GLOSE 2001

par 

Frédéric LEPLAT

Avocat au Barreau de Paris – Ginestié, Paley-Vincent Associés

Docteur en droit – Enseignant à l’Université

 

 

SOCIÉTÉ

Com, 23 janvier 2001, Bull. n° 24, Pourvoi 98-10-668

Les associés des sociétés civiles sont débiteurs subsidiaires du passif social envers les tiers et peuvent, par application de l'article 64, alinéa 1, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-65, alinéa 1°, du Code de commerce, se prévaloir des plans de continuation.

Com, 13 février 2001, Bull. n° 37, Pourvoi 97-18-315

Dès lors qu'une copie du procès-verbal du conseil d'administration, signé des administrateurs, autorise son président à accorder une caution à un créancier et que ce procès-verbal a été remise au créancier celui-ci n'est tenu à aucune autre vérification concernant ladite autorisation. Le défaut de retranscription du procès-verbal sur le registre spécial prévu par l'article 85 du décret du 23 mars 1967 lui était inopposable.

Com, 20 février 2001, Bull. n° 44, Pourvoi 98-16-842

La radiation d'office d'une société du registre du commerce et des sociétés prononcée en application de l'article 42.4 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984, dans sa rédaction applicable en la cause, n'a pas pour effet la perte de sa personnalité morale .

Com, 27 février 2001, Bull. n° 45, Pourvoi 99-18-646

La société Lagardère SCA (Lagardère), à l'occasion d'une offre publique d'échange sur les actions et les obligations convertibles de sa filiale Matra Hachette réalisée au début de l'année 1994, a émis, pour rémunérer les titres apportés à cette offre, des actions et obligations convertibles nouvelles auxquelles était attaché un bon de souscription d'actions, donnant la faculté de souscrire deux actions Lagardère pour cinq bons de souscription. La société ABC Arbitrage, faisant valoir qu'elle avait exercé un certain nombre de bons de souscription entre le 31 janvier et le 30 juin 1997, sans que des distributions de dividendes imputés sur le compte primes d'apport, décidées par la société Lagardère pour les exercices 1993 et 1994 n'aient donné lieu à un ajustement des droits de souscription d'actions attachés aux bons, l'a assignée pour obtenir l'attribution d'un nombre d'actions supplémentaires correspondant à l'ajustement auquel il aurait dû, selon elle, être procédé. La société Lagardère ayant contesté la recevabilité de cette action, le Tribunal, par un premier jugement du 4 mars 1998, a dit l'action recevable et par un second jugement du 10 juin 1998 a dit la société ABC Arbitrage, recevable mais mal fondée, que la cour d'appel a confirmé ce dernier jugement sur la recevabilité et, réformant au fond, a fait droit partiellement aux demandes de la société ABC Arbitrage.

Selon la Cour de cassation, « bien qu'ayant déclaré. qu'elle n'était pas saisie de l'appel de la disposition du jugement du 4 mars 1998 ayant déclarée recevable l'action de la société ABC Arbitrage et que cette question ne pouvait être remise en discussion, la cour d'appel ne l'en a pas moins examinée de la même manière qu'elle l'eût fait si elle s'en était jugé saisie ; que dès lors, la société Lagardère est sans intérêt à contester les motifs par lesquels la cour d'appel a dit que le jugement du 4 mars 1998 ne lui était pas déféré en tant qu'il a déclaré recevable l'action de la société »

Ayant acquis régulièrement la qualité de porteur de bons de souscription d'actions émis par la société Lagardere, la société ABC Arbitrage a intérêt à agir dès lors qu’elle poursuivait la réparation du dommage personnellement et directement subi lors de l'exercice desdits bons, en raison de la délivrance par la société émettrice d'un nombre d'actions inférieur à celui qu'elle prétendait lui être dû.

Les dispositions de l'article 194-5 de la loi du 24 juillet 1966 devenu l'article L.225-154 du Code de commerce, destinées à préserver les intérêts des titulaires de valeurs mobilières donnant droit à l'attribution d'actions s'appliquent à toute opération affectant les fonds propres susceptible d'entraîner pour la société émettrice une perte de substance impliquant une baisse de la valeur des actions et en particulier à la mise en distribution d'un dividende prélevé, non sur les bénéfices, mais sur les primes liées au capital.

Le préjudice consiste pour le titulaire de bons de souscription dans l'obtention lors de l'exercice du droit de souscription, d'un nombre d'actions inférieur à celui auquel il pouvait prétendre en vertu du contrat d'émission, si les ajustements nécessaires au maintien des droits des titulaires de bons avaient été effectués.

Com, 27 février 2001, Bull. n° 47, Pourvoi 98-14-206

Par sa nature et son objet, dépourvus d'équivoque pour le conseil d'administration, et compte tenu de la formulation de l'autorisation donnée par celui-ci, une convention réglementée qui avait été unique, et avait prolongé ses effets dans le temps, s'analyse en une convention à durée indéterminée ne nécessitant pas de nouvelles autorisations annuelles aux termes de l'article 101 de la loi du 24 juillet 1966, devenu l'article L.225-38 du Code de commerce, qui n'impose, par ailleurs, aucune forme particulière aux conventions réglementées.

Com, 13 mars 2001, Bull. n° 60, Pourvoi 98-16-197

Un gérant invoque la faute personnelle de ses associés qui avaient décidé de sa révocation dans le seul dessein de lui nuire. Il assigne ses deux associés en paiement de dommages-intérêts. Caractérise de la part de ses auteurs une volonté de nuire constitutive d'une faute, la décision de révocation prise en violation flagrante des règles légales relatives à la tenue et à la convocation des assemblées des associés, et inspirée par une intention vexatoire contraire à l'intérêt social.

Com, 9 mai 2001, Bull. n° 87, Pourvoi 98-17-187

La liquidation amiable d'une société impose l'apurement intégral du passif, les créances litigieuses devant, jusqu'au terme des procédures en cours, être garanties par une provision.

Com, 15 mai 2001, Bull. n° 89, Pourvoi 98-14-965

Selon l'article 30, alinéa 1, du décret du 4 janvier 1955, auquel renvoie l'article 11 du décret du 4 juillet 1972 applicable aux contrats de crédit-bail immobilier, les actes et décisions judiciaires soumis à publicité par application du 1° de l'article 28 sont, s'ils n'ont pas été publiés, inopposables aux tiers qui, sur le même immeuble, ont acquis, du même auteur, des droits concurrents en vertu d'actes ou de décisions soumis à la même obligation de publicité et publiés, ou ont fait inscrire des privilèges ou des hypothèques.

Il en résulte que les créanciers représentés par le liquidateur ne sont pas, en tant que tels, des tiers au sens de ce texte.

Com, 15 mai 2001, Bull. n° 90, Pourvoi 98-15-002

Le juge-commissaire a tous pouvoirs pour désigner une personne qualifiée afin de mener des investigations en vue de rechercher des faits susceptibles d'établir la qualité de dirigeant et de révéler des fautes de gestion.

Com, 15 mai 2001, Bull. n° 91, Pourvoi 98-14-560

L'action tendant à l'extension de la procédure collective d'une personne à une autre sur le fondement de fusion des patrimoines ou de la fictivité d'une personne morale n'est pas ouverte aux créanciers.

Com, 22 mai 2001, Bull. n° 99, Pourvoi 98-17-386

L'autorisation du conseil d'administration portant sur un cautionnement donné pour l'achat d'un véhicule ne vaut pas pour un contrat de crédit-bail fût-il relatif même véhicule. 

Com, 19 juin 2001, Bull. n° 124, Pourvoi 98-18-333

Le juge qui doit apprécier, à l'occasion d'une action en résolution de la cession de parts sociales la portée d'une clause contractuelle de garantie, n'est pas tenu par la date de cessation des paiements fixée par le tribunal qui ouvre ultérieurement le redressement judiciaire de la société dont les parts ont été cédées.

Com, 17 juillet 2001, Bull. n° 152, Pourvoi 97-20-018

En application de l'article 1844-7.7° du Code civil, la société prend fin par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judiciaire, que la société est en liquidation dés l'instant de sa dissolution et que les pouvoirs du gérant prennent fin à la date de la dissolution de la société. Dès lors, en raison du prononcé de la liquidation judiciaire de la société l’ancien gérant n'avait plus qualité pour convoquer l'assemblée des associés.

Si toute assemblée des associés d'une société à responsabilité limitée peut être annulée en cas de convocation irrégulière, l'action en nullité n'est pas recevable lorsque tous les associés étaient présents ou représentés.

Com, 9 octobre 2001, Bull. n° 164, Pourvoi 98-18-487

Le créancier impayé d’une société civile de moyens avait été autorisé par le juge de l’exécution à pratiquer deux saisies conservatoires – une sur les comptes et le matériel de la société, l’autre sur des sommes détenues par un organisme de Sécurité sociale pour le compte des deux associés de la société civile.

Par la suite, le juge de l’exécution rétracta l’ordonnance autorisant la seconde saisie conservatoire. Ce jugement fut confirmé par un arrêt d’appel, aux termes duquel la responsabilité des associés de société civile étant subsidiaire, le créancier aurait dû démontrer avoir vainement poursuivi la société civile, après avoir obtenu un titre exécutoire à son encontre, pour que la saisie conservatoire puisse être ordonnée par le juge de l’exécution.

 

La Chambre commerciale de la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel, lui reprochant la violation de l’art. 67 de la loi du 9 juillet 1991, relative aux procédures civiles d’exécution. Ce texte énonce les deux conditions nécessaires au prononcé d’une mesure conservatoire : le créancier doit démontrer être titulaire d’une créance paraissant fondée en son principe et doit justifier de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement. Or l’arrêt attaqué aurait subordonné l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire à l’existence de la preuve d’une créance.

Com, 9 octobre 2001, Bull. n° 165, Pourvoi 98-20-394

Une concubine reprochait à l’arrêt d’appel de ne pas avoir ordonné la liquidation de la « société de fait » (en réalité une société créée de fait) « résultant de sa vie commune avec [son concubin] ». La concubine avait notamment, en appel, invoqué la confusion de son patrimoine et de celui de son concubin et l’existence de différents éléments du contrat de société (apports, contribution aux pertes, affectio societatis). Son pourvoi visait les art. 455 du Nouveau Code de procédure civile et 1832 du Code civil, ce dernier texte énonçant les différents éléments du contrat de société. La Chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi, la cour d’appel ayant constaté que la concubine ne rapportait pas la preuve des éléments caractérisant l’existence d’une société créée de fait.

Com, 20 novembre 2001, Bull. n° 180, Pourvoi 99-14-172

Dès lors qu'un débiteur est informé de la création et de l'organisation d'un groupement d'entreprises, constitutif, sauf stipulation contraire, d'une société en participation, pour la fourniture de prestations commandées par lui et pour la perception du prix correspondant, un gérant étant conventionnellement désigné comme mandataire social à cette fin, il peut opposer aux autres associés, ou aux cessionnaires de leurs droits, qui lui réclameraient le paiement de tout ou partie de la créance commune, la non-conformité de telles prétentions à leur pacte social, et ce jusqu'à la dissolution du groupement.

 

Com, 20 novembre 2001, Bull. n° 186, Pourvoi 99-13-894

Les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale.

Ne suffit pas à établir que les poursuites diligentées préalablement contre la SCI étaient, du fait de l'insuffisance du patrimoine social, privées de toute efficacité, la motif selon lequel une créancière a obtenu un jugement condamnant la SCI, inscrit sur ses biens une hypothèque de second rang, et qu'elle produit une correspondance d'un notaire faisant apparaître l'existence d'une inscription d'un autre créancier en premier rang sur les même biens.

Com, 18 décembre 2001, Bull. n° 201, Pourvoi 99-11-787

Les sociétés coopératives agricoles ont pour objet l'utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité

Ces sociétés et leurs unions relèvent de la compétence des juridictions civiles, ce dont il ressort que les sociétés coopératives ont un objet non commercial les faisant échapper à la compétence des tribunaux de commerce, même si elles accomplissent des actes tels que des achats pour revendre, réputés actes de commerce, dés lors que ceux-ci sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs.