GLOSE – ACTUALITÉS – Bulletin – Octobre 2002 

 

par 

 

Frédéric LEPLAT

Avocat à la Cour - Docteur en droit – Enseignant à l’Université

f.leplat@glose.org

 

RUBRIQUES

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·         BANQUE ET BOURSE

·         CONCURRENCE

·         FISCALITE

·         ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ

.         INSTRUMENTS DE PAIEMENT ET DE CREDIT

·         AUTRES_DOMAINES


 

BANQUE ET BOURSE

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Com. 8 octobre 2002, Bull. n° 136

Les cautions respectivement président du conseil d'administration et directeur général, qui n'ont jamais prétendu ni démontré que la banque aurait eu sur leurs revenus, leurs patrimoines et leurs facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération immobilière entreprise par la société, des informations qu'eux-mêmes auraient ignorées, ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité de cette banque en raison d'une disproportion entre le montant de leur engagement et leur capacité financière.

 

Com. 8 octobre 2002, Bull. n° 137

La Cour d’appel a pu rejeter l’action en responsabilité de la caution exercée à l’encontre d’une banque.

L'affectation par la banque des fonds litigieux, dont le remboursement était garanti par la caution, au remboursement du solde débiteur du compte bancaire de sa cliente plutôt qu'à celui des sommes lui restant dues au titre d’un autre prêt était conforme à la volonté de l’emprunteur et ne caractérise aucune faute, l’emprunteur ayant la libre disposition des fonds provenant du nouvel emprunt.

 

Com. 8 octobre 2002, Bull. n° 138

La Court d’appel a rejeté les demandes formées par la banque contre les cautions au motif que l'économie du protocole avait été de permettre à la banque de réduire le montant des autorisations qu'elle avait accordées en obtenant de meilleures garanties, contre la promesse tacite d'un maintien des concours ainsi accordés et alors qu’en l’espèce la banque avait résilié  avec précipitation et mauvaise foi, la convention en dénonçant sans mise en demeure préalable et sans laisser aucune chance de régularisation à ses co-contractants les concours délivrés.

 

Selon la Cour de cassation la Cour  d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1184 et 1230 du Code civil.

Elle devant rechercher si la nature des engagements souscrits, le caractère strict des délais, spécialement négociés, stipulés à la convention pour l'accomplissement d'obligations dont le créancier avait intérêt à obtenir l'exécution immédiate et dont les débiteurs ne pouvaient ignorer qu'elles étaient essentielles à la poursuite de la convention, n'impliquaient pas une renonciation tacite des parties à l'exigence d'une mise en demeure.

 

Com. 1er octobre 2002, Bull. n° 131

En l’espèce, la banque reproche à l'arrêt d'avoir annulé la constitution de gage souscrite par une caution.

Selon la Cour d’appel, la caution, tiers à la société, avait entendu prendre le risque d'aider une société présentée comme en difficulté mais non de s'engager pour une société en situation déjà irrémédiablement compromise. La banque, qui était en relation d'affaires avec cette société ne pouvait ignorer cette situation. Le caractère viable de l'entreprise était une condition déterminante de l'engagement de la caution

Selon la Cour de cassation, la Cour d’appel a légalement justifié sa décision en ayant fait ressortir que la caution avait fait de la solvabilité du débiteur principal la condition tacite de sa garantie.

 

CONCURRENCE

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Com. 22 octobre 2002, Bull. n° 148

Le boycott constitue une action délibérée en vue d'évincer un opérateur du marché. Il suppose une volonté d'éviction.

Com. 22 octobre 2002, Bull. n° 149

L'action en concurrence déloyale peut être intentée même par celui qui ne peut se prévaloir d'un droit privatif.

 

ENTREPRISES EN DIFFICULTÉ

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Com. 29 octobre 2002, Bull. n° 155

Le pourvoi formé contre l'arrêt statuant sur le relevé de forclusion, n'est pas soumis aux dispositions de l'article 173 de la loi du 25 janvier 1985 devenu l'article L. 623-4 du Code de commerce

Faute par le tribunal d'ordonner l'allongement du délai de déclaration des créances, le prononcé du jugement de liquidation judiciaire après une période d'observation est sans influence sur ce délai qui a couru à compter de la publication du jugement de redressement judiciaire.

 

Com. 29 octobre 2002, Bull. n° 154

Le sort de l'intervention n'est pas lié à celui de l'action principale lorsque l'intervenant principal, commissaire à l'exécution du plan, se prévaut d'un droit propre qu'il est seul habilité à exercer après le jugement ayant arrêté le plan de cession.

 

Com. 15 octobre 2002, Bull. n° 143 et Com. 15 octobre 2002, Bull. n° 144

L'article L. 143-4.7 du Code rural n'interdit pas aux SAFER de préempter des biens cédés lors de la liquidation judiciaire d'une entreprise.

 

Com. 15 octobre 2002, Bull. n° 145

Les créances d'indemnités et pénalités subséquentes à la résiliation d'un contrat régulièrement poursuivi, sont exclues de la priorité de paiement (Article 40 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-32 du Code de commerce).

Les créanciers d'indemnités et de pénalités mentionnées au 3 de l'article L. 621-32 du Code de commerce bénéficient d'un délai supplémentaire d'un mois, pour déclarer leur créance auprès du représentant des créanciers (Article 66, alinéa 2, du décret du 27 décembre 1985).

Il en résulte que ces créances d’indemnité et de pénalité sont soumises à déclaration au passif de la procédure collective comme les créances antérieures au jugement d'ouverture.

 

Com. 1er octobre 2002, Bull. n° 133

Après l'appel relevé par le débiteur, avant sa mise en liquidation judiciaire, contre une décision statuant sur l'existence et le montant d'une créance, le désistement d'appel du liquidateur est impropre à dessaisir les juges d'appel, faute par eux d'avoir constaté le désistement du débiteur dans l'exercice de son droit propre.

 

Com. 1er octobre 2002, Bull. n° 134

La reconnaissance de dette souscrite en l’espèce constitue un acte à titre onéreux, au regard de l'article L. 621-108 du Code de commerce. Cet acte étant postérieur à la cessation des paiements, la cour d'appel, qui a annulé la reconnaissance de dette, en a exactement déduit, que les saisies-attributions pratiquées en exécution de cette reconnaissance étaient privées de fondement.

 

FISCALITE

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Com. 22 octobre 2002, Bull. n° 151

Le principe fixé à l'article 2 de la loi du 5 août 1911, selon lequel le privilège créé pour le recouvrement des taxes en faveur des associations syndicales autorisées s'exerce dans les mêmes formes que le privilège de la contribution foncière, ne rend pas applicable à ces taxes la procédure d'avis à tiers détenteur.

 

  

INSTRUMENTS DE PAIEMENT ET DE CREDIT

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Com. 8 octobre 2002, Bull. n° 135

L'établissement de crédit sur lequel a été tiré un chèque frappé d'opposition n'a pas à vérifier la réalité du motif d'opposition invoqué.

 

AUTRES DOMAINES

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Com. 29 octobre 2002, Bull. n° 156

La convention passée entre l'annonceur et l'agence de publicité qui donne à cette dernière non seulement mandat de passer des ordres d'insertion, mais encore d'effectuer leur paiement au régisseur pour le compte de l'annonceur est autorisée par l'article 20 de la loi du 29 janvier 1993.

 

Com. 29 octobre 2002, Bull. n° 153

La mention de la caution "Bon pour caution personnelle et solidaire, sans limitation de durée et à hauteur de tous engagements de la société, y compris les intérêts au taux contractuel, frais et accessoires" est claire dans son libellé et dénuée d'équivoque.

 

Com. 22 octobre 2002, Bull. n° 147

La Cour de cassation précise le régime de l’octroi de mer à la suite des arrêts Legros et Lancry de la CJCE.

 

Com., 22 octobre 2002, Bull. n° 152

En l’espèce, l'objet copié est une montre de haute renommée, ayant un pouvoir attractif et prestigieux.

La Cour d’appel a considéré que l'offre faite par une société à sa clientèle d'une copie servile de la montre dans les conditions dénoncées porte manifestement atteinte à l'image de marque de cette montre qu'elle vulgarise et déprécie, la rabaissant au rang de simple "gadget publicitaire".

Un tel usage, en ce qu'il affectait l'image, qualifiée de prestigieuse, d'un produit notoire et de marque, ne fût-il plus couvert par un droit privatif, était fautif.

 

Com. 22 octobre 2002, Bull. n° 150

L'action en paiement de droits de douanes a le caractère d'une action civile et est indépendante de l'action pour l'application des sanctions fiscales, que peut exercer l'administration des Douanes sur le fondement de l'article 343-2 du Code des douanes, qui a, elle seulement, le caractère d'une action publique.

En l’espèce l'action diligentée par l'administration des Douanes, tendant à obtenir exclusivement le paiement des droits réellement dus par l'importateur, était civile. En conséquence, que le principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce était inapplicable.

Une loi ne peut être considérée comme interprétative qu'autant qu'elle se borne à reconnaître, sans rien innover, un état de droit préexistant qu'une définition imparfaite a rendu susceptible de controverse.

Le principe de la sécurité juridique s'oppose à ce qu'un règlement communautaire soit appliqué rétroactivement à des faits nés sous le régime antérieur, cela indépendamment des effets favorables ou défavorables qu'une telle application pourrait avoir pour l'intéressé, sauf en raison d'une indication claire, soit dans ses termes, soit dans ses objectifs, permettant de conclure que ce règlement dispose autrement que pour l'avenir seul.

Le principe du respect de la confiance légitime a pour objet de protéger les ressortissants communautaires contre des changements exagérément brutaux de la réglementation économique.

 

Com. 15 octobre 2002, Bull. n° 142

La cassation d'un arrêt expressément prononcée en toutes ses dispositions investit la juridiction de renvoi de la connaissance de l'entier litige dans tous ses éléments de fait et de droit, quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation.

Par l'effet de la cassation de l'arrêt prononcée "dans toutes ses dispositions", la cause et les parties ont été remises dans l'état où elles se trouvaient avant l’arrêt. Dès lors les parties pouvaient, devant la cour de renvoi, invoquer de nouveaux moyens ou former des prétentions nouvelles qui sont soumises aux règles qui s'appliquent devant la juridiction dont la décision a été cassée.

 

Com. 15 octobre 2002, Bull. n° 146

La carte grise constituant un accessoire indispensable du véhicule, en acceptant d'acquérir le véhicule sans se faire remettre la carte grise, la société en avait une possession équivoque.

 

Com. 8 octobre, Bull. n° 140

Si l'Administration est investie d'un pouvoir de décision qui lui permet d'imposer unilatéralement des obligations de faire ou de ne pas faire, cette prérogative est attachée aux actes administratifs présentant un contenu normatif ou à ceux qui, concourant à la réalisation d'une mission d'intérêt général, doivent être respectés par les usagers ou les agents publics. Tel n'est pas le cas s'agissant d'une créance douanière pour le recouvrement de laquelle l'Administration peut, soit recourir aux procédés que lui offre le droit commun, soit, si elle dispose d'un titre valable, utiliser la contrainte.

La contrainte, titre exécutoire susceptible d'opposition, s'assimile, quant à ses effets, à un jugement rendu par défaut, et qu'ainsi la nullité de la contrainte ne fait pas obstacle à l'examen au fond du bien-fondé de la réclamation de l'Administration.

 

Com. 8 octobre 2002, Bull. n° 141

La Cour de cassation statue dans un litige sur l’octroi de mer et met en œuvre la jurisprudence de la CJCE  du 27 février 1980, Hans Just, du 27 mars 1980, Denkavit Italiana, et du 25 février 1988, Bianco.

 

Com. 8 octobre 2002, Bull. n°  139

Si les agents des douanes tiennent de l'article 65 du Code des douanes le pouvoir d'accès auprès des opérateurs économiques aux documents relatifs aux opérations dont ils ont le contrôle, ce droit de communication est limité à ce qui est strictement nécessaire pour assurer le respect de l'ordre public économique et la prévention des infractions et ne saurait être étendu à des opérations n'entrant pas dans le champ de la compétence de l'administration des Douanes. En outre ce texte ne confère pas aux agents des douanes un pouvoir général d'audition.

En l’espèce, l'administration des Douanes avait procédé à un interrogatoire des représentants de l'importateur aux seules fins de savoir si les taxes illicites perçues par elle avait été répercutées sur des tiers. Il en résultait qu'elle n'agissait pas dans le cadre d'une opération relevant de son contrôle ou de sa compétence et que l'administration des Douanes avait procédé par un détournement de pouvoir.

 

Com. 1er octobre 2002, Bull. n° 132

La procuration donnée était revêtue de la formule "lu et approuvé, bon pour cautionnement solidaire", ce dont il résultait, selon la Cour de cassation, que cet acte constituait un commencement de preuve par écrit du cautionnement.

Dès lors la Cour d’appel devait rechercher si cette mention incomplète n'avait pas été portée par la caution au pied d'un acte définissant l'engagement de la société débitrice et contenant toutes les précisions sur la portée, la nature et les modalités de remboursement de l'obligation cautionnée.