Com, 9 octobre 2001, Bull n° 160, N° 98-21-987 N° 98-22-015
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Joint les
pourvois n- 98-21.987, 98-22.015, 98-22.016, et 9$-22.017, qui attaquent le
même arrêt ;
Donne acte aux
sociétés Béton travaux, RMC France et Béton de France Sud-Est,,Brignolaise de
béton et d'agglomérés, de ce qu'elles se désistent de leur pourvoi en ce qu'il
est dirigé contre la société Unibéton, la société Béton de la Méditerranée, la
société Lafarge béton granulats SA, la société Express béton SA, la société
Chantiers prêt, la société Béton chantiers de Nice, l'EURL Béton chantiers du
Var ;
Attendu, selon l'errât attaqué,
et les productions, que, saisi par le ministre de l'Economie de pratiques
constatées sur le marché dû béton prêt à l'emploi de la région Provence-Alpes
Côte-d'Azur, et et d'une demande,de mesures conservatoires afférentes aux
pratiques visées dans la saisine au fond, le Conseil de la concurrence,
statuant en commission permanente, a, par décision n° 94-MC-10 du 14 septembre
1994, enjoint, jusqu'à l'intervention de la décision au fond, aux sociétés
Béton de France, aux droits de laquelle vient la société RMC Fiance,
Superbéton, Béton chantiers du Var et Société méditerranéenne de béton de
cesser de vendre directement ou indirectement, dans un rayon de 25 km autour
de la ville de Toulon, du béton' prêt à l'emploi à un prix unitaire inférieur
au coût moyen variable de production tel qu'il résultait de la comptabilité
analytique établie mensuellement par chacune des entreprises concernées pour
chacune de leurs centrales ; que le recours contre cette décision a été
rejeté par arrêt de la cour d'appel du 3 novembre 1994, les pourvois contre cet
arrêt ayant été rejetés par arrêts de la Chambre commerciale, financière et
économique n° 271 P, 272 D et 273 D du 4 février 1997 ; que, statuant, en formation
plénière comprenant notamment les membres de la commission permanente, sur la
saisine au fond, par décision n° 97-D-39 du 17., juin 1997, le Conseil de la
concurrence a infligé à treize .entreprises, parmi lesquelles les sociétés
Béton de France, Unibéton, Béton de France Sud-Est, Béton travaux, et
Brignolaise de béton et d'agglomérés des sanctions pécuniaires d'un montant
compris entre 50 000 francs et 40 millions de francs et a ordonné la
publication de sa décision, en raison d'ententes se manifestant,par des
fixations concertées de prix, de répartition de marchés et de pratiques de prix
prédateurs aux fins d'éviction de certains concurrents ; que dix des entreprises
sanctionnées ont formé des recours en annulation ou réformation contre cette décision ;
Sur la première
branche des premiers moyens des pourvois n°' 98-22.015 et 98-22.016, la deuxième
branche du premier moyen du pourvoi n° 98-21.987 et le moyen unique du pourvoi
n° 98-22.017, réunis
Attendu que les
sociétés Béton travaux, RMC France, Béton de France Sud-Est, Unibéton et
Brignolaise de béton et d'agglomérés font grief 'd l'arrêt d'avoir rejeté leur
recours en annulation contre la décision du Conseil de la concurrence ayant
prononcé à leur encontre des sanctions pécuniaires, alors, selon le moyen,
qu'il résulte des énonciations de la décision frappée de recours que le
rapporteur du Conseil de la concurrence, gui a établi la notification des
griefs, puis a procédé à des investigations complémentaires, a participé au
délibéré, si bien qu'en refusant d'annuler la décision rendue dans de telles
conditions, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu
qu'il résulte de l'article 2-3° du décret n° 87-849 du 19 octobre 1987 que,
lorsque la déclaration de recours contre les décisions du Conseil de la
concurrence ne contient pas l'exposé des moyens invoqués, le demandeur doit
déposer cet exposé au greffe dans les deux mois qui suivent la notification de
la décision frappée de recours ; que les sociétés Béton travaux, RMC
France, Béton de France Sud-Est, Unibéton et Brignolaise de béton et
d'agglomérés n'ayant exposé les moyens d'annulation tirés de la présence du
rapporteur au délibéré ni lors de leur déclaration de recours ni dans les deux
mois suivant la notification de la décision, elles ne sont pas recevables à le
faire pour la première fois devant la Cour de cassation et la cour d'appel
n'était pas tenue de les relever d'office ; d'où il suit que le moyen est
irrecevable ;
Mais sur la
deuxième branche des premiers moyens des pourvois n°° 98-22.015 et 98-22.016,
et la première branche du premier moyen du pourvoi n° 98-21-987, réunis
Sur
l'irrecevabilité du moyen soulevée par le ministre de l'Économie
Attendu que le
ministre de l'Économie soutient que le grief de défaut d'impartialité tiré du
prononcé par le Conseil de la Concurrence d'une décision au fond après le
prononcé d'une décision ordonnant des mesures conservatoires est nouveau ;
Mais attendu que
la société Unibéton a soutenu, dans son mémoire à l'appui du recours contre la
décision du Conseil de la concurrence, produit, « qu'on ne peut s'empêcher de
penser que par l'importance qui lui a été donnée, tant par le Conseil de la
concurrence lui-même que par les commentateurs, la décision n° 94-MC-10, le
Conseil s'interdisait en fait d'examiner dans un sens contraire le fond de
l'affaire et privait les sociétés mises en cause d'un véritable débat objectif
et impartial > ; qu'en l'état de ces énonciations, dont il ressort que
le moyen tiré du défaut d'impartialité du Conseil de la concurrence ayant
prononcé des mesures conservatoires puis une décision au fond était dans le
débat, le moyen n'est pas nouveau ;
Et sur le moyen
Vu l'article 6,
paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, ensemble l'article 12 de l'ordonnance du 1- décembre 1986,
devenu l'article L. 464-1 du Code de commerce
Attendu que toute
personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal
impartial ; que cette exigence doit s'apprécier objectivement ; que
cette règle est applicable au Conseil de la concurrence ;
Attendu que
l'arrêt retient que les mesures conservatoires prononcées au début de la
procédure, avant enquête approfondie sur le fond, pour faire cesser une
pratique gravement préjudiciable à l'ordre public économique, ne sauraient
être considérées comme un préjugement sur l'imputabilité de ces
pratiques ;
Attendu qu'en
statuant ainsi, alors que le Conseil de la concurrence s'était prononcé sur le
caractère prohibé d'une partie des faits qui lui étaient dénoncés dans la
procédure de mesures conservatoires, ce dont il devait être déduit qu'il ne
pouvait, dans une formation comportant des membres ayant statué dans cette
procédure, statuer à nouveau au fond, sans manquer objectivement au principe
d'impartialité ci-dessus énoncé, l'arrêt a violé, par refus d'application, les
textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS,
et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois
CASSE ET ANNULE,
dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 1998, entre les
parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et
les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être
fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.