Civ I, 2 octobre 2001, Bull n° 235, N° 00-10-404

 

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches

 

Attendu que, le 15 juin 1997, Mme Y..., ayant la double nationalité française et marocaine, a mis su monde à Chene­Bougeries'(canton de Genève) une fille prénommée Ilyane ; que, par acte du 26 mars 1998, elle a assigné M. X..., de natio­nalité marocaine, en déclaration de paternité naturelle ; que celui‑ci a soulevé l'exception d'incompétence de la juridiction française laquelle s'est déclarée compétente par application de l'article 14 du Code civil ;

 

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 10 novembre 1999) d'avoir rejeté son contredit, alors, selon le moyen

 

1° qu'en statuant ainsi, sans vérifier si la saisine du tribu­nal français et les conséquences en découlant quant à la déter­mination de la loi applicable au fond étaient compatibles avec l'interdiction absolue fait, en droit marocain, de toute recherche de paternité naturelle, la cour d'appel n'a pas res­pecté le principe fondamental de l'identité nationale de Mme Y... et de la sienne, violant ainsi la Convention franco-­marocaine du 10 août 1981 et l'article 14 du Code civil, ensemble l'article 55 de la Constitution,

 

2° qu'en tour état de cause, il avait rappelé, devant les juges du fond, que Mme Y..., en raison de sa nationalité maro­caine et de sa religion musulmane, devait être considérée comme ayant fait acte d'.r allégeance » au droit marocain qui prohibe toute recherche judiciaire de paternité naturelle ; qu'en omettant de vérifier si une telle allégeance n'emportait pas renonciation implicite au bénéfice de l'article 14 du Code civil, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ;

 

Mais attendu que la règle de compétence édictée au profit du demandeur français par l'article 14 du Code civil s'impose au juge français et ne peut être écartée, si son bénéficiaire ne renonce pas à s'en prévaloir, que par un traité international ; que, par motif adopté, la cour d'appel a décidé exactement que la Convention franco‑marocaine du 10 août 1981 ne concernait pas les actions relatives à la filiation et qu'elle ne pouvait donc écarter l'application de l'article 14 du Code civil dont bénéfi­cie Mme Y... du fait de sa nationalité française, seule prise en considération par les tribunaux français ;

 

Et attendu qu'il ne résulte nullement du contredit que M. X... ait soutenu, devant la cour d'appel, le moyen tiré de la renon­ciation de Mme Y... au bénéfice de l'article 14 du Code civil ; d'où il suit que, nouveau et mélangé de fait et de droit, le moyen est irrecevable ;

 

PAR CES MOTIFS

 

REJETTE le pourvoi.

 

Civ I, 2 octobre 2001, Bull n° 236, N° 00-11-369

 

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Sur le second moyen, pris en sa première branche

 

Vu l'article 11 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 ;

 

Attendu que les règles indirectes de compétence édictées par ce texte sont, su stade de la reconnaissance, exclusives de l'application des articles 14 et 15 du Code civil ;

 

Attendu que, par jugement du 21 avril 1975, le tribunal régional de Casablanca a prononcé le divorce des époux X...-Y..., tous deux de nationalité française et dont le dernier domicile commun se situait au Maroc ; que, par acte du 15 mars 1996, Mme Y... a assigné M. X... devant le tribu­nal de grande instance de Paris en demandant à celui-ci de lui déclarer inopposable le jugement marocain ; que l'arrêt attaqué a fait droit à cette demande ;

 

Attendu que, pour statuer comme elle l'a fait, la cour d'ap­pel énonce que Mme Y... n'a ni accepté la compétence du juge marocain ni renoncé expressément ou tacitement à la compé­tence française exclusive de l'article 15 du Code civil après le prononcé du divorce ;

 

En quoi, elle a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen, ni sur la seconde branche du second moyen

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 novembre 1999, entre les parties, par la cour d'ap­pel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autre­ment composée.