GLOSE – ACTUALITÉS - Bull. déc. 2001

Commentaires de droit des sociétés 

 

par Bruno DONDERO,

maître de conférences à l’Université Paris I – Panthéon Sorbonne.

 

 

 

 

Sommaire :

 

- 1. Civ. 1ère, 18 décembre 2001, Bull. I, n° 321.

 

L’option en faveur du régime de report de l’imposition des plus-values sur l’apport de clientèle à une SELARL (art. 151 octies du CGI) doit être contenue dans l’acte de constitution de la société.

 

 

- 2. Civ. 1ère, 18 décembre 2001 (2 arrêts), Bull. I, n° 324 et 325.

 

Le champ d’application de l’art. L. 231-6 du Code de commerce ; le caractère indemnitaire de la clause statutaire prévoyant le paiement de sommes à la charge du coopérateur n’exécutant pas ses obligations ; l’admissibilité du registre des associés coopérateurs comme élément de preuve.

 

 

- 3. Civ. 3ème, 12 décembre 2001, Bull. III, n° 153.

 

La transformation d’une société ne donne pas naissance à une nouvelle personne morale.

 

 

- 4. Com., 18 décembre 2001, Bull. IV, n° 201.

 

L’achat pour revente effectué par des sociétés coopératives agricoles n’emporte pas compétence du tribunal de commerce, dès lors que les actes concernés sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs.

 


 

1. Civ. 1ère, 18 décembre 2001, Bull. I, n° 321.

 

L’option en faveur du régime de report de l’imposition des plus-values sur l’apport de clientèle à une SELARL (art. 151 octies du CGI) doit être contenue dans l’acte de constitution de la société.

 

 

Trois personnes physiques, qui exploitaient séparément des laboratoires d’analyses médicales, les regroupèrent en constituant une société d’exercice libéral à responsabilité limitée, dont les statuts furent rédigés par un avocat, qui procéda par ailleurs aux formalités de constitution. Postérieurement à la constitution de la société, l’un des associés fit l’objet d’un redressement fiscal, et se vit réclamer la somme de 372.980 francs au titre de la plus-value sur l’apport de sa clientèle à la SELARL. Par la suite, cet associé adressa à l’administration fiscale un acte « rectificatif », par lequel il optait pour le régime de report d’imposition des plus-values prévu par l’art. 151 octies du Code général des impôts. Par ailleurs, les associés de la SELARL intentèrent une action contre l’avocat qui les avait conseillés, aux fins, notamment, d’obtenir sa condamnation à payer le montant du redressement notifié à l’associé.

 

Par un arrêt rendu le 2 juin 1998, la Cour d’appel de Paris retint la responsabilité de l’avocat poursuivi. Elle jugea que le conseil avait commis une faute en ne faisant pas figurer l’option en faveur du régime de report d’imposition des plus-values dans les statuts de la société. Elle déclara par ailleurs que l’acte rectificatif était inopérant.

 

C’est sur ce dernier point que portait la critique du pourvoi. L’avocat condamné soutenait qu’un acte rectificatif comportant l’option pour le régime susvisé de report de l’imposition des plus-values pouvait être déposé postérieurement à la constitution de la société. Cette faculté d’opter pour le régime de faveur de l’art. 151 octies du CGI aurait empêché de constater une faute à la charge de l’avocat.

 

Le pourvoi est rejeté, la Cour de cassation n’admettant pas la possibilité d’exercer l’option susvisée postérieurement à la constitution de la société. La première Chambre civile rappelle que l’option pour le régime prévu par l’art. 151 octies du CGI doit, aux termes de ce texte, être exercée dans l’acte constatant la constitution de la société, conjointement par l’apporteur et la société (v. le II, b de l’art. 151 octies). Elle peut de ce fait approuver la solution de la Cour d’appel de Paris.

 

Si la solution est claire, on peut se demander quelle importance a été accordée par la Cour de cassation au fait – qu’elle mentionne expressément – que l’acte rectificatif n’avait été établi que deux ans après l’acte de constitution de la société, et après notification d’un redressement fiscal de ce chef. Un acte rectificatif adressé à l’administration fiscale plus tôt, et de l’initiative de l’associé (ou de son avocat), aurait-il permis à cet associé de bénéficier du report d’imposition des plus-values ? Cette possibilité n’est pas entièrement exclue, et verrait la Cour de cassation adopter une position moins rigide que celle qui transparaît de l’arrêt commenté.

 

 

 

Texte de l’arrêt :

Sur le moyen unique :

 

Attendu que les consorts Gérard, médecins et pharmacien, qui exploitaient chacun, en leur nom personnel un laboratoire d'analyses médicales, les ont regroupés en 1993 en constituant une société d'exercice libéral à responsabilité limitée ; que M. Guez, avocat, en a rédigé les statuts et a procédé aux formalités de constitution ; qu'en 1994, l'administration fiscale a notifié à M. François Gérard un avis d'imposition de 372.980 francs au titre de la plus-value sur l'apport de sa clientèle à la société ; qu'un acte “rectificatif” d'exercice de l'option a été adressé à l'administration fiscale en 1995 ; qu'estimant que le redressement fiscal était imputable à une faute de l'avocat qui avait omis de faire figurer dans les statuts de la société l'option en faveur du régime de report de l'imposition sur les plus values prévue à l'article 151 octies du Code général des impôts, les consorts Gérard ont assigné M. Guez pour obtenir sa condamnation à payer le montant du redressement notifié à M. François Gérard, et à séquestrer les sommes pouvant être réclamées par le Trésor public dans le cas où les deux autres associés recevraient un avis d'imposition dans le délai de prescription ;

 

Attendu que M. Guez fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 2 juin 1998) d'avoir retenu sa responsabilité alors qu'ainsi que l'avait admis l'administration fiscale conformément à la jurisprudence administrative, un acte rectificatif peut être déposé ultérieurement et comporter l'option manquante et qu'il est constant que M. Gérard a fait déposer un acte rectificatif d'apport comportant la mention effective prévue à l'article 151 octies du Code général des impôts le 4 juillet 1995, de sorte qu'en déclarant que cet acte rectificatif était inopérant pour retenir la faute de M. Guez pour n'avoir pas fait figurer cette option dans l'acte initial, la cour d'appel aurait violé les articles 151 octies et 1382 du Code civil ;

 

Mais attendu qu'aux termes de l'article 151 octies I du Code général des impôts, l'imposition des plus values relevant du régime défini par ce texte peut faire l'objet d'un report sur simple option exercée dans l'acte constatant la constitution de la société, lorsque l'apport de l'entreprise est effectué à une société à responsabilité limitée, cette option étant exercée dans l'acte d'apport conjointement par l'apporteur et la société ; que, dès lors, c'est à bon droit que la cour d'appel a jugé que l'acte rectificatif, établi deux ans après l'acte de constitution de la société après notification d'un redressement fiscal de ce chef, était inopérant ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

REJETTE le pourvoi.

 

 

 

2. Civ. 1ère, 18 décembre 2001 (2 arrêts), Bull. I, n° 324 et 325.

 

Le champ d’application de l’art. L. 231-6 du Code de commerce ; le caractère indemnitaire de la clause statutaire prévoyant le paiement de sommes à la charge du coopérateur n’exécutant pas ses obligations ; l’admissibilité du registre des associés coopérateurs comme élément de preuve.

 

 

Deux des adhérents d’une coopérative produisant du lait, M. B. et Mme C., cessèrent leurs livraisons de lait à la société. Celle-ci sanctionna ses deux adhérents. Elle leur réclama différentes sommes, au titre de sanctions statutaires. Mme C. fut par ailleurs exclue de la coopérative. Celle-ci intenta par la suite une action contre les deux adhérents, aux fins d’obtenir paiement des sommes qu’elle leur réclamait. Elle fut déboutée de cette demande par deux arrêts rendus par la Cour d’appel de Toulouse les 6 et 27 mai 1999.

 

Les parties s’étant pourvues en cassation, la première Chambre civile censure partiellement l’arrêt rendu le 27 mai 1999 (arrêt relatif à M. B., n° 324) et dans sa totalité l’arrêt rendu le 6 mai 1999 (arrêt relatif à Mme C., n° 325).

 

Les deux arrêts rejettent le pourvoi incident formé par les coopérateurs, au même motif (I). Dans les deux cas, le pourvoi principal formé par la coopérative est accueilli et l’arrêt attaqué est censuré, mais pour des motifs différents (II et III).

 

 

I. Chacun des deux arrêts rejette le pourvoi incident qui avait été formé par le coopérateur sanctionné. Ces pourvois étaient fondés sur la question de l’application de l’art. 52 de la loi du 24 juillet 1867, devenu l’art. L. 231-6 du Code de commerce. Ce texte dispose que l’associé qui se retire ou qui est exclu reste tenu pendant 5 ans, envers les associés et les tiers, de toutes les obligations existant au moment de sa retraite. Ce délai quinquennal commence à courir au jour où l’associé cesse de faire partie de la société (v. M. Jeantin, Juris-Classeur Sociétés Traité, Fasc. 167-10, Sociétés à capital variable – Règles communes à toutes les sociétés à capital variable, refondu par G. Durand-Lépine, n° 86). Dans les deux cas, et par une formule identique, la Cour de cassation approuve l’arrêt attaqué d’avoir jugé que le texte en question s’appliquait aux seules dettes sociales incombant au coopérateur et existant au moment de sa retraite, et non aux pénalités et indemnités faisant éventuellement suite à sa démission avant le terme de son engagement.

Les adhérents sanctionnés prétendaient sans doute trouver dans le texte susvisé une prescription abrégée leur permettant d’échapper aux poursuites de la coopérative. Cette prétention est cependant écartée, ce qui confirme le fait que la prescription abrégée édictée par l’art. L. 231-6 du Code de commerce ne concerne que les dettes sociales dont l’associé peut se voir réclamer le paiement par des tiers ou par ses coassociés qui auraient payé plus que leur part (en ce sens, v. M. Jeantin, par G. Durand-Lépine, op. cit., n° 83).

Un autre argument au soutien de la solution retenue pourrait par ailleurs être trouvé dans le fait que le texte n’applique la prescription quinquennale qu’aux engagements de l’associé « envers les associés et envers les tiers », et ne mentionne pas ses obligations envers la société elle-même.

Il faut toutefois ajouter aux engagements de l’associé concernés par l’art. L. 231-6 sa dette d’apport, bien qu’il soit tenu de celle-ci envers la société aussi bien qu’envers ses coassociés.

 

 

II. L’arrêt de la Cour d’appel de Toulouse relatif à M. B. avait semble-t-il débouté la coopérative de sa demande au motif de la non-conformité des statuts de cette société au regard de l’arrêté du 3 janvier 1974 homologuant les statuts types des sociétés coopératives agricoles et de l’annexe de cet arrêté. Aux termes de l’art. 7, al. 4 et 6 de l’annexe, les sanctions prévues en cas de manquement aux engagements du coopérateur doivent réparer le préjudice subi par la coopérative et être calculées sur la base de l’exercice restant à courir jusqu’à la fin de l’engagement. Or la clause statutaire sur laquelle la coopérative avait fondé sa demande aurait eu un caractère forfaitaire et ne permettait pas de « se référer à la nécessité de réparer l’entier préjudice ».

La Cour de cassation censure l’arrêt attaqué en relevant d’office un moyen de cassation tiré de la violation de l’arrêté de 1974 et de son annexe. Elle relève que les statuts de la coopérative reproduisent des dispositions impératives prévues par les statuts types, et ont pour objet de réparer le préjudice subi par la coopérative du fait de l’inexécution de leurs obligations par les adhérents.

 

Indépendamment de la lettre des statuts de la société coopératrice, il convient d’ajouter que le caractère forfaitaire des sommes mises à la charge des associés par une clause statutaire n’excluait pas que cette clause ait pour finalité la réparation du préjudice subi par la société.

 

 

III. L’arrêt de la Cour d’appel de Toulouse relatif à Mme C. est quant à lui censuré pour violation de l’art. R. 522-2, al. 3 du Code rural. Mme C. avait repris les engagements de son père envers la coopérative. Les magistrats toulousains avaient jugé que la société coopérative ne prouvait pas la date de l’engagement initial du père de son adhérente, le registre des associés coopérateurs ne pouvant être opposé aux associés par la coopérative, car émanant de cette même société.

La Cour de cassation censure l’arrêt attaqué en retenant que le registre des coopérateurs, institué par le texte précité et soumis aux « autorités administratives de contrôle », constitue, en tant que document obligatoire, un élément de preuve que le juge ne peut, par principe, écarter des débats.

 

L’art. R. 522-2, al. 3 du Code rural dispose que « toute société coopérative agricole doit avoir obligatoirement à son siège un registre des associés coopérateurs sur lequel ces derniers sont inscrits par ordre chronologique d’adhésion et numéros d’inscription avec indication du capital souscrit ». La tenue du registre mentionné par ce texte incombe à la société. De ce fait, on aurait pu penser qu’elle ne pouvait se prévaloir de ce registre à l’encontre des associés. L’art. 1331 du Code civil aurait pu fonder cette solution, puisque ce texte prévoit notamment que « les registres et papiers domestiques ne font point un titre pour celui qui les a écrits ». Mais on pouvait douter du caractère de preuve auto-constituée du registre institué par l’art. R. 522-2, dès lors que la société n’est pas entièrement libre dans la tenue de ce registre. Si la tenue du registre n’est pas contrôlée directement, l’art. R. 525-15 du Code rural fait obligation à la coopérative agricole de transmettre chaque année à l’autorité qui l’a agréée (commissaire de la République du département ou de la région, ou ministre de l’agriculture – v. l’art. R. 525-2 du Code rural) et dans le délai d’un mois à compter de la date de la réunion de l’assemblée générale ayant approuvé les comptes de l’exercice écoulé, « un état indiquant le nombre des associés coopérateurs » (mais pas l’importance du capital souscrit), entre autres documents. L’état en question doit être certifié conforme par le président du conseil d’administration ou son représentant. Il apparaît donc difficile que la société puisse modifier par la suite le registre des associés coopérateurs, qui ne correspondrait alors plus à l’état transmis aux autorités administratives. L’admissibilité de ce registre comme moyen de preuve de la qualité d’associé coopérateur avait déjà été affirmée incidemment par un arrêt récent de la Cour de cassation (Civ. 1ère, 19 décembre 2000, Bull. I, n° 332 ; Bull. Joly 2001, p. 524, note L. Godon), qui avait également jugé que d’autres moyens de preuve étaient admissibles.

 

L’admissibilité du registre comme moyen de preuve étant établie, on peut encore s’interroger sur la force probante qui lui sera reconnue. L’existence d’un contrôle fiable portant sur les adhésions, tel qu’exposé ci-dessus, incite à voir dans le registre des adhérents plus qu’un commencement de preuve par écrit.

 

 

 

Texte des arrêts : (n° 324)

Attendu que M. Bayol, adhérent de l'Union laitière des Pyrénées, devenue l'Union laitière des Pyrénées, Aquitaine, Charente (l'Ulpac), depuis janvier 1976, a informé la coopérative de ce qu'il cessait ses livraisons de lait ; en l'absence d'une reprise des livraisons de lait, malgré mise en demeure, le conseil d'administration de la coopérative, par délibération du 27 décembre 1990, l'a condamné au paiement des sanctions statutaires pour rupture avant le terme de l'engagement d'associé coopérateur, après compensation des sommes dues au titre de ses parts sociales et des factures de lait ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :

 

Attendu que la cour d'appel a exactement retenu que l'article 52 de la loi du 24 juillet 1867 s'applique aux seules dettes sociales incombant à l'associé coopérateur et existant au moment de sa retraite et non pas aux pénalités ou indemnités, faisant éventuellement suite à sa démission avant le terme de son engagement ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

Mais sur le moyen relevé d'office, les dispositions de l'article 1015 ayant été respectées, dans le cadre du pourvoi principal :

 

Vu l'arrêté du 3 janvier 1974 homologuant les statuts-types des sociétés coopératives agricoles, publié au Journal officiel du 5 mars 1974, et son annexe ;

 

Attendu qu'il résulte de l'article 7, alinéas 4 et 6, de cette annexe que les sanctions prévues en cas de manquement aux engagements du coopérateur doivent réparer le préjudice subi par la coopérative et sont calculées sur la base de l'exercice restant à courir jusqu'à la fin de l'engagement ;

 

Attendu que, pour débouter la coopérative de sa demande, la cour d'appel a retenu que la clause de l'article 7-6 des statuts de l'Ulpac avait un caractère forfaitaire, malgré les variables qu'elle mettait en œuvre et que l'on ne pouvait donc pas se référer à la nécessité de réparer l'entier préjudice ;

 

Attendu, cependant, que l'article 7 des statuts de l'Ulpac, lequel reproduit des dispositions impératives prévues par les statuts types, a pour objet d'assurer l'indemnisation du préjudice subi par la coopérative à la suite de l'inexécution par les adhérents de leurs obligations de livrer l'intégralité de leur production de lait, préjudice résultant de la nécessité pour la coopérative de faire face à ses charges fixes en dépit de la défaillance de ses associés par rapport à la durée de leur engagement ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elle a débouté l'Ulpac de sa demande d'indemnité compensatrice du préjudice subi, l'arrêt rendu le 27 mai 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux.

(n° 325)

 

Attendu que Mme Crouzat, ayant repris dès janvier 1984 les engagements de M. Elie Laurents, son père, adhérent de l'ULP, devenue par la suite l'ULPAC, a cessé toute livraison de lait à partir du 1er septembre 1990 ; que le conseil d'administration a décidé le 23 novembre 1990 en application des statuts, son exclusion et a fixé le montant de la pénalité statutaire et de l'indemnité compensatrice ; qu'après la compensation entre les sommes restées dues par la coopérative au titre de la dernière livraison et du remboursement du capital social, l'ULPAC a fait assigné la coopératrice en paiement des sommes restant dues ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi incident qui est préalable, tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :

 

Attendu que la cour d'appel a exactement retenu que l'article 52 de la loi du 24 juillet 1867 s'applique aux seules dettes sociales incombant à l'associé coopérateur et existant au moment de sa retraite et non pas aux pénalités ou indemnités faisant éventuellement suite à sa démission avant le terme de son engagement ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

 

Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :

 

Vu l'article R. 522-2, alinéa 3, du Code rural ;

 

Atendu que le registre des associés de la coopérative, prévu par le texte susvisé, soumis aux autorités administratives de contrôle, constitue, en tant que document obligatoire, un élément de preuve que le juge ne peut, par principe, écarter des débats ;

 

Attendu que pour décider que l'ULPAC ne prouvait pas la date de l'engagement initial du père de la coopératrice, la cour d'appel a retenu que le registre des associés coopérateurs, émanant d'elle-même, ne pouvait être opposable au coopérateur ;

 

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

 

PAR CES MOTIFS :

 

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 mai 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau (…).

 

3. Civ. 3ème, 12 décembre 2001, Bull. III, n° 153.

La transformation d’une société ne donne pas naissance à une nouvelle personne morale.

 

 

Une société SCF, agissant en tant que maître de l’ouvrage, avait chargé trois personnes physiques d’une mission de maîtrise d’œuvre (intervention d’architecte) en vue de la construction d’un groupe d’immeubles. Cette société se substitua une autre société pour l’exécution de ce projet. Cette seconde société, qui avait initialement la forme de société civile immobilière, se transforma par la suite en société en nom collectif.

Les architectes demandèrent le paiement d’un solde d’honoraires tout à la fois à la première société, à la société en nom collectif qui lui avait été substituée, et, semble-t-il… à la société civile immobilière !

 

Par un arrêt rendu le 21 octobre 1999, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence rejeta les demandes formées contre la société en nom collectif et la société maître de l’ouvrage, mais accueillit néanmoins la demande formée contre la société civile immobilière.

 

Cet arrêt est censuré tant en ce qu’il avait rejeté la demande formée contre la société maître de l’ouvrage (I) qu’en ce qu’il avait débouté les architectes de la demande formée contre la société en nom collectif (II).

 

 

I. Concernant la demande formée contre la société maître de l’ouvrage, la Cour de cassation juge que l’acceptation par un créancier de la substitution d’un nouveau débiteur au premier, même sans réserve, n’implique pas, en l’absence de déclaration expresse, qu’il ait entendu décharger le débiteur originaire de sa dette. L’arrêt attaqué, qui avait retenu que la société substituée à la société maître de l’ouvrage « avait accepté d’être la seule interlocutrice des maîtres d’œuvre » pour écarter la demande formée par ceux-ci, a violé en cela l’art. 1275 du Code civil, aux termes duquel la délégation ne décharge le délégant que si le créancier bénéficiaire le déclare expressément.

C’est là une solution constante (v. déjà, not., Com., 12 décembre 1995, Bull. IV, n° 294). Protectrice du créancier, elle peut toutefois apparaître excessive, dès lors que l’acceptation contractuelle d’une « substitution » de débiteur devrait logiquement entraîner renonciation à poursuivre le débiteur originaire.

 

 

II. Concernant la demande formée contre la société en nom collectif, que la société maître de l’ouvrage s’était substituée dans la convention conclue avec les architectes, l’arrêt attaqué avait rejeté la demande formée par ces derniers, tout en condamnant la société civile immobilière au paiement des sommes réclamées. Les magistrats aixois voient de ce fait leur décision censurée pour violation de l’art. 1844-3 du Code civil, texte disposant que la transformation régulière d’une société en société d’une autre forme n’entraîne pas la création d’une personne morale nouvelle.

 

Au vrai, on peine à comprendre le raisonnement suivi par l’arrêt attaqué, qui avait condamné la société civile mais refusé de condamner la société en nom collectif, en retenant que les demandeurs ne sollicitaient pas sa condamnation, et que cette société n’offrait pas de leur payer les sommes allouées, tout en constatant que la société en nom collectif « avait déclaré être aux droits de la SCI ». C’est en effet méconnaître le mécanisme de la transformation, qui n’est qu’une modification des statuts, que de traiter la société en sa forme initiale et en sa forme postérieure à la transformation comme deux sociétés distinctes. Cette confusion se prolonge d’ailleurs par l’emploi fait par la Cour de cassation des termes « être aux droits de la SCI ». La transformation n’entraîne pas de transmission de droits, puisqu’elle ne constitue qu’une mesure de restructuration interne à la société transformée.

 

On peut encore comprendre pourquoi les demandeurs ne se sont pas satisfaits du fait que l’arrêt attaqué avait condamné au paiement la société civile immobilière. Cette société et la société en nom collectif également poursuivie ne constituant qu’une seule et même personne morale, la condamnation de la société civile aurait dû permettre de poursuivre l’exécution de l’arrêt d’appel auprès de la société commerciale. Mais l’arrêt attaqué empêchait précisément cela en rejetant la demande de paiement formée contre la société en nom collectif (on peut noter au passage qu’une demande en paiement avait été formée contre la société en nom collectif, mais que l’arrêt attaqué retenait que les demandeurs ne sollicitaient pas sa condamnation, ce qui apparaît contradictoire) !

 

 

 

Texte de l’arrêt :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 1275 du Code civil ;

Attendu que la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point novation, si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 octobre 1999), qu'en 1986, la Société la construction française (SCF), maître de l'ouvrage, a, par convention d'intervention d'architecte, chargé MM. Miranda, Saada et Lanteri d'une mission de maîtrise d'œuvre en vue de la construction d'un groupe d'immeubles ; que la SCF s'est substituée, pour l'exécution du programme, la société civile immobilière (SCI) Les Terrasses de Thalassa, aux droits de laquelle vient la société en nom collectif (SNC) Thalassa ; que le projet n'ayant pu être mené à bien après réalisation d'études préliminaires, les architectes ont sollicité le paiement d'un solde d'honoraires ;

Attendu que pour rejeter les demandes formées par les architectes contre la SCF, l'arrêt retient que cette société s'est substituée la SCI dans l'exécution de ses obligations, conformément à la faculté qui lui avait été accordée dans la convention d'intervention d'architecte, et que, dans ses conclusions d'appel, la SCF avait indiqué que la SCI avait accepté d'être la seule interlocutrice des maîtres d'œuvre ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la seule acceptation par le créancier de la substitution d'un nouveau débiteur au premier, même si elle n'est assortie d'aucune réserve, n'implique pas, en l'absence de déclaration expresse, qu'il ait entendu décharger le débiteur originaire de sa dette, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1844-3 du Code civil ;

Attendu que la transformation régulière d'une société en une société d'une autre forme n'entraîne pas la création d'une personne morale nouvelle ;

Attendu que pour rejeter les demandes formées par les architectes contre la SNC, l'arrêt retient que les demandeurs ne sollicitaient pas la condamnation de cette société, qui n'offre pas de leur payer les somme allouées ;

Qu'en statuant ainsi, tout en condamnant la SCI au paiement des sommes réclamées, alors qu'elle avait constaté que la SNC avait déclaré être aux droits de la SCI, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par MM. Miranda, Saada et Lanteri contre la Société la construction française et contre la société en nom collectif Thalassa, l'arrêt rendu le 21 octobre 1999, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier.

 

4. Com., 18 décembre 2001, Bull. IV, n° 201.

L’achat pour revente effectué par des sociétés coopératives agricoles n’emporte pas compétence du tribunal de commerce, dès lors que les actes concernés sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs.

 

 

Une union de coopératives avait assigné en référé devant le président du tribunal de commerce une société anonyme, d’une part, et plusieurs coopératives, d’autre part, aux fins de conclusion et d’exécution d’un contrat de vente et pour voir cesser une pratique de refus de vente. Le président du tribunal de commerce se déclara matériellement incompétent concernant la demande formée contre les coopératives et jugea mal fondées les demandes formées contre la société anonyme.

 

La décision du président du tribunal de commerce fut confirmée par un arrêt rendu par la Cour d’appel d’Angers le 30 novembre 1998. L’union de coopératives forma un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt, qui est rejeté par l’arrêt commenté. Le pourvoi contestait l’arrêt d’appel tant sur la question de l’incompétence du président du tribunal de commerce que sur celle du caractère non fondé de la demande (cette question ne sera pas étudiée plus avant dans le cadre de ce commentaire).

 

L’auteur du pourvoi soutenait que la demande relevait de la compétence des juridictions commerciales, et invoquait l’argumentation suivante. L’achat pour revendre est un acte de commerce, et les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des contestations relatives aux actes de commerce réalisés par des sociétés coopératives avec des tiers non coopérateurs. Or les sociétés coopératives défenderesses bénéficiaient d’accords de coopération commerciale avec la société anonyme, qui exploitait elle-même une entreprise commerciale. La division du litige opérée par la cour d’appel, la conduisant à dénier la compétence des tribunaux de commerce, aurait constitué une violation des art. L. 521-1 et L. 521-5 du Code rural et de l’art. 873 du Nouveau Code de procédure civile.

 

Pourtant, l’art. L. 521-5 du Code rural dispose au contraire que les coopératives et les unions de coopératives relèvent de la compétence des juridictions civiles. Les sociétés coopératives ont pour objet, aux termes de l’art. L. 521-1, l’utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou développer leur activité économique. Du rapprochement de ces deux textes, la Cour de cassation déduit que les sociétés coopératives ont un objet non commercial les faisant échapper à la compétence des tribunaux de commerce, même lorsqu’elles accomplissent des actes réputés commerciaux, tels que l’achat pour revendre, dès lors que ceux-ci sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs (v., pour un arrêt retenant la compétence des tribunaux de commerce pour les contestations relatives aux actes de commerce que les sociétés coopératives ou leurs unions peuvent faire avec des tiers non coopérateurs, Civ. 1ère, 18 novembre 1986, Bull. I, n° 272 ; v. également, affirmant que les actes accomplis par une coopérative agricole en conformité de son objet social et de ses statuts ne sauraient lui conférer la qualité de commerçant, Civ. 1ère, 8 juillet 1997, n° 241). L’arrêt attaqué est approuvé, en ce qu’il a fait application de ce principe après avoir constaté qu’en l’espèce, les marchandises achetées par les coopératives étaient destinées à être revendues à leurs adhérents.

 

Cette solution n’est pas surprenante, au vu du principe posé par l’art. L. 521-5 du Code rural.

On pourrait aller jusqu’à douter de la qualification d’acte de commerce des achats pour revendre effectués par les sociétés coopératives aux fins de réaliser l’objet que leur assigne l’art. L. 521-1 du Code rural. Ainsi que l’écrit le professeur Guyon (Droit des affaires, t. 1, 11ème éd., Economica, 2001, n° 53), l’achat et la revente visés par l’art. L. 110-1 du Code de commerce « forment un acte unique parce qu’ils sont reliés par l’intention de réaliser un bénéfice » (sur la nécessité d’une « finalité lucrative » pour que l’achat pour revendre ait une nature commerciale, v. Trib. com. Seine, 12 mars 1912, DP 1912, 2, p. 207 ; v. également M. de Juglart et B. Ippolito, Cours de droit commercial, 1er vol., 10ème éd., Montchrestien, 1992, n° 72, c). Or il est difficile de voir une telle intention de lucre dans l’achat fait en vue de la revente aux coopérateurs. Certes, on sait qu’en pratique les sociétés coopératives revendent à leurs membres à un prix supérieur au prix de revient. Mais il apparaît qu’elles ne procèdent ainsi que par précaution, sans intention de s’enrichir (v. R. Saint-Alary et P. Le Berre, Juris-Classeur Sociétés Traité, Fasc. 168-10, Sociétés coopératives – Généralités, n° 59). On peut encore relever que l’intention de réaliser un bénéfice ne figure pas parmi les objectifs essentiels des sociétés coopératives, tels qu’énumérés par l’art. 1er de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947.

Une société coopérative n’accomplirait donc pas un acte de commerce en achetant pour revendre à ses associés coopérateurs, même lorsque la coopérative revend les biens achetés à ses associés à un prix supérieur au prix de revient.

 

 

 

Texte de l’arrêt :

 

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 30 novembre 1998), que par acte du 23 janvier 1998, l'Union des coopératives Cooperl Hunaudaye (l'Union) a assigné en référé la société Le Maïs angevin ainsi que la coopérative Agralco Coutances, la coopérative CAM 53 Laval, la coopérative Coopagri Bretagne Landernau (les coopératives) aux fins de s'entendre décerner acte de qu'elle passait une commande ferme de semence de maïs à la société Le Maïs angevin, que cette société soit condamnée, à lui livrer sous astreinte sa commande et à lui faire connaître ses conditions de vente, et enfin qu'il lui soit ordonné ainsi qu'aux « sociétés distributrices » de lui communiquer l'ensemble des documents contractuels relatifs à la commercialisation de la semence de maïs établis entre elles ; que par ordonnance de référé, le président du tribunal de commerce s'est déclaré incompétent matériellement en ce qui concerne les coopératives et a déclaré les demandes dirigées contre la société Le Maïs angevin non fondées ;

 

Sur le premier moyen

 

Attendu que l'Union fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise du chef de la compétence, alors, selon le moyen, que l'article 632, modifié par la loi du 13 juillet 1967, pose une présomption de commercialité, en réputant acte de commerce tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en ouvre ; que les tribunaux de commerce sont compétents pour connaître des contestations relatives aux actes de commerce réalisés par les sociétés coopératives agricoles avec des tiers non coopérateurs ; qu'en l'espèce, l'Union demandait à la juridiction des référés commerciaux de voir cesser un trouble manifestement illicite se manifestant par des pratiques discriminatoires existant entre la société anonyme Le Mais angevin et les trois coopératives, bénéficiant par leur fonction de distributeur d'accords de coopération commerciale avec l'entreprise commerciale précitée ; qu'ainsi l'arrêt confirmatif attaqué n'a dénié la compétence commerciale, au prix d'une division du litige préjudiciable à l'examen d'ensemble légitimement sollicité par l'Union qu'en violation par fausse application des articles L. 521-1 et L. 521-5 du Code rural et 873 du nouveau Code de procédure civile, conférant au président du tribunal de commerce le pouvoir de faire cesser un trouble manifestement illicite ;

 

Mais attendu que selon l'article L. 521-1 du Code rural, les sociétés coopératives agricoles ont pour objet l'utilisation en commun par des agriculteurs de tous moyens propres à faciliter ou à développer leur activité économique, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité et que selon l'article L. 521-5 du même Code, ces sociétés et leurs unions relèvent de la compétence des juridictions civiles, ce dont il ressort que les sociétés coopératives ont un objet non commercial les faisant échapper à la compétence des tribunaux de commerce, même si elles accomplissent des actes tels que des achats pour revendre, réputés actes de commerce, dés lors que ceux-ci sont effectués au profit des agriculteurs coopérateurs ; qu'ayant fait application de ce principe après avoir constaté que les semences de maïs achetées auprès de la société Le Maïs angevin par les coopératives assignées étaient destinées à être revendues à leurs adhérents, la cour d'appel a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ;

 

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches

 

Attendu que l'Union fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle l'a déclarée non fondée en ses demandes dirigées contre la société Le Maïs angevin, alors, selon le moyen

 

1° qu'il appartient au juge des référés commerciaux de faire cesser un trouble manifestement illicite, qui peut résulter entre autres de manquements aux dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence ; que l'Union faisait précisément valoir dans ses conclusions que la société Le Mais angevin versait aux autres coopératives, des primes de fin de campagne, tout en se refusant à communiquer les modalités de calcul de ses primes de telle sorte que l'Union n'était pas, vu ce défaut de transparence, en mesure de connaître le prix définitif exact en fin de campagne, ce qui entraînait à son détriment le risque anormal soit de vente à perte, soit de s'aliéner des adhérents susceptibles de profiter de meilleurs cours, qu'en se bornant à affirmer que le sort particulier consenti aux distributeurs du Mais angevin se justifierait en raison de services prévus à la charte « Distributeur conseiller Le Mais angevin », non appliquée à l'Union, l'arrêt attaqué, qui a méconnu qu'il appartenait à la société Le Mais angevin de justifier de la licéité des remises de prix qu'elle accordait à certains de ses clients, n'a pas mis le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle et privé de base légale le débouté de l'Union au regard des dispositions des articles 7 et 33 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, ensemble 873, modifié par le décret du 17 juin 1987, du nouveau Code de procédure civile,

 

2° qu'il ne suffisait pas à la société le Mais angevin de refuser la commande du 23 janvier 1998 de l'Union en affirmant une rupture de stock du produit demandé, la preuve de la réalité d'une rupture de stock incombant, non à la victime du refus, mais bien au vendeur qui entend s'en prévaloir, qu'en retenant que l'Union n'établissait pas que le motif formulé dans la lettre de la société le Mais angevin du 28 janvier 1998 était fallacieux, l'arrêt attaqué a renversé le fardeau de la preuve et violé par suite l'article 1315 du Code civil;

 

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt constate qu'il n'est pas établi que l'Union se soit heurtée à un refus de la société Le Maïs angevin de lui communiquer ses conditions générales de vente pour les campagnes « maïs 1996/1997 » et « maïs 1997/1998 », et qu'à réception des pièces communiquées, l'Union n'a pas formulé de demande de communication complémentaire notamment sur les documents contractuels établis entre la société Le Maïs angevin et d'autres coopératives ; que l'arrêt relève que l'Union a obtenu communication de la charte « Distributeur conseiller Maïs angevin » mettant en évi­dence les services exigés du distributeur conseiller avant la vente, pendant la vente et après la vente, et que les conditions générales de vente lient la remise « Distributeur conseiller angevin » à ces services « tous de rigueur pour prétendre à l'obtention de remise » ; que l'arrêt constate enfin que pour 1998, l'Union disposait des informations sur les remises de fin de campagne faites par la société Le Maïs angevin ; qu'en l'état de ces constatations dont elle a déduit que le trouble invoqué par l'Union consistant dans le refus de la société Le Maïs angevin de lui faire connaître ses conditions commerciales n'était pas établi, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, d'autre part, que contrairement aux énonciations du moyen, il appartient à celui qui se prévaut d'un refus de vente, qui ne constitue plus par lui-même une faute civile depuis l'abrogation de l'article 36, paragraphe 2, de l'ordonnance du 1er décembre 1986 dans sa rédaction antérieure à la .loi n° 96-588 du 1er juillet 1996, d'établir la réalité de l'éventuel abus de droit que celui-ci peut néanmoins constituer; qu'ayant constaté que la commande de maïs variété Anjou 58 du 23 janvier 1998 effectuée par l'Union n'a pas été honorée par la société Le Maïs angevin, motif pris de ce que cette variété n'était plus disponible polir cause de rupture de stock, la cour d'appel, énonçant qu'il appartenait à l'Union d'établir le caractère fallacieux de ce motif, n'a pas inversé la charge de la preuve ;

 

Qu'il suit de là que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches;

 

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.