Civ III, 4 juillet 2001, Bull n° 94, N° 00-12-143
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Sur le premier moyen
Vu l'article 686
du Code civil, ensemble l'article 1134 de ce Code ;
Attendu qu'il est
permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs
propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les
services établis ne soient imposés ni à la personne, ni en faveur de la personne,
mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient
d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public ;
Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Montpellier, 17 février 1999), que les consorts Roux ont vendu
un terrain à la société civile immobilière (SCI) Les Cayres, selon acte du 4
octobre 1990, portant acceptation par la société acqueresse de l'interdiction,
faite aux divers commerçants qui viendraient à s'installer sur le terrain
vendu, de fabriquer ou vendre du pain et de la pâtisserie, dans leur forme
artisanale et ce, quel que soit le type de commerce qui y serait exercé ;
qu'après avoir édifié sur ce terrain un immeuble comprenant des locaux à usage
commercial, la SCI Les Cayres l'a revendu à la SCI Mazars, par un acte
reproduisant cette même clause ; que cette société a donné en
location-gérance un fonds de commerce à la société à responsabilité limitée
(SARL) LSF, qui y exploitait un supermarché ; que les consorts Roux,
invoquant le non-respect de la clause d'interdiction, ont assigné les sociétés
Les Cayres, Mazars et LSF pour obtenir la cessation de ce prétendu manquement
et la réparation de leur préjudice ; que la SARL Roux et fils est
intervenue à l'instance ;
Attendu que pour
déclarer nulle la stipulation litigieuse et débouter les consorts Roux de leur
demande, l'arrêt, ayant relevé que l'interdiction édictée à l'acte du 4 octobre
1990 n'était pas constitutive d'une servitude, en l'absence de détermination du
fonds dominant, l'interdiction étant stipulée « pour le respect de la mémoire
de M. Léon Roux », retient qu'une convention, dite de non-concurrence,
interdisant, sans limitation de temps, l'exercice d'une activité commerciale
définie est licite si elle est restreinte à un lieu déterminé, qu'il s'agit,
cependant, dans ce cas toujours d'une servitude établie par le fait de l'homme
attachée à un fonds dans l'intérêt d'un autre fonds, et que faute d'avoir
déterminé un fonds dominant bénéficiaire de la clause de non-concurrence, cette
clause est nulle ;
Qu'en statuant
ainsi, alors que l'interdiction faite à l'acquéreur d'un fonds immobilier de
l'affecter à un usage déterminé peut revêtir le caractère d'une obligation
personnelle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS,
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen
CASSE ET ANNULE, dans toutes
ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 février 1999, entre les parties, par la
cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les
parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait
droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes