d'avoir déclaré les deux contrats de crédit-bail immobilier opposables à la procédure collective, en conséquence, fixé la créance de Eurobail au titre de l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985 à la somme de 11 281 751 francs et condamné M. Roche ès qualités à payer à Eurobail la somme de 722 704 francs au titre de l'article 40 de la même loi, alors, selon le moyen :

 

1° qu'en application de l'article « 8 du décret n° 66-545 du 2 juillet 1966 », le défaut de publicité du contrat de crédit-bail entraîne l'inopposabilité de son droit de propriété aux créanciers du crédit-preneur, que, conformément à l'article 148 de la loi du 25 janvier 1985, le liquidateur qui a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt de tous les créanciers et repré­sente l'ensemble de ceux-ci, est apte d se prévaloir de ladite inopposabilité, qu'en l'espèce, après avoir établi l'absence de publication des deux contrats de crédit-bail, en considérant pour les déclarer opposables à la procédure collective, que les créanciers représentés par le liquidateur ne pouvaient se pré­valoir de la qualité de tiers, la cour d'appel a violé l'article 30 du décret du 4 janvier 1955 et les textes précités ;

 

2° qu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du crédit-preneur, la déclaration de créance du crédit-bailleur ne saurait suppléer l'absence de publication de l'opération de crédit-bail ; qu'en l'espèce après avoir constaté l'absence de publicité des deux contrats de crédit-bail, en considérant, au contraire, pour les déclarer opposables à la procédure collec­tive, que la déclaration de créance effectuée par Eurobail ren­dait ladite absence « sans incidence », la cour d'appel a violé les textes précités ;

 

3° que si le crédit-bailleur peut opposer son droit de pro­priété à l'encontre des tiers qui en ont connaissance, l'opposa­bilité du contrat ù la procédure collective suppose que soit établie la connaissance par chacun des créanciers de l'exis­tence des droits du crédit-bailleur ; qu'en l'espèce, après avoir constaté l'absence de publicité des deux contrats de crédit­bail, en les déclarant opposables aux créanciers de la .société, ,sans constater que chacun desdits créanciers avait eu connais­sance de l'existence des droits de Eurobail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes précités ;

 

Mais attendu qu'après avoir énoncé que, selon l'article 30, alinéa 1, du décret du 4 janvier 1955, auquel renvoie l'article 11 du décret du 4 juillet 1972 applicable aux contrats de crédit-bail immobilier, les actes et décisions judiciaires sou­mis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même obligation de publicité et publiés, ou ont fait inscrire des privilèges ou des hypothèques, l'arrêt en déduit exactement que les créan­ciers représentés par le liquidateur ne sont pas, en tant que tels, des tiers au sens de ce texte ; qu'en l'état de ces énonciations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa déci­sion ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

 

PAR CES MOTIFS

 

REJETTE le pourvoi.