Loi
de Finances pour 2005
Loi
de Finances Rectificative pour 2004
Synthèse
par
Olivier Uetwiller
La LF 2005 et LFR 2004
se traduisent par de nombreuses mesures techniques d’ajustement des
dispositions fiscales dans le contexte Européen avec en outre, une volonté
d’orienter la politique économique vers une concentration et une relocalisation
d’activités en France.
1. Principales mesures concernant les entreprises
1. Modification
de l'article 209B
2. Suppression
à compter de 2007 de l’imposition des plus-values à long terme sur titres de
participation
3. Le
prélèvement libératoire sur les contrats d’assurance vie et de capitalisation
s’applique aux contrats européens
4. Réduction à
16,5% du taux d’imposition des plus-values d’apport d’immeubles par les
sociétés soumises à l’IS
5. Restructurations
- transfert de déficits sans limitation et interdiction de déduire les mali -
VNC
6. Augmentation
du tarif des droits d’enregistrement
7. « Absence »
d’imposition en cas de transfert de siège social dans un autre état membre de
l’UE
8. Suppression de
la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés
2. Autres mesures
1. Abrogation de l’exit tax
2. Nouveau mécanisme de stock-options
3. Successions & donations
4. « Amendement Charasse » sur les
exonérations relatives aux cessions des branches d'activité et de clientèle
5. Pénalités de retard sur les créances
commerciales
6. Crédit d'impôt pour relocalisation
d'activité en France
7. Exonérations fiscales – pôles de
compétitivité
8. Continuité des imputations, précompte pour
prélèvement de 25 %
9. Alignement du régime d’imposition des
plus-values des non résidents qui détiennent un
immeuble en France via une société de personne française sur le régime en cas
de détention directe
10. Intangibilité du bilan d’ouverture du
dernier exercice non prescrit - Remise en cause de la jurisprudence du Conseil
d’Etat
11.
Crédit
d’impôt des PME pour les dépenses d’équipement dans les nouvelles technologies
1. Article 209B et paradis fiscaux
L'article 209 ne s'applique plus qu’aux participations de plus de 50 %
(droits financiers ou droits de vote) dans des sociétés établies dans des
paradis fiscaux. En revanche outre les établissements et succursales, le texte
s’applique désormais aux « entités juridiques » ce qui inclut
notamment les trust, fiducies etc … A noter que ce seuil est réduit à 5% en cas
d’action de concert entre différentes entreprises françaises et que les profits
sont considérés comme des revenus « réputés distribués » afin
de tenter de contourner la protection des conventions fiscales que le Conseil
d’Etat avait opposé à l’administration.
La notion de paradis fiscal
au sens de l'article 238A du code est désormais définie puisqu'il s'agit
désormais des pays dans lesquels « les impôts sur les bénéfices ou les
revenus dont le montant est inférieur de plus de la moitié à celui de l’impôt
sur les bénéfices ou sur les revenus est inférieur de plus de la moitié à celui
de l’impôt sur les bénéfices ou sur les revenus dont elles auraient été
redevables dans les conditions de droit commun en France, si elles y avaient
été domiciliées ou établies (i.e. ce qui donne un taux d’imposition
inférieur à 16,67 %). Rappelons que le taux actuel est, selon la pratique
administrative, de 22,22 %.
Safe harbor : Sauf abus,
le texte ne s’applique pas au sein de l’UE.
2. Exonération progressive des plus-values à
long terme sur titres de participation
A
compter des exercices ouverts en 2007, les plus-values sur titres sont
exonérées à hauteur de 95 % de leur montant. Les prélèvements sur la réserve
spéciale des plus-values à long terme seront frappés d’une taxe de 2,5 % dans la
limite de 200 millions d’euros, après un abattement de 500 000 euros.
Entre
2005 et 2007, l’imposition des plus-values sur titres est dégressive (15 % et
8%).
3. Extension
du champ d’application du prélèvement libératoire sur les contrats d’assurance
vie et de capitalisation aux contrats UE
Afin de
se mettre en conformité avec les règles européennes relatives à la liberté
d’établissement et la libre prestation de services, le bénéfice du prélèvement
libératoire est désormais ouvert aux contrats d’assurance vie et de
capitalisation souscrits auprès de compagnies établies dans les autres pays de
l’UE. Jusqu’à présent en effet, l’administration fiscale avait pris la position
de refuser à ces contrats le bénéfice du prélèvement libératoire au motif de la
préservation de la cohérence du système fiscal français.
4. Taux
réduit d’imposition des plus-values d’apport d’immeubles par les sociétés
soumises à l’IS
Sous réserve de la conservation pendant 5 ans des immeubles (ou contrat
de crédit-bail) apportés par une personne morale soumise à l’IS d’immeubles à
une société faisant appel public à l’épargne, les plus-values d’apport sont
imposées au taux réduit de 16,5 %.
Cette disposition vise à faciliter la titrisation du
patrimoine immobilier des sociétés françaises.
5. Restructurations
- transfert de déficits sans limitation – mali de fusion - VNC
·
Transfert
de déficits : Le principe
d’un agrément préalable est maintenu, mais désormais les montants de déficits fiscaux
transférés en cas de fusion (ou opération assimilées) ne sont plus limités.
Même solution dans les groupes intégrés. Le sort des fusions transfrontalières
au sein de l’Union n’est pas abordé.
· Mali de fusion/confusion (art 209 II bis): C’est désormais la loi qui tranche le sort des mali de fusion (vrai et faux) de façon à mettre un terme au débat qui anime les relations entre l’administration et les entreprises depuis des années. Il faut distinguer :
o
Faux
mali : Non déductible si
l’opération est placée en régime de faveur (cette non déductibilité est
absolue, puisqu’elle est effective au moment de l’opération ou bien plus tard,
à l’occasion de la dépréciation dudit mail qui doit désormais être immobilisé,
ou encore au moment de la cession des actifs), déductible dans le cas
contraire (bien que cette dernière hypothèse n’ait pas vraiment de sens
car, dans ce cas, on appréhende directement le vrai mali !) ;
o
Vrai
mali : Non déductible. Le
texte est assez mal rédigé dans le sens où l’on ne sait pas si cette
interdiction vise l’ensemble des opérations ou uniquement celles soumises au
régime de faveur des fusions. En l’état, nous penchons pour une interdiction
absolue car l’interdiction figure à l’article 209 et qu’elle s’applique aux
« opérations mentionnées au … de l’article 210-0 A » sans
distinction du régime fiscal appliqué à l’opération.
·
VNC/Valeurs
réelles : La tolérance
fiscale n’a plus lieu d’être compte tenu de la précision des nouvelles règles comptables.
En schématisant, la VNC est le principe pour les opérations
intra-groupe (la notion de contrôle est définie par le règlement 99-02 du
CRC) et les opérations réalisées « à l’envers » ; la valeur réelle
pour les autres opérations y incluant toutefois les filialisations suivies de
la cession des titres hors du groupe.
6. Changement des tarifs des droits
d’enregistrement
Opérations |
Nouveau |
Ancien taux |
Ventes d’immeubles |
5,09 % |
4,88 % |
Ventes d‘immeubles
soumis au taux réduit([1]) |
0,715 %([2]) |
0,615 % |
Ventes d’immeubles
étrangers par acte passé en France |
5 % |
4,80 % |
Echange d’immeubles |
0,715 % ou 5 % |
0,615 % ou 4,88 % |
Cession d’actions |
1,1 % plafonné à 4.000 € |
1 % plafonné à 3.049
€ |
Cession de parts sociales |
5 % |
4,80 % |
Cession de fonds de
commerce |
5% au delà de 23 K€ |
4,80 % au delà de 23
K€ |
Droit de partage |
1,1 % |
1% |
Droit fixe actes
innommés |
125 € |
75€ |
Droit fixe fusions |
375 ou 500 € suivant
le capital de la société |
230€ |
Autre droit fixe |
25 € |
15€ |
7. Transfert du siège social dans un autre
état membre de l'Union
Le transfert de siège social au sein de l’UE n'entraîne plus les redoutables
conséquences d'une cessation d'entreprise au sens de l'article 221-5
('imposition de l'ensemble des plus-values latentes sur l'actif corporel et
incorporel des sociétés, ainsi que des bénéfices en sursis d'imposition et des
bénéfices de l'exercice en cours à la date de la cessation d'activité).
Remarque : La portée de cette mesure reste à discuter.
En effet, le Conseil d'Etat a largement consacré le principe de l'imposition de
la plus-value latente en cas de retrait d'un actif du bilan. Or (sauf le cas
particulier du maintien en France d’un établissement stable), il est difficile
d'imaginer un transfert de siège sans "déplacement" des actifs et
notamment du fonds de commerce de la société qui, dans la plupart du temps, ne
figure pas au bilan et recèle la majorité sinon l'intégralité des plus-values
latentes de l'entreprise.
On peut alors s'interroger sur la compatibilité de cette
situation avec les principes européens de liberté d'établissement, de liberté
de mouvement des capitaux et le règlement sur les sociétés européennes (Cf.
Règlement 2157 du 8 octobre 2001) qui inspire le présente disposition
puisqu'elle limite considérablement la portée effective d'un transfert de siège
social. Gageons qu'avec l'élargissement de l'Union, les contentieux ne vont pas
tarder à naître sauf à ce que l'administration prenne une position extensive
sur le sujet ce qui semble peut probable à la lumière des exemples passés sur
l'introduction des directives fiscales dans le droit français.
Le texte n’est donc qu’une demi-mesure fiscale qui
pourrait se révéler in fine incompatible avec les règles européennes relatives
à la liberté d’établissement et à la libre circulation des capitaux.
8. Suppression de la contribution
additionnelle à l’impôt sur les sociétés
Réduction de la contribution additionnelle de 3 % sur l'impôt sur les
sociétés (article 235 ter ZA du code général des impôts) à 1,5 % pour 2005 et
suppression en 2006. Le taux agrégé de l'impôt sur les sociétés serait ainsi
ramené de 34,33 % à 33,83 % pour 2005 et 33,1/3 % en 2006.
2. Autres Mesures
1. Abrogation de l’exit tax (articles
167 1 bis et 167 bis du code général des impôts)
Cette mesure a été ajoutée par rapport au projet. Ses effets sont
limités dès lors que les dispositions de l’exit tax avaient été jugées
inapplicables dans le contexte européen. En revanche, cette suppression va
soulager les candidats à l’exil fiscal hors l’Union Européenne et notamment
vers la Suisse.
2. Nouveau
mécanisme d’attribution d’actions gratuites
Pour pallier les carences fiscales du régime français des stock
options, la loi de Finances vient de promouvoir un mécanisme plus simple et
légèrement plus avantageux en ce que, désormais, les actions peuvent être
attribuées gratuitement.
L’attribution gratuite d’actions à des salariés ou mandataires sociaux
(articles L 225-197-1 à 5 du code de commerce) est imposé dans les conditions
suivantes :
o La valeur
des actions attribuées gratuitement est imposée au taux fixe de 41 % (option
possible pour l’imposition à titre de salaire) et exonérée de charges
sociales et de la CSG et CRDS frappant les revenus d’activité ;
o La
plus-value de cession est imposée de façon standard (27%) ;
Ce régime « de faveur » est subordonné au respect de deux
conditions : (i) l’attribution des actions par l’assemblée générale de la
société n’est définitive qu’au terme d’une période « d’acquisition »
de deux ans minimum et (ii) à la conservation des titres pendant au moins deux
ans après leur acquisition définitive (soit une période totale
d’indisponibilité de quatre ans).
3. Successions
& Donations (article 775 ter nouveau du CGI) et donations (article 776 bis
nouveau du CGI)
Successions :
Un nouvel abattement global de 50 000 euros s’applique désormais sur la
part des successibles entre époux et en ligne directe. Le montant de
50 000 euros est réparti entre les successibles au prorata de leurs droits
dans la succession.
Le traitement fiscal des successions/donations entre partenaires d’un
PACS est assoupli.
Donations : Désormais, et sous certaines conditions, les passifs
grevant les biens donnés sont déductibles de l’assiette des droits alors que ce
n’était jamais le cas auparavant.
4. Un amendement "charasse" sur les
exonérations afférentes aux cession des banches d'activité et de clientèle
L'exonération prévue à
l'article 238 quaterdecies du CGI ne s'applique pas lorsque le cessionnaire est
contrôlé à plus de 50 % par le cédant conjoint pacsé, ascendant, descendant,
frère et soeur ou lorsque ledit cessionnaire dirige le cessionnaire, le tout, à
un moment quelconque au cours de 3 années suivant la cession.
5. Pénalités
de retard sur les créances commerciales
Les pénalités de retard sur les créances commerciales ne sont imposables
/ déductibles qu’au titre de l'exercice d'encaissement / paiement.
6. Crédits d'impôt
Ø Crédit d'impôt pour relocalisation
d'activités en France
Les entreprises qui relocalisent en France
une activité qu'elles avaient préalablement délocalisée hors l'espace
économique européen bénéficient d'un crédit d'impôt égal à 50 % des dépenses de
personnel relatives aux emplois créés pendant la première année, 40 % pour les
12 mois suivants et ainsi de suite jusqu'à l'expiration du 60éme mois. Un
crédit supplémentaire s'applique aux relocalisations dans les zones éligibles à
la prime d'aménagement du territoire classée pour les projets industriels.
Remarque : Le crédit
d’impôt en question augmenté des autres aides dont bénéficie l’entreprise est
plafonné à 100 000 euros pour chaque période de 3 ans au titre de la
réglementation CE sur les aides d’Etat.
Ø
Crédit
d'impôt pour dépenses de prospection commerciale hors l'espace économique européen
des PME embauchant un salarié dédié
Les PME (moins de 250 salariés - chiffre d'affaires inférieur à 50
millions d'euros - total bilan inférieur à 43 millions d'euros et dont le
capital est détenu à 75 % au moins par des personnes physiques), qui embauchent
un salarié pour les besoins de la prospection commerciale hors l'espace
économique européen, peuvent bénéficier
d'un crédit d'impôt égal à 50 % des dépenses de prospection (la liste
est fixée par la loi) dans la limite de 40 000 euros. Ce crédit d’impôt
est calculé au titre de chaque période d’imposition ou exercice clos au cours
desquels des dépenses éligibles ont été exposées. Les dépenses éligibles étant
celles exposées au cours de la période de 24 mois suivant l’embauche du
salarié, le crédit d’impôt sera donc susceptible de s’appliquer au titre de
trois exercices successifs.
7. Exonérations
fiscales – pôles de compétitivité
Les entreprises implantées dans les pôles en question et participant à
un projet de R&D agréé bénéficient d’une exonération d’IS au titre des 3
premières années et d’un abattement de 50 % pour les deux années suivantes. Ces
exonérations sont effectives sous réserve du respect des seuils relatives aux
aides d’état (100 K€ sur trois ans).
Ces entreprises bénéficient également d’une exonération de la part
patronale des cotisations sociales versées pour les salariés participant au
projet de R&D, à hauteur de 50% pour les PME au sens communautaire du terme
et de 25% pour les autres, pendant une durée maximum de 6 ans.
8. Continuité
des imputations précompte pour prélèvement de 25 %
L’administration a corrigé le trou de la
législation (le régime défini en 2004 ne prévoyait pas de continuité entre le
précompte et le prélèvement de 25 % ce qui permettait de remettre les bases
précompte à zéro pour les besoins du calcul du prélèvement de 25%).
Le décret d’application du texte est paru.
Il définit notamment les postes d’imputation. Reste à trouver le formulaire
adéquat. Aux dernières nouvelles, les centres des impôts renvoient les
contribuables vers les 2750.
9. Les
non résidents qui détiennent un immeuble en France via une société de personnes
française sont désormais imposés comme s’ils détenaient l’immeuble directement
Cet article vise à supprimer l’avantage fiscal
dont bénéficiaient les non résidents associés de sociétés de personnes qui
étaient imposés au taux de 16 % au lieu du prélèvement du tiers.
A compter de 2005 donc :
Ø Les personnes physiques résidentes de
l’Union (+ Norvège et Islande) sont imposables au taux de 16%, et les autres, au taux de
33,1/3% et ce, quel que soit leur situation (détention directe, via une société
de personne non soumise à l’IS, ou via une société étrangère) ;
Ø Les personnes morales sont soumises à
l’IS si elles sont résidentes de France et au prélèvement du tiers dans le cas
contraire, et ce, quel que soit le mode de détention
10. Intangibilité
du bilan d’ouverture du dernier exercice non prescrit - Remise en cause de la
jurisprudence du Conseil d’Etat
La solution dégagée par le Conseil d’Etat
dans son arrêt du 7 juillet 2004 est réduite à peut de chose par l’article 38
bis nouveau.
En substance, on revient à l’ancienne
solution, suivant laquelle l’administration est en droit d’imposer au titre du
dernier exercice non prescrit les insuffisances d’actif ou surévaluation de
passif. La seule exception concerne les « erreurs ou omissions » se
rapportant à un exercice de plus de 10 ans au moment du contrôle.
Indépendamment du débat sur la légitimité
de cette disposition, il faut remarquer que le Conseil d’Etat en 2004 avait simplifié notre système fiscal et
rétabli une certaine sécurité juridique. Ce retour à l’ancien régime qui repose
sur une théorie intellectuellement séduisante (accroissement d’actif et
intangibilité du premier bilan non prescrit) est injustifiable en pratique
puisqu’elle ignore le système universel de la prescription et donne une image
brouillée de notre système fiscal.
11. Crédit
d’impôt des PME pour les dépenses d’équipement dans les nouvelles technologies
PME concernées : moins de 250 salariés et CA inférieur à 50M€ ou bilan
inférieur à 43M€ et capital détenu à plus de 75 % par des personnes
physiques ou par des sociétés satisfaisant ce critère,
Crédit d’impôt : 20 % des dépenses éligibles ;
Dépenses éligibles : (la
liste doit être fixée par un décret qui reste à paraître)
Ø
Immobilisations
corporelles et incorporelles neuves servant à la mise en place d’un réseau hors
les ordinateurs sauf s’ils sont exclusivement utilisés comme serveurs ;
Ø
Immobilisations
corporelles neuves permettant un accès internet haut débit ;
Ø
Immobilisations
corporelles et incorporelles neuves nécessaires à la protection des réseaux
ci-dessus ;
Ø
Dépenses
d’aide à la mise en place et à la protection des réseaux ci-dessus.
oOo