Civ III, 19
décembre 2001, Bull n° 158, N° 99-15-682
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Sur le moyen
unique
Vu l'article 1176
du Code civil ;
Attendu que
lorsqu'une obligation est contractée sous la condition qu'un événement arrivera
dans un temps fixe, cette condition est censée défaillie lorsque le temps est
expiré sans que l'événement soit arrivé ; que s'il n'y a point de temps
fixe, la condition peut toujours être accomplie ; et qu'elle n'est censée
défaillie que lorsqu'il est devenu certain que l'événement n'arrivera
pas ;
Attendu, selon
l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 décembre 1998), que le 31 janvier 1958,
les époux Amiel ont vendu aux époux Rousson, un terrain détaché d'une parcelle ;
que l'acte mentionnait la constitution sur le fonds vendu, au profit de la
portion restant appartenir aux vendeurs, d'une superficie de 1370 m2, d'une
servitude de passage devant cesser lorsque celle-ci aurait un accès à la voie
publique, ou à la création d'une voie en projet à son angle sudouest ;
qu'il était stipulé que les époux Amiel concédaient gratuitement aux époux
Rousson, pour la durée d'existence de la servitude, la jouissance exclusive de
la parcelle demeurée leur propriété, et s'interdisaient, ainsi qu'à leurs
ayants droit, de construire sur cette parcelle tant que le droit de passage
pourrait s'exercer ; que M. Amiel, devenu seul propriétaire de la
parcelle de 1 370 m', a assigné, le 23 octobre 1994, les époux Rousson pour
faire juger ledit engagement caduc en l'absence de réalisation de la voie
publique en projet lors de la signature de l'acte ;
Attendu que pour
accueillir la demande, l'arrêt retient que l'engagement de M. Amiel, qui
équivalait à « geler » toute réalisation sur son terrain sans contrepartie et
en octroyant même une jouissance gratuite exclusive aux époux Rousson, était
nécessairement enfermé dans l'esprit des parties dans un délai raisonnable
puisque limité à la réalisation d'un projet de voie déjà existant, et que les
parties n'avaient pu s'engager sur la réalisation d'une condition consistant en
la création d'une voie en projet en 1958, au-delà d'une période qui excéderait,
maintenant, quarante années ;
Qu'en statuant
ainsi, alors que l'acte du 31 janvier 1958 n'avait enfermé la réalisation de la
condition dans aucun délai, sans relever qu'il était devenu certain que cette
réalisation n'aurait pas lieu, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE,
dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 1998, entre les
parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence,
la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt
et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.