Civ III, 4 juillet 2001, Bull n° 92, N° 98-16-775

 

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Sur le moyen unique, qui est recevable

 

Vu l'article 34-3 du décret du 14 octobre 1955, ensemble l'article 54 du Code de procédure civile ;

 

Attendu qu'en cas d'inexactitude ou de discordance, ou à défaut de publication du titre du disposant ou de l'attestation de transmission par décès à son profit, le conservateur ne procède pas aux annotations sur le fichier immobilier, il notifie, dans le délai maximum d'un mois à compter du dépôt, les inexactitudes, discordances ou défaut de publication relevés au signataire du certificat d'identité porté au pied de tout bordereau, extrait, expédition ou copie conformément aux prescriptions des articles 5 et 6 du décret du 4 janvier 1955 ;

 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 20 mars 1998), que la société Visea Thorn Emi (société) ayant assigné son agent commercial, M. Parquier, en paiement de sommes, a été autorisée, à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur un immeuble appartenant aux époux Pasquier ; que cette inscription a été prise le 22 novembre 1991 ; qu'un jugement du 12 janvier 1994 a condamné M. Pasquier à payer une certaine somme à la société ; que M. Angeras, notaire, ayant procédé, le 31 mars 1992, à la vente amiable de l'immeuble sans tenir compte de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, la société qui n'a pu recouvrer sa créance, l'a assigné en responsabilité ;

 

Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que l'inscription définitive prise le 8 avril 1994 était effectivement prématurée mais qu'ayant été rejetée, elle avait été renouvelée selon bordereau rectificatif du 16 mai 1994, publié le 20 mai suivant, donc dans le délai légal, qu'il résulte de l'article 34-3 du décret du 14 octobre 1955 que ce n'est que pour les énonciations non entachées d'erreur que le bordereau rectificatif prend effet à la date du dépôt du bordereau originaire, que pour les autres énonciations, il prend rang à la date de son propre dépôt et que dés lors le bordereau du 16 mai 1994, venu rectifier le bordereau prématurément déposé le 8 avril 1994, n'a pris effet qu'au 16 mai 1994 et est donc régulièrement intervenu dans le délai de deux mois à compter du jour où le jugement du 12 janvier 1994, signifié le 16 mars 1994, a acquis force de chose jugée ;

 

Qu'en statuant ainsi, alors qu'un bordereau rectificatif ne peut avoir pour seul objet que la rectification des inexactitudes, discordances, ou défaut de publication du titre et que le vice résultant de l'inscription d'hypothèque définitive intervenue avant que le jugement statuant au fond n'ait acquis force de chose jugée ne constitue ni une inexactitude ni une discordance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.