Com, 23 octobre 2001, Bull n° 174, N° 00-10-631

 

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Attendu, selon le jugement déféré, que M. Le Guen, horti­culteur, a formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer du 12 janvier 1990 du président du Tribunal de commerce de Morlaix l'ayant condamné au paiement d'une certaine somme su titre des cotisations dues à l'ANIHORT, organisation interprofessionnelle agricole, en vertu des arrêtés interministériels d'extension adoptés pour les années 1987 à 1989 ; que M. Le Guen a fait valoir que la cotisation litigieuse finançait des actions contraires au droit communautaire, notamment en ce que certaines des normes de présentation et de commercialisation des produits en cause édictées par l'ANIHORT étaient applicables aux produits importés et constituaient dès lors des mesures d'effet équivalent incompa­tibles avez l'article 30 du Traité instituant la Communauté européenne et que les normes de qualité pour les fleurs cou­pées fraîches et les feuillages frais édictées par cette même association étaient différentes de celles prévues par le règle­ment CEE n° 316/68 du Conseil des Communautés euro­péennes du 12 mars 1968 pris en application du règlement de base du Conseil n° 234/68 ; qu'il a fait valoir également que ces cotisations constituaient des aides d'État qui n'avaient pas été notifiées à la Commission des Communautés européennes ;

 

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

 

Vu l'article 30, devenu l'article 28, du Traité instituant la Communauté européenne, ensemble le règlement du Conseil des Communautés européennes n° 234168 du 27 février 1968 portant établissement d'une organisation commune de marché dans le secteur des plantes vivantes et des produits de flori­culture ;

 

Attendu que, pour rejeter l'opposition de M. Le Guen, le Tribunal retient qu'il lui appartiens de démontrer que la cotisa­tion litigieuse sert à financer des actions contraires à l'article 85, paragraphe 1, du Traité ;

 

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte de la juris­ptvdence de la Cour de justice des Communautés européennes (Le Lampion, 25 novembre 1986 ; Larroche frères, 22 sep­tembre 1988) qu'en présence d'une organisation commune des marchés comportant une réglementation exhaustive de cer­taines normes de production ou de commercialisation, les Etats membres n'ont plus compétence pour étendre aux producteurs non affiliés les accords interprofessionnels conclus par l'orga­nisation de producteurs, que l'obligation des producteurs non affiliés de participer su financement des caisses et fonds insti­tués par une organisation de producteurs est illégale dans la mesure où elle sert à financer des activités qui sont elles­mémes jugées contraires au droit communautaire, qu'il appar­tient à la juridiction nationale d'apprécier quelle est la partie de la contribution financière qui sert à financer de telles activi­tés, qu'il appartenait en conséquence à l'ANIHORT, dés lors que M. Le Guen avait apporté des éléments de nature à démontrer que la cotisation litigieuse finançait des activités contraires su droit communautaire, notamment une lettre du 13 septembre 1994 de la Commission des Communautés euro­péennes relative à un litige opposant l'ANIHORT à un autre horticulteur, d'apporter la preuve que, pour partie, la cotisation litigieuse finançait des activités compatibles avec l'ordre juri­dique communautaire, le Tribunal a violé les textes susvisés ;

 

Et sur le moyen unique, pris en sa seconde branche:

 

Vu l'article 93, paragraphe 3, devenu l'article 88, para­graphe 3, du Traité instituant la Communauté européenne, ensemble l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

 

Attendu que, pour statuer comme il a fait, le Tribunal retient que M. Le Guen ne rapporte pas la preuve de ce que la cotisa­tion a rompu l'égalité concurrentielle entre les ressortissants des Etats membres ;

 

Attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. Le Guen faisant valoir que l'extension par arrêtés inter­ministériels des cotisations litigieuses constituait une mesure d'aide d'Etat en ce que ces cotisations financeraient des actions au bénéfice de certaines entreprises ou certaines pro­ductions et que la mesure d'extension n'avait pas été su préa­lable notifiée à la Commission des Communautés européennes, le Tribunal n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;

 

PAR CES MOTIFS

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le juge­ment rendu le 8 juillet 1998 rectifié le 28 avril 1999, entre les parties par le tribunal de commerce de Morlaix ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trou­vaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les ,renvoie devant le tribunal de commerce de Brest.