Civ III, 28 novembre 2001, Bull n° 137, N° 00-13-559 N° 00-14-450
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Joint les
pourvois m" 00-13.559 et 00-14.450 ;
Sur le moyen
unique du pourvoi n° 00-13.559
Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Paris, 31 janvier 2000), que de 1983 à 1985 la société SFRM,
appartenant au « groupe Alusuisse », assurée par la compagnie Albingia, selon
police « dommages-ouvrage », a fait effectuer des travaux de remplacement de
la couverture et de renforcement de la charpente de son bâtiment à usage
industriel, par la société Heper coordination, entrepreneur, assurée par la
compagnie GFA, devenue AM Prudence ; que cet entrepreneur a sous-traité la
pose de la nouvelle couverture et l'exécution de la charpente à la société
Normacadre, assurée par la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux
publics (SMABTP) ; que les bacs en acier ont été fabriqués et fournis à la
société Normacadre par la société Les Forges d'Haironville, devenue la société
Haironville ; que des désordres de perforation et de corrosion de ces
bacs ayant été constatés, la compagnie Albingia, subrogée après paiement dans
les droits du maître de l'ouvrage, a sollicité le remboursement des sommes
versées par elle en réparation du préjudice ;
Attendu que la
société Haironville fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec
l'entrepreneur principal, le soustraitant et leurs assureurs, à payer des
sommes à la compagnie Albingia, alors, selon le moyen
l° que la
compagnie d'assurances, subrogée dans les droits du maître de l'ouvrage qui
disposait d'une action contractuelle directe contre le fabricant des bacs en
acier, ne pouvait pas rechercher la responsabilité de celui-ci .sur un
,fondement quasi délictuel et que la cotir d'appel a ainsi violé par fausse
application l'article 2270-1 du Code civil:
2" que les
phénomènes de corrosion et de condensation ayant entraîné la perforation des
bacs de couverture en acier constituaient un vice caché de la chose vendue et
qu'en s'abstenant de rechercher .si l'action contre le,fabricant des bacs
avait été engagée à bref délai, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à
sa décision au regard des articles 1641 et 1648 du Code civil ;
3° que
l'obligation de conseil d'un fabricant de couvertures métalliques n'existe que
vis-à-vis de ses clients profanes et qu'en ne recherchant pas, comme elle y
avait pourtant été invitée par les conclusions de la société Haironville, si le
maître de l'ouvrage, spécialisé dans l'affnage de l'aluminium et faisant partie
d'un groupe producteur de bacs de couverture en aluminium, ne connaissait pas parfaitement,
aussi bien les phénomènes de corrosion et de condensation générés par .son
industrie, que les caractéristiques techniques des différents matériaux de
couvertures métalliques, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à ,sa
décision au regard des articles 1135 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu,
d'une part, qu'ayant exactement relevé que la société Normacadre,
sous-traitant, engageait sa responsabilité vis-à-vis du maître de l'ouvrage sur
le fondement délictuel, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que le
fournisseur de ce sous-traitant, la société Haironville, devait, à l'égard du
maître de l'ouvrage, répondre de ses actes sur le même fondement ;
Attendu, d'autre
part, qu'ayant relevé que la société Haironville avait manqué à son obligation
de conseil et de renseignement en acceptant de fournir des éléments de
couverture en acier laqué, alors que le questionnaire qu'elle avait remis à sa
cocontractante et que celle-ci avait rempli portait des indications qui
auraient dû la conduire à émettre des réserves sur l'utilisation d'éléments de
toiture en acier, matériau sensible à la corrosion, ou l'inciter à réaliser une
étude plus approfondie et plus précise des contraintes imposées par le site
industriel, et souverainement retenu qu'il n'était pas démontré que le maître
de l'ouvrage ait eu une compétence notoire en matière de construction de
bâtiments industriels, et se soit immiscé dans l'exécution des travaux, la cour
d'appel, qui n'a pas fondé sa condamnation sur la garantie des vices cachés, et
qui a effectué la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa
décision de ce chef ;
Sur le moyen
unique du pourvoi 00-14.450 et le moyen unique du pourvoi incident, réunis
Attendu qu'ayant
souverainement relevé que la société Heper coordination avait elle-même, par
lettre, précisé qu'il était essentiel que les éléments porteurs assurant la
stabilité des ouvrages soient garantis dix ans, que le devis accepté énonçait
expressément que l'ouvrage de renforcement des charpentes donnerait lieu à
garantie décennale, qu'à aucun moment le maître de l'ouvrage n'avait de façon
claire et précise manifesté sa volonté d'exonérer les locateurs d'ouvrage de la
présomption édictée par les articles 1792 et suivants du Code civil, que les
documents produits démontraient que les travaux confiés avaient, dans l'esprit
du maître de l'ouvrage comme de l'entrepreneur, pour objet direct et essentiel
de supprimer le risque grave présenté par la vétusté et le mauvais état des
ossatures et charpentes métalliques, et qu'il n'était pas sérieux d'affirmer
que le maître de l'ouvrage aurait préféré, parmi celles qui lui étaient
proposées, une solution à très faible coût et aurait accepté un risque, les
techniques de rénovation proposées étant d'un coût très voisin, la cour d'appel
a pu retenir, répondant aux conclusions, qu'il n'était pas possible de
considérer que le maître de l'ouvrage aurait, de propos délibéré, accepté qu'il
ne soit procédé qu'à une réparation de fortune n'offrant qu'une efficacité
limitée dans le temps, alors qu'il avait conscience de ce que la responsabilité
pénale des dirigeants se trouvait engagée en cas d'effondrement et, qu'il se
disposait à relancer ses activités industrielles et à rénover, au prix
d'investissements très lourds, les installations de production installées sous
les structures métalliques ;
D'où il suit que
le moyen n'est. .pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE les
pourvois.