LA QUALIFICATION

 

                                DE

 

           GARANTIE AUTONOME

                                                                                                

 

 

Par Nicolas BORGA

 

 

 

 

Mémoire D.E.A Droit Privé Fondamental Université Jean Moulin Lyon 3, année universitaire 2000/2001

Sous la direction de Madame le Professeur S. PORCHY-SIMON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                        « Sans sûretés, pas de crédit, sans crédit pas d’économie moderne. »[1]

 

 

 

Les sûretés sont en effet indispensables au crédit, car celui-ci suppose la confiance. En assurant une certaine sécurité au créancier quant au recouvrement de sa créance, les sûretés établissent par la même, un climat de confiance[2], qui permet le développement du crédit. A cet égard, le cautionnement, seule sûreté personnelle envisagée par le Code civil, semblant de moins en moins apte à assurer une certaine sécurité au créancier[3], le crédit pourrait s’en trouver affecté.

Aussi, la pratique a récemment imaginé diverses formes de nouvelles sûretés personnelles pour restaurer la sécurité du créancier. La garantie autonome, dont la validité en droit français a été reconnue par la Cour de Cassation dès 1982[4], est sans aucun doute, l’une des plus connues, mais surtout, l’une des plus efficaces d’entre elles.

 

La garantie autonome ou indépendante, peut se définir, comme « un engagement de payer une certaine somme, pris en considération d’un contrat de base et à titre de garantie de son exécution, mais constitutif d’une obligation indépendante du contrat garanti et caractérisé par l’inopposabilité des exceptions tirées de ce contrat »[5]. L’acte constatant l’engagement sera généralement dénommé, « lettre de garantie ».

Le schéma contractuel est relativement simple, puisqu’une personne, le garant, s’engage à la demande d’un débiteur, le donneur d’ordre, à verser à un créancier, le bénéficiaire, une somme d’argent sur appel de ce dernier.

 

La technique de la garantie autonome est à usages multiples. Elle peut être utilisée en droit international comme en droit interne et peut venir couvrir des obligations aussi bien contractuelles, légales (douanières, fiscales…) que délictuelles.

La garantie de soumission vient par exemple garantir une obligation délictuelle, puisqu’elle intervient pendant la phase des pourparlers. Pour assurer le sérieux de la soumission et des négociations, l’auteur de l’appel d’offre va exiger la fourniture d’une garantie bancaire, représentant un pourcentage (1 à 10 %) du montant estimé du marché.

Mais il existe aussi des garanties dites de restitution d’acompte, qui visent comme leur nom l’indique, à couvrir le remboursement d’acomptes en cas d’inexécution de ses engagements par le fournisseur. La garantie de bonne fin quant à elle, consiste en la couverture par un tiers de l’obligation de bonne et loyale exécution du contrat dans les délais impartis[6]. Mais au-delà des ces distinctions, la garantie autonome tend à se développer, notamment en droit interne, pour venir couvrir les opérations les plus banales, se substituant ainsi au cautionnement.

 

 Lorsqu’une garantie est souscrite à l’occasion d’une opération internationale,  certains bénéficiaires vont exiger pour renforcer leurs positions, que l’engagement soit émis non par une banque garante de la nationalité du donneur d’ordre, mais par une banque de leur propre nationalité. Mais une telle banque acceptera rarement de garantir un débiteur étranger dont elle ignore tout, et contre qui, elle devra éventuellement agir en justice devant des tribunaux et selon des procédures inconnues pour elle.

Le plus souvent, le donneur d’ordre s’adressera alors à sa propre banque nationale, en lui demandant la mise en place de la garantie exigée par le bénéficiaire. Cette banque se tournera vers la banque du bénéficiaire pour que celle-ci accepte de délivrer la garantie exigée, contre engagement de sa part de la contregarantir, au cas  elle serait appelée en paiement par le bénéficiaire. Deux garanties autonomes seront alors émises, celle au profit du bénéficiaire dite, de premier rang, et celle octroyée au garant de premier rang qui sera dite, contregarantie. Ce n’est là qu’une transposition de la technique du sous-cautionnement[7].

 La banque du pays du bénéficiaire s’engagera plus facilement, si elle sait être contregarantie par une banque avec qui elle a l’habitude de traiter ou qui jouit d’une forte notoriété. En raison de l’importance accordée par les banques à leur réputation internationale, il y a peu de contestation au paiement dans de telles hypothèses, le risque sera donc très réduit pour la banque garante de premier rang.

 

Définie de telle manière, la garantie autonome apparaît comme un mécanisme relativement simple à appréhender. Si simple, que pour un auteur, l’apparition de telles sûretés de substitution au cautionnement pourrait refléter une régression du droit, par leur pauvreté technique eue égard à celui-ci[8]. Pour autant, il ne faut pas se méprendre, car comme l’écrit M. Teyssié[9], « au bal des apparences elle (la garantie autonome) a choisi le masque de la simplicité pour mieux cacher au limier en mal de vérité l’entrelacs des questions, débats, contradictions ».

 

L’une des principales difficultés suscitées par cette sûreté, est celle de sa qualification, qui a donné lieu à un abondant contentieux jurisprudentiel. La doctrine s’est intéressée à cette question, mais le plus souvent de manière très pragmatique, en cherchant à déterminer les critères de qualification de ce contrat, car c’est un contrat, mais sans s’attarder sur leur origine et leur rôle dans le débat judiciaire.

 

La qualification[10] peut apparaître, « comme un outil, une méthode dont se sert le juriste et qui peut être définie d’une façon générale, comme le procédé intellectuel consistant à rattacher un cas concret à un concept juridique abstrait reconnu par une autorité normative afin de lui appliquer son régime »[11]. L’opération de qualification suppose donc un modèle abstraitement défini, ayant vocation à accueillir sous sa définition, un cas concret, c’est-à-dire, un ensemble de faits. La qualification permettra alors d’appliquer le régime juridique correspondant à ce modèle abstrait au cas concret. Il faut donc identifier les cas auxquels une règle de droit s’appliquera, c’est le rôle de la qualification. Comme l’écrit F. Terré[12], « la qualification apparaît comme la confrontation d’une définition et d’un cas concret ».

 

 On parle alors souvent de syllogisme[13], pour désigner cette opération intellectuelle. Tout type contractuel, suppose la réunion de certains éléments de qualification. Confronté à un cas concret, le juge vérifiera si les éléments propres à ce type contractuel sont présents. Dans l’affirmative il qualifiera la convention en ce sens.

Cela nécessite, une définition suffisamment précise et stable, sans quoi l’opération de qualification est aléatoire, dénuée de toute rigueur et rend impossible la classification vers laquelle elle tend normalement[14].

Or à cet égard, un premier écueil se dresse, lorsque est envisagé l’étude de la qualification de garantie autonome. En effet, si la définition donnée plus haut de ce mécanisme, ne semble plus faire beaucoup de difficultés, il n’en a pas toujours été ainsi. Comme nous le verrons au cours de cette étude, de nombreuses hésitations ont pu se faire jour, rendant d’autant plus incertaine l’opération de qualification.

Mais, et c’est là un second écueil, il faut se garder de croire qu’une bonne définition suffit à éliminer toute difficulté de qualification. Encore faut-il en effet, qu’elle soit largement partagée, ce qui est toujours très rare, et comprise par tous de la même manière.

 

Ne serait-ce que sur la nature de l’engagement du garant, des hésitations pourraient apparaître, est-ce un contrat? Est-ce une sûreté  ? Il semble possible de les éliminer dès à présent, par une réponse affirmative.

 

-La garantie autonome est un engagement conventionnel unilatéral : A l’étranger, particulièrement en Belgique[15] et en Allemagne[16], la garantie autonome est parfois considérée comme un acte juridique unilatéral. L’intérêt de cette qualification, est de pouvoir considérer, que la garantie existe, même sans l’accord du bénéficiaire.

 

La doctrine[17] et la jurisprudence[18] française sont quant à elles, unanimes en faveur de la qualification de contrat unilatéral, ceci, en raison de la réticence traditionnelle du droit français à admettre les actes unilatéraux[19].

Un accord de volonté apparaît en effet nécessaire, entre le garant et le créancier bénéficiaire, même si l’acceptation de celui-ci pourrait être tacite. Cet accord de volonté s’ajoute généralement à un second lien contractuel existant entre le garant et le débiteur donneur d’ordre. Dans le cadre de cette étude, le lien entre le bénéficiaire et le donneur d’ordre sera dénommé, « rapport fondamental » ou « contrat de base », en notant toutefois, que la première expression semble plus adaptée que la seconde, qui renvoie par trop, au caractère accessoire propre au cautionnement. Quant au rapport unissant le donneur d’ordre et le garant, il sera dénommé « rapport d’ordre »[20].

 

Comme le cautionnement, la garantie autonome est donc un contrat unilatéral, puisque seul le garant s’oblige. Le bénéficiaire n’est en effet tenu d’aucune obligation à son égard. Mais cet engagement conventionnel unilatéral, s’inscrit néanmoins dans le cadre d’une opération juridique tripartite.

 

Outre son caractère contractuel, la garantie autonome revêt tous les aspects d’une sûreté personnelle.

 

-La garantie autonome est une sûreté personnelle : La doctrine semble unanime sur ce point[21]. Si toute sûreté est une garantie, toute garantie n’est pas une sûreté[22]. Or, la garantie autonome, contrairement à son appellation, est une sûreté.

 

En effet, selon les critères communément admis[23], on qualifiera de sûreté personnelle l’effet d’une convention spéciale qui, d’une part, ajoute au débiteur principal un nouveau débiteur, et d’autre part ouvre à celui-ci un recours contre le débiteur principal, le nouveau débiteur n’ayant pas vocation à contribuer à la charge définitive de la dette. Les deux critères sont donc l’adjonction d’une créance au profit du créancier contre le garant, et l’absence de contribution à la dette par le garant.

Cet engagement répond visiblement à ces deux critères, car il confère bel et bien un nouveau débiteur au créancier, sans qu’il ne soit tenu de contribuer à la charge définitive de la dette, puisqu’il dispose d’un recours contre le garant après paiement. Ce n’est pas le cas d’un grand nombre d’autres mécanismes, qui ne s’apparentent qu’à des garanties[24]. Tel est le cas par exemple de l’assurance crédit, de l’action directe ou encore de la solidarité en général, qui ne répondent qu’à un critère sur deux.

 

L’intérêt de la garantie autonome, mais aussi d’un certain nombre de nouvelles sûretés personnelles telles que le constitut, par rapport au concept de sûreté, réside dans son caractère non accessoire. En effet, le droit des sûretés s’est construit autour de trois institutions ; le cautionnement, le gage et l’hypothèque, qui avaient en commun d’utiliser les techniques de l’obligation ou du droit réel, mais à titre d’accessoire[25]. Comme le souligne M. Aynès[26], la notion de sûreté est donc relative. Le droit des sûretés évolue, au contact de ces nouvelles conventions crées par la pratique, qui ne sont pas de simples accessoires de l’obligation principale, même si nous aurons l’occasion d’observer, que tout lien n’est pas pour autant coupé.

 

Quant à son origine, cette sûreté personnelle est née dans le cadre du commerce international au début des années soixante-dix[27]. Comme l’écrivent MM. Gavalda et Stoufflet[28], « le risque - et par corollaire, la nécessité de garanties – est inhérent au commerce international ». Ce risque justifie la recherche de garanties particulièrement efficaces.

A cet égard, les sûretés classiques se révèlent inaptes à fournir une protection satisfaisante pour le créancier, elles « franchissent mal les frontières »[29]. La complexité de certaines opérations commerciales, l’applicabilité de droits nationaux plus ou moins divergents, la méfiance à l’égard des contractants étrangers et les difficultés d’exécution rencontrées en pays étranger, sont autant d’explications à cette faiblesse des sûretés traditionnelles et à leur désaffection dans le cadre du commerce international[30].

 

Pour remédier à cela, les créanciers ont pris l’habitude d’exiger de leurs débiteurs un dépôt de garantie, de fonds ou de valeurs, pour les contraindre à exécuter leurs engagements. Ce dépôt devait être effectué entre les propres mains du créancier ou auprès de sa banque, ce qui, comme l’écrit Ph. Simler[31], n’était rien d’autre, « que la forme la plus primaire du gage avec dépossession ».

Il s’agissait là d’une garantie très efficace et parfaitement liquide pour le créancier. Mais pour le débiteur, cette solution avait un résultat préjudiciable, puisqu’elle obérait lourdement sa trésorerie et réduisait sensiblement sa capacité de crédit.

 

Aussi, la pratique a substitué à ce dépôt de garantie, un engagement par signature d’un établissement de crédit ou d’assurance, garantissant au bénéficiaire le versement de la somme représentative de la consignation. Cette solution suppose, pour être aussi sûre pour le créancier que le dépôt de garantie, que l’engagement souscrit emprunte la rigueur de la sûreté réelle qu’il remplace. Il faut donc que l’appel de la garantie ne se heurte à aucun obstacle, qu’aucune exception ne puisse être opposée au bénéficiaire.

La garantie doit donc être payable à première demande du bénéficiaire, qui trouve alors une sécurité équivalente à celle dont il peut jouir dans le cas d’un dépôt de fonds[32].

 

Les garanties autonomes sont à l’heure actuelle très prisées par les opérateurs du commerce international, sans que cette technique ne soit véritablement réglementée. Aussi, plusieurs organismes internationaux ont tenté de mettre au point des règles uniformes ainsi que des modèles-type de garanties, auxquels les parties ont la possibilité de se référer[33].

 

Ainsi, la Chambre de Commerce international (CCI), a élaboré dès 1978 un texte intitulé « Règles uniformes de la CCI pour les garanties contractuelles »[34], mais il a été très peu suivi. Aussi, en 1980, elle a élaboré un nouveau texte, « Règles uniformes de la CCI relatives aux garanties sur demande »[35]. Mais ces règles n’ont vocation à s’appliquer, que si les parties le stipulent expressément. Or, la pratique ne semble pas manifester un grand enthousiasme à cet égard.

Ces textes de la CCI visent en réalité à limiter le recours aux garanties à première demande, au profit des garanties dites « documentaires » et « à première demande justifiée », qui font partie, avec la garantie à première demande, de la catégorie des garanties autonomes.

Mais la garantie à première demande est la forme la plus fréquente de garantie autonome, car la plus absolue. Une telle garantie « doit être payée à première réquisition et l’appel de la garantie est, par le bénéficiaire, discrétionnaire, pourvu qu’il intervienne pendant la période d’efficacité prévue au contrat et qu’il n’apparaisse pas manifestement abusif »[36].

 L’appel d’une garantie documentaire est quant à lui, subordonné à la présentation de certains documents, ce qui atténue la rigueur de l’engagement[37]. Quant à la garantie à première demande justifiée, la justification requise émane du bénéficiaire lui-même et aucune preuve de la réalité des motifs invoqués n’est exigée[38]. Au niveau de la rigueur de l’engagement, cette garantie est donc intermédiaire.

 

Enfin, la Commission des Nations-Unies pour le droit commercial (CNUDCI) a adopté en 1995 un projet de convention relatif aux garanties indépendantes et aux lettres de crédit stand-by[39]. Contrairement aux règles de la CCI, cette convention une fois en vigueur, aura, sauf, clause contraire vocation à s’appliquer de plein droit aux garanties indépendantes internationales soumises au droit d’un Etat signataire.

 

Nous aurons l’occasion de voir au cours de cette étude, que les requalifications en cautionnement ont été nombreuses pour les garanties autonomes souscrites dans le cadre de relations purement internes. Ce n’est pas le cas pour les contrats internationaux, où en vertu d’une sorte de lex mercatoria, l’usage est plutôt de conclure des garanties autonomes que des cautionnements et où, il y a peu de contestations quant à la qualification de l’engagement, car les banques garantes sont soucieuses de préserver leur réputation sur les places financières internationales, et contestent très rarement l’appel de la garantie par le bénéficiaire.

Pour l’essentiel, nous nous cantonnerons donc au problème de la qualification en droit interne. Si les solutions envisagées en droit étranger pourront parfois être évoquées, ce sera dans le but d’observer la manière dont la garantie autonome a pu être accueillie dans ces différents droits et de les comparer au droit français.

 Cette perspective « interniste », nous conduira ainsi, à ne pas traiter de certains aspects des garanties autonomes, telles que les contregaranties, qui ne sont pratiquées que dans le cadre du commerce international, et qui n’intéressent pas au premier chef, le problème de la qualification.

 

L’usage de la garantie autonome n’est en effet, pas resté cantonné à l’hypothèse des contrats internationaux. Un auteur soulignait ainsi, qu’elle « déborde de son lit naturel »[40], pour venir s’implanter en droit interne et venir concurrencer le cautionnement. C’est dans ce cadre que surgissent les véritables difficultés de qualification.

La garantie autonome vient alors couvrir toutes sortes d’opérations de crédit. Son montant ne se limite pas comme souvent en matière internationale à une fraction de l’engagement du débiteur principal, mais vise à procurer au créancier une sécurité complète et inconditionnelle contre la défaillance de l’emprunteur. Les établissements financiers exigent fréquemment à l’heure actuelle, une garantie indépendante aux lieu et place du cautionnement, par exemple pour garantir le remboursement d’emprunts[41].

 

Comme nous avions pu le souligner au début de cette étude, sûreté et crédit sont liés, car la sûreté apporte la confiance indispensable au crédit. A cet égard, M. Prüm souligne très justement[42], « Source d’une confiance renforcée, les sûretés autonomes facilitent l’accès des entreprises à des sources de financement dans de meilleures conditions ». Parallèlement, le cautionnement est quant à lui remis en cause en tant que source de confiance, par la crise qu’il traverse.

Que l’on se situe dans le cadre de contrats internationaux ou de relations strictement internes, l’apparition des garanties autonomes est en effet liée, au besoin de renforcer la position du créancier. Mais, alors qu’en matière de contrats internationaux, ces causes de fragilité sont tout à fait spécifiques au contexte, dans le cadre de relations juridiques internes, cette fragilité n’est que la résultante de la crise du cautionnement.

 

Cela ne doit pas étonner, comme a pu l’écrire M. Mouly[43], « l’histoire et le droit comparé démontrent en effet que, lorsque le cautionnement est trop affaibli par l’augmentation des protections législatives, la pratique recherche d’autres formes de garanties personnelles beaucoup plus rigoureuses ». La France ne fait là que suivre une évolution connue depuis longtemps par d’autres pays européens, qui à côté du cautionnement accessoire, connaissent des garanties dites « autonomes »[44].

 

Depuis le début des années quatre-vingt, c’est à un mouvement jurisprudentiel et législatif constant de protection de la caution auquel on assiste. L’exemple marquant à cet égard en jurisprudence, est le sens nouveau qui a pu être donné un temps à l’article 1326 du Code civil, érigeant la mention manuscrite en condition de validité de l’engagement. Si la Cour de Cassation est revenue sur ce point, la tendance générale se perpétue, avec par exemple, les hypothèses de mise en jeu de la responsabilité du créancier ou encore, l’édiction d’un principe de proportionnalité entre l’engagement de la caution et ses ressources.

Le législateur a emboîté le pas de la jurisprudence, par l’adoption de plusieurs lois, de celle du 1er mars 1984 instituant notamment une obligation d’information à la charge des établissements de crédit[45] et prohibant la renonciation au bénéfice de cession d’action de l’article 2037 du Code civil, à celle du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, qui modifie les textes antérieurs et accroît encore la protection de la caution[46].

 

Comme l’écrit Ph. Simler[47], « l’histoire du cautionnement est celle d’un conflit entre la tendance très nette du législateur et, plus récemment de la jurisprudence à entourer l’obligation de la caution de précautions et de protection diverses, et la tendance inverse de la pratique à contourner ces obstacles dans l’intérêt du créancier ».

Cette évolution vers un cautionnement rigoureux n’est pas de nature à le rendre attrayant, d’autant plus, que le cautionnement est par nature accessoire. La dette de la caution est greffée sur celle du débiteur principal, ce qu’illustrent les articles 2012, 2013, et 2036 du Code civil.

Ce caractère accessoire a pour corollaire, la possibilité pour la caution d’invoquer toutes les exceptions inhérentes à l’obligation principale. Son obligation suit celle du débiteur principal, ainsi, en cas de faillite du débiteur, si le créancier ne déclare pas sa créance à la procédure collective, la dette du débiteur principal sera éteinte et celle de la caution avec[48]. De même, la caution peut invoquer la non exigibilité de la dette principale[49], mais aussi, toutes les causes de disparition de celle-ci (nullité, qu’elle qu’en soit la cause, résolution, résiliation, compensation, paiement…).

Or, en matière de garantie autonome, le principe d’inopposabilité des exceptions règne. Cette sûreté est complètement fermée aux causes de nullité ou d’extinction de l’obligation du donneur d’ordre envers le bénéficiaire. Seul l’appel frauduleux ou manifestement abusif de la garantie par le bénéficiaire peut bloquer le paiement.

La garantie autonome permettant d’échapper aussi bien à la surprotection législative et jurisprudentielle de la caution, qu’aux conséquences du caractère accessoire du cautionnement, on perçoit là, l’enjeu de la qualification. Le régime juridique applicable exerce ici une influence tout à fait décisive.

 

En raison de l’extrême rigueur qu’implique la garantie autonome, notamment lorsqu’elle est stipulée payable à première demande, et des risques d’abus suscités par ce mécanisme[50], des critiques se sont élevées à son encontre. Un auteur a ainsi pu qualifier la garantie autonome de destructrice[51], alors que d’autres ont pu contester sa validité dans les relations juridiques internes[52].

Pour autant, la majorité de la doctrine[53] considère, qu’en vertu du principe de liberté contractuelle, rien ne s’oppose à la validité de cet engagement. En effet, c’est sur le fondement de ce principe que la validité de la garantie autonome à été admise en droit interne, même dans sa variante la plus rigoureuse, la garantie à première demande. Ainsi, dans un arrêt fondateur, la Cour de Cassation a pu affirmer, « l’engagement à première demande, autonome à l’égard du contrat de base, est régi par les seules dispositions de la lettre de garantie »[54].

En ce sens, on remarquera, que dans la plupart des arrêts de la Cour de Cassation rendus en la matière[55], celle-ci vise l’article 1134 du code civil, article très (trop ?) souvent présenté comme le siège du dogme de l’autonomie de la volonté.

 

Par ailleurs, nous aurons l’occasion de voir plus en détails, qu’à l’origine, la garantie autonome semble bel et bien correspondre à un contrat innomé[56], c’est-à-dire à un contrat distinct des moules contractuels prévus par la loi et ne bénéficiant pas d’un statut juridique prédéfini, car né spontanément des besoins de la pratique. Ces contrats innomés, n’ont plus la même signification qu’en droit romain, et sont actuellement considérés comme un facteur de liberté contractuelle.

En droit romain en effet, un accord de volonté entre deux personnes n’était à l’origine reconnu comme un véritable contrat que s’il était conclu selon certaines formes[57]. A défaut, il était sans force juridique, il s’agissait d’un pacte nu dépourvu d’action[58]. Des atténuations sont par la suite intervenues[59], mais à l’origine, l’innomé représentait donc un mode d’engagement non reconnu par le droit et dépourvu d’action.

Cette opposition n’a plus lieu d’être aujourd’hui, en raison de l’avènement du consensualisme. L’article 1107 du Code civil[60], conforté en cela par l’article 1134, est très clair sur ce point, tout accord de volonté, qu’il entre ou non dans une catégorie préalablement définie par la loi est juridiquement efficace[61]. L’article 1107 aurait donc recueilli la distinction pour la dépouiller de sa signification romaine. L’utilité même de cette distinction a alors pu être remise en cause, Planiol observe ainsi, qu’il n’y a pas de contrats innomés dans le système juridique français, « qu’il ne peut pas y en avoir »[62].

Mais de nos jours, la distinction entre contrats nommés et innomés relève d’une toute autre approche et conserve un intérêt au sens où l’innomé, permet aux contractants d’adapter leurs accords aux différents besoins de la vie et une diversification des types contractuels[63]. Ces contrats permettent par ailleurs d’échapper aux règles d’ordre public régissant un contrat nommé[64], ce qui est particulièrement intéressant dans le cadre de notre étude, le cautionnement étant de plus en plus réglementé par des dispositions de ce type. La seule limite en matière d’innomé relève en fait de l’imagination des parties et des règles impératives applicables à toutes les conventions.

 Cette catégorie de contrats a ainsi pu être présentée par un auteur, « comme un immense réservoir de liberté »[65]. Par le biais des contrats innomés, le législateur offre aux parties la possibilité de recourir à des formes contractuelles inconnues de la loi ou de la jurisprudence, et leur permet donc d’échapper aux règles impératives gouvernant les contrats nommés, même les règles d’ordre public, sans pour autant qu’il n’y ait de fraude à la loi.

 

L’autonomie de la volonté et plus précisément, le principe de liberté contractuelle semblent donc particulièrement présents en matière de garantie autonome.

 Toutefois, l’idée d’autonomie de la volonté a subit un net recul depuis le début du siècle. La liberté contractuelle, composante de ce principe, apparaît dans ce cadre comme une liberté mesurée, tirant sa force d’une habilitation consentie par le système juridique[66]. L’idée que la volonté contractuelle possèderait par elle-même la vertu de créer des effets de droit est rejetée.

Néanmoins, les tenants de la conception volontariste tirent argument des contrats innomés, en observant que ceux-ci sont obligatoires sans que les parties aient à justifier de l’utilité économique ou sociale de l’accord. A cela, certains auteurs répondent, que les contrats innomés sont soumis comme les contrats nommés à la théorie générale des contrats[67]. Il en résulte une nécessaire conformité des intérêts contractuels particuliers à certains préceptes constituant dans la théorie générale des obligations, l’expression d’impératifs supérieurs. Comme l’écrit un auteur, « l’efficacité du contrat innomé demeure sous la dépendance de la contrainte étatique »[68]. Nommés ou innomés, les actes juridiques ne sont donc efficaces qu’en vertu d’une concession de la loi.

 

Il n’en demeure pas moins, que la théorie des contrats innomés « permet la diversification des types contractuels eux-mêmes »[69]. La garantie autonome en est un exemple, elle permet d’échapper aux règles même impératives propres au cautionnement, ce qui explique son succès. La consécration de cet engagement en droit français vient redorer quelque peu le blason du principe de liberté contractuelle.

 

Mais, à vrai dire, le problème de la qualification de cet engagement ne doit pas être exclusivement abordé sous l’angle du pouvoir créateur des volontés individuelles. Le contentieux abondant suscité par cette question ainsi que les nombreuses requalifications d’engagements intitulés « garantie autonome » en cautionnement relèvent très souvent en réalité d’une mauvaise compréhension de ce mécanisme.

 

Si les parties sont libres de choisir un cadre contractuel distinct de ceux prévus par le Code civil, cela ne s’effectue pas sans conditions, il faut notamment, que ce nouveau moule contractuel soit véritablement original et nouveau par rapport aux contrats voisins et qu’il respecte les conditions générales de validité des conventions. La volonté n’est donc pas toute puissante, elle ne peut pas faire produire à un acte intitulé garantie autonome, mais correspondant en réalité à un cautionnement, les effets d’une garantie autonome.

Autrement dit, elle ne peut pas obtenir l’application du régime juridique propre à la garantie autonome, si l’acte n’en a que le nom.

 

Les difficultés de qualification de cet engagement sont surtout dues, à la relative nouveauté du procédé en droit français,  qui a entraîné une certaine incompréhension de ce mécanisme et s’est notamment traduite par le fait qu’une définition claire et cohérente a mis longtemps à émerger.

Les juges, confrontés à ce type d’engagements, se sont alors vus dotés, d’un large pouvoir d’appréciation, ce qui a entraîné des requalifications d’actes à plus ou moins bon escient. Une impression d’action concurrente du juge, parfois hostile à la généralisation des garanties autonomes en droit interne, a alors pu être ressentie. La qualification d’un tel engagement apparaîtrait tout à fait aléatoire, fonction de la volonté du juge.

 

Pour notre part, admettant que, « pour l’essentiel…, la qualification est une question de droit soustraite au caprice des particuliers,…puisqu’il appartient au juge de restituer au contrat sa qualification véritable sans s’arrêter à la dénomination choisie par les parties et il appartient au juge du droit de rectifier l’erreur commise par les juges du fond dans la qualification des faits de l’espèce » [70], nous nous attacherons à montrer, que les parties ne sont pas pour autant passives[71], bien au contraire.

Il ne s’agit pas dans le cadre de cette étude, d’énoncer que les qualifications sont le fait des parties, en raison de l’autonomie de leur volonté, mais plutôt, de mettre en évidence, qu’en raison de caractères propres à la garantie autonome, lorsque les parties ont soigneusement défini leur engagement, le juge ne peut, venir substituer sa volonté à la leur. Nous observerons par ailleurs, que rien ne s’oppose à la reconnaissance de la validité de cette convention en droit français, en ce sens, le principe de liberté contractuelle est présent.

Autrement dit, alors même qu’il serait foncièrement hostile à cette convention en droit interne, le juge ne pourra pas procéder à sa requalification, sous peine de voir sa décision censurée par la Cour de Cassation.

 

Toutefois, les éléments de qualification de la convention de garantie autonome sont très stricts et rigides, c’est-à-dire qu’ils doivent être respectés scrupuleusement par les parties, faute de quoi l’acte apparaîtra ambigu, et pourra alors être interprété voire requalifié. Mais dans le même temps, cette rigidité des éléments de qualification, leur caractère objectif, c’est-à-dire, qu’ils ne reposent pas en principe sur une recherche d’intention des parties, tend à limiter l’intervention du juge notamment pour interpréter la convention. Une telle intervention pourrait en effet, venir déjouer les prévisions des parties, car comme l’écrit F. Terré[72] dans ce cas, « Le juge substitue à la volonté des particuliers ses propres conceptions. C’est la conséquence inéluctable de toute interprétation ».

Si les parties respectent ces éléments de qualification, la marge d’appréciation du juge sera faible, et la volonté des contractants de conclure une garantie autonome plutôt qu’un cautionnement consacrée.

 

Lorsque les parties ont soigneusement défini leur convention, le juge ne peut donc s’opposer à leur volonté de conclure une garantie autonome. En ce sens, elles disposent d’une maîtrise de principe de la qualification (TITRE I). Toutefois, la large confusion subsistant, même si le droit positif semble engagé sur la voie de la clarification, quant à la notion même de garantie autonome, est susceptible de conduire à un éventuel contrôle judiciaire de la qualification (TITRE II).

L’ambiguïté ou la confusion redonne alors au juge un certain pouvoir d’appréciation, dont les termes de la lettre de garantie, s’ils avaient été précis, auraient du en principe le déposséder.

 

 

 

 

 

 

 


 

 

                                       TITRE I

 

 

 

                        UNE MAITRISE DE PRINCIPE DE LA QUALIFICATION DE

 

       GARANTIE AUTONOME PAR LES PARTIES

 

 

 

 

 

Nous avons pu l’évoquer, les enjeux de la qualification sont très importants, puisque de la qualification découle le régime juridique applicable.

Si le code civil ne prévoit qu’une sûreté personnelle, le cautionnement[73], celle-ci est inadaptée aux réalités économiques actuelles, M. Simler a pu écrire en ce sens, « Le Code civil réglemente, aujourd’hui, un cautionnement ignoré de la pratique, qui n’existe plus guère que dans les cas  où la loi ou le juge exige du débiteur qu’il fournisse caution »[74].

Aussi, la pratique cherche t-elle à échapper à cette qualification légale afin de renforcer la position du créancier. Si des voix se sont élevées contre l’admission en droit interne de la garantie autonome, nous verrons qu’en droit strict, rien ne s’y oppose. Le choix de la qualification de garantie autonome apparaît donc libre (Chapitre I).

 

Le choix d’une sûreté  telle que la garantie autonome est orienté tout entier vers l’application d’un régime juridique dérogatoire au cautionnement et sur lequel, les éléments de qualification que nous aurons mis en évidence ont un impact certain. Les contractants disposant d’une certaine liberté quant au choix d’une qualification de garantie autonome, le régime juridique de celle-ci découle fort logiquement pour une grande part, même si cela peut n’être qu’indirect, de leur volonté (Chapitre II).

 

 

 

 

 

                                                        CHAPITRE I

 

 

                            DU LIBRE CHOIX DE LA QUALIFICATION

 

                                          DE GARANTIE AUTONOME

 

 

 

Le code civil ne prévoit donc, qu’une forme de sûreté personnelle, mais il n’a pas pour autant entendu en interdire la création de nouvelles, telle la garantie autonome.

 Aussi nous verrons dans un premier temps, que les justiciables peuvent librement s’affranchir du cadre légal propre au cautionnement et souscrire une garantie autonome, en raison de la validité de cette convention en droit interne (section 1).

 Puis nous observerons dans un second temps, que la validité et l’originalité de la garantie autonome trouvent leurs sources dans la théorie des contrats innomés, dont cette nouvelle sûreté personnelle non accessoire est indiscutablement, tout du moins à son origine, une application (section 2). Théorie des contrats innomés, qui nous le verrons, peut venir expliquer les critères de qualification actuels de cette convention.

 

 

 

 

SECTION 1. VALIDITE DE LA GARANTIE AUTONOME EN DROIT INTERNE

 

 

 

Le principe de liberté contractuelle doit conduire a priori, à admettre la validité de la convention de garantie autonome. Toutefois, quelques interrogations ont pu naître en droit interne sur ce point, d’une part en raison de la rupture du lien d’accessoire ainsi opérée avec l’obligation principale, rupture dont il nous faut apprécier la portée (§1), afin d’examiner si elle a pour effet de priver de validité cette convention, d’autre part, les opposants à la garantie autonome ont pu faire valoir qu’elle était l’instrument d’une fraude à la loi (§2), visant à contourner les dispositions protectrices de la caution.

 

 

 

§1.PORTEE DE LA RUPTURE DU LIEN D’ACCESSOIRE

 

 

 

Dans ce cadre, nous serons tout d’abord conduit à constater qu’il n’existe en droit interne, aucun principe d’ordre public « d’accessoriété » des garanties, qui serait de nature à empêcher la conclusion d’une garantie autonome. Mais cette rupture du lien d’accessoire suscite plus d’interrogations quant à la cause de la convention. En effet, si la garantie autonome n’est pas, contrairement au cautionnement, l’accessoire du contrat de base, a t-elle une cause ? Et dans l’affirmative, où celle-ci peut-elle être identifiée ?

 

 

 

A. L’absence d’un principe d’ordre public « d’accessoriété » des

     garanties

          

 

En principe, la constitution d’une sûreté suppose l’existence d’une créance à garantir, elle ne peut exister indépendamment de celle-ci et en suit normalement le sort. L’exemple type est le cautionnement, dont le caractère accessoire est généralement considéré comme insusceptible d’être écarté par les parties, ainsi, l’article 2012 al 1 du code civil qui dispose, « …au cas de nullité de l’obligation principale, le cautionnement n’est pas plus valable que celle-ci », est impératif.

 

 Mais comme l’écrivent MM. Gavalda et Stoufflet[75], « le principe de l’accessoire est un élément essentiel du cautionnement, mais il ne répond à aucune norme de portée générale qui imposerait d’en étendre l’autorité à d’autres figures juridiques »[76]. Autrement dit, si le caractère accessoire est de l’essence du cautionnement, il n’a pas pour autant valeur de règle d’ordre public devant régir toute la matière des sûretés personnelles[77]. De la même manière, pour M. Simler[78], la liberté des conventions permet de prendre des engagements qui, tout en ayant pour fonction de garantir une créance, excluent néanmoins ce caractère accessoire. Caractère qui établit, un lien permanent entre le sort de l’obligation de la caution et celui de l’obligation principale, ce qui se traduit par le principe de l’opposabilité des exceptions, alors qu’en matière de garantie autonome du fait de l’absence d’un lien d’accessoire, le sort de la garantie autonome n’est pas lié à celui de l’obligation garantie.

 

Cette « non accessoriété » des garanties autonomes n’a pas toujours été admise[79], et ce, au motif qu’il n’existerait qu’une seule forme de sûreté personnelle, le cautionnement accessoire.

Cela ne se justifiait pas, en effet, l’un des premiers commentateurs du code civil[80]énonçait déjà que, « rien n’empêche de se porter fort pour des faits qui ne sont pas susceptibles de tomber sous l’empire du cautionnement ». La loi elle-même, avec l’article 2012 al.2 du code civil, reconnaît la possibilité de cautionner la dette d’un incapable et invite dès lors à admettre un type de sûreté personnelle différent du cautionnement et qui aurait pour objet de garantir l’obligation principale, même contre les risques d’annulation[81].

Toutefois, le lien d’accessoire n’est pas totalement rompu. En effet, toute sûreté implique nécessairement une obligation à garantir, aussi nous observerons au cours de cette étude qu’un certain lien subsiste, notamment eu égard, aux éventuelles références au contrat de base présentes dans l’acte de garantie, ainsi qu’au principe de l’inopposabilité des exceptions, qui nous le verrons n’est pas absolu.

 

Si comme nous venons de l’évoquer, le caractère accessoire du cautionnement n’a pas valeur de règle d’ordre public, le problème se déplace quant à la validité des garanties autonomes. En effet, généralement, la créance garantie apparaît comme la cause de la constitution d’une sûreté, aussi, il est possible de se demander si une sûreté non-accessoire comme la garantie autonome, détachée de la créance à garantir doit être considérée comme manquant de cause, et donc comme non valable au regard des principes de l’ordre juridique français.

 

 

            B. L’existence d’une cause de la garantie issue du contrat de base

 

 

L’existence d’une cause de la garantie autonome a suscité une controverse, entre ceux considérant qu’il s’agissait là d’un acte abstrait, et ceux pour qui, la garantie autonome respecte la tradition causaliste française. Toutefois, nous verrons que cette opposition n’est pas forcément irréductible, la difficulté consistant plus à déterminer quelle est cette cause de la garantie autonome, et le rôle qu’elle peut être amenée à jouer.

 

 

1.           La controverse acte causé / acte abstrait

 

 

L’existence de sûretés accessoires telle la garantie autonome a renouvelé le débat quant à l’existence d’actes abstraits, c’est-à-dire, des actes dont la validité serait détachée de leur cause.

Pour MM. Ripert et Boulanger[82], l’acte abstrait « est un acte qui se suffit à lui–même sans qu’il soit nécessaire d’en rechercher la cause. Il ne sera donc pas permis de démontrer l’absence de cause pour obtenir l’annulation de cet acte »[83].

Le droit romain connaissait l’acte abstrait[84]. Les effets éventuellement injustes d’un tel acte peuvent généralement être corrigés par l’idée d’enrichissement sans cause. Ce que faisaient déjà les romains au moyen de la condictio sine causa.

Mais il est généralement considéré que le droit français répugne à en admettre la validité. C’est pourquoi, nous verrons que la majorité de la doctrine considère la garantie autonome comme un acte causé. Ainsi selon Ph. Simler, il ne s’agit pas là d’un acte abstrait[85], mais d’un acte causé soumis au droit commun, même si son caractère autonome réduit sensiblement le rôle de la cause.[86]Cette conception est largement partagée[87], il est généralement objecté à l‘encontre des actes abstraits qu’ils seraient contraires à l’article 1131 du code civil[88].

Il a par ailleurs été fait valoir, que seule la loi pourrait autoriser de tels actes[89], mais il est possible d’objecter à cet argument que le virement bancaire, le mécanisme de la carte de crédit et surtout, le crédit documentaire irrévocable, dont la parenté avec la garantie autonome est souvent soulignée, peuvent apparaître comme des engagements abstraits, alors même qu’ils ne sont pas prévus par la loi[90].

Selon cette conception majoritaire, l’inopposabilité des exceptions n’induirait pas la qualification d’acte abstrait, cet effet de la garantie autonome pouvant s’expliquer par un raisonnement sur l’action des parties à l’égard de la cause de l’engagement, ce dont nous traiterons plus loin au cours de cette étude.

 

Quant à la Cour de Cassation, force est de constater qu’elle n’a pas souhaité prendre part au débat[91]. Dans les deux arrêts de la Chambre commerciale  du 20 décembre 1982, la question de l’influence d’une l’allégation de nullité entachant le contrat de base sur la validité de l’engagement de garantie se posait, et à travers cela, la question de la cause de cet engagement.

 La Haute Cour ne s’est pas prononcée sur la cause, elle a jugé que, « même si l’engagement de la banque avait pour cause le contrat de base dont la nullité était alléguée, la banque, en raison de son engagement de payer à première demande, ne pouvait se dérober à cette obligation »[92]. L’emploi du conditionnel par la Haute Cour est ici significatif. Mais elle n’a pas pour autant énoncé qu’il s’agissait là d’un acte causé. En effet, cette décision peut tout à fait se concilier avec la conception causaliste, comme avec la notion d’acte abstrait telle qu’elle est défendue par certains auteurs.

 

La théorie de l’abstraction a pu très tôt, être soutenue par d’éminents auteurs[93]. Mais elle n’a globalement pas été retenue en droit français, contrairement à d’autres pays occidentaux comme l’Allemagne, après Savigny[94] ou la Belgique[95].

 Pour autant, certaines opérations impliquant trois personnes sont considérées par une partie de la doctrine comme des dérogations à cette prohibition de principe[96], il s’agit principalement, du cautionnement, de la délégation, et des titres négociables[97]. Mais la tendance moderne, va toutefois dans le sens d’un rétrécissement de la catégorie des actes abstraits. En effet, si la nature abstraite des titres négociables est à peu près incontestée, ce n’est pas le cas pour le cautionnement ni même pour la délégation, lorsqu’il s’agit d’une délégation imparfaite[98].

 

La garantie autonome est, elle aussi, une opération impliquant trois personnes, et elle emprunte la plupart de ces caractéristiques principales à chacune des figures juridiques évoquées plus haut. Il est donc possible de se demander si le faible impact de la notion de cause quant à la validité de la garantie autonome ne serait pas dû à sa nature abstraite. D’ailleurs, les auteurs causalistes concèdent, que l’indépendance de la garantie autonome à l’égard des effets du contrat de base la rapproche singulièrement d’une obligation abstraite[99]. Cette théorie de l’abstraction a même parfois pu être enviée pour sa simplicité[100].

 

Il faut remarquer qu’en droit belge, la Cour de Cassation belge ne considère pas la garantie autonome comme un acte abstrait[101], ce qui n’est pas le cas de la majorité de la doctrine[102]. Ainsi, selon P. Van Ommeslaghe[103], « la pratique a en effet crée pour les besoins de la vie des affaires particulièrement, des actes abstraits de leur cause, indépendamment de toute intervention positive du législateur, par le jeu de l’autonomie de la volonté. Ces actes répondent à des nécessités certaines, ils sont utilisés fréquemment et ne présentent aucun inconvénient, ils traduisent un besoin de sécurité juridique et de rapidité des transactions comme les actes déjà organisés par la loi positive »[104]. En droit allemand[105] et autrichien[106], la garantie autonome serait là aussi majoritairement analysée comme un acte abstrait[107].

 

C’est peut être tout cela, qui a incité certaines juridictions[108]et quelques auteurs[109] à opter pour la qualification d’acte abstrait. Mais pour cette partie minoritaire de la doctrine, l’acte abstrait n’est pas un acte sans cause, « il peut se définir comme un acte normalement causé, mais dont l’absence éventuelle de cause n’influerait pas sur la validité »[110]. L’acte est valable indépendamment de sa cause, ce qui ne signifie pas qu’il soit sans cause. Les termes « abstrait » ou « causal » ne correspondent pas dans cette optique à la présence ou à l’absence d’une cause dans la catégorie d’actes considérés, mais au rôle de cette cause, à son influence sur l’engagement du débiteur.

 

On retrouve là, la conception d’Alfred Rieg, pour qui « l’acte abstrait n’est pas dépourvu de cause, il en est seulement détaché, un acte abstrait est d’abord un acte causé »[111]. Or, la plupart des auteurs confondent trop souvent acte abstrait et acte sans cause. Lorsqu’ils font le choix entre acte abstrait et causé, ils sont conduits à énoncer qu’il s’agit d’un acte causé, précisément car il a une cause[112].

Pour les tenants de l’acte abstrait, le débat ne se pose pas en ses termes, l’acte abstrait a une cause. L’article 1131 du code civil n’est donc pas un obstacle, et celle-ci conserve  un rôle, notamment dans le cadre des recours après paiement[113]. Mais avant le paiement, l’exception pour défaut de cause ne peut être invoquée par le débiteur[114].

 

 L’acte abstrait aurait alors pour fonction d’assurer la sécurité et la rapidité des transactions, en sacrifiant temporairement les impératifs de protection du débiteur[115].

Comme l’explique un auteur[116], on comprend, que le droit civil français, tout entier orienté vers la protection du débiteur soit si réticent à l’égard des actes abstraits, et que cette notion soit reçue plus facilement en droit cambiaire, ou les impératifs de sécurité et de rapidité du paiement priment souvent les intérêts du débiteur. Or, la parenté entre la garantie autonome et certains engagements cambiaires tel que l’ouverture de crédit documentaire irrévocable est certaine, et les impératifs de sécurité et de rapidité des paiements sont identiques, notamment dans le cadre du commerce international.

 

Une conciliation est donc possible entre les tenants de l’abstraction et les auteurs souhaitant intégrer la garantie autonome dans le système causaliste français classique, pour autant, affirmer que quoi qu’il en soit, il s’agirait d’un acte causé, ne résout pas toutes les interrogations, encore faut-il déterminer quelle-est cette cause.

 

 

2.      Détermination de la cause de la garantie autonome

 

 

Dans ce cadre, il s’agit de s’intéresser à la cause de l’obligation ou cause objective, réputée toujours la même pour une catégorie donnée de contrats. La cause subjective ou cause du contrat ne présente pas de spécificités particulières en la matière, mais nous aurons l’occasion de voir par la suite, qu’elle peut toutefois constituer un obstacle à une indépendance totale de la garantie indépendante. Elle sera donc envisagée dans la partie de l’étude consacrée au régime juridique de la garantie autonome.

 

 Il est ici question de l’existence de la cause objective en tant que condition de validité des conventions, et la garantie autonome doit avoir une cause, conformément aux exigences de l’article 1131 du code civil. Mais l’identification de cette cause est rendue difficile, par le fait qu’il s’agit là d’un contrat unilatéral portant engagement de payer une somme d’argent. La cause d’un tel engagement doit alors être recherchée en dehors du contrat lui-même[117].

 Deux positions se sont affrontées. Pour la doctrine majoritaire, la cause de l’engagement du garant doit être recherchée dans la relation donneur d’ordre-bénéficiaire c’est-à-dire, dans le rapport fondamental. Mais une partie minoritaire de la doctrine considère quant à elle, que la cause de l’engagement du garant se situe dans les relations garant-donneur d’ordre.

a.      La conclusion du contrat de base, cause de l’engagement du garant

 

 

 

Cette opinion majoritaire en doctrine a pu être relayée par quelques exemples jurisprudentiels[118]. Pour ces auteurs[119], la fonction de sûreté de la garantie autonome induit que celle-ci soit constituée en fonction du contrat de base. « Si le garant s’oblige envers le bénéficiaire, c’est pour que celui-ci consente au donneur d’ordre l’avantage subordonné à la constitution de la garantie : acceptation de la soumission, paiement d’un acompte, signature du marché, octroi du crédit »[120].

Par transposition avec la solution admise en matière de cautionnement[121], un auteur[122]considère de manière voisine, que l’engagement du garant trouve donc sa cause, dans la considération par le banquier du contrat de base à conclure. On remarquera, que pour l’un des auteurs voyant dans la garantie autonome un acte abstrait[123], la cause de l’engagement du garant se situe là aussi dans les relations donneur d’ordre-bénéficaire.

  

Certains opposants à la garantie autonome comptaient déduire de ce constat, que la nullité, la résiliation ou la résolution du contrat de base devait entraîner la caducité de la garantie, et ce par transposition de la solution admise en matière de cautionnement.

Rejetant cette conséquence, cette doctrine considère que l’indépendance et l’autonomie de l’engagement du garant s’expliquent par l’autonomie de la volonté et la liberté contractuelle. Rien ne s’oppose d’après ces auteurs, à ce que les intéressés usent de leur liberté pour définir autrement la cause de l’engagement du garant et réduire cette cause à l’essentiel. Le lien causal entre le contrat de base et l’engagement de garantie serait alors coupé[124], le contenu de la cause faisant ici l’objet d’un aménagement conventionnel entre les parties.

 

Pour autant, la Cour de Cassation dans les deux arrêts de 1982, n’a pas exclu que l’obligation du garant trouve sa cause ailleurs que dans le contrat de base, elle ne s’est pas prononcée sur ce point. Aussi, une partie minoritaire de la doctrine estime, que c’est dans le rapport d’ordre qu’il faut rechercher la cause de l’engagement du garant.

 

 

 

 

 

 

 

                       b. La cause de la garantie autonome dans les relations garant-donneur d’ordre                             

                          

 

Pour certains auteurs[125], c’est en effet dans les rapports entre le garant et le donneur d’ordre que l’on peut identifier la cause de l’engagement du garant à l’égard du bénéficiaire.

 Ces auteurs, alors même qu’ils admettent qu’il n’y aurait pas d’engagement de garantie sans contrat de base, considèrent, que l’engagement du garant trouve sa cause uniquement dans les rapports de celui-ci avec le donneur d’ordre, à savoir dans l’engagement corrélatif du donneur d’ordre, d’une part, de le rembourser après versement éventuel du montant de la garantie, d’autre part, de lui payer la commission prévue. Cette vision des choses aboutit à la conséquence séduisante, que tous les évènements menaçant le contrat de base ne se répercutent pas sur le contrat de garantie.[126]

 

Ainsi pour M. Aynès[127], la garantie autonome n’est pas une obligation abstraite, et la cause de l’engagement du garant ne se trouve pas dans le contrat principal. Selon cet auteur, le contrat principal constitue la cause efficiente du contrat de garantie, le garant s’obligeant parce qu’il existe une obligation principale. Mais cette obligation principale n’est pas le but qu’il se donne en s’obligeant, c’est-à-dire que ce n’est pas là, la cause finale de l’engagement du garant. Cette cause se trouve dans la relation liant le garant au débiteur, et consiste notamment dans la rémunération versée par celui-ci. Il en conclut, que la différence entre le cautionnement et la garantie autonome ne réside pas dans la cause de l’engagement mais dans l’objet de cet engagement, et cette autonomie de l’objet de l’engagement du garant justifie l’inopposabilité des exceptions.

 

Mais de sérieuses objections ont pu être émises à l’encontre de cette théorie[128]. Il a été fait valoir, que si la considération de la rémunération et du remboursement tient sûrement lieu de cause du contrat entre le garant et le donneur d’ordre, elle aura de ce seul fait, constitué un motif déterminant de l’engagement du garant envers le bénéficiaire constitutif du contrat de garantie stricto sensu. Mais il s’agit là d’un motif personnel au garant, étranger au bénéficiaire de la garantie.

Cette proposition aurait aussi l’inconvénient de lier la validité de la garantie aux prestations fournies par le donneur d’ordre, ce que le bénéficiaire ne saurait accepter[129].

 

Aucune de ces deux conceptions de la cause de la garantie autonome ne fait donc l’unanimité, c’est certainement ce qui a conduit certains auteurs[130] à recourir à la théorie de l’acte abstrait pour gommer ces contradictions, liées à la tradition causaliste française.

Le rejet quasi-unanime de la théorie de l’abstraction pour expliquer le mécanisme de la garantie autonome se fonde généralement sur la prétendue contradiction des actes abstraits avec l’article 1131 du code civil. Toutefois, on a pu observer que l’acte abstrait n’est pas réellement un acte sans cause, c’est un acte détaché de sa cause. Mais l’acte abstrait introduit, il est vrai, un déséquilibre important dans le contrat. Pour autant, le droit français en connaît quelques exemples, même si ce point est discuté en doctrine. Enfin, certains auteurs[131] ont pu montrer, contrairement a ce qui peut-être soutenu par une partie de la doctrine[132], que la cause conserve un rôle en la matière, et que l’abstraction n’est jamais absolue.

 

Dans le cadre des relations contractuelles bilatérales, il apparaît que l’obligation est nécessairement causée, le débiteur peut se soustraire à son engagement en prouvant l’absence de cause. Mais il n’en va pas de même lorsque « l’obligation contractée a sa cause dans un rapport juridique existant entre le débiteur et une tierce personne »[133]. Il s’agit en fait des rapports impliquant trois personnes : le débiteur ou promettant, le tiers et le créancier. C’est le cas par exemple, de la délégation parfaite, des titres négociables ou même du cautionnement[134]. Or la garantie autonome semble correspondre assez bien à ce type de schéma, et cela permettrait d’échapper aux contradictions découlant des théories voulant l’intégrer dans un schéma causaliste strict.

 

Quoi qu’il en soit, la garantie autonome a une cause, et ce, que l’on penche pour la qualification d’acte « abstrait » ou pour la qualification d’acte « causé », même si le lien entre l’obligation du garant et la cause de celle-ci est particulièrement ténu. Cette sûreté personnelle non-accessoire n’est donc pas contraire aux exigences de l’article 1131 du code civil, de ce point de vue, rien ne s’oppose à sa validité.

 

Mais comme a pu l’écrire un auteur[135], force est de reconnaître que « le rôle de la cause objective en matière de garantie autonome, est inversement proportionnel au débat que cette notion a suscité ». En effet, si la cause objective réside dans la conclusion du contrat de base, peu importe que celui-ci ne vienne jamais à existence ou même qu’il soit annulé. Le garant ne peut pas pour autant déroger à son obligation, car en conférant à son engagement un caractère autonome, il a renoncé à opposer quelque exception que ce soit tenant au contrat de base, et c’est bien ce qu’à énoncé la Cour de Cassation dans ses deux arrêts du 20 décembre 1982.

Peu importe en définitive, que la cause de l’engagement du garant réside dans les relations donneur d’ordre-bénéficiaire ou dans les relations garant-donneur d’ordre ou même qu’il s’agisse d’un acte abstrait. En raison de la nature même de la garantie autonome, le garant ne peut échapper à son obligation en alléguant un vice affectant le contrat de base, et donc un vice quant à la cause de sa propre obligation.

 

 Il est possible par certains moyens d’échapper au caractère inconditionnel de la garantie autonome, notamment par le biais de la notion d’appel manifestement abusif ou éventuellement en se fondant sur la cause subjective de la garantie autonome, mais nous étudierons ces hypothèses dans le cadre du régime juridique de la garantie autonome. Il s’agissait en effet ici, de s’intéresser à la validité de principe de la garantie autonome dans l’ordre juridique français, et non aux cas particuliers.

Sur le terrain de la cause de l’obligation, rien ne semble donc s’opposer à la reconnaissance a priori de la validité de la garantie indépendante. Mais une autre objection a été émise. Des auteurs se sont en effet interrogés sur le point de savoir si la garantie autonome ne pouvait pas être utilisée comme instrument d’une fraude à la loi.

 

 

             §2. L’ABSENCE DE FRAUDE A LA LOI

 

 

Nous observerons tout d’abord, que la théorie classique de la fraude à la loi est a priori inapplicable dans le cadre de la garantie autonome (A), puis nous serons conduit à nous interroger s’il en est de même lorsque la garantie autonome vient se substituer à un cautionnement légal ou judiciaire(B).

 

 

 

A. L’inapplicabilité a priori de la théorie de la fraude à la loi

 

 

L’argument tiré d’une fraude à la loi a été invoqué dans le cadre des garanties autonomes de droit interne, souscrites par des personnes physiques non commerçantes, en lieu et place du traditionnel cautionnement. Il a pu être prétendu que cela permettait d’éluder les dispositions protectrices bénéficiant aux cautions, la garantie autonome étant alors l’instrument d’une fraude.

Mais la Cour de Cassation n’a jamais adhéré à ce raisonnement[136], et considère qu’il n’y a pas fraude à la loi dans une telle hypothèse. Cette position est tout à fait justifiée, en effet, selon M. Vidal[137], « il y a fraude chaque fois que le sujet de droit parvient à se soustraire à l’exécution d’une règle obligatoire par l’emploi, à dessein, d’un moyen efficace, qui rend ce résultat inattaquable sur le terrain du droit positif ». Comme l’écrit M. Le Dauphin[138], la fraude à la loi suppose donc qu’une personne qui tombe sous l’empire d’une règle objectivement applicable crée artificiellement, pour éluder cette règle, les conditions d’application d’une autre règle qui neutralise la précédente. Or, lorsque des contractants conviennent de la conclusion d’une garantie autonome, les dispositions relatives au cautionnement ne leur étaient pas objectivement applicables, de sorte qu’il n’y a pas fraude à la loi à ne pas vouloir que la sûreté personnelle qu’ils ont mis en place soit gouvernée pas ces règles.

 

Le principe de liberté contractuelle conduit à considérer que les justiciables peuvent choisir le type de sûreté personnelle qui s’adapte le mieux à leurs intérêts, la loi n’ayant pas entendu faire du cautionnement la seule sûreté personnelle possible[139].

Il n’y a pas non plus lieu de réserver l’utilisation des garanties autonomes à certaines catégories de contractants[140], les personnes physiques non commerçantes peuvent souscrire en droit interne de telles garanties sans pour autant qu’il y ait une quelconque fraude à la loi. C’est précisément ce qu’a jugé la Cour de Cassation dans son arrêt du 13 décembre 1994[141], pour réagir à l’encontre de certaines décisions de juridictions du fonds très hostiles à l’égard de ce type de garantie autonome[142].

 

 Cette sûreté personnelle non accessoire est donc valable en droit interne et ce, quelle que soit la personne qui la souscrit. Toutefois, la question s’avère plus délicate, lorsque c’est la loi qui prescrit la fourniture d’une caution (cautionnement légal) ou lorsqu’elle vient autoriser le juge à exiger un cautionnement (cautionnement judiciaire).

 

 

 

 

 

 

 

                B. La garantie autonome substitut d’un cautionnement légal ou judiciaire

 

 

Pour des auteurs de plus en plus nombreux, si la licéité de la garantie autonome ne doit faire aucun doute en droit interne, même lorsque cette garantie est constituée  en lieu et place d’un cautionnement, cela doit être réservé au cautionnement conventionnel. C’est-à-dire, comme l’écrit un auteur[143], « celui qui garantit une obligation qui est elle-même conventionnelle et pour laquelle le créancier est maître des sûretés qu’il entend obtenir ».

Mais en matière de cautionnement légal ou judiciaire, le bénéficiaire de cette sûreté ne pourrait en exiger une autre que celle prévue par le texte. Ainsi, si un cautionnement simple est prévu, le créancier ne peut exiger un cautionnement solidaire, a fortiori, il ne peut pas exiger la fourniture d’une garantie autonome.

 

 C’est ce qui a pu être jugé par la Cour de Cassation à propos de la loi d’ordre public du 16 juillet 1971 relative aux retenues de garantie en matière de marchés de travaux, qui prévoit qu’il est possible d’échapper à cette retenue de garantie au profit du maître de l’ouvrage en lui substituant un cautionnement[144]. Néanmoins, la Haute Cour a par la suite pu ajouter, que cette loi n’interdit pas qu’un établissement financier consente une garantie autonome, sans lien avec l’exécution des travaux et ne venant pas se substituer à la retenue de garantie[145].

 

Pour certains auteurs, il devrait en aller de même en matière de crédit à la consommation où les dispositions du Code de la consommation issues de la loi « Neiertz » du 31 décembre 1989, prescrivent un formalisme particulier, à peine de nullité, pour les cautionnements couvrant ce type d’opérations. Pour ces auteurs[146], le dispositif protecteur de la caution ne doit pas pouvoir être éludé par un simple recours à une garantie autonome.

 

Mais cette position ne fait pas forcément l’unanimité. Il est possible de faire valoir, qu’en matière de crédit à la consommation, recourir à une garantie autonome n’est pas constitutif d’une fraude, mais d’une habileté[147]. Certains auteurs[148] considèrent donc qu’une garantie autonome peut valablement, venir couvrir un crédit à la consommation[149].

 

 Dans le même sens, nous allons maintenant observer, qu’à l’origine, la garantie autonome constitue indiscutablement un contrat innomé. Or la théorie de l’innomé,  lorsque le contrat est véritablement autonome par rapport aux contrats voisins, « permet d’échapper à des règles impératives, sans qu’il y ait de ce fait la moindre fraude, mais simplement un résultat de l’habileté » [150].

Les règles propres au cautionnement ne sont pas applicables car elles supposent l’existence d’éléments qui ne sont pas réunis. Aussi, sommes nous conduits à considérer qu’en matière de crédit à la consommation, si le législateur a entendu réglementer strictement le cautionnement, il n’a pas pour autant eu la volonté d’empêcher l’éclosion de nouveaux contrats innomés telle la garantie autonome. Cette nature originairement innomée de la garantie autonome, va permettre de révéler les éléments de qualification de cette convention, c’est-à-dire ses critères de qualification.

 

 


 

SECTION 2. LA GARANTIE AUTONOME, UN CONTRAT ORIGINAIREMENT

                       INNOME

 

 

Selon F. Terré, « L’avènement de qualifications innomées signifie un dépassement des qualifications préétablies. Devant l’insuffisance de celles-ci, les volontés individuelles imaginent de nouveaux cadres, seuls capables de promouvoir les buts poursuivis »[151]. Dans cette optique, une doctrine quasi-unanime définit la garantie autonome comme un contrat sui generis ou innomé[152].

 Il sera possible de voir par la suite, que s’il s’agit bien là, d’un contrat autonome et original, par rapport aux cadres contractuels prévus par la loi, le régime juridique de cette convention est assez précisément défini, de sorte qu’il est possible de douter de la pertinence actuelle de cette qualification de contrat innomé.

Pour autant, à l’origine, la garantie autonome est assurément une structure innomée, c’est ce qu’il s’agira tout d’abord de démontrer, en examinant si la garantie autonome répond aux conditions de reconnaissance du contrat innomé (§1), ce qui permettra par la suite de constater, que c’est de cette nature innomée de la garantie autonome, que découle les principes actuels de qualification de cette convention (§2).

 

 

 

       §1.LES CONDITIONS A LA RECONNAISSANCE DE LA GARANTIE AUTONOME

            EN TANT QUE STRUCTURE INNOMEE

 

 

Comme tout contrat, le contrat innomé doit respecter les conditions générales de validité des conventions, mais plus spécifiquement, les conditions de reconnaissance d’un contrat innomé sont de deux ordres ; certaines sont variables et apparaissent au travers de la comparaison avec les contrats nommés voisins du contrat à qualifier (A). Mais il existe une condition constante, à savoir l’autonomie effective de ce contrat par rapport à ces contrats nommés de référence, sans quoi il n’y aurait pas innomé (B).

 

 

 

A.         L’incidence des contrats nommés voisins

 

 

Envisager les contrats nommés servant de référant à la garantie autonome conduit immanquablement à évoquer le cautionnement. On est là en présence de deux sûretés personnelles, et le cautionnement est la seule de ce type à figurer au titre des contrats nommés par le Code civil.

 

Il aurait été possible de raisonner par rapport à la délégation, prévue à l’article 1275 du code civil. Mais la délégation telle qu’elle est envisagée par le code civil, n’est qu’un mode d’extinction des obligations. Certes, les effets de la garantie autonome et de la délégation, lorsque celle-ci est utilisée sous la forme d’une sûreté personnelle, sont très proches[153]. Mais ce type de délégation est moins fréquemment utilisé que la garantie autonome et quelques doutes subsistent quant à son régime juridique, notamment en ce qui concerne l’inopposabilité des exceptions. Il semble donc difficile de l’élever au rang de contrat nommé de référence pour la qualification de la garantie autonome.

Il en va de même pour le constitut qui, s’il fait sa réapparition en droit positif[154], ne peut servir de référant à la garantie autonome de par sa faible utilisation.

 

Les contrats voisins d’un contrat innomé peuvent avoir une assez forte incidence sur la qualification de celui-ci. C’est par rapport à ces contrats voisins que l’autonomie effective du nouveau contrat sera mise à l’essai. Mais plus incidemment, ces contrats voisins font ressortir trois caractères de l’innomé, qui sont autant de conditions à sa reconnaissance.

Ainsi, pour F. Terré[155], « l’innomé présente trois caractères fondamentaux : un caractère subsidiaire, un caractère relatif, un caractère transitoire ».

 

La qualification de contrat innomé est tout d’abord subsidiaire, au sens ou cette qualification ne sera reconnue que s’il est vraiment impossible de faire rentrer le contrat en cause dans une catégorie préexistante. On retrouve ici la tendance naturelle du juriste à rattacher la convention qu’il doit qualifier à une classification préexistante, tendance qui explique peut être les opinions doctrinales tendant à considérer la garantie autonome comme une variété de cautionnement.

 Ce caractère subsidiaire se comprend du point de vue de la technique juridique. Il est inutile de consacrer l’existence d’un contrat innomé lorsque le contrat en cause peut rentrer dans une catégorie connue. Mais cette subsidiarité se justifie surtout si le contrat nommé voisin est soumis à des règles impératives, une convention innomée dépourvue d’une réelle autonomie viderait de son contenu la catégorie nommée préétablie et déposséderait de toute portée la règle impérative.

Le débat suscité par la garantie autonome, en matière de crédit à la consommation par exemple, est caractéristique, mais il n’y a là, ni fraude à la loi ni atteinte à l’ordre public, en raison de l’originalité de ce contrat par rapport au cautionnement.

 

Le contrat innomé a pour François Terré un caractère relatif, au sens où il ne se détermine que par rapport au nommé, ainsi pour cet auteur[156], « l’importance de l’innomé est minime lorsque les catégories nommées sont nombreuses et diversifiées, on trouve alors le plus souvent un cadre adéquat et pouvant convenir aux situations concrètes qui apparaissent. Inversement, si les types définis sont en nombre restreint, les nécessités de fait feront surgir des cadres innomés ».

 

Quant au caractère transitoire du contrat innomé, cela indique que les catégories juridiques n’ont pas été imaginées en principe en nombre limité, aussi, une fois le régime juridique du contrat innomé suffisamment fixé, l’innomé devient nommé[157].

 

Mais il faut surtout s’intéresser à la condition constante de reconnaissance des contrats innomés, c’est-à-dire l’exigence d’originalité effective de ce contrat. Cette condition aura pour effet de faire émerger les principes actuels de qualification de garantie autonome, principes valables, que la garantie autonome soit encore qualifiée de contrat innomé ou accède au rang de contrat nommé.

 

 

 

 

 

                 B. L’exigence d’originalité de la garantie autonome en tant que

                contrat innomé

 

 

Pour F.Terré[158], il s’agit en fait de la seule condition constante pour la reconnaissance d’un contrat innomé, « celui-ci doit être effectivement nouveau par rapport aux classifications antérieurement admises par le législateur ou consacrées par la jurisprudence ».

 

 Cet auteur distingue trois sortes de contrats innomés. Il   existe tout d’abord, « l’innomé-alliage » qui correspond à un mélange de deux contrats nommés.

Parfois un emprunt partiel est fait aux éléments qui servent de base à une qualification préexistante. A la suite d’une simple décomposition de la qualification initiale se développe la qualification innomée, c’est « l’innomé-décomposition ».

Enfin, l’innomé peut résulter d’éléments de qualification nouveaux, l’innovation est alors très poussée, cette qualification innomée s’appuie sur des éléments en totalité ou en majeure partie originaux, c’est « l’innomé-création ».

 

Dans le même ordre d’idées, un auteur[159]distingue au sein des contrats innomés, les contrats « lourds »[160] c’est-à-dire des contrats propres aux parties et totalement atypiques, qui sont élaborés par les contractants dans toutes leurs clauses, et les contrats dans lesquels les parties, pour répondre à des besoins spécifiques qui ne sont satisfaits par aucun type contractuel connu, se fondent sur un contrat nommé mais en déforment les éléments « normaux », ou y ajoutent d’autres éléments « anormaux ». Les contrats « lourds » correspondraient aux contrats « innomés-création », selon la classification de M. Terré, et dans la classification la plus répandue, ils représentent ces contrats « sui generis » ou « sur-mesure », qui partagent le champ de l’innomé avec les contrats mixtes[161]. Pour ce qui est de la garantie autonome, Mlle Rochfeld la classe au rang des contrats « lourds ».

Ce type de contrat est aisément reconnaissable, les besoins de la pratique commandent la consécration d’un nouveau type de contrat, aucun cadre préexistant n’étant approprié. Il s’agit d’un contrat nouveau dont les éléments ne sont empruntés à aucun des contrats nommés préalablement définis.

 

Mais une fois posée l’exigence d’originalité effective, il est nécessaire de s’interroger sur la nature de l’élément nouveau générateur d’innomé. Or, il va ici être intéressant de voir, que des considérations d’ordre général sur la théorie des contrats innomés, peuvent venir expliquer l’élément prédominant de la qualification de garantie autonome, à savoir, l’autonomie de l’objet du contrat.

Deux explications ont pu être fournies, quant à l’éclosion des contrats innomés, pour certains auteurs[162], qui se fondent sur la notion de cause « catégorique », c’est l’existence d’une finalité « atypique », c’est-à-dire d’une cause atypique, qui caractérise les contrats innomés. Mais pour d’autres[163], c’est l’apparition de nouveaux objets de contrat qui suscite l’éclosion de cadres innomés.

 

 

1.          L’originalité issue d’une cause atypique

 

 

Qualifier le contrat en fonction de sa cause, revient à énoncer que « toute qualification-type implique une cause-type »[164]. C’est-à-dire, que c’est la cause d’un contrat qui permet de le qualifier, puisque cette cause est censée être toujours la même pour un type de contrat donné[165].

Aussi, il serait possible de considérer que le choix de nouvelles causes, différentes de celles propres aux contrats nommés, serait de nature à entraîner une diversification des catégories juridiques. Cette théorie puise ses racines dans la conception classique de la cause mais s’en démarque profondément, quant au rôle assigné à cette notion.

 

Selon les auteurs de ce que l’on appellera la « théorie classique de la cause », la cause est toujours identique par sorte de contrat, ainsi, pour Demolombe[166], « la cause finale est toujours identiquement la même dans tous les contrats identiques ». Mais l’objectif principal de cette théorie était de limiter le contrôle du juge en bornant son domaine d’examen. Faire de la cause un élément objectif, prédéterminé et identique par type de contrat donné, par opposition aux mobiles, permettait de cantonner le contrôle judiciaire aux seuls aspects externes de l’acte[167].

La réflexion de ces auteurs ne se situait pas sur le terrain de la motivation de l’acte et aboutissait comme l’a écrit M. Le Balle[168], « à admettre que, dans un contrat donné d’un type déterminé, la cause est toujours invariable et unique, ce qui implique que dans chaque contrat d’une contexture déterminée, les parties sont en quelque sorte prisonnières de la loi », ne serait admis en conséquence que des « types purs de contrat ». Des contrats innomés telle que la garantie autonome n’aurait donc pas pu trouver leur place au sein de cette théorie[169].

 

 L’identité des causes ne se vérifie en réalité que dans le domaine des contrats typiques, c’est-à-dire des contrats nommés, et tombe lorsque la cause est définie de façon individualisée. Aussi, comme l’écrit J. Rochfeld[170], « la cause, identique par type de contrat donné, n’est pas exclusive d’un autre mode atypique de contracter. Les types contractuels sont aujourd’hui non seulement souples, puisqu’on peut les aménager, mais peuvent être écartés ».

 

Par la suite, une réflexion plus moderne va être développée sur la nature de l’identité de la cause en fonction du type de contrat. Une entreprise de catégorisation des contrats par l’alignement des processus de motivation eux-mêmes va être menée. C’est la notion de cause catégorique, qui sera véritablement développée par Louis Boyer[171], même si cette idée était déjà présente en germe chez H. Capitant, qui admettait que l’identité des causes, des « buts », induisait une classification des contrats[172].

Louis Boyer, se réfère à la théorie classique, en décrivant la cause comme le « mobile abstrait et objectif qui variera selon les différents types de contrat, mais qui demeurera identique pour toutes les conventions faisant partie d’une même catégorie contractuelle »[173]. Il s’agit là de la cause catégorique, par opposition à la cause « casuelle », qui se compose d’éléments choisis par les parties, sans égard au type de contrat, et afin de l’individualiser. Selon cette conception, « toutes les parties à des contrats d’une même espèce ont un comportement psychologique dans une certaine mesure identique », elles sont animées d’une volonté contractuelle[174] qui leur fait désirer la réalisation d’un même mobile, le mobile « catégorique ».

La cause n’est  plus ici, objective par une limitation du contrôle judiciaire aux aspects externes de l’acte, mais elle est objective parce que le processus de motivation est lui-même uniformisé.

 

Toutefois, la théorie de la cause « catégorique » telle qu’elle fut présentée par Louis Boyer a pu être critiquée[175]. En effet, de la même manière que la théorie classique de la cause, cette cause « catégorique » semble exclusive d’un autre mode de contracter, d’une distinction entre les domaines des contrats typiques et les contrats innomés.

 

Concernant les contrats innomés telle la garantie autonome, cette théorie de la cause catégorique semble donc inapte en l’état, à expliquer le caractère autonome et original de ce contrat par rapport au cautionnement. C’est pourquoi, un auteur a récemment repris la thèse de M. Boyer sur ce point[176]. Selon Mlle Rochfeld, le contrat innomé se caractériserait par une cause atypique, distincte de celles connues pour les types de contrat prédéfinis par la loi ou consacrés par la jurisprudence. L’originalité de la garantie autonome résiderait donc dans l’existence d’une cause atypique, originale par rapport à la cause typique propre au cautionnement.

 

Mais l’idée de cause catégorique rend en réalité difficilement compte de l’autonomie effective de la garantie autonome, et cela, en raison de la nature de ce type de contrats.

En effet, la notion de cause objective est assez claire dans les contrats synallagmatiques où elle s’identifie avec la contrepartie de l’obligation de chaque contractant, donc avec l’obligation de l’autre contractant[177]. Mais dans les contrats unilatéraux, comme c’est le cas du cautionnement et de la garantie autonome, la situation est moins claire[178], la cause doit être recherchée dans une contrepartie extérieure au contrat[179].

Or, la cause de la garantie autonome ou le but à atteindre, c’est favoriser la conclusion du contrat de base, en ce sens, elle semble donc se confondre avec la cause objective, c’est-à-dire avec le but, du cautionnement. Faut-il pour autant en déduire que la garantie autonome ne présente pas une cause atypique par rapport au cautionnement, et qu’elle n’est donc pas réellement un contrat innomé ?

 

Cette difficulté peut être résolue de deux manières, il est tout d’abord possible d’avancer que les éléments propres à la garantie autonome et qui la différencie du cautionnement, ont été intégrés dans la cause par la volonté des parties, ces éléments, principalement le caractère non accessoire de la garantie, seraient donc entrés dans le champ contractuel. Mais la cause objective est censée être toujours la même pour un contrat donné, les volontés particulières ne peuvent servir de support à la qualification.

Mais il est aussi possible de considérer, à la manière de J.F Overstake[180], que c’est principalement l’objet, au sens de la prestation essentielle caractéristique, qui permet de qualifier le contrat selon tel ou tel type, la cause ne servant dans cette analyse qu’à situer le contrat au sein des grandes catégories juridiques existantes, c’est-à-dire par exemple, pour la détermination de son caractère gratuit ou onéreux, synallagmatique ou unilatéral.

 

 La cause permettrait donc de classer la garantie autonome au sein des contrats unilatéraux, et même de la qualifier de sûreté personnelle, mais c’est l’objet du contrat, entendu au sens de l’obligation principale qu’il fait naître, qui permettrait de qualifier l’acte de cautionnement ou de garantie autonome.

 

 Cette théorie est intéressante en ce qu’elle introduit l’influence de l’objet au plan de la qualification, mais l’auteur, sans nier la création de contrats innomés, considère que tout contrat innomé devra être ramené selon son obligation principale dans une catégorie existante, même large, capable d’accueillir sa particularité afin d’y être réglementée[181]. Cela n’est pas gênant s’il s’agit par exemple de faire entrer la garantie autonome dans la catégorie des sûretés personnelles ou des contrats unilatéraux, mais ça l’est plus, si cette catégorisation a pour objectif de nier la spécificité du contrat innomé en le réglementant par le biais de dispositions propres au contrat nommé, dans le cas présent le cautionnement.

 

 

2.          L’originalité issue d’un nouvel objet de contrat

 

 

Pour certains auteurs, l’originalité des contrats innomés par rapport aux cadres contractuels préétablis peut être révélée par l’apparition de nouveaux objets de contrat[182], l’objet du contrat  étant entendu ici au sens de l’obligation principale qu’il fait naître, et non pas au sens de l’opération juridique que les parties cherchent à réaliser.

 

Rappelons que pour la doctrine majoritaire, l’essentiel réside dans l’objet des obligations nées du contrat, le contrat en tant que tel n’a pas véritablement  d’objet, il a seulement des effets, qui s’analysent dans la création d’une ou plusieurs obligations. Comme l’écrit M. Ghestin, « l’objet de l’obligation c’est ce à quoi le débiteur s’oblige, ce qu’il doit, autrement dit, la prestation promise. L’objet des obligations varie selon la volonté des parties qui en fixe le contenu »[183].

Quant à l’objet du contrat, cette notion a pu être entendue au sens de l’opération juridique envisagée par les parties[184], mais cette conception a été critiquée en raison de son inutilité par rapport à la notion d’objet de l’obligation[185].

 

Définie différemment, la notion d’objet du contrat n’est pas dépourvue d’intérêt. Ainsi, pour MM. Ripert et Boulanger[186], « l’objet du contrat désigne la prestation à propos de laquelle l’accord des volontés intervient et autour de laquelle s’ordonne l’économie du contrat. Quant le contrat est conclu, elle devient l’objet d’une obligation : c’est donc toujours bien de l’objet d’une obligation qu’il s’agit ; mais cette prestation est l’élément en l’absence duquel les parties n’auraient pas songé à former le contrat ; c’est à elle que se rapportent les autres obligations que le contrat peut créer ; elle absorbe en quelque sorte l’utilité économique du contrat…Dans le cas de la vente d’un immeuble, par exemple, c’est le transfert de la propriété de l’immeuble qui constitue, selon la formule de l’article 1108, la matière de l’engagement ».

 C’est sur le fondement de cette conception de l’objet que J.F. Overstake a proposé sa classification des contrats, et c’est sur cette même conception que MM. Ghestin, Jamin et Billiau[187]  et Mme Grillet-Ponton se fondent pour énoncer qu’un nouvel objet de contrat peut être générateur d’innomé[188].

Ces nouveaux objets de contrat découverts par la pratique peuvent présenter une originalité plus ou moins marquée par rapport aux cadres existants, et certains tel celui de la garantie autonome sont véritablement irréductibles.

 Ce qui caractérise cette convention, c’est la création d’un nouvel objet de contrat totalement distinct de l’objet du contrat de cautionnement. Alors que la caution s’engage à payer la dette du débiteur principal, l’obligation du garant ne dépend pas quant à elle de l’obligation principale qu’elle a pour fonction de garantir[189]. Si le garant est obligé de la même manière qu’une caution, l’objet du contrat n’a rien d’original par rapport au contrat nommé voisin qu’est le cautionnement, et l’innomé ayant un caractère subsidiaire, l’acte faussement qualifié de garantie autonome, sera requalifié en cautionnement. Il n’y a donc dans une telle hypothèse de requalification, aucune sévérité particulière du juge, mais simplement une application de la théorie des contrats innomés.

 

La nature de l’obligation principale pesant sur le garant est donc fondamentalement différente de celle de la caution. Le caractère original de l’objet de cette convention démontre indiscutablement la nature primitivement innomée de la garantie autonome, en même temps qu’il fournit l’élément primordial de qualification de cette convention.

 

Il était donc nécessaire de revenir à la nature originairement innomée de la garantie autonome. Origine innomée qui est la source des éléments principaux de qualification de cette convention. Ces éléments de qualification ont vocation à perdurer, même si à l’occasion de l’étude du régime juridique de la garantie autonome, il sera possible de voir, que celui-ci est à l’heure actuelle assez précis pour que l’on considère que la garantie autonome s’est élevée au rang de contrat nommé, issu de la pratique contractuelle et consacré par la jurisprudence.

 

 

 

§2. LES PRINCIPES ACTUELS DE QUALIFICATION

 

 

Actuellement, deux principes régissent la qualification de garantie autonome. Un principe premier, l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant par rapport à l’obligation principale (A), issu directement de la nature innomée de la garantie autonome, et un principe second, découlant en réalité du premier, à savoir la stipulation de l’inopposabilité des exceptions (B).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A.     L’autonomie de l’objet de l’obligation du garant, principe premier de       

qualification

 

 

Dans le cadre du cautionnement, la caution se présente comme un nouveau débiteur, soumis à une éventuelle action en paiement du créancier, qui vient garantir le recouvrement d’une dette qui lui est a priori étrangère. Ainsi, selon Pothier[190], « un cautionnement n’est qu’une simple adhésion à l’obligation du débiteur principal ». La caution est personnellement responsable, d’un « rapport de dette dont le contenu est le même que celui de la dette principale »[191]. Le cautionnement se résume alors à un simple rapport de responsabilité.

Quant à la garantie autonome, elle obéit, à un schéma tout à fait différent. Le garant est personnellement responsable, non pas de la dette du donneur d’ordre, mais d’un engagement nouveau et indépendant. L’objet de son engagement n’est pas de payer à la place de la caution, sinon il n’y aurait là qu’un simple rapport de responsabilité d’une même dette, mais de payer une dette tout à fait indépendante. L’objet de son obligation est donc totalement différent de l’objet de l’obligation d’une caution. Ainsi, selon L. Aynès, « la seule différence entre le cautionnement et la garantie autonome tient à l’objet : la caution s’oblige à payer la dette du débiteur principal (art. 2011 du code civil), le garant à première demande, telle somme d’argent »[192].

 

Après bien des hésitations, en raison de garanties hybrides soumises à l’appréciation des tribunaux[193], la Chambre commerciale de la Cour de Cassation a adopté une position claire et cohérente, dans un arrêt[194] du 13 décembre 1994. Selon cet arrêt, un acte intitulé « engagement autonome de garantie exécutable à première demande », stipulant le « remboursement de…toutes les sommes dues par le débiteur comme décrit ci-dessus », ne pouvait être un engagement indépendant dès lors qu’il avait « pour objet la propre dette du débiteur »[195].

La Cour de Cassation ne pouvait être plus catégorique, l’objet de l’obligation du garant ne doit pas s’apparenter à un cautionnement. Ces deux contrats ont donc bel et bien un objet distinct, contrairement à ce qui a pu être affirmé un temps par un auteur[196].

 

Pour certains[197], cette décision de la Cour de Cassation était révélatrice d’une volonté de mettre un coup d’arrêt au développement des garanties autonomes. Il n’en est rien, la Cour n’a fait ici que développer les principes de qualification propres aux contrats innomés, ce qui conduisait logiquement à écarter la qualification de garantie autonome au profit de celle de cautionnement, dans la mesure ou l’objet du contrat n’était pas autonome par rapport à l’objet de l’obligation d’une caution traditionnelle. Dans un tel cas, la convention ne présente en effet, pas véritablement d’originalité par rapport au cautionnement.

Cette solution a été reprise par la suite par plusieurs arrêts postérieurs de la haute juridiction[198], ainsi que par un grand nombre de juridictions du fond[199]. Comme l’écrit M. Simler[200], « cette position, qui est en parfaite concordance avec le concept de garantie autonome, doit être considérée comme définitivement arrêtée ».

 

Un léger doute a toutefois pu naître récemment, sur la pérennité de ce critère. Tout d’abord, par un arrêt d’Assemblée plénière du 4 juin 1999[201], la Cour de Cassation a considéré, que la garantie financière dont doivent justifier les professionnels de l’immobilier, « en raison de son autonomie…n’est pas éteinte lorsqu’en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’agent immobilier, le client ne déclare pas au passif sa créance de restitution de la somme versée ». Or, comme nous l’étudierons plus loin[202], le garant s’engage dans ce type d’engagement à payer la dette du débiteur, ce qui est inconciliable avec la qualification de garantie autonome.

Mais au regard de l’évolution jurisprudentielle postérieure, il est possible de considérer, que cette solution est tout à fait propre à ce type de garanties, qui ne s’apparentent peut-être d’ailleurs pas à des garanties autonomes stricto sensu, ce que ne contredit d’ailleurs pas l’arrêt de la Cour de Cassation[203].

 

D’autre part, à propos de garanties autonomes « classiques », un arrêt récent de la Première chambre civile a pu prêter à controverse[204], puisqu’il a considéré, que la mise en jeu d’une garantie n’est pas subordonnée à la défaillance du débiteur principal, « lorsque le garant se porte garant des sommes dues par le bailleur à première demande écrite du bénéficiaire »[205]. L’objet de l’engagement n’apparaît alors aucunement autonome.

 

Toutefois, il faut se garder pour l’heure, d’octroyer une trop grande portée à cet arrêt. En effet, on remarquera tout d’abord, que la Cambre commerciale de la Cour de Cassation, a, postérieurement réaffirmé sa position traditionnelle quant à l’objet de l’engagement du débiteur[206]. Ensuite, il est à noter, que cet arrêt du 12 décembre 2000 n’a pas été publié au Bulletin civil des arrêts de la Cour de Cassation, ce qui illustre peut être une volonté des magistrats de la Haute Cour de ne pas en faire une décision de principe.

 

Comme l’observe M. Legeais[207], la Première chambre civile n’a pas qualifié l’arrêt en cause, aussi, selon cet auteur, elle a « peut être simplement voulu donner effet à une clause de paiement à première demande sans vouloir prendre un parti sur sa qualification ». Ce que cet auteur regrette, car selon lui, l’engagement pouvait éventuellement être qualifié de constitut ou de cautionnement à première demande.

Effectivement, il est possible de considérer que l’engagement litigieux aurait éventuellement pu être constitutif d’un constitut ou d’un cautionnement à première demande[208]. Mais le fait que la Cour de Cassation ne se soit pas prononcée sur la qualification exacte de l’engagement n’a rien d’étonnant, puisque comme nous l’avons déjà souligné, si la Haute Cour peut censurer les mauvaises qualifications, elle ne peut pas leur en substituer une, car cela relève du domaine du fait.

 

Cet arrêt étant isolé, contredit par la jurisprudence de la Chambre commerciale et non publié, ce qui tend à lui dénuer le caractère d’arrêt de principe, il n’y a pas lieu de considérer, pour l’heure, qu’il remette en question le critère clair, cohérent et en harmonie avec le concept de garantie autonome, dégagé en 1994. Si tel n’était pas le cas, « c’est à un nouveau déferlement de pseudo-garantie autonome que l’on risque d’assister »[209], et il est douteux que ce soit là, la volonté de la Cour de Cassation.

 

L’autonomie de l’objet de l’engagement du garant a pour corollaire, le principe de l’inopposabilité des exceptions. Ce principe sera étudié en détail dans la partie de cette étude consacrée au régime juridique de la garantie, mais il est nécessaire d’envisager dès maintenant, la stipulation de l’inopposabilité des exceptions. Stipulation qui a été élevée par la jurisprudence au rang de principe de qualification. Toutefois, il ne s’agit là que d’un principe second.

 

 

B. La stipulation de l’inopposabilité des exceptions, principe second de

              qualification

 

 

La convention de garantie autonome doit clairement interdire au garant de se prévaloir des exceptions relatives au contrat de base ou comporter une clause dépourvue d’ambiguïtés sur ce point. Ainsi, selon un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du 27 juin 2000[210], « un engagement ne peut-être qualifié de garantie autonome que s’il n’implique pas une appréciation des modalités d’exécution du contrat de base pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité et s’il comporte une stipulation de l’inopposabilité des exceptions ».

 

La Cour de Cassation érige donc cette stipulation de l’inopposabilité des exceptions au rang de critère de qualification. Toutefois, selon la jurisprudence, cette stipulation est insuffisante à elle seule pour emporter qualification de garantie autonome[211]. Un engagement où serait stipulé l’inopposabilité des exceptions alors même que l’objet de l’obligation du garant ne serait pas autonome doit être requalifié en cautionnement, il s’agirait donc de deux critères cumulatifs.

 

 Il est possible de considérer toutefois, que la stipulation de l’inopposabilité des exceptions n’est en réalité qu’un principe second de qualification par rapport à l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant. En effet, nous pourrons voir par la suite, que l’inopposabilité des exceptions découle en réalité de l’autonomie de l’objet de l’engagement du garant. Il est d’ailleurs significatif à cet égard, que ce soit la stipulation de l’inopposabilité des exceptions, et non l’inopposabilité des exceptions elle-même, qui soit érigée au rang de critère de qualification, dans le cas contraire cela aboutirait à définir l’acte par ses effets.

Il apparaît, que si l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant est un critère de fond, la stipulation de l’inopposabilité des exceptions n’est qu’un critère formel. Une convention de garantie autonome rédigée de manière précise et non ambiguë et faisant clairement apparaître l’autonomie de l’engagement du garant devrait pouvoir échapper à la requalification en cautionnement, alors même qu’une stipulation d’inopposabilité des exceptions serait absente.

 

Ces principes de qualification, principalement l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant, ne sont pas sans conséquence sur le régime juridique de la garantie autonome, dont les principaux aspects découlent de la nécessaire autonomie de l’objet de l’engagement du garant, et donc, indirectement, de la liberté reconnue aux justiciables d’échapper aux moules contractuels prévus par la loi.

 

 Le débat autour de la réalité du dogme de l’autonomie de la volonté et du principe de liberté contractuelle a pu être évoqué, même les contrats innomés peuvent apparaître sous la dépendance de la contrainte étatique[212], puisqu’ils sont soumis à certains principes de la théorie générale des obligations. Toutefois, il est indiscutable que la théorie moderne des contrats innomés permet une diversification des types contractuels eux-mêmes, et offre donc aux contractants, la possibilité d’adapter leurs accords aux différents besoins de la vie.

 Les parties sont libres d’échapper aux types contractuels légaux, et d’imaginer de nouveaux cadres à leur action. Ce faisant, ils disposent bien d’une certaine liberté contractuelle. Ils agissent sous la dépendance de la loi, mais peuvent toutefois s’affranchir des moules contractuels légaux, et ainsi échapper aux dispositions impératives régissant tel ou tel contrat nommé, sans qu’il n’y ait de fraude à la loi.

Si l’on ne sait encore si l’autonomie de la volonté relève plus du mythe que de la réalité, une certaine place peut être faite à la liberté contractuelle en droit français, notamment par le biais des contrats innomés.

 

Comme a pu l’écrire un auteur[213], « lorsque le droit contemporain des sûretés refuse aux créanciers une garantie efficace, la pratique utilise la liberté contractuelle pour obtenir par des montages et des combinaisons de contrats connus[214] une restauration de la sécurité du créancier ».

 

Dans l’esprit des parties, la qualification demeure étroitement associée aux résultats qu’elles attendent de la situation nouvelle qu’elles viennent de créer entre elles. Le régime juridique ayant vocation à s’appliquer à la convention réagit sur la qualification, il est indissociable de celle-ci. C’est en ce sens, que selon l’expression de F. Terré, c’est l’un des « deux pôles de la qualification »[215].

Ce régime juridique découle pour une grande part de l’autonomie de l’objet de l’engagement du garant, et donc de l’originalité de la garantie autonome par rapport au cautionnement. La volonté contractuelle permettant une définition autonome de l’objet de la garantie, il est permis de considérer, que cette volonté est la source du régime juridique tout à fait original de cette convention.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

                                                                                             

                                                         CHAPITRE II.

 

 

                            LA VOLONTE CONTRACTUELLE, SOURCE D’UN

 

                                            REGIME JURIDIQUE ORIGINAL

 

 

 

 

 

Lorsque des contractants ont la volonté de conclure une garantie autonome, c’est à dessein de provoquer l’application d’un régime juridique dérogatoire à celui du cautionnement. La pression législative s’exerçant autour de celui-ci constitue une puissante source de motivation.

Ainsi selon un auteur[216], « la division entre contrats nommés et contrats innomés présente une raison d’être essentielle, relative au régime juridique applicable à ces contrats respectifs ». En effet, les contrats innomés ne sont soumis qu’aux règles générales gouvernant l’ensemble des contrats et échappent aux règles spéciales propres à chaque contrat nommé[217].

 

Il n’est donc pas totalement étonnant, que les principales caractéristiques du régime juridique de la garantie autonome, découlent de l’originalité et de l’autonomie de cette convention par rapport au cautionnement. Ces règles, découlant de l’autonomie du contrat de garantie, sont donc issues plus ou moins directement, de la volonté contractuelle.

Tout comme nous avons vu, que la volonté contractuelle constitue la source de cette qualification originale, les règles inhérentes à cette qualification, semblent donc elles aussi, même si cela s’effectue de manière plus indirecte, procéder de la volonté des parties.

 

Ainsi, selon l’un des arrêts de la Cour de Cassation du 20 décembre 1982, le contrat de garantie autonome est « régi par les seules dispositions de la lettre de garantie ». Dans une certaine mesure, ceci est exact. Ainsi, les parties pourront opter au sein de la catégorie des garanties autonomes, entre garantie à première demande, garantie documentaire ou garantie à première demande justifiée[218]. Elles pourront librement déterminer le montant de la garantie, à condition toutefois qu’il soit déterminé ou au moins déterminable. De même la durée de la garantie est librement appréciée par elles, et l’appel de la garantie pourra avoir lieu à n’importe quel moment, si toutefois le terme extinctif  l’affectant n’est pas encore échu.

 

Cette formule de la Cour de Cassation aurait pu laisser à penser, qu’au cas par cas, les parties mettent sur pied un régime juridique totalement original et propre à leur convention. Mais en réalité c’est à l’application quasi-automatique d’un régime juridique spécifique, auquel on assiste, dans l’hypothèse d’une qualification de garantie autonome. En cela, il sera possible de considérer qu’il ne s’agit plus là d’un contrat innomé.

En effet, la combinaison des principes de qualification de ce contrat, et du régime juridique attaché à celui-ci, nous conduira à constater, que la qualification de garantie autonome est une qualification rigide, qui s’effectue selon des éléments strictement déterminés. Ce qui laisse à penser que la garantie autonome a accédé au rang de contrat nommé.

Or dans le cadre d’un contrat nommé, estimer que le régime juridique d’une convention serait en totalité déterminé par les parties, irait à l’encontre de l’idée même de qualification. En effet, la qualification a pour objectif de déterminer le régime juridique applicable à une convention, or, si celui-ci ne présente pas un minimum d’unité et donc de prévisibilité, l’opération de qualification perd son utilité et donc sa raison d’être.

 

Pour autant, la volonté des parties est respectée, puisque c’est en connaissance de cause, qu’elles ont librement fait le choix d’opter pour une garantie autonome plutôt que pour une autre sûreté personnelle, nommée ou innomée, pour couvrir l’opération objet du contrat de base. La volonté des parties est donc bien la source de l’applicabilité d’un tel régime juridique, même si cette volonté peut alors se résumer à un choix entre soit, l’un des contrats nommés existant pouvant satisfaire le but poursuivi par les parties, soit un contrat innomé. Mais cela n’affecte pas l’idée selon laquelle les parties maîtrisent la qualification de garantie autonome. L’existence de certaines règles inhérentes à cette qualification, notamment celles relatives aux références au contrat de base et à l’exigence d’un montant et d’une durée déterminée vient en effet renforcer le caractère rigide de cette qualification. Rigidité qui constitue moins un obstacle pour les parties qu’une garantie, lorsqu’elles ont respecté ces règles, de voir leur volonté consacrée.

Le déclin du dogme de l’autonomie de la volonté est évident. Celle-ci n’est pas toute puissante, mais dans un certain cadre, elle trouve tout de même à s’exprimer. La liberté contractuelle permet aux parties d’intégrer leurs relations dans une certaine forme contractuelle, choisie par elles, et ayant vocation à entraîner l’application d’un certain régime juridique. C’est là que se situe le véritable enjeu de la qualification.

 

 Deux types de règles peuvent être distinguées au sein du régime juridique de la garantie autonome. Les premières sont, inhérentes à la qualification de garantie autonome (Section 1) et découlent de l’indépendance de cette convention à l’égard du contrat de base et de son originalité par rapport au cautionnement. En ce sens, elles procèdent, plus ou moins directement, de la volonté des parties. Les secondes sont quant à elles, issues de la théorie générale des contrats, et n’ont qu’une vocation résiduelle (Section 2).

 

 


 

SECTION 1. LES REGLES ISSUES DE LA VOLONTE CONTRACTUELLE

 

 

Deux séries de règles peuvent apparaître comme issues de la qualification même de garantie autonome. Il s’agit du principe de l’inopposabilité des exceptions (§1), qui constitut le trait saillant de cette convention, et de règles gouvernant la rédaction de l’acte de garantie (§2).

Ces deux aspects du régime juridique découlant comme nous le verrons, de l’indépendance de l’engagement de garantie à l’égard du contrat de base.

 

 §1. LE PRINCIPE DE L’INOPPOSABILITE DES EXCEPTIONS

 

 

L’inopposabilité des exceptions est sans doute ce qui caractérise le mieux la garantie autonome. Cette règle paraît intimement liée à la volonté contractuelle des parties, qui ont désiré procurer la sécurité la plus grande possible au bénéficiaire.

 L’autonomie de la garantie indépendante postule l’inopposabilité des exceptions, ce principe n’est en effet, ni plus ni moins que le corollaire de l’autonomie de cette sûreté. Pour autant, cela ne manque pas de susciter des interrogations. Théoriques tout d’abord, il est en effet possible de se demander sur quels fondements repose ce principe de l’inopposabilité des exceptions (1). Pratiques ensuite, en examinant les applications concrètes issues de ce principe (2).

 

 

A. Fondements du principe d’inopposabilité des exceptions

 

 

Deux raisonnements ont pu être proposés pour fonder le principe de l’inopposabilité des exceptions en la matière, un raisonnement tiré de l’autonomie de l’objet de la garantie autonome, et un raisonnement, déjà  brièvement évoqué, tiré de la cause de la garantie.

 

 

1.      L’autonomie de l’objet de la garantie, fondement de l’inopposabilité des

      exceptions

 

  

Pour une partie de la doctrine[219], l’originalité de la garantie autonome tient essentiellement à son objet. Cette doctrine se fonde sur l’autonomie de la volonté pour expliquer l’inopposabilité des exceptions inhérentes à la garantie autonome, mais ici, l’autonomie de la volonté porte sur l’objet et non pas sur la cause. Rappelons, que selon ces auteurs[220], la cause de la garantie autonome se situe dans les relations garant-donneur d’ordre, et non pas dans les relations donneur d’ordre-bénéficiaire, car si tel était le cas, la disparition du contrat principal aurait pour effet d’anéantir la garantie autonome.

 

Aussi, alors que l’objet de la caution est de payer la dette du débiteur principal, ce qui entraîne l’opposabilité des exceptions tenant à cette dette[221], l’objet de la garantie autonome est déterminé par l’accord du garant avec le bénéficiaire et les parties sont en principe libres de déterminer l’objet de leur convention. Le garant ne s’engageant pas à payer la dette du débiteur, il ne peut soulever les exceptions y étant inhérentes.

D’une manière assez voisine, MM. Marty Raynaud et Jestaz[222]considèrent, que « l’inopposabilité des exceptions résulte simplement de l’effet relatif des contrats, ou plus précisément, du principe sous-jacent d’indépendance des contrats, tel qu’il s’exprime notamment dans la règle de l’effet relatif ».

 

Ce raisonnement, aussi séduisant soit-il[223], ne peut se comprendre que si la cause de la garantie autonome est située dans les relations garant-donneur d’ordre. Dans cette hypothèse, l’engagement du garant n’est effectivement jamais en contact avec le contrat de base, aussi, le principe de l’effet relatif des conventions suffirait à justifier l’inopposabilité des exceptions. Toutefois, il est impuissant à expliquer l’impossibilité pour le garant d’invoquer la nullité du « rapport d’ordre », c’est-à-dire du contrat existant entre le garant et le donneur d’ordre, siège de la cause de l’engagement du garant d’après ces auteurs, pour se soustraire au paiement du montant de la garantie.

En effet, si le rapport d’ordre venait à être annulé ou résolu, l’engagement du garant se trouverait alors privé de cause, et aucun raisonnement fondé sur le principe de l’effet relatif des conventions ou l’autonomie de l’objet, ne saurait venir expliquer cela[224].

 

 

2. L’action de la volonté sur la cause, fondement de l’inopposabilité des   

    exceptions

 

 

Si nous avons pu évoquer, que le débat sur la cause est plutôt stérile en pratique, puisque la Cour de Cassation, sans se prononcer sur la cause, considère qu’en raison de son engagement, le garant ne peut invoquer d’exceptions tirées du contrat de base[225], il est quand même légitime de se demander ce qui justifie cette solution.

Le raisonnement se situe ici dans le cadre où la cause de l’engagement du garant est localisée dans les rapports donneur d’ordre-bénéficiaire. Si l’autonomie de l’objet de la garantie autonome peut suffire à expliquer que le garant ne peut échapper à son obligation en invoquant de simples considérations extérieures à son propre engagement, elle est impuissante à expliquer que celui-ci ne peut exciper du défaut de cause de son engagement du fait de la nullité du contrat de base. Ce raisonnement ne répond ne répond pas à cette interrogation, même en situant la cause de l’engagement dans les relations garant-donneur d’ordre. Il est donc indispensable de s’interroger sur la cause pour fonder une telle inopposabilité des exceptions. C’est alors que réapparaît la controverse acte abstrait/ acte causé.

 

Pour les auteurs voyant dans la garantie autonome un acte abstrait[226], l’abstraction suffit à expliquer que le garant ne peut tirer argument du défaut de cause de son engagement avant paiement. L’acte étant détaché de sa cause, le garant ne peut invoquer la nullité de son engagement pour défaut de cause avant d’avoir procéder au paiement. Après avoir exécuté son obligation, il dispose toutefois d’un recours contre le donneur d’ordre, qui lui même pourrait exercer un recours contre le bénéficiaire, au cas où il considérerait que celui-ci a bénéficié d’un paiement indu[227].

 

Mais la majorité de la doctrine[228], refuse de voir dans la garantie autonome un acte abstrait, en raison de la prétendue incompatibilité de ceux-ci avec l’article 1131 du code civil. Aussi, ces auteurs ont tenté de fournir une autre justification au principe de l’inopposabilité des exceptions, sans qu’il n’y ait là d’unité doctrinale.

 

Selon A. Prüm, l’inopposabilité des exceptions n’entraîne pas forcément l’abstraction[229]. A la manière d’auteurs plus anciens en matière de titres négociables[230], il considère que ce sont des raisons de pure pratique qui justifient l’inopposabilité des exceptions. De cette manière le caractère causal de la garantie autonome pourrait se concilier avec son caractère indépendant et non accessoire.

 

 Toutefois, si l’inopposabilité des exceptions doit être recherchée ailleurs que dans l’abstraction du mécanisme, il ne faut pas pour autant « rejeter tout souci d’analyse » comme l’écrit M. Vivant[231]. Or c’est bien à cela que conduit la théorie selon laquelle l’inopposabilité des exceptions ne découlerait que des besoins de la pratique.

M. Vivant considère quant à lui, que le principe de l’inopposabilité des exceptions trouve son fondement dans la théorie de l’apparence[232], et non pas dans la notion d’acte abstrait. Dans ce cadre, « le tiers est protégé dans la mesure de son ignorance légitime de la situation réelle ou, plus exactement, dans la mesure où l’apparence crée par l’opération a pu légitimement l’induire en erreur sur la réalité ».

 

Mais pour la majorité des auteurs contemporains[233], l’indépendance et l’autonomie de l’engagement du garant, dont découle l’inopposabilité des exceptions, s’expliquent par l’autonomie de la volonté et la liberté contractuelle. Mais dans ce cadre, l’autonomie de la volonté agit sur la cause de l’engagement et non plus sur l’objet de celui-ci. Rien ne s’oppose d’après ces auteurs, à ce que les intéressés usent de leur liberté pour définir autrement la cause de l’engagement du garant et réduire cette cause à l’essentiel. Le lien causal entre le contrat de base et l’engagement de garantie serait alors coupé, le contenu de la cause faisant ici l’objet d’un aménagement conventionnel entre les parties.

 

Cette explication a été admise en raison de la finalité des garanties autonomes. De plus, s’agissant d’une création de la pratique, rien ne semble pouvoir s’opposer à ce que les parties aménagent le fonctionnement de ces garanties en fonction de leurs besoins. Le garant ne peut donc pas se retrancher derrière la nullité prétendue du contrat de base, derrière l’allégation de résiliation ou de résolution pour inexécution ou pour une inexécution prétendue ou pour toute autre cause, pour se soustraire à son engagement de garantie. Il devra payer en dépit du fait que le donneur d’ordre prétende avoir correctement et complètement exécuté son obligation, sauf appel manifestement abusif ou frauduleux de la garantie.

 

Selon cette doctrine, le garant, en conférant à son engagement un caractère autonome, a renoncé à opposer quelque exception que ce soit tenant au contrat de base. Mais cette renonciation ne heurte pas l’ordre public, l’existence d’une cause objective étant généralement considérée comme d’intérêt privé[234].

 

 Si la Cour de Cassation a pu juger[235], que « même si l’engagement de la banque avait pour cause le contrat de base dont la nullité était alléguée, en l’état, la banque, en raison de son engagement de payer à première demande ne pouvait se dérober à cette obligation ». Cette formule lapidaire laisse toutefois en suspend, la question du fondement de l’inopposabilité des exceptions.

C’est ce qui a conduit certains auteurs[236] à considérer que la cause objective ne joue aucun rôle en pratique, ainsi, pour M. Simler, « la cause objective est évincée par l’inopposabilité des exceptions ». Mais intellectuellement, seule la notion de cause qui peut venir rendre compte de l’inopposabilité des exceptions, et ce de deux manières, soit en considérant comme la majorité de la doctrine, que les parties ont conventionnellement aménagé le contenu de la cause de leur engagement, soit en considérant la garantie autonome comme un acte abstrait, hypothèse que la Cour de Cassation n’a pas condamnée par ses deux arrêts du 20 décembre 1982.

 

B. Applications du principe d’inopposabilité des exceptions

 

 

Si la caution peut se prévaloir des bénéfices de discussion et de division[237], ainsi que des dispositions des articles 2036 et 2037[238] du Code civil, le garant autonome, en raison de l’indépendance de son engagement, ne se voit reconnaître aucune faculté en ce sens.

Ainsi, selon Ph. Simler[239], l’inopposabilité des exceptions n’est que « le corollaire et la traduction concrète de l’autonomie de la garantie ». En vertu de ce principe, le garant appelé en paiement du montant de la garantie par le bénéficiaire, ne peut en principe lui opposer d’autres exceptions que celles issues du contrat de garantie lui-même, et encore faut-il pour cela que la garantie n’ait pas été stipulée payable à première demande, auquel cas, l’inopposabilité des exceptions est quasi-absolue[240].

 

Dans cette hypothèse, c’est comme si l’on assistait à un renversement de la charge de la preuve. En effet, celui qui se prétend créancier d’une obligation doit, en principe prouver son droit de créance ; or, dans le cas d’une garantie à première demande, le paiement a lieu avant toute discussion. Ce n’est qu’une fois le paiement effectué par le garant, que la preuve de l’absence de droit du bénéficiaire pourra être rapportée. Le bénéficiaire occupe alors la position de défendeur au litige qui est plus avantageuse que la position de demandeur, surtout dans le domaine du commerce international[241].

Ce principe de l’inopposabilité des exceptions n’est pas limité à la personne du garant. Il s’impose aussi au donneur d’ordre qui ne peut soulever aucune exception pour s’opposer à la demande en paiement du bénéficiaire[242]. Mais il n’est pas non plus limité au seul contrat de base (b), la garantie étant également indépendante à l’égard du rapport d’ordre (a).

 

 

1.      L’inopposabilité des exceptions tirées du rapport d’ordre

 

 

La garantie autonome est en effet, doublement indépendante. Le garant étant engagé personnellement envers le bénéficiaire, il ne saurait lui opposer d’exceptions tirées du rapport d’ordre. Cette solution a été consacrée de manière assez logique par la jurisprudence[243], le bénéficiaire étant resté étranger à cette relation juridique.

 

En vertu de cette indépendance à l’égard du rapport d’ordre, le garant ne peut opposer au bénéficiaire de nouvelles instructions qu’il aurait reçues de son donneur d’ordre, et qui tendraient à limiter la portée de son engagement. Toute modification de la garantie après son émission doit être acceptée par le bénéficiaire. Toutefois, le consentement de celui-ci est présumé, dans les cas où la modification aurait pour effet d’accroître ou de proroger ses droits[244].

 L’inopposabilité des exceptions tirées du rapport d’ordre suppose, que le garant ne peut révoquer ou restreindre son engagement envers le bénéficiaire en raison de la déconfiture ou de l’inexécution par le donneur d’ordre des obligations lui incombant au titre du rapport d’ordre[245].

L’insolvabilité du donneur d’ordre est inopposable au bénéficiaire[246], ce qui ne faisait en réalité guère de doutes, puisque cette solution est admise en matière de sûreté accessoire[247]. Comme le souligne M. Prüm[248], l’une des fonctions de la sûreté est « précisément de prémunir le bénéficiaire contre ce risque ».

Enfin, illustrant la force de ce principe, la nullité du rapport d’ordre n’est pas non plus opposable au bénéficiaire[249].

 

 

2.      L’inopposabilité des exceptions tirées du contrat de base

 

 

La convention de garantie autonome est totalement indépendante à l’égard du contrat de base ou rapport fondamental.

Toutefois, une hésitation a pu apparaître, la doctrine et la jurisprudence se sont en effet interrogés sur le point de savoir si la nullité du contrat de base devait entraîner la nullité du contrat de garantie. Nous l’avons déjà évoqué, l’indépendance d’une telle sûreté s’oppose à ce que le garant ou le donneur d’ordre puisse empêcher l’exécution par le garant de son obligation en soulevant la nullité du contrat de base.

 

Pour autant, l’argument a pu un temps être admis chez les juges du fond. Ainsi, la Cour d’appel de Paris a pu juger[250], « que sans doute l’annulation du contrat de base entraînerait celle de la lettre de garantie, dont il constitue en effet la cause. » Sur pourvoi, la Cour de Cassation décida dans une jurisprudence devenue célèbre[251], que « même si l’engagement (de la banque) avait pour cause le contrat (de base) dont la nullité était alléguée, en l’état, la banque, en raison de son engagement de payer à première demande, ne pouvait se dérober à cette obligation ». Levant toute équivoque, la Cour de Cassation a jugé dans un arrêt du 13 décembre 1983[252], « qu’une éventuelle nullité de l’obligation (du donneur d’ordre) à l’égard du bénéficiaire serait sans influence sur l’engagement indépendant (du contre-garant) ».

Mais il faut tout de même remarquer, qu’une telle nullité pourrait éventuellement être révélatrice d’un appel manifestement abusif.

 

De la même manière, la résolution ou la résiliation du contrat de base est sans incidence sur l’engagement du garant[253], tout comme son inexécution, que celle-ci résulte d’un fait du créancier, du fait du prince ou même d’un cas de force majeure[254].

Peu importe que le débiteur ait exécuté la totalité de ses obligations[255]. De même, il est impossible d’opposer au bénéficiaire l’extinction de l’obligation garantie, que ce soit par compensation[256], confusion, remise de dette, transaction[257], novation[258] ou encore défaut de déclaration de la créance à la procédure collective du donneur d’ordre[259].

 

Enfin, ne peuvent être invoquées, ni la modification du contrat de base[260], ni sa cession[261], ni l’impossibilité pour le donneur d’ordre de se retourner pour des raisons politiques ou autres contre le bénéficiaire si l’appel en garantie se révélait injustifié[262], ni pour le garant, l’inefficacité de son recours contre le donneur d’ordre du fait de son insolvabilité ou de l’ouverture d’une procédure collective à son égard[263].

 

En matière de garanties internationales, le donneur d’ordre essaiera le plus souvent de s’opposer au paiement par le garant, du fait des difficultés suscitées par un éventuel recours contre le bénéficiaire, notamment lorsque celui-ci se trouve à l’étranger[264].

Ces actions sont en principe vouées à l’échec. Tel est le cas de la défense de payer adressée au garant par le donneur d’ordre, qui peut résulter d’une simple injonction ou d’une décision de justice. Le garant doit en principe passer outre cette défense de payer, sous réserve d’un éventuel appel manifestement abusif[265].

Ces demandes tendant à faire défense au garant de payer sont rejetées par les tribunaux en raison de la nature de la garantie autonome[266]. Cette solution a été approuvée par la Cour de Cassation[267]. Toutefois une défense de payer peut exceptionnellement se justifier[268], dans l’hypothèse d’un appel manifestement abusif, lorsque la garantie est appelée alors que le terme extinctif est expiré[269]ou encore si une garantie documentaire est appelée sans que les documents prévus au contrat soient produits[270].

Les mêmes solutions sont retenues en cas de mise sous séquestre de la garantie. Cette voie est a priori vouée à l’échec, sauf les réserves déjà évoquées quant à la défense de payer[271].

Enfin, les donneurs d’ordre ont parfois tenté de pratiquer des saisies conservatoires ou des saisies attributions de la garantie, mais cette possibilité est totalement fermée par la jurisprudence[272], même dans les hypothèses où sont admises une défense de payer ou une mise sous séquestre de la garantie.

 

La jurisprudence rejette donc en principe ces différentes actions intentées par le donneur d’ordre, car dans une telle hypothèse, « il se met en contradiction avec son engagement de procurer au bénéficiaire une garantie autonome »[273].

 

 Le principe de l’inopposabilité des exceptions a donc une portée très large en matière de garantie autonome, les dérogations sont très peu nombreuses. Le meilleur moyen de paralyser le mécanisme de la garantie autonome semble résider dans l’application de principes généraux du droit tels que la théorie de l’abus de droit ou l’adage fraus omnia corrumpit[274]. Mais il ne s’agit pas là d’exceptions stricto sensu.

 

Si l’inopposabilité des exceptions constitue assurément un principe de fond, en matière de garantie autonome, d’autres règles, gouvernant la rédaction de l’acte de garantie semblent n’avoir qu’une portée formelle. Pourtant, derrière cet aspect formel, celles-ci cachent un véritable impact quant au fond.

 

 

 

         §2. LES REGLES GOUVERNANT LA REDACTION DE L’ACTE DE

               GARANTIE

 

 

Ces règles apparaissent a priori moins liées à la volonté contractuelle que le principe d’inopposabilité des exceptions. Pour autant, ces règles sont indispensables à la qualification de cette convention, et procèdent de son  autonomie à l’égard du contrat de base.

Si l’idée même de qualification a un sens, c’est en raison d’une certaine stabilité des éléments, qui pourront permettre d’identifier tel ou tel contrat. Or, ces règles garantissent l’originalité effective de la garantie autonome par rapport au cautionnement. Chaque fois qu’elles ne sont pas respectées, il s’avère en réalité qu’un des éléments nécessaires à la qualification fait défaut, et que l’engagement souscrit ne correspond pas à une garantie autonome.

 

Ces règles sont inhérentes à l’autonomie de l’engagement du garant, elles s’imposent d’elles-mêmes, nonobstant le fait, comme nous le verrons par la suite, que la Cour de Cassation a pu venir les préciser. Loin de porter atteinte à la volonté des contractants, elles permettent en réalité de s’assurer de la clarté et de la précision de cette volonté contractuelle.

L’indépendance de l’engagement du garant à l’égard du contrat de base conduit tout d’abord à s’interroger sur les éventuelles références pouvant être faites à ce contrat dans l’acte de garantie. Ce qui nous amènera ensuite à évoquer l’exigence d’un montant et d’une durée déterminée.

 

 

A.     Les éventuelles références au contrat de base

 

 

La garantie autonome a pour fonction de venir couvrir une opération sous-jacente déterminée. Une certaine référence à cette opération ne saurait donc être exclue, ne serait-ce que pour identifier la dette garantie. Aussi, une référence générique au contrat de base dans le préambule de la garantie est de ce fait usuelle[275]. Pour autant, toute référence n’est pas possible. En effet, certaines ont pour conséquence de faire dépendre l’engagement du garant de celui du donneur d’ordre, ce qui aboutit à en nier l’autonomie.

Il s’agit là d’une règle fondamentale quant à la bonne rédaction d’une garantie autonome, et ce n’est que la traduction concrète de l’exigence d’autonomie de l’engagement du garant.

 

1.      Les références interdites

 

 

L’indépendance de l’engagement du garant s’oppose à ce qu’il soit déterminé par référence à l’obligation du donneur d’ordre. Comme l’écrit Ph. Simler[276], « celui qui souscrit une garantie autonome contracte une obligation distincte de la dette garantie et nouvelle. Cette obligation autonome a certes pour fonction de garantir l’exécution du contrat de base, mais elle est « détachée » de ce contrat dès l’instant où elle est mise en place ».

 

L’autonomie de l’engagement du garant ne pose pas de difficultés si l’objet du contrat principal est une obligation de faire, puisque l’obligation du garant est toujours le paiement d’une somme d’argent, il n’y aura a priori pas de confusion possible dans la rédaction de l’acte de garantie entre le contrat de base et l’engagement propre du garant. Mais lorsque la garantie vient couvrir une dette de somme d’argent, ce qui est le cas de beaucoup de garanties autonomes de droit interne, la référence au contrat de base peut conduire à une détermination de l’obligation du garant par rapport à celle mise à la charge du donneur d’ordre en raison du rapport fondamental.

 

Dans la pratique, beaucoup de rédacteurs de lettres de garantie ont pu croire qu’il suffisait de nommer une convention garantie autonome ou d’accoler à cet acte une clause dite de « paiement à première demande » ou « d’inopposabilité des exceptions », pour modifier la nature profonde de l’engagement. Mais nous l’avons vu, c’est l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant qui est déterminante quant à la qualification. Aussi, malgré la présence de ces termes, si la garantie a pour objet la dette même du débiteur, il ne s’agit pas là d’une garantie autonome, mais d’un simple cautionnement[277].

 

Après bien des hésitations, des juges du fonds[278] comme de la Cour de Cassation[279], celle-ci, dans son important arrêt du 13 décembre 1994 a nettement affirmé cette position[280], il ne peut y avoir garantie autonome lorsque l’engagement du garant « a pour objet la propre dette du débiteur principal ».

L’autonomie de l’engagement du garant doit être effective, et cette autonomie s’apprécie de manière concrète au travers des éventuelles références au contrat de base pouvant être faites dans la lettre de garantie. Si l’autonomie de la garantie n’est pas effective, le caractère subsidiaire des contrats innomés conduit à rejeter la qualification de garantie autonome au profit de celle de cautionnement[281].

 

Comme l’écrit Ph. Simler[282], « s’obliger à payer à première demande ce que doit ou devra le débiteur garanti…est non seulement incohérent, mais fondamentalement contradictoire ». En effet, le garant ne peut être tenu dans de telles conditions de payer « ce que doit le débiteur principal », que si celui-ci doit effectivement quelque chose, ce qui n’est pas le cas si son obligation n’est pas valable ou a été éteinte pour une cause quelconque. Selon cet auteur[283], « ces vérifications inéluctables, dès lors que l’on se réfère à ce que doit le débiteur, ne sont autre chose que la recherche des exceptions que le débiteur pourrait ou aurait pu opposer au créancier ». Or de telles vérifications sont totalement incompatibles avec le mécanisme de la garantie autonome, puisque celui qui s’engage à payer ce « que doit le débiteur principal », doit nécessairement pouvoir opposer les exceptions inhérentes à cette dette, son engagement fut-il à première demande.

 

De telles stipulations révèlent en réalité, une grande méconnaissance des particularismes de cette sûreté personnelle non accessoire. A la suite de cette jurisprudence, les équipes bancaires ont été extrêmement prudentes dans la rédaction de leurs actes de garantie, en évitant soigneusement toute référence au contrat de base.

Pour autant, toute référence ne doit pas être nécessairement exclue. En effet, il ne saurait y avoir de garantie sans identification d’un contrat de base, et il n’est pas illégitime pour le client donneur d’ordre d’exiger que l’acte de garantie et ses conditions de mise en jeu, soient « reliés» à ce contrat, sans pour autant entraîner une requalification de l’acte en cautionnement[284].

 

2.      Les références possibles

 

 

Ainsi que l’écrit M. Vasseur[285], « la référence au contrat de base constitue l’une de ces dispositions essentielles et a pour résultat d’exclure que la garantie donnée à propos d’une affaire soit invoquée à propos d’une autre ». En effet, la fonction de sûreté de la garantie indépendante postule qu’elle soit émise pour couvrir une opération déterminée[286], aussi une référence minimale au rapport fondamental est nécessaire[287].

La Cour d’appel de Paris a ainsi pu juger[288], « que la référence au contrat litigieux n’affecte pas le caractère autonome de l’engagement litigieux ; que la référence générique au contrat de base ne sert en l’espèce qu’à identifier la sûreté et doit empêcher qu’elle ne soit mise en cause à propos d’une opération qui lui resterait totalement étrangère; qu’en tant que telle, elle demeure toutefois sans incidence sur l’autonomie de la garantie ».

 

Cet arrêt se situe dans le droit fil d’un arrêt très remarqué de la Cour de Cassation du 7 octobre 1997[289]qui avait déjà statué en ce sens. Entre temps, il est vrai qu’un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de Cassation[290] du 23 février 1999 avait pu semer le doute. Dans cet arrêt, la requalification en cautionnement ne faisait pas de doutes, puisque le garant s’était obligé à payer à première demande « toutes sommes dues par le preneur en vertu de la convention de crédit-bail ». Mais la Cour de Cassation a censuré la Cour d’appel de Riom pour ne pas avoir requalifié une garantie intitulée « à première demande » en « cautionnement », alors que l’engagement se référait à la dette du débiteur principal et ne pouvait donc pas être autonome. En réalité, il semble qu’il faille considérer la rédaction de cet arrêt comme malencontreuse et relevant de la litote[291]. Il s’agissait moins d’un problème d’identification de la garantie que d’identité d’objet, la Haute Cour a semble t-il voulu dire que la garantie autonome se référait à la dette du débiteur pour la détermination de son objet, et qu’ainsi, celui-ci ne pouvait être autonome.

 

La Cour de Cassation est d’ailleurs venue clarifier sa position, par deux arrêts de la Chambre commerciale des 18 mai[292] et 15 juin[293] 1999. Dans le premier arrêt, la Haute Cour censure un arrêt de la Cour d’appel de Paris qui avait écarté la qualification de garantie autonome sous prétexte que les lettres de garantie se référaient au contrat de base. Alors que dans l’arrêt du 15 juin, elle approuve cette même cour d’appel d’avoir considéré qu’en présence de références à l’établissement de la défaillance du débiteur et en l’absence d’éléments caractérisant  l’autonomie des garanties, l’engagement ne constituait qu’un cautionnement.

Ces deux arrêts ne sont nullement contradictoires, ils permettent de tracer la ligne de partage entre les références possibles et celles qui ne le sont pas. Ainsi, dans l’arrêt du 18 mai 1999, l’acte de garantie précisait que celle-ci intervenait « pour la bonne exécution et la performance appropriée » d’un contrat auquel il était fait référence de manière précise. La Cour d’appel de Paris qui avait cru devoir requalifier cet acte en cautionnement au motif que ces références faisaient obstacle à l’indépendance de la garantie est censurée par la Cour de Cassation. Selon la Haute Cour, « de telles garanties ne sont pas privées d’autonomie par de simples références au contrat de base, n’impliquant pas appréciation des modalités d’exécution de celui-ci pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité ».

 

Dans le sens inverse, mais d’une manière complémentaire, l’arrêt du 15 juin 1999, approuve la Cour d’appel de Paris d’avoir requalifié l’engagement litigieux en cautionnement, cet engagement se référant à la « défaillance » du débiteur. L’objet de l’engagement du garant n’avait donc là rien d’autonome puisque son exécution était tributaire de la défaillance du débiteur.

Or, c’est le propre de la caution de s’engager pour le cas  le débiteur ne paierait pas. D’autre part, la stipulation d’inopposabilité des exceptions n’était pas présente dans l’acte en cause, alors qu’elle l’était dans l’affaire du 18 mai 1999. Le fait que cet engagement soit stipulé payable à première « demande » se révèle sans aucune incidence, si les deux principes de qualification ne sont pas réunis.

 

Concrètement, un engagement de payer telle somme « à première demande », pourra être qualifié de garantie autonome alors même que la dette du débiteur principal se révèle être du même montant, du moment que d’une manière ou d’une autre, il n’est pas stipulé que le garant s’engage à payer la dette propre du débiteur principal.

Son engagement est nouveau et indépendant, aussi, il ne peut être déterminé par rapport à ce que doit ou devra le donneur d’ordre, il doit être déterminé abstraitement. Ce qui est important, c’est que le montant de la garantie n’implique pas une appréciation des modalités d’exécution du contrat de base, mais qu’il soit déterminé de manière abstraite, ce qui peut tout de même se faire, par rapport à une somme stipulée au contrat de base.

 

 Ainsi, comme l’écrit M. Simler[294], « peut être approuvé l’arrêt qui a retenu la qualification de garantie autonome en présence de l’engagement de payer à première demande la « somme égale à l’indemnité, d’un montant maximum de 5 000 000 F, qui pourrait être due… »[295] ou encore « tout ou partie de la somme précitée »[296]. L’engagement avait pour objet, en effet, non l’indemnité elle-même, mais une somme déterminée par référence au montant de cette indemnité » [297].

 

La ligne de partage peut paraître ténue, mais elle révèle toute l’originalité de la garantie autonome. Ces exigences rédactionnelles qui pourraient apparaître à première vue d’ordre uniquement formel, permettent en réalité de déterminer si l’objet de l’engagement du garant est réellement autonome. Elles sont donc primordiales pour la qualification. Ce qui n’a rien de surprenant, si l’on se rappelle que l’originalité de ce mécanisme découle de l’autonomie de son objet. Si l’acte est rédigé d’une manière telle que l’autonomie apparaît artificielle, la qualification de cautionnement doit l’emporter  en raison de la subsidiarité déjà évoquée de la garantie autonome.

Le caractère rigide de la qualification de garantie autonome apparaît alors nettement. Rigidité qui découle de la nécessité d’une autonomie effective de ce contrat par rapport au cautionnement.

 

Certains auteurs[298] ont pu voir dans cette démarche de la Cour de Cassation, une atteinte à la volonté des parties, qui lorsqu’elles insèrent dans l’acte de garantie une clause « d’inopposabilité des exceptions » ou de « paiement à première demande », ont clairement entendu que le paiement soit automatique.

 Dans un arrêt du 2 février 1988 la Cour de Cassation semblait en effet, avoir fait de la clause dite « d’inopposabilité des exceptions » le critère essentiel de la qualification de garantie autonome, mais nous l’avons vu, ce n’est plus désormais l’élément primordial, la Haute Cour faisant prévaloir le critère de l’objet de la garantie. La garantie ne peut avoir pour objet la propre dette du débiteur et être stipulée « payable à première demande » ou accompagnée d’une clause d’inopposabilité des exceptions, c’est tout à la fois incohérent et contradictoire.

Si la qualification de garantie autonome a pu être consacrée en droit positif, c’est bien en raison de l’autonomie de l’objet de ce contrat par rapport au cautionnement. Or les garanties hybrides rédigées par les contractants s’apparentent le plus souvent à l’une ou à l’autre des qualifications. Sauf à envisager l’hypothèse intermédiaire du constitut qui est peut être à même de résoudre certaines difficultés rencontrées en pratique, lorsque que les parties ont manifestement voulu rendre le paiement automatique, mais qu’elles se sont pour autant référées à ce qui serait dû par le débiteur principal.

 

Mais si, comme nous le verrons plus loin, ces quelques hypothèses peuvent éventuellement être résolues par la notion de constitut, il est impossible de recourir à la qualification de garantie autonome en pareil cas.

Cela ne signifie pas pour autant que la volonté des parties n’est pas respectée. Mais il faut qu’elle se soit clairement exprimée, à défaut, cela provoque l’intervention du juge, qui va venir interpréter le contrat et éventuellement le requalifier. Or lorsqu’il intervient, le juge est susceptible de venir substituer sa propre appréciation à celle des contractants.

Le caractère rigide de la  qualification de garantie autonome a pour conséquence, comme nous le verrons, de limiter l’intervention du juge quand tous les éléments de qualification propres à cette convention sont réunis, et donc de consacrer l’action des parties sur la qualification de garantie autonome. Cette rigidité est donc moins une atteinte à la volonté des parties qu’une garantie. Lorsqu‘elles prennent soin de respecter l’originalité de cette qualification, elles sont à l’abri de l’interventionnisme du juge, qui ne peut que consacrer leur volonté.

 

Les interrogations quant aux références possibles à l’égard du contrat de base sont donc au cœur du problème de qualification. De ces règles énoncées quant aux références au contrat de base, découlent deux conséquences, l’acte de garantie doit comporter un montant et une durée déterminés.

 

 

B.     L’exigence d’un montant et d’une durée déterminés

 

 

Ces deux exigences spécifiques sont liées à la problématique dégagée quant aux références au contrat de base dans l’acte de garantie. Un arrêt récent de la Cour de Cassation, très clair sur le problème de la qualification, a ainsi pût juger, qu’un « engagement ne peut être qualifié de garantie autonome que s’il n’implique pas une appréciation des modalités d’exécution du contrat de base pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité… ». Durée et montant de la garantie ne doivent donc pas être fixés par référence à l’engagement du débiteur. Mais plus précisément, à la différence du cautionnement, ces deux éléments doivent être déterminés ou du moins déterminables (hypothèse peu probable en pratique)..

 

 

 1. Un montant déterminé

 

 

Si en matière de cautionnement, l’obligation de la caution peut n’être déterminée que par rapport à l’obligation principale, l’indépendance de la garantie autonome à l’égard du contrat de base s’y oppose, comme nous venons de le voir.

 

Aussi, en pratique les garanties autonomes sont le plus souvent chiffrées, le garant s’engageant à payer une certaine somme, librement déterminée par les parties. Il est difficile de concevoir une garantie autonome dont le montant ne serait pas déterminé par avance, et ce pour la bonne raison, qu’en application de la théorie générale des contrats, l’engagement du garant doit avoir un objet déterminé ou au moins déterminable[299], ce qui ne peut se faire comme pour la caution par référence à l’obligation principale.

 

 Le montant doit donc être déterminé ou au moins déterminable[300]. Si l’on admet qu’il ne soit que déterminable[301], il doit l’être en fonction de paramètres fournis par la convention de garantie et non par rapport à ce que doit ou devra le débiteur principal, sinon la requalification s’impose[302]. Il doit être établi sans qu’il soit besoin de vérifier la réalité et l’étendue de l’obligation du débiteur principal. L’hypothèse d’une garantie autonome dont le montant serait illimité semble à exclure, puisqu’il ne serait alors ni déterminé ni déterminable.

 

Dans le cadre d’une garantie autonome, et spécialement lorsque celle-ci est stipulée payable « à première demande », l’obligation souscrite par le garant suppose que le règlement soit fixé d’avance ou du moins, prédéterminé de manière précise par les termes de la lettre de garantie[303].

En pratique, le montant exact de l’engagement est donc le plus souvent arrêté d’office à une certaine somme d’argent. Dans le cadre des garanties couvrant une opération de crédit, la garantie peut représenter l’intégralité de la dette du donneur d’ordre. Mais le montant de la garantie peut aussi ne représenter qu‘une fraction de cette dette, ce qui est généralement le cas des garanties de bonne exécution d’un marché commercial[304].

 

On remarquera, qu’en raison du caractère accessoire du cautionnement, l’article 2013 du Code civil dispose, que « le cautionnement ne peut excéder ce qui est dû par le débiteur, ni être contracté sous des conditions plus onéreuses ». L’obligation de la caution est donc déterminée par référence à la dette du débiteur principal et ne peut lui être supérieure. Dans le cas d’une garantie autonome en revanche, l’absence d’accessoriété conduit à estimer qu’en principe, rien n’empêche le garant de s’engager sous des conditions plus onéreuses. Soit que le montant de sa dette soit supérieur à celui de la dette initiale, soit que sa rigueur excède celle prévue pour l’obligation fondamentale.

 

Enfin, il faut signaler toutefois, l’existence de garanties dites « glissantes » ou « réductibles », à propos desquelles, le montant de la garantie n’est pas fixé de manière forfaitaire et déterminée, mais de manière dégressive, la garantie se réduisant au fur et à mesure de l’exécution de l’obligation garantie[305]. Ce type de garantie pose quelques difficultés au regard de l’exigence d’autonomie. Dans le cadre d’une banque garante, si la réduction est prévue de manière automatique par une clause du contrat, la banque doit y procéder, ce qui implique de sa part une certaine vérification de la progression de l’exécution du contrat de base[306], et peut apparaître difficilement compatible avec une clause de paiement à première demande.

La réduction de la garantie ne s’effectue pas toujours de manière automatique, dans ce cas, le garant ne peut s’en prévaloir qu’en produisant un accord du bénéficiaire reconnaissant que les conditions de cette réduction sont remplies[307], si celui-ci n’y consent pas, le règlement intégral reste dû[308].

Toutefois, selon la jurisprudence, le caractère réductible de ces garanties, que la réduction s’opère de manière automatique ou non, ne prive pas l’engagement de son caractère de garantie à première demande[309].

 

 

                 2. Une durée déterminée

 

 

En raison de son caractère accessoire, le cautionnement ne comporte généralement d’autre durée que celle de l’obligation garantie, il peut même avoir une durée indéterminée. La spécificité des garanties autonomes exclue un quelconque lien entre leurs durées et celles des obligations garanties.

Théoriquement, une garantie autonome pourrait pourtant être conclue pour une durée indéterminée. Cette solution aurait l’avantage de la souplesse, notamment lorsque le temps nécessaire à la pleine exécution du contrat de base est difficilement évaluable[310].

Toutefois, une telle garantie autonome assortie d’une durée indéterminée est inadaptée à la finalité de cette forme de sûreté personnelle. En effet, l’ordre public français prohibe les engagements perpétuels[311], un engagement de garantie à durée indéterminée serait exposé à un droit de résiliation unilatéral et discrétionnaire du donneur d’ordre.

 

En matière de cautionnement, cette solution n’est pas choquante, il est en effet possible d’appliquer la distinction entre obligation de couverture et obligation de règlement, la caution restant tenue des dettes nées avant la résiliation. Mais cette distinction est inapplicable aux garanties autonomes, puisqu’il faut nécessairement se référer à ce que doit le débiteur principal au moment de la résiliation pour déterminer l’obligation de règlement. La résiliation unilatérale d’une garantie autonome  à durée indéterminée emporterait libération totale du garant. Il il est donc difficilement concevable que le bénéficiaire accepte que la sûreté dont il a vocation à bénéficier soit si fragilisée. D’autant plus, que c’est souvent les bénéficiaires eux-mêmes qui rédigent les actes de garantie qu’ils veulent voir souscrits à leur profit[312].

 

Le plus souvent, la garantie est par conséquent consentie pour un certain nombre de mois ou d’années ou jusqu’à l’arrivée d’un terme extinctif[313]. Terme extinctif qui peut être certain ou incertain. La détermination de ce terme sera généralement fonction du contrat de base. Pourtant, « il n’en résulte aucune atteinte au caractère autonome de la garantie, dès lors que, le terme une fois fixé, tout lien avec le contrat de base s’efface. » [314]. L’autonomie de la garantie a ainsi pour conséquence, que l’extinction du terme affectant le contrat de base est sans effet sur le sort de la garantie[315].

A l’arrivée du terme extinctif, le garant est totalement libéré, si la garantie n’a pas été appelée[316]. A la différence de la caution qui reste tenue, après l’arrivée du terme, pour les dettes du débiteur principal nées avant le terme, alors même que ces dettes ne seraient exigibles que plus tard. En effet, nous avons eu l’occasion de souligner, que la distinction entre obligation de couverture et obligation de règlement ( qui subsiste après l’arrivée du terme) est inapplicable aux garanties autonomes[317].

 

Comme nous avons pu le voir, les traits caractéristiques du régime juridique de la garantie autonome sont liés à la nécessaire autonomie de cette sûreté personnelle. En ce sens, ils procèdent bien, de manière plus ou moins directe, de la volonté d’autonomie des parties. Mais à côté de ces règles inhérentes à cette qualification, il y a lieu d’appliquer de manière résiduelle, certains principes issus de la théorie générale des contrats. Application résiduelle, au sens, où il s’agit là, de ce qui subsiste au niveau des garanties autonomes, soit des règles découlant de la théorie générale du contrat, soit des règles propres au cautionnement et pouvant s’appliquer par analogie.

 

 


 

SECTION 2. L’APPLICATION RESIDUELLE DE REGLES ISSUES DE LA

                       THEORIE GENERALE DES CONTRATS

 

 

 

A cet égard, il semble qu’il soit possible d’envisager tout d’abord, ce qu’il est possible de nommer, le « statut contractuel primaire »[318] (§1), c’est-à-dire les règles applicables à tout contrat quel qu’il soit, nommé ou innomé. Puis, de s’interroger sur l’éventuelle applicabilité  par analogie de règles propres au cautionnement (§2). A cette occasion, nous serons conduit à constater, que l’originalité de la garantie autonome constitue un obstacle sérieux au raisonnement analogique.

 

 

§1. LA SOUMISSION DE LA GARANTIE AUTONOME AU « STATUT

      CONTRACTUEL PRIMAIRE » 

 

 

L’article 1107 du Code civil dispose, « Les contrats, soit qu’ils aient une dénomination propre, soit qu’ils n’en aient pas, sont soumis à des règles générales qui son l’objet du présent titre ». Ce titre s’intitule « des contrats ou des obligations conventionnelles en général », c’est-à-dire, les articles 1101 à 1369 du Code civil[319].

Mais il est possible de considérer, qu’en dehors des seuls textes du Code (A), certains principes généraux de la théorie générale des contrats ont vocation à être intégrés à ce statut contractuel primaire (B).

 

 

A.     L’application des règles générales issues du Code civil

 

 

Ces règles générales, ayant vocation à régir toute convention, présentent dans le Code civil sont naturellement applicables à la garantie autonome. Tel est notamment le cas des conditions essentielles de validité des conventions, c’est-à-dire, les dispositions quant au consentement[320] et à la capacité[321] des parties contractantes, ainsi que celles ayant trait à l’objet[322] et à la cause des obligations[323].

La cause et l’objet de l’engagement du garant ayant déjà été abondamment développés, nous nous en tiendrons à quelques éléments sur le consentement et la capacité des parties. Puis nous évoquerons l’article 1326 du code civil, qui est le seul texte des dispositions générales ayant donné lieu à du contentieux et à une controverse doctrinale sur son applicabilité aux garanties autonomes.

 

- Consentement.

Il y a peu de contentieux sur ce point, il paraît en effet naturel que le contrat de garantie requière un accord de volonté. Si en raison de la gravité de l’engagement, l’offre doit être expresse[324], l’acceptation pourrait quant à elle, n’être que tacite, comme en matière de cautionnement[325].

La théorie des vices du consentement avait peu de chances d’être appliquée, tant que les engagements étaient souscrits par des professionnels du crédit[326]. Mais depuis l’éclosion de garanties autonomes souscrites par des particuliers en lieu et place du traditionnel cautionnement, il faut considérer que des annulations pour vices du consentement sont tout à fait envisageables. La garantie autonome ne présente dans ce cadre guère de particularités par rapport aux solutions admises en matière de cautionnement[327].

Il faudra toutefois être attentif aux développements jurisprudentiels sur ces questions, certaines juridictions du fond ayant déjà par le passé manifesté une hostilité certaine à l’égard des garanties autonomes de droit interne, en se fondant de manière critiquable, sur la théorie des vices du consentement[328].

A cet égard, il faut admettre avec M. Simler[329], « qu’un devoir particulier d’information pèse sur le créancier institutionnel acceptant ou exigeant une garantie à première demande de la part d’un garant non rompu à la technique des garanties ». Un manquement de la banque à son devoir de conseil pourra être constitutif d’une réticence dolosive[330].

 

- Capacité :

 En la matière, il faut bel et bien considérer, que la garantie autonome ne présente aucune spécificité par rapport au cautionnement[331]. Cette identité n’a en réalité rien de gênant, puisque les solutions admises en matière de cautionnement ne sont pas en relation avec le caractère accessoire de ce contrat. C’est à propos de ce type de règles, consentement et capacité, communes aux deux institutions, que M. Simler[332] évoque la possibilité d’un « droit commun des sûretés personnelles ».

 

- Mention manuscrite :

L’applicabilité de l’article 1326 du Code civil[333] aux garanties autonomes est l’un des rares exemples de disposition du régime général des obligations ayant fait l’objet d’une controverse, aussi bien en jurisprudence qu’en doctrine.

 

S’agissant des garanties autonomes souscrites en droit interne par de simples particuliers non commerçants[334], le droit commun de la preuve des actes juridiques trouve à s’appliquer. Quant à l’article 1326 plus précisément, la garantie autonome correspond bien à un contrat unilatéral ayant pour objet le paiement d’une somme d’argent, aussi, il ne semble faire aucun doute quant à son application. C’est d’ailleurs la solution retenue par la doctrine majoritaire[335] et la jurisprudence[336].

Si le montant de la garantie est déterminé de manière autonome, la formulation de la mention manuscrite, en lettres et en chiffres, ne soulève pas de difficultés particulières. Toutefois, il se peut que le corps de l’acte indique bien le montant de l’engagement, mais que la mention soit absente ou incomplète, il faut alors avoir recours à des compléments de preuve extrinsèques.

 

Pour une partie minoritaire de la doctrine[337], il s’agirait alors d’une remise en cause du caractère autonome de la garantie indépendante. Selon cette opinion, en cas d’insuffisance de la mention, la preuve extrinsèque complémentaire ne pourrait être trouvée que dans le contrat principal. Une telle prise en compte de celui-ci serait alors en contradiction avec l’autonomie de l’engagement. Aussi, l’application de l’article 1326 devrait ici être écartée. Quelques juridictions du fond[338] ont pu adopter ce raisonnement, prenant à tort, l’article 1326, pour un texte propre au cautionnement.

 

Il apparaît en réalité à la lecture de cette jurisprudence dissidente, que les engagements en cause ne répondaient pas à la qualification de garantie autonome, le garant s’engageant à payer l’objet de l’obligation principale. Dans ces hypothèses, c’est la mauvaise qualification de l’engagement qui est source de difficultés au regard de l’article 1326, l’objet de l’engagement du garant étant déterminé par référence à l’obligation principale, et non pas cette disposition en elle-même.

Or, lorsque l’engagement correspond véritablement à une garantie autonome, c’est-à-dire, quand il a pour objet une somme d’argent déterminée ou au moins déterminable sans référence à l’obligation principale, les difficultés suscitées par l’article 1326 en matière de cautionnement et liées au caractère accessoire de ce contrat sont évincées[339].

 

Quant à la portée de l’article 1326 en matière de garantie autonome, l’arrêt du 10 janvier 1995 lui confère la même qu’en matière de cautionnement. L’exigence de la mention manuscrite est de nature probatoire et ne constitue en rien une condition de validité de l’engagement. Elle permet de prouver, non pas l’existence ou le quantum de l’obligation, mais la conscience qu’a le débiteur « de la nature et de la portée de l’obligation »  qu’il contracte[340].

 

En dehors de ces textes prévus par le Code civil lui-même, il y’a lieu d’appliquer à la garantie autonome certains principes généraux du droit des contrats, dont on peut penser, qu’ils font aussi partie de ce « statut contractuel primaire ».

 

 

 

 

 

 

 

B.     L’application de principes de la théorie générale des contrats

 

 

 Plusieurs principes généraux du droit des contrats trouvent à s’appliquer en matière de garantie autonome. Ainsi, par exemple, la prohibition des engagements perpétuels a déjà pu être évoquée. Mais deux d’entre eux revêtent une importance particulière quant à cette sûreté personnelle non-accessoire, puisqu’ils peuvent venir atténuer la rigueur de cet engagement. Il s’agit des théories de l’abus de droit et de la fraude.

Nous ne pourrons dans le cadre d’une telle étude détailler complètement ces mécanismes. Aussi, nous les  présenterons rapidement, ce qui permettra de voir, qu’une distinction nette est difficile à établir entre eux. Puis nous évoquerons les conditions de leur mise en œuvre pour paralyser un appel manifestement abusif ou/et frauduleux. Sachant, qu’il est admis de manière unanime, qu’en cas d’appel manifestement abusif ou frauduleux, le garant peut et même doit, ne pas payer[341].

 

 

           1. Notions d’appel manifestement abusif ou frauduleux de la garantie

 

 

L’hypothèse d’un abus de droit suppose un droit incontestable, détourné de sa finalité ou dont il est fait un usage de mauvaise foi. L’appel d’une garantie déjà éteinte est injustifié et voué à l’échec[342], pour autant il ne s’agit pas là d’un abus de droit, le bénéficiaire étant sans droit. La théorie de l’abus de droit consiste ainsi à cantonner l’exercice d’un droit dans des limites raisonnables.

 

Quant à la théorie de la fraude, issue de l’adage « fraus omnia corrumpit », elle vient « sanctionner les manœuvres des individus qui, par ruse, tentent de tirer parti des règles juridiques afin de bénéficier…d’un avantage dont ils ne devraient pas profiter »[343]. Classiquement, sont distinguées, la fraude à la loi (fraus legis) et la fraude de l’homme ou fraude dirigée contre l’homme (fraus alterius). Mais ces deux hypothèses peuvent se rejoindre sous une même définition ; serait une manœuvre frauduleuse, « tout acte juridique ou activité judiciaire irrégulier ou techniquement correct, réalisé dans une intention de tromperie et qui tend à éluder une obligation conventionnelle ou légale »[344].

Pour J. Stoufflet[345], « l’abus manifeste s’apparente à la fraude en ce sens qu’il a pour objectif, comme la fraude, l’obtention d’un avantage indu au préjudice du vendeur/donneur d’ordre. Mais c‘est une notion beaucoup plus large puisqu’il y a abus manifeste dès lors que l’absence de droit au titre du contrat de base est établie de manière irréfutable, alors que la fraude suppose que la volonté de nuire soit démontrée ».

 

La caractéristique première de la fraude résiderait donc dans l’intention de nuire. Mais comme le souligne M. Simler[346], la preuve positive de cette intention de nuire est difficile à rapporter, et « l’exigence stricte de cette preuve positive se traduirait par une impunité de la plupart des comportements frauduleux ». Aussi, la jurisprudence a assoupli ces exigences probatoires, ce qui est visible notamment dans le domaine de l’action paulienne, où il est admis que la seule conscience chez le débiteur du préjudice causé à son créancier suffit à constituer la fraude paulienne[347].

 

Dans une telle perspective, le comportement frauduleux se confond avec la mauvaise foi de l’auteur d’un appel manifestement abusif. En effet, comme l’écrit Ph. Simler[348], « la connaissance du préjudice causé n’est ici pas autre chose que la conscience de l’absence de droit ». Et cet auteur d’en conclure, qu’en matière de garantie autonome, « est donc abusif et frauduleux, l’appel de la garantie par le bénéficiaire qui sait qu’il est sans droit pour le faire ou l’appel de la contregarantie par le garant de premier rang qui sait que l’appel de la garantie de premier rang est ou serait abusif »[349].

Ainsi, ces deux principes d’équité et de justice, bien que très différents en théorie[350], se rejoignent en pratique. « Abus, fraude et mauvaise foi apparaissent alors comme des dénominations différentes de la même réalité »[351]. Il n’est donc pas étonnant que la jurisprudence se réfère tantôt à la fraude tantôt à l’abus[352] sans véritable ligne directrice.

 

Ainsi, n’est pas abusif, l’appel d’une garantie autonome alors qu’il est établi que le contrat de base n’a été que partiellement exécuté[353] ou s’il existe un différend entre les parties au contrat de base[354]. A l’inverse, a pu être considéré abusif, le fait que le motif réel de l’appel de la garantie, de l’aveu même du maître de l’ouvrage, ne correspondait pas à l’objet pour lequel celle-ci avait été émise, mais se rapportait à un autre contrat[355]. La fraude et l’abus manifeste ont aussi pu être retenus dans un cas  la lettre de garantie avait prévu que les contestations relatives à la garantie seraient résolues par arbitrage et  l’appel à la garantie était intervenu après que le tribunal arbitral ait été saisi[356].

 

L’hypothèse d’une paralysie du paiement de la garantie ne doit cependant pas être considérée comme une atteinte à l’autonomie de l’engagement vis-à-vis du contrat de base[357]. Si la fraude ou la mauvaise foi du bénéficiaire procède le plus souvent du contrat de base, c’est dans le cadre de l’exécution du contrat de garantie qu’elle se manifeste. En ce sens, il ne s’agit pas d’une exception tenant au contrat de base.

 En effet, ce n’est pas du contrat de base que le bénéficiaire tient son droit d’appeler le garant en paiement. Aussi, ce droit, employé abusivement ou de manière frauduleuse, ne peut pas être considéré comme une exception tirée du contrat de base et comme une limite au principe d’inopposabilité des exceptions. Il ne s’agit là que de l’application d’un principe général du droit.

 

 

2. Caractère manifeste de la fraude ou de l’abus

 

 

La fraude ou l’abus doivent exister, mais ils n’ont normalement pas à être prouvés, ils doivent être manifestes. La fraude ou l’abus doivent être évidents, ce qui peut être particulièrement utile, lorsque c’est le juge des référés, « juge de l’évidence », qui est appelé à statuer. Ce caractère manifeste suppose donc que la preuve de l’abus ou de la fraude n’a pas à être rapportée, cela doit « crever les yeux » selon l’expression d’un auteur[358].

 

Si le garant ou le donneur d’ordre avait à rapporter la preuve de leurs allégations, l’autonomie de la garantie serait niée. Cette preuve devrait être recherchée dans l’exécution ou l’inexécution du contrat de base, et le garant s’est précisément engagé à ne soulever aucune exception découlant de ce rapport juridique[359].

La Cour de Cassation a donc opté pour le critère de l’évidence. Ainsi, dans un arrêt où le donneur d’ordre invoquait un appel manifestement abusif de la garantie au motif qu’il avait pleinement exécuté l’obligation garantie, son pourvoi a été rejeté[360]. Ce rejet par la Cour de Cassation s’explique doublement, d’une part, en invoquant simplement l’exécution de ses engagements, il soulevait indiscutablement une exception tirée du contrat de base et d’autre part, la Cour de Cassation relève qu’il avait « apparemment » exécuté le contrat principal. L’évidence de l’abus ou de la fraude n’était pas présente, aussi, l’appel de la garantie ne pouvait être considéré comme manifestement abusif.

 

Il aurait été possible d’imaginer que le recours aux notions de fraude et d’abus manifeste aurait été plus important en droit interne que dans le cadre du commerce international. En effet, à la différence des garanties de droit interne, l’existence de contregaranties est fréquente au niveau international et constitue parfois un obstacle à l’admission d’un appel manifestement abusif[361]. Mais on trouve peu d’illustrations[362] en droit interne de ces principes, c’est pourtant souvent la relation triangulaire classique bénéficiaire-donneur d’ordre-garant qui est présente. Cela peut s’expliquer par la plus grande facilité qu’aurait celui qui serait victime d’un appel manifestement abusif, d’exercer une action récursoire immédiate.

 

On signalera, qu’au titre de ces principes généraux pouvant venir paralyser le paiement, certains auteurs font parfois appel à la notion de cause subjective (cause du contrat)[363].

Au-delà de la cause objective (cause de l’obligation), supposée identique pour chaque convention de garantie autonome, les motifs particuliers animant les contractants pourraient être illicites ou immoraux. On prendra pour exemple l’hypothèse d’un contrat de base licite d’exportation de biens ou de services, sur lequel se grefferait une garantie n’ayant d’autre but, dans un contexte de contrôle des changes, que de permettre une sortie illicite de devises, voire une opération de blanchiment d’argent. La cause subjective de ce contrat de garantie serait alors viciée. Mais cela relève pour l’heure de l’hypothèse d’école, la jurisprudence ne s’est pas prononcée, et de telles situations, si elles sont imaginables dans le cadre du commerce international, sont plus hypothétiques en droit interne.

 

Si la garantie autonome se voit soumis à ce « statut contractuel primaire », nous allons pouvoir observer, que son originalité s’oppose à l’application de règles propres au cautionnement de manière analogique. A travers cette résistance à l’analogie, s’affirme l’irréductibilité de la garantie autonome.

 

 

§2. L’ORIGINALITE DE LA GARANTIE AUTONOME, OBSTACLE AU

      RAISONEMENT ANALOGIQUE

 

 

Face aux mystères que peut présenter un contrat innomé, les juristes, par une tendance naturelle à se référer au connu, sont le plus souvent tentés d’appliquer à ce contrat, les règles propres à un contrat nommé voisin. C’est le raisonnement analogique.

Souvent, le régime juridique d’un contrat innomé comportera des lacunes. Ainsi, selon un auteur[364], cette méthode se justifie, car elle « satisfait un besoin de sécurité juridique en permettant d’étendre aux innovations de la pratique les règles éprouvées auxquelles sont soumis les contrats nommés ».

Ce n’est pas le droit commun qu’il s’agit d’appliquer par analogie, puisque celui-ci a vocation à régir tous les contrats, mais les règles spéciales régissant un contrat voisin qui présente le plus d’affinités avec le contrat innomé[365].

 

Mais l’application de cette méthode analogique est très relative. Relative dans le temps, puisque le principe d’analogie sera généralement applicable « parce que le contrat innomé est dans l’enfance »[366].

Méthode qui est aussi relative selon le degré d’autonomie du contrat en cause. Ainsi, pour D. Grillet-Ponton[367], « l’extension analogique ne peut être pratiquée lorsqu’en dépit des analogies constatées, le motif d’exception qui anime la règle dérogatoire attachée à tel contrat nommé ne se retrouve pas dans l’économie du contrat innomé ».

Or nous l’avons vu, la garantie autonome correspond à un contrat « innomé-création » selon la terminologie de F.Terré, c’est-à-dire, un contrat totalement distinct et nouveau par rapport aux moules contractuels préétablis par la loi. Il ne sera donc pas surprenant de constater, que l’on trouve peu d’exemples de règles propres au cautionnement ayant pu être transposées par analogie à la garantie autonome[368].

 

Cela a pu être évoqué, toutes les dispositions propres au cautionnement et liées à son caractère accessoire, ne peuvent être transposées à la garantie autonome en raison de l’indépendance de cet engagement. Pour autant, il est possible de considérer que les dispositions régissant le cautionnement et n’étant pas liées à son caractère accessoire mais à sa nature de sûreté personnelle, doivent pouvoir s’appliquer. Mais le raisonnement analogique apparaîtra alors limité et ne viendra pas remettre en cause l’originalité de cette convention.

 

Dans un nombre important d’hypothèses, l’identité des solutions entre cautionnement et garantie autonome ne repose pas à proprement parler sur un raisonnement analogique.

Ainsi en est-il de la question des recours dont dispose le garant contre le donneur d’ordre après avoir payé le bénéficiaire[369]. Il dispose assurément d’un recours personnel[370], mais bénéficie t-il d’un recours fondé sur la subrogation dans les droits du bénéficiaire contre le donneur d’ordre ?

 

Une subrogation conventionnelle est envisageable, mais il faudrait que le bénéficiaire y ait expressément consenti au moment du paiement sous forme d’une quittance subrogative[371]. En pratique, le garant ne saurait subordonner l’exécution de la garantie à cette condition, sauf si elle est prévue dans la lettre de garantie, ce qui est peu probable.

Mais c’est l’admission de la subrogation légale qui soulève plus de difficultés, en ce qu’elle semble contredire le caractère autonome de l’engagement du garant tenu non pas de la dette du donneur d’ordre, mais d’une dette qui lui est propre. En effet, la caution peut se prévaloir de l’article 1251-3° du Code civil disposant, « la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d’autres ou pour d’autres au payement de la dette, avait intérêt de l’acquitter ». Mais il semble impossible de considérer, que le garant autonome soit tenu « avec d’autres » ou « pour d’autres ».

Toutefois, la Cour de Cassation ouvre la subrogation légale à tous ceux qui, en payant une dette, même personnelle, libèrent à due concurrence celui sur qui doit peser définitivement l’obligation[372]. Aussi, même si le problème ne semble pas encore s’être posé en jurisprudence à propos des garanties autonomes, la doctrine considère généralement que ce recours subrogatoire devrait être admis[373].

 

Cette dualité de recours, peut éventuellement apparaître comme inhérente à la fonction de sûreté personnelle et faisant donc partie, d’un « droit commun » de ce type de sûreté[374], mais il ne s’agit pas là, d’un raisonnement analogique stricto sensu. Cela parce que l’article 1251-3° du Code civil n’est pas une disposition propre au cautionnement, mais est intégrée au titre III du Code intitulé, « Des contrats ou des obligations conventionnelles en général ». L’extension du champ d’application de cette disposition ne vise d’ailleurs pas uniquement le cautionnement[375].

 

Nous avons pu voir, que l’application de l’article 1326 du Code civil n’est pas fondée sur la méthode analogique, puisqu’il s’agit d’un texte général. Mais quant à la preuve de la souscription d’une garantie autonome, un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation a pu juger, « qu’un engagement de garantie à première demande doit être exprès ». On ne peut alors s’empêcher de faire le parallèle avec l’article 2015 du Code civil selon lequel, « Le cautionnement ne se présume pas ; il doit être exprès et on ne peut l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté ».

En l’espèce, le litige portait sur le point de savoir si une banque avait garanti seulement les obligations d’une société ou également celles de ses filiales. La Cour de Cassation répond par la négative en dégageant cette règle. Il semble bien que l’analogie a joué dans ce cas.

                                                                                                 

La parenté de solution en matière de consentement et de capacité du garant a déjà pu être évoquée, mais il s’agit là encore de dispositions applicables à tous les contrats, le raisonnement analogique n’est donc pas en cause. Mais une analogie peut exister dans un domaine voisin de la capacité, celui du pouvoir de souscrire une garantie autonome.

 

La question du pouvoir se pose tout d’abord, pour les personnes morales. Dans les sociétés à responsabilité limitée, les gérants et associés « autres que les personnes morales », ont interdiction de faire « cautionner ou avaliser » par la société leurs engagements envers les tiers[376]. La jurisprudence n’a pas eu l’occasion de se prononcer, mais pour certains auteurs[377], bien que ce texte ne vise expressément que le cautionnement et l’aval, il devrait être étendu aux garanties autonomes, alors qu’une interprétation a contrario pourrait aussi être menée.

Quant aux sociétés anonymes, les textes soumettent à l’exigence d’une autorisation préalable du conseil d’administration ou du conseil de surveillance, les « cautions, avals et garanties »[378] souscrits au nom de la société pour les dettes de tiers. Ici, la solution ne fait pas de doutes, et il ne s’agit pas d’un raisonnement par analogie, puisqu’il semble difficile de considérer que le terme « garanties » ne recouvre pas l’hypothèse d’une garantie autonome, ce que la jurisprudence confirme[379].

 

Cette question du pouvoir de souscrire une garantie autonome se pose aussi, dans le cas d’époux communs en biens. Selon l’article 1415 du Code civil, « Chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n’aient été contractés avec le consentement exprès de l’autre conjoint qui, dans ce cas, n’engage pas ses biens propres ». Ce texte, qui figure dans la partie du Code consacrée aux régimes matrimoniaux, ne vise que le cautionnement. Pour autant, la jurisprudence ne s’est pas arrêtée à une lecture littérale de cet article et l’a appliqué aux garanties autonomes[380]. Dans cette hypothèse, les juges ont recouru à la méthode analogique, mais là encore, c’est la nature de sûreté personnelle de la garantie autonome qui le justifie.

 

Les limites rencontrées par la méthode analogique pour la détermination du régime juridique mettent en évidence l’originalité de cette convention et le rôle éminent de la volonté contractuelle en tant que source de ce régime juridique. Arrivé à ce stade de l’analyse, il est alors nécessaire d’en titrer les premières conclusions.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

CONCLUSION DU TITRE PREMIER

 

 

 

 

Nous l’avions évoqué, la qualification de contrat innomé a un caractère transitoire. Une fois le régime juridique de celui-ci fixé, « le contrat innomé sera devenu un nouveau contrat nommé[381] ». Un contrat né de la pratique  mais largement connu et répandu au point d’en devenir une institution, peut en effet, être considéré comme nommé, la nomination par une autorité législative ou réglementaire ne s’imposant nullement[382].

Or la garantie autonome a aujourd’hui environ trente ans d’existence et si, beaucoup d’incertitudes régnaient jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix sur ce concept, la majeure partie de ces difficultés semblent à l’heure actuelle résorbées, et son régime juridique est suffisamment connu, pour que l’on puisse considérer qu’il ne s’agit plus d’un contrat innomé[383].

 

Envisageant la garantie autonome en tant que contrat nommé, il est alors possible de procéder à sa qualification de manière plus traditionnelle, c’est-à-dire, en raisonnant à partir de l’obligation essentielle et principale du contrat[384] ou obligation caractéristique de celui-ci. Obligation caractéristique qui sera l’élément nécessaire et permanent de la qualification. Pour la garantie autonome, cette obligation principale réside assurément dans l’engagement du garant, le critère de qualification n’évoluant pas en raison de la promotion de la garantie autonome au rang de contrat nommé.

 

Quant à la forme de la convention, tout comme la qualité des parties, elle n’est généralement pas considérée comme un élément de qualification du contrat. Le principe du consensualisme à habitué les juristes à considérer la rédaction d’un écrit comme une simple exigence probatoire sans incidence sur la qualification.

Toutefois, si le plus souvent, la forme du contrat est une condition de validité de la convention, requise ad solemnitatem, il est d’autres hypothèses, où la forme du contrat intervient à titre complémentaire de la qualification[385], c’est-à-dire, que la qualification dépendra partiellement de la forme adoptée par les parties. Le défaut d’accomplissement de la forme ne sera pas sanctionné par la nullité mais par la disqualification du contrat. Le régime juridique recherché par les contractants ne pourra alors leur être accordé. Eu égard à la garantie autonome, on peut se demander si le respect d’une certaine forme ne vient pas jouer un tel rôle de complément de la qualification.

 

 Certes, la garantie autonome n’est pas un contrat solennel. La Cour de Cassation ne prescrit pas l’emploi de formes particulières. Du moins, elle ne le fait pas ouvertement, mais à divers titres, nous avons pu constater que le respect de certaines formes préside à la qualification de garantie autonome. Ainsi, la Cour de Cassation a élevé  au rang de critère de qualification, l’exigence d’une stipulation de l’inopposabilité des exceptions.

Dans le même ordre d’idées, l’indépendance de l’engagement du garant doit apparaître très clairement, à travers les références au contrat de base et la nécessité que l’acte contienne un montant et une durée déterminée. Une mauvaise rédaction de l’acte de garantie à ces différents égards, n’entraînera pas sa nullité, ce qui confirme qu’il ne s’agit pas d’un contrat solennel, mais sa requalification, le plus souvent en cautionnement.

Ces exigences de la Cour de Cassation, découlant de l’autonomie de l’objet de l’engagement du garant, ont sans aucun doute possible, un impact quant à la forme de l’acte de garantie. A ce titre, il est possible de considérer qu’elles jouent ce rôle de complément de qualification énoncé. Leur non-respect entraînant une disqualification de la convention.

 

Cet aspect  « formel » de l’acte de garantie, même si ce terme peut paraître impropre, n’est pas sans relancer l’idée selon laquelle, la garantie autonome serait un acte abstrait. En effet, selon MM. Ripert et Boulanger[386], « l’acte abstrait est un acte formel », la volonté des parties n’étant plus soutenue par la cause, il faut qu’elle le soit par la forme.

 

A travers le titre premier de cette étude, il apparaît surtout, que la qualification de garantie autonome repose sur des éléments de qualification précis, concrets et objectifs.

Lorsque la convention conclue par les parties correspond aux éléments de qualification propres à la garantie autonome, rien ne saurait entraver leur volonté d’écarter le caractère accessoire propre au cautionnement. Comme nous l’avons vu, cette qualification repose essentiellement sur l’autonomie de l’objet de l’obligation du garant, ainsi que sur le complément de qualification constitué par les exigences de rédaction de l’acte de garantie. Or, il s’agit là d’éléments objectifs de qualification et comme l’écrit M. Terré, lorsqu’une qualification dépend essentiellement d’éléments objectifs, la volonté des parties est prépondérante, alors que l’action du juge est réduite[387].

 

Une création de la pratique telle que la garantie autonome suppose bien entendu, la consécration du juge, « mais celui-ci ne peut aisément la refuser lorsque l’existence d’un élément nouveau est indéniable »[388]. La garantie autonome comporte assurément un élément nouveau et original la distinguant nettement du cautionnement. Cet élément nouveau sera soumis à l’appréciation du juge. Mais selon cet auteur, la marge de liberté impartie au juge n’est que temporaire, au stade de la reconnaissance de l’innomé, avant de voir le contrat en cause s’élever au rang de contrat nommé.

 

Toutefois, il apparaît qu’une large confusion existe encore en pratique quant à cette qualification. Confusion qui conduit le juge à interpréter la volonté des parties, alors qu’il ne devrait pas avoir à le faire. Les éléments objectifs de qualification précédemment dégagés sont obscurcis par la confusion régnant quant à ce concept. Alors que la qualification devrait s’opérer essentiellement à partir de ces éléments objectifs, l’élément subjectif que constitue la volonté des parties prend une importance anormale.

 

Or lorsque les éléments subjectifs occupent une place importante quant à la qualification d’une convention, l’influence des parties diminue, alors que celle du juge s’accroît, puisque celui-ci, « substitue à la volonté des particuliers ses propres conceptions. C’est la conséquence inéluctable de toute interprétation »[389]. Phénomène qui sera d’autant plus accentué, que les parties n’auront pas ou mal exprimé leur volonté, c’est-à-dire le but poursuivi[390].

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                             

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                             

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                    TITRE II

 

 

 

                         UNE LARGE CONFUSION, SOURCE D’UN EVENTUEL 

                                                                   

                              CONTROLE JUDICIAIRE DE LA QUALICATION

 

 

 

 

 

L’exigence d’originalité effective de la garantie autonome en tant que nouvelle sûreté personnelle, par rapport au cautionnement a fait émerger des éléments de qualification de nature plutôt rigide, ce qui  préserve son originalité.

Ce caractère rigide de la qualification de garantie autonome, n’est pas le fait du juge, mais découle des nécessités de l’opération de qualification elle-même. Il ne pouvait en aller autrement, si cette convention doit occuper une place pleine et entière au sein de la catégorie des sûretés personnelles, et ne pas être considérée comme un dérivé du cautionnement.

 

Cette rigidité, qui peut constituer une garantie pour les contractants contre une intervention du juge, peut aussi venir déjouer leurs prévisions, dans la mesure où elles auront mal assimilé toutes les exigences de cette qualification, et que la convention conclue ne correspondra pas à une garantie autonome.

Le juge se devra alors d’intervenir, pour redonner à l’acte sa qualification appropriée. L’adage selon lequel, « ce que font les parties importe plus que ce qu’elles disent » trouve ici à s’appliquer. Il ne suffit pas de dénommer une convention « garantie autonome », pour que cette qualification soit retenue par le juge, encore faut-il que le corps de l’acte corresponde à ce mécanisme. Or, à l’égard de la garantie autonome, une large confusion, aux origines diverses, a longtemps régné, suscitant ainsi l’action du juge.

 

 La volonté des contractants d’écarter le caractère accessoire du cautionnement doit en principe être consacrée par le juge, encore faut-il que cette volonté se soit clairement exprimée et qu’il n’y ait aucune ambiguïté à ce sujet. A défaut, il sera nécessaire pour le juge d’interpréter la volonté des parties afin de procéder à la qualification de la convention. La maîtrise de la qualification de garantie autonome par les parties est donc conditionnée, par une expression claire de l’autonomie qu’elles veulent conférer à cette sûreté.

 

Les multiples exemples de requalification intervenus en jurisprudence, pourraient laisser penser, qu’il existe un certain aléa en la matière, le juge se réservant le droit de requalifier le contrat à sa guise. Mais cette impression n’est pas le reflet de la réalité. Si le juge intervient, c’est que l’acte est ambigu et que le mécanisme décrit ne correspond pas véritablement à une garantie autonome.

 

Ce phénomène ne doit pas étonner, comme l’écrit François Terré[391], « Les qualifications sont la grammaire du droit. C’est seulement lorsqu’elles sont nettement précisées que leur emploi devient sans périls…Certaines d’entre elles sont riches d’une longue histoire qui se poursuit jour après jour. Mais chaque fois qu’il en est fait usage, les précautions sont nécessaires, au même titre que seul le mot juste est capable de transmettre la pensée. »

 

Si parfois des dérives ont pu être constatées dans l’intervention du juge quant à cette qualification, en raison d’une certaine hostilité à l’égard de cette nouvelle forme de sûreté personnelle, il ne s’agissait que d’épiphénomènes, eu égard à l’émergence progressive de cette notion.

Le juge ne peut en effet requalifier à sa guise une convention comportant les éléments exigés par une qualification donnée. Mais il peut à certains égards, apparaître comme un gardien des qualifications. Il n’est en effet pas illégitime, qu’il intervienne pour redresser les qualifications incorrectes. Qu’il s’agisse des parties ou du juge, les qualifications ne doivent pas sans arrêt pouvoir être remises en cause et entourées d’une totale incertitude[392], auquel cas, c’est l’utilité même de l’opération de qualification en général qui serait en question.

 

Si la confusion, dont nous tenterons de mettre en évidence l’origine, quant au concept de garantie autonome(Chapitre I), suscite l’intervention du juge pour redresser les qualifications incorrectes (Chapitre II), par contrecoup, cette confusion a contribué à préciser la notion de garantie autonome. Cela ne doit pas étonner, toute qualification d’un cas concret par rapport à une notion impliquant comme a pu l’écrire M. Marty[393], une « définition de cette notion ». Cette précision devant aboutir au final, a une diminution de l’intervention du juge.

 

 

                               

                                                  

 

                                                     

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                              CHAPITRE I

 

 

                                L’ORIGINE DE LA CONFUSION QUANT A LA            

 

                                QUALIFICATION DE GARANTIE AUTONOME

 

 

               

 L’origine de cette confusion est double. En effet, les ambiguïtés peuvent être issues de la notion même de garantie autonome (Section 1), c’est-à-dire, que ce concept a pu en lui-même, être mal compris. Cette mauvaise compréhension se répercutera logiquement sur la rédaction des engagements de garantie. Mais la confusion a aussi pu naître de la confrontation de la garantie à d’autres sûretés personnelles (Section 2), nommées ou innommées, présentant selon les cas, plus ou moins de ressemblances avec elle.

 

 

 

 

SECTION 1. LES AMBIGUITES ISSUES DE LA NOTION MÊME DE                         

                       GARANTIE AUTONOME

 

 

 

Longtemps, la notion de garantie autonome a été entourée d’un certain flou. La spécificité de cette nouvelle sûreté personnelle non-accessoire n’a pas toujours été clairement perçue. Cette confusion d’ordre intellectuelle (§1) n’est pas restée sans conséquence. Elle a en effet, aboutit à la rédaction de garanties hybrides, suscitant des ambiguïtés que l’on pourrait qualifier de matérielles (§2).

 

 

 

§1. UNE CONFUSION INTELLECTUELLE

 

 

 

Du fait de la nouveauté du procédé, il est possible de trouver des traces de cette mauvaise compréhension, aussi bien chez le législateur (A), qu’en doctrine (B) ou en jurisprudence (C), malgré la clarification opérée depuis l’arrêt de la Cour de Cassation du 13 décembre 1994[394].

 

 

 

 

 

 

 

A.     La confusion législative

 

 

A travers les articles 131 et 144 du Code des marchés publics dans son ancienne rédaction, il s’est avéré, que le législateur lui-même, n’avait pas saisi toute l’originalité de la garantie autonome, en édictant par le biais de ces dispositions une sûreté personnelle hybride[395].

Selon l’article 131 de ce Code, « tout titulaire d’un marché peut être tenu de fournir un cautionnement en garantie de la bonne exécution du marché et du recouvrement des sommes dont il serait tenu débiteur au titre de celui-ci…le cautionnement en numéraire ou en titre peut être remplacé par une caution personnelle et solidaire ». Et l’article 144 du même code d’ajouter, que «ce versement est fait sur l’ordre de l’administration contractante sans que la caution puisse différer le paiement ou soulever une protestation pour quelque motif que ce soit »[396].

Certains auteurs[397] ont alors pu en conclure, que l’on était là en présence d’une garantie autonome. Ainsi, pour M. Ancel[398], il était donc vain de s’interroger sur la validité des garanties indépendantes au regard du droit français, le législateur donnant lui-même l’exemple.

 

Mais la référence qui était faite à la dette du débiteur principal empêchait d’y voir une véritable garantie à première demande. Pour clarifier la situation, un décret du 15 décembre 1992 a modifié le Code des marchés publics sur les garanties exigées des titulaires de marché[399]. Ce code prévoit désormais, que la retenue de garantie « peut être remplacée…par une garantie à première demande ou, si les deux parties en sont d’accord, par une caution personnelle et solidaire… »[400] et que l’avance facultative visée à l’article 155 ne peut être versée que moyennant « une garantie à première demande »[401].

 

Toujours dans un effort de clarification, un arrêté du 10 décembre 1993 propose des formules pour de telles garanties[402]. Une action en contestation de la légalité de cet arrêté a été rejetée par le Conseil d’Etat, qui à l’occasion de cet arrêt, a pu à son tour, souligner la différence existant entre cautionnement et garantie autonome[403].

Mais malgré cette volonté de clarification, les tribunaux administratifs se voient eux aussi confrontés à des garanties de nature hybride[404].

 

 

 

B. La confusion doctrinale

 

 

Dans sa thèse parue en 1981, M. Ancel, se référant à des auteurs allemands, a pu énoncer, que la garantie autonome n’était en fait, qu’une variante du cautionnement[405]. Pour cet auteur, la garantie n’a vocation à jouer qu’en cas de défaillance du donneur d’ordre[406], qui reste le débiteur principal. Selon M. Ancel[407], la persistance des termes « caution » ou « cautionnement » serait d’ailleurs un signe en ce sens, ces engagements fussent-ils à première demande.

 

Pour cet auteur, « les garanties bancaires ne sont au fond, malgré leur caractère non accessoire, que des variantes du cautionnement de droit commun. De même que le cautionnement solidaire est un cautionnement avec renonciation aux bénéfices de discussion et de division, les garanties bancaires sont des cautionnements avec renonciation aux exceptions tirées du rapport fondamental ». La renonciation à invoquer les exceptions tirées du rapport commercial de base ne procurerait dans cette optique, qu’un avantage d’ordre purement procédural au bénéficiaire[408].

 

Pour asseoir sa théorie, M. Ancel se réfère notamment à un auteur allemand, M. Von Caemmerer, qui serait l’un des « découvreurs des garanties du commerce international »[409]. Pour cet auteur[410], « ce qui est déterminant ce n’est pas de savoir si le caractère accessoire de l’engagement a été écarté ou plus ou moins limité par la volonté des parties. Ce qui compte, c’est si la garantie a été donnée pour protéger contre l’inexécution de l’obligation d’autrui. Chaque fois que c’est le débiteur principal et non le garant qui doit en définitive supporter la charge de la prestation, on est en présence…de la situation typique du cautionnement ».

M. Ancel reprend cet argument à son compte, en énonçant, que le garant n’entend assumer que l’insolvabilité éventuelle du donneur d’ordre. Il dispose par ailleurs d’un recours contre celui-ci au cas où il aurait à payer. Ainsi, la garantie indépendante, de la même manière que le cautionnement, n’affecterait pas la contribution à la dette, qui serait toujours supportée en définitive par le donneur d’ordre. Cet auteur en conclut donc, qu’il ne s’agit là que « d’une variante du cautionnement »[411].

 

Mais plusieurs objections peuvent être apportées à cette théorie.

Il est tout de suite possible d’avancer, que si l’on devait considérer que chaque fois que la charge définitive d’une dette est finalement supportée par le débiteur du rapport fondamental garanti, il s’agit d’un cautionnement. Cela conduirait à qualifier de cautionnement quasiment toutes les hypothèses de garantie (délégation imparfaite, aval, crédit documentaire…) autre que l’assurance, et à vrai dire toutes les hypothèses de sûretés personnelles. L’absence de contribution à la charge définitive de la dette est en effet, un critère propre à toute sûreté personnelle et pas simplement au cautionnement[412].

Enfin et surtout, M. Ancel reconnaît lui-même que le caractère accessoire est de l’essence du cautionnement[413]. Or, si certaines protections légales dont bénéficie la caution peuvent être écartées conventionnellement, tels que les bénéfices de discussion ou de division, une renonciation par la caution à opposer toute exception, équivaut à une renonciation au caractère accessoire de cet engagement. Le cautionnement étant essentiellement accessoire en droit français, y renoncer est impossible, sauf à qualifier différemment l’engagement en cause[414].

 

 

C.     Une confusion jurisprudentielle

 

 

Les hésitations de la jurisprudence quant à la qualification de garantie autonome ont été déjà largement développées à travers le problème des éventuelles références au contrat de base dans l’acte de garantie.

La Cour de Cassation a clairement affirmé sa position par l’arrêt du 13 décembre 1994[415], qu’elle a confirmé à de nombreuses reprises[416], suivie en cela par les juges du fonds[417]. Mais il faut bien reconnaître, qu’aussi claire que soit la jurisprudence de la Cour de Cassation issue de l’arrêt du 13 décembre 1994 et des arrêts l’ayant ensuite confirmé, certaines juridictions du fond continuent pourtant à qualifier des engagements de garantie autonome alors même que l’objet de la garantie est défini comme étant la dette du débiteur principal[418]. De manière inverse, il arrive à certaines d’entre elles de requalifier de manière abusive des cautionnements en garantie autonome[419].

Ces quelques incohérences jurisprudentielles ne doivent pas inquiéter, eu égard à la démarche générale tendant vers une meilleure compréhension de ce mécanisme. Mais une inquiétude plus profonde a pu émaner de la Cour de Cassation elle-même en raison d’un arrêt rendu par son Assemblée plénière le 4 juin 1999[420].

 

Dans cet arrêt, la Cour de Cassation a entendu mettre fin aux incertitudes relatives à la qualification de la garantie financière dont doivent justifier les professionnels de l’immobilier et aux divergences existant au sein des différentes chambres de la Haute Cour[421]. L’enjeu de la qualification dans cette hypothèse n’est pas sans importance : il porte sur l’application à cette garantie obligatoire, c’est-à-dire aux créanciers que la loi entend spécialement protéger, de l’article 53 de la loi du 25 janvier 1985. Ce qui entraînerait l’extinction de leur créance pour défaut de déclaration à la procédure collective du débiteur garanti.

 

A la différence du cautionnement, la garantie autonome échappe à cette disposition, or pour la Cour de Cassation, « En raison de son autonomie, la garantie financière exigée…n’est pas éteinte lorsqu’en cas de redressement ou de liquidation judiciaire de l’agent immobilier, le client ne déclare pas au passif sa créance de restitution de la somme versée. »

La Haute Cour a voulu éviter aux bénéficiaires de ces garanties professionnelles, qui le plus souvent, n’ont pas pour habitude de lire le BODACC, de voir leur créance éteinte pour non-déclaration à la procédure collective du débiteur garanti. Pour les mêmes raisons, la Cour de Cassation a pu juger[422] que l’engagement de garantie extrinsèque d’achèvement d’un immeuble, « faisait naître à la charge de l’organisme agrée une obligation indépendante de celle du débiteur défaillant » et « constituait une garantie autonome qui ne disparaissait pas du fait du redressement ou de la liquidation judiciaire de ce débiteur. »

 

L’arrêt du 4 juin 1999 a récemment été confirmé par un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du 23 mai 2000[423], aussi, faut-il considérer cette solution comme relativement solide. L’objectif visé par cette jurisprudence est tout à fait louable, pour autant, elle n’est pas sans susciter des interrogations.

 

En effet, la ressemblance entre ces garanties et le cautionnement est grande. En premier lieu, il s’agit d’un engagement de se substituer au débiteur en cas de défaillance de celui-ci et de payer sa dette. Or nous avons vu, que la qualification de garantie autonome ne répond pas à ce type d’engagement. En second lieu, ces engagements sont le plus souvent délivrés par des organismes spécialisés, plus précisément, des sociétés de caution mutuelle, dont l’objet exclusif est de délivrer des cautionnements. A ce titre, elles sont régies par une loi spéciale relative aux sociétés ayant un tel objet[424].

 

En raison de ces incompatibilités avec la garantie autonome stricto sensu, certains auteurs[425] ont pu se demander, si cette jurisprudence n’allait pas remettre en cause le critère de distinction entre cautionnement et garantie autonome retenu par la Cour de Cassation depuis l’arrêt de la Chambre commerciale du 13 décembre 1994.

En réalité, si l’allusion à la garantie autonome est forte, notamment en raison des arrêts de la Troisième Chambre civile relatifs aux garanties d’achèvement d’un immeuble, la Cour de Cassation dans son arrêt du 4 juin 1999, n’a pas formellement énoncé qu’on était là en présence d’une garantie autonome stricto sensu. En effet, lorsque la Cour de Cassation censure une décision pour mauvaise qualification, elle ne peut pas en principe, lui en substituer une autre car cela relève du domaine du fait[426].

 

Aussi, pour certains auteurs[427], l’autonomie de la garantie procèderait moins de la technique utilisée que de sa finalité protectrice, la qualification de garantie serait en effet secondaire par rapport à sa finalité, ce qui expliquerait que la Cour de Cassation n’ait pas jugé utile d’y procéder. D’après ces auteurs cela irait dans le sens d’une application de cette solution à toutes les garanties professionnelles où l’on retrouve une semblable finalité[428].

 

Mais pour d’autres, la question de la qualification des garanties professionnelles ne doit pas être occultée de la sorte. La Cour de Cassation semble en tout cas exclure la qualification de cautionnement, aussi, certains les rattachent au mécanisme de l’assurance pour compte[429], alors que d’autres les analysent comme une garantie indemnitaire inspirée de celles existant dans les droits allemand et anglais[430].

 

Il faudra donc observer avec attention les prochains développements relatifs à la question de la nature juridique de ce type de garantie, la qualification de garantie autonome ne semblant pas la plus appropriée. Mais cette jurisprudence n’a pas remis en cause celle relative à la qualification de garantie autonome stricto sensu, comme le montre un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du 27 juin 2000[431]. Il semble donc que la portée de cette jurisprudence doive être limitée aux garanties des professionnels.

Si cette confusion a pu, comme nous venons de le voir, être présente aussi bien chez le législateur qu’en doctrine ou en jurisprudence, nous allons pouvoir désormais observer, comment cela s’est traduit au plan matériel, dans les actes de garantie eux-mêmes.

                           §2. LES AMBIGUITES MATERIELLES PRESENTES DANS L’ACTE DE

                                 GARANTIE

 

 

L’ambiguïté rédactionnelle des actes de garantie à déjà pu être quelque peu abordée à travers le problème des éventuelles références au contrat de base pouvant être faîtes dans l’acte de garantie.

Ces références au contrat de base peuvent en effet être envisagées à ce titre[432]. Mais nous avons pu observer leur très grande importance quant à la qualification même de garantie autonome. Si bien, que la teneur de ces références conditionne l’autonomie de l’objet de la garantie et conduit à considérer, que l’absence de référence à l’objet de l’obligation du donneur d’ordre pour déterminer l’engagement du garant constitue une règle fondamentale du régime juridique de la garantie. Le non-respect de cette règle conduit logiquement à la disqualification de cet engagement. Le juge n’a alors aucunement à sonder la volonté des parties pour cela, le contenu de l’acte ne correspondant pas au mécanisme de la garantie autonome.

 

Ici, il s’agit plutôt de s’intéresser à la tendance qu’avaient pris les contractants de dénommer leur acte dans un sens ou d’y insérer des clauses empruntant, tantôt au cautionnement, tantôt à la garantie autonome sans que cela n’ait véritablement de cohérence, créant alors des garanties hybrides.

Il nous faut alors déterminer quelle valeur accorder à la dénomination de la convention et à ces clauses présumées caractéristiques de tel ou tel engagement. Il se peut, que soient rencontrés à cette occasion des actes empruntant à l’un et à l’autre des modèles, ce qui ne manquera pas, comme nous le verrons par la suite, de conduire le juge à interpréter la volonté des parties.

 

Envisageons donc de manière successive, l’importance eu égard à la qualification, de la dénomination de l’acte (A) et des clauses a priori révélatrices de la présence d’un cautionnement ou d’une garantie autonome(B).

 

 

A.     L’importance de la dénomination

 

 

Il eut été possible de penser, que lorsque les parties intitulent leur convention « cautionnement » ou « garantie autonome », leur volonté s’est clairement exprimée. Mais très souvent, le corps de l’acte ne correspond pas à sa dénomination. De la même manière que l’habit ne fait pas le moine, le nom n’induit pas la qualification.

C’est le mécanisme tel que les contractants l’auront décrit dans le corps de l’acte et notamment à travers son obligation caractéristique, qui sera déterminant au regard de la qualification et fera en quelque sorte « émerger » leur volonté réelle, dissimulée sous le masque de la dénomination.

Comme le constate un auteur[433], « la pratique bancaire a si bien mêlé les dénominations qu’il est aujourd’hui difficile d’accorder à leur emploi quelque autre importance que celle d’un vague indice ». La jurisprudence a donc fini par considérer que la dénomination de l’acte ne préjuge en rien de son contenu précis, que l’acte soit dénommé « cautionnement », « garantie autonome », « garantie indépendante » ou encore « garantie à première demande », aucune de ces expressions n’est déterminante quant à la qualification[434].

On remarquera toutefois, qu’il a été jugé, que le mot « cautionnement » dans la mention manuscrite l’emporte sur l’expression « garantie à première demande » portée dans une mention dactylographiée[435].

 

 

B.     La présence de clauses contractuelles « caractéristiques »

 

1.      Les références aux règles du cautionnement

 

 

La question qui doit être envisagée ici est celle de savoir, si un acte intitulé « garantie autonome » ou « garantie à première demande », doit être requalifié parce qu’il fait référence en son sein, à des règles propres au cautionnement.

L’acte peut aussi être dénommé « cautionnement » et faire référence à des règles propres à cette sûreté, alors même que l’engagement du garant est défini de manière autonome et accompagné d’une stipulation d’inopposabilité des exceptions. Quelles conséquences faut-il en  tirer au plan de la qualification ?

 

Les parties peuvent avoir par exemple, expressément exclu les bénéfices de division et de discussion, autant de règles incompatibles avec la qualification de garantie autonome.

Ce type de clauses, ne doit être considéré que comme un simple indice de la présence d’un cautionnement[436]. Malgré leur présence, si l’objet de l’engagement du garant est déterminé de manière autonome et que l’acte contient une stipulation de l’inopposabilité des exceptions, l’acte sera constitutif d’une garantie autonome et non d’un cautionnement. Il ne faudra alors pas tenir compte de ces stipulations incompatibles avec l’indépendance de l’engagement.

 

Enfin, lorsqu’il est fait emploi des termes « caution solidaire » ou qu’une référence est faite aux règles propres à la solidarité, la solution est identique. Alors même que solidarité et autonomie sont des concepts antinomiques, la jurisprudence admet généralement que cette présence n’est pas de nature à remettre en cause la qualification de garantie autonome, dès lors que les autres clauses de l’acte sont claires et précises[437]. La clause de solidarité n’aura le plus souvent été incluse dans une garantie autonome que par inadvertance ou ignorance de sa signification profonde.

 

La référence aux règles du cautionnement n’est donc pas décisive quant à la qualification. Un engagement correctement défini, accompagné d’une stipulation de l’inopposabilité des exceptions prévaudra toujours sur ces maladresses rédactionnelles, il est plus révélateur de l’intention des parties.

 

 

2.      La présence de clauses caractérisant l’autonomie.

 

 

Longtemps, deux clauses ont pu être considérées comme caractéristiques de la volonté de conférer à l’engagement un caractère autonome. Il s’agit, des clauses dites de « paiement à première demande » et « d’inopposabilité des exceptions ».

 

Ainsi, M. Prum a pu écrire[438], que « la clause dite de « paiement à première demande » constitue la manifestation la plus nette de l’autonomie d’une garantie par rapport à l’opération fondamentale ». La jurisprudence française a d’ailleurs pu assigner à cette clause la valeur d’une véritable présomption d’indépendance de la sûreté[439], comme l’avait fait avant elle, la doctrine et la jurisprudence allemande[440].

La clause « d’inopposabilité des exceptions » était, elle aussi censée refléter l’indépendance et l’autonomie de l’engagement du garant. Un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation du 2 février 1988, semblait même en avoir fait un critère essentiel quant à la qualification[441].

Mais dès 1992, la Cour de Cassation a pu juger[442], qu’une contregarantie par laquelle une banque « s’engageait irrévocablement et inconditionnellement à lui (bénéficiaire) payer une certaine somme » si « le donneur d’ordre…manque à son obligation de paiement », était un cautionnement. Cette décision de 1992, ouvrait la voie à l’arrêt du 13 décembre 1994[443], faisant de l’autonomie de l’objet de l’engagement du garant, l’instrument décisif de la qualification de garantie autonome. L’insertion de telles clauses, alors que l’engagement du garant serait déterminé eu égard à la dette du donneur d’ordre, n’est pas de nature à emporter la qualification de garantie autonome.

 

Aucune de ces deux stipulations, lorsqu’elles sont insérées dans un acte  l’objet de l’engagement du garant est déterminé par rapport à celui du donneur d’ordre, ne peut donc emporter à elle seule la qualification de garantie autonome. Il semble néanmoins possible, de considérer leur présence comme un indice fiable, dès lors qu’elle n’est pas contredite par ailleurs. La clause de renonciation à opposer toutes exceptions peut même apparaître plus significative, puisqu’il faut rappeler, que la Cour de Cassation l’a érigé en critère de qualification[444].

Comme le remarque A. Prüm[445], il y a une certaine redondance à insérer ces deux clauses dans un même acte. Mais pour cet auteur, elle est destinée à attirer l’attention du garant sur la rigueur de l’engagement souscrit, il s’agirait de « deux expressions équivalentes de l’autonomie »[446].

 

Si en droit interne, ces clauses n’ont que la valeur de simples indices d’interprétation pour le juge. Il semble toutefois que dans le cadre du commerce international, elles aient une plus grande portée[447], en raison du rôle qui jouent les usages, qui vont plutôt dans le sens de la conclusion de garanties autonomes que de cautionnements.

 

Certains auteurs[448] ont pu regretter, la disqualification d’un engagement comportant de telles clauses mais dont l’objet n’était pas défini de manière autonome, estimant, que c’était là une atteinte à la volonté des parties.

 Il est effectivement regrettable, qu’un certain manichéisme règne en jurisprudence. L’acte correspondra en effet, soit à un cautionnement, soit à une garantie autonome. Les garanties déterminées par référence à l’engagement du donneur d’ordre, seront systématiquement requalifiées en cautionnement, alors même que le garant s’est engagé à payer à première demande du bénéficiaire et à ne soulever aucune exception.

A cet égard, l’appel à la notion de constitut ou l’admission en droit français du cautionnement dit « à première demande »[449], respecteraient peut-être mieux la volonté des parties. Mais dans une telle hypothèse, si la volonté des parties n’était pas de conclure un cautionnement, nous avons pu montrer, qu’elle n’était pas non plus de conclure une garantie autonome.

La garantie autonome obéit à une logique propre, qui doit être respectée dans toutes ses dimensions. Comme l’écrit Ph. Simler[450], « il n’est pas possible de vouloir les avantages de l’autonomie tout en définissant la garantie de la même manière qu’un cautionnement ». L’engagement ne peut être à la fois accessoire et autonome. Des garanties stipulées payables « à première demande » et « sans pouvoir opposer aucune exception », ne sont pas véritablement autonome, si le garant s’engage à payer ce que doit ou devra le débiteur principal.

 

Dans une telle hypothèse, les parties n’ont pas entendu conclure une garantie autonome, à cet égard leur volonté n’est pas bafouée. Mais elles n’entendaient peut être pas souscrire un cautionnement accessoire, il y a alors lieu de considérer qu’elle n’a pas été tout à fait respectée. Aussi, nous faut-il nous intéresser désormais à d’autres sûretés personnelles, plus ou moins proches de la garantie autonome, proximité, pouvant là aussi être une source de confusion quant à la qualification.

 


 

 

SECTION 2. UNE CONFUSION ISSUE DE LA CONFRONTATION A D’AUTRES

                       SURETES PERSONNELLES

 

 

En raison des insuffisances du cautionnement accessoire, la pratique s’est très rapidement détachée des textes du Code civil pour tenter de conférer une plus grande sécurité au créancier. La garantie autonome est caractéristique de ce phénomène, mais elle n’en est pas le seul exemple. Toutes ces sûretés ou garanties, présentent des liens plus ou moins étroits avec la garantie autonome ou le cautionnement. A ce titre, elles sont susceptibles d’induire une certaine confusion dans l’esprit des justiciables, voire des juristes.

Si la qualification de garantie autonome s’opère essentiellement par rapport au cautionnement, il n’est pas inintéressant, de la confronter à d’autres formes de sûretés personnelles, plus ou moins accessoires. Autres formes de sûretés personnelles dont on peut penser à certains égards, qu’elles correspondent parfois plus à la volonté des parties, qu’une qualification de cautionnement ou de garantie autonome. Vis-à-vis de nouvelles sûretés personnelles, la garantie autonome peut venir, en tant que contrat nommé, servir de modèle voisin pour procéder à la qualification de ces conventions, avant qu’à leur tour, elles viennent grossir les rangs de la catégorie des contrats nommés.

 

Seules les sûretés personnelles récemment envisagées par la doctrine ou dégagées par la pratique retiendront notre intérêt. Leur application étant le plus souvent marginale par rapport à la garantie autonome, il faudra déterminer en quoi elles en diffèrent et s’interroger sur leur admissibilité dans la catégorie des sûretés personnelles en droit français.

Au sein de ces sûretés personnelles pouvant être envisagées par rapport à la garantie autonome, il est possible de distinguer, celles empruntant à des techniques présentent dans le Code civil (§1) de celles entièrement issues de la pratique (§2). Mais il est possible de considérer qu’en un sens, elles sont toutes issues de la pratique, celles trouvant un fondement dans un texte du Code civil, n’ayant pas été envisagées par celui-ci en tant que telles.

 

 

§1. LES SURETES PERSONNELLES EMPRUNTANT A DES TECHNIQUES

      ISSUES DU CODE CIVIL

 

 

La garantie autonome peut être confrontée à trois techniques du Code civil pouvant être utilisées sous la forme de sûretés personnelles; la solidarité passive (A), la promesse de porte-fort (B) et enfin, la délégation imparfaite (C).

 

 

A.     La solidarité passive

 

 

La solidarité passive est un mécanisme de garantie personnelle prévu par le Code civil aux articles 1200 à 1216. En principe, la solidarité est utilisée dans l’hypothèse  où dès le départ, plusieurs personnes sont débitrices d’un même créancier.

La solidarité permet d’échapper au principe selon lequel la dette doit se diviser entre les codébiteurs, puisque le créancier peut demander le paiement de la totalité de la dette à chaque codébiteur, sauf à celui qui a payé à se retourner contre le ou les autres pour récupérer ce qui excède sa part. En ce sens, la solidarité joue le rôle d’une garantie, puisque chaque codébiteur, étant intéressé à la dette, est à la fois débiteur principal (pour sa part) et garant (pour celle des autres). A la différence du cautionnement, il n’y a donc pas un débiteur principal et un garant.

L’engagement de chaque codébiteur n’est donc pas un engagement accessoire, même si l’un des codébiteurs est libéré envers le créancier, les autres peuvent continuer à être tenus. Le codébiteur solidaire est tenu plus sévèrement qu’une caution.

Ainsi, la Cour de Cassation a pu juger à plusieurs reprises[451], que si l’un des codébiteurs est en redressement ou en liquidation judiciaire et que le créancier omet de déclarer sa créance à la procédure collective, ce défaut de déclaration entraînera l’extinction de la dette de ce codébiteur, mais n’empêchera pas le créancier de poursuivre le ou les autres, alors qu’une caution aurait été libérée.

 

Toutefois, la solidarité dans sa forme originaire ne peut être confondue avec la garantie autonome ni même avec le cautionnement, puisque le codébiteur solidaire est pour une partie au moins de la dette, débiteur principal. La solidarité passive ne peut donc jouer le rôle d’une sûreté de substitution au cautionnement, comme peut l’être la garantie autonome[452].

Si la différence est donc a priori nette entre garantie autonome et solidarité passive, elle l’est moins lorsque le codébiteur solidaire n’est pas intéressé à la dette. Sous cette forme, la solidarité passive peut constituer une sûreté de substitution au cautionnement, comme la garantie autonome en droit interne.

En effet, selon l’article 1216 du Code civil, « Si l’affaire pour laquelle la dette a été contractée solidairement ne concernait que l’un des coobligés solidaires, celui-ci serait tenu de toute la dette vis-à-vis des autres codébiteurs, qui ne seraient considérés par rapport à lui que comme ses cautions». Selon un auteur[453], ce sont les règles de la solidarité qui doivent s’appliquer et non celles du cautionnement, quant au régime juridique de cette sûreté personnelle.

 

Mais cet article 1216 du Code civil ne fait guère l’objet d’applications pratiques[454]. Pour MM. Cabrillac et Mouly[455], l’explication réside dans « l’irréductible antinomie qu’il y a entre un engagement « désintéressé » (c’est-à-dire sans contribution) qui est, par nature une sûreté personnelle, et le régime imposé d’une solidarité qui repose sur l’intérêt, la contribution définitive de la dette ».

La confusion entre l’engagement d’un codébiteur solidaire non intéressé à la dette et l’engagement d’un garant autonome est peu probable. En effet, le codébiteur s’engage à payer la dette d’autrui, l’objet de son engagement n’est pas véritablement autonome. Il est donc possible de considérer à cet égard, que cet engagement est plus proche d’un cautionnement, même si la caution est tenue moins sévèrement.

 

 

B.     La promesse de porte-fort

 

 

Ce mécanisme consiste généralement pour une personne à promettre à son cocontractant le fait d’un tiers. De manière classique ce fait promis réside dans la ratification par le tiers d’un contrat. Il semble que c’est cette utilisation qui ait été envisagée par le Code civil[456], qui à tort, présente la promesse de porte-fort comme une exception au principe de l’effet relatif des contrats. En effet, il s’agit là d’un engagement personnel. Le porte-fort s’engage à ce que le tiers ratifie la convention, et si celui-ci ne ratifie pas, seul le porte-fort sera responsable.

Il est généralement considéré, que le porte-fort intervient simplement pour qu’un tiers conclue un contrat, et non pas pour qu’il l’exécute. Ainsi pour MM. Marty et Raynaud[457], « si le porte-fort promet de procurer l’engagement d’autrui, il ne promet nullement l’exécution de cet engagement ».

 

Mais de manière plus originale, certains auteurs[458] ont pu proposer d’utiliser la promesse de porte-fort pour faire naître à la charge du garant une obligation principale qui ne serait pas affectée par les exceptions touchant la dette garantie. Le porte-fort viendrait ici garantir l’exécution d’une obligation par un tiers.

L’article 1120 du Code civil est en effet rédigé en des termes très généraux, ainsi selon M. Ponsard[459], « l’on peut se porter fort pour l’accomplissement de toutes espèces de faits susceptibles de former l’objet d’une convention et en particulier d’un fait quelconque d’un tiers autre que la ratification d’un contrat ». Selon cet auteur, « se porter fort est le genre et la promesse de faire ratifier est l’espèce ».

 

Si la promesse de porte-fort sûreté semble pour l’heure inconnue du droit français, il est possible de considérer que rien n’interdit d’utiliser cette technique dans une hypothèse où le tiers serait déjà personnellement débiteur du bénéficiaire de la promesse. Le fait promis serait alors l’exécution de l’engagement du débiteur, le porte-fort apparaissant comme un garant de cette exécution. Le porte-fort s’engage dans ce cadre à indemniser le créancier, en cas d’inexécution du débiteur, en ce sens la promesse de porte-fort peut être qualifiée de « garantie indemnitaire »[460].

 

Par rapport au cautionnement, l’intérêt de cette nouvelle forme de sûreté personnelle réside dans le caractère non accessoire de l’engagement du garant. En effet, le porte-fort ne paye pas la dette du débiteur principal, mais il est personnellement responsable si le débiteur n’exécute pas son engagement et ceci quelle que soit la cause de cette inexécution.

Pour cette raison, la promesse de porte-fort est parfois rangée dans la catégorie des garanties autonomes[461]. Ce qui peut se justifier, puisque le principe de l’inopposabilité des exceptions s’applique à ce type d’engagement.

Mais comme l’écrit Ph. Simler[462], en réalité la question ne se pose pas,  dès lors que l’objet d’une promesse de porte-fort « est la réparation d’un préjudice causé par l’inexécution de l’obligation garantie. Certes, cette obligation a du exister, être valable et exigible, ne pas avoir été éteinte…Mais la question est alors celle de la réalité du préjudice et du lien de causalité entre ce préjudice et l’inexécution alléguée, et non celle de l’opposabilité des exceptions tenant à l’obligation garantie ».

 

La garantie autonome a pu être envisagée comme une application de cette forme de promesse de porte-fort[463], et plus généralement comme une garantie indemnitaire[464], en ce qu’elle aurait pour fonction de réparer forfaitairement un préjudice éventuel. Mais la garantie autonome quand elle vient se substituer au traditionnel cautionnement accessoire, n’a pas pour objet la réparation d’un quelconque préjudice, mais le paiement par le garant d’une somme d’argent déterminée. Le bénéficiaire n’a pas alors à justifier d’un éventuel préjudice et encore moins de l’inexécution d’une obligation par le donneur d’ordre.

Il est en outre possible de souligner, comme le fait M. Simler[465], que « cette qualification rapprocherait dangereusement la garantie autonome de la clause pénale, judiciairement réductible en droit interne ( article 1152 du Code civil) », ce qui irait totalement à l’encontre de la finalité de cette sûreté. Cet auteur souligne par ailleurs, que le cumul d’une clause pénale à la charge du débiteur principal et d’une garantie autonome est parfaitement possible.

 

Une explication à cette confusion réside peut être dans une analyse du droit comparé. Nous pourrons observer par la suite, que même si elle s’en écarte sur plusieurs aspects, la garantie autonome est proche du « garantievertrag » ou contrat de garantie de droit allemand, lui-même dérivée de la « promissio indemnitatis » romaine. Il s’agit là, d’une garantie non accessoire[466], ayant vocation à indemniser un créancier en raison de l’inexécution de son débiteur. En ce sens, la promesse de porte-fort utilisée comme sûreté personnelle semble donc fortement s’en rapprocher.

D’ailleurs en droit suisse, le garantievertrag, a été rattaché par la doctrine à l’article 111 du Code des obligations suisse[467], généralement considéré comme l’équivalent de l’article 1120 du Code civil français relatif à la promesse de porte-fort. A ce titre, il faut remarquer que ce contrat de garantie (garantievertrag) est souvent dénommé « porte-fort » par la doctrine francophone[468].

Comme avec l’article 1120, l’effet de ce contrat de garantie n’est pas d’obliger le tiers[469], mais simplement d’obliger le promettant à indemniser le bénéficiaire de la promesse de porte-fort au cas où le tiers n’accomplirait pas le fait promis[470].

 

Alors que la caution s’engage à exécuter l’obligation garantie, le porte-fort s’engage à indemniser le créancier si le fait du tiers qu’il a promis ne se réalise pas[471]. Quant au garant autonome, il s’engage à payer telle somme d’argent, le plus souvent à première demande du créancier. L’objet de ces différentes obligations apparaît ici déterminant quant à la qualification de ces différentes sûretés personnelles[472].

 

Toujours dans le cadre des sûretés personnelles non accessoires empruntant à des techniques du Code civil, il nous faut envisager la délégation imparfaite, qui lorsqu’elle est utilisée sous cette forme, a pu être qualifiée de « fausse jumelle »[473] de la garantie autonome.

 

 

C.     La délégation imparfaite

 

 

La délégation est envisagée par l’article 1275 du Code civil au titre des modes d’extinction des obligations. Selon cet article, « la délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s’oblige envers le créancier, n’opère point novation, si le créancier n’a expressément déclaré qu’il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation ».

Selon MM. Weill et Terré[474], « la délégation est une opération par laquelle une personne (le délégué) sur ordre d’une autre (le délégant) accepte de contracter une obligation envers une troisième (le délégataire) ».

 

Cette définition par son caractère large, est susceptible de venir rendre compte de la variété d’hypothèses recouvrées par la délégation. En effet, deux formes de délégation sont traditionnellement distinguées. La délégation « parfaite » ou « novatoire », dans laquelle le délégataire déclare expressément qu’il décharge son débiteur initial le délégant, la délégation opère alors novation par changement de débiteur[475]. Dans cette hypothèse, le délégué, nouveau débiteur, vient se substituer au délégant, débiteur initial du créancier délégataire, ce qui a pour effet principal l’extinction de la dette préexistante. Mais la délégation peut aussi être dite « imparfaite » ou « simple », dans l’hypothèse  le délégataire n’entend pas libérer le garant, la délégation n’emporte alors pas novation.

 

C’est la délégation simple, qui est susceptible de venir jouer le rôle d’une sûreté personnelle de substitution au cautionnement. Mais pour cela, le délégué ne doit pas s’engager envers le délégataire parce qu’il serait le débiteur du délégant. Car dans une telle hypothèse, en payant, il éteint sa propre dette et ne dispose donc d’aucun recours contre le délégant. Il s’agit alors selon les expressions de MM. Cabrillac et Mouly[476], d’une « délégation-paiement » et non d’une « délégation-sûreté », cet engagement ne répond pas aux critères traditionnels de la notion de sûreté personnelle[477].

 

Dans l’hypothèse d’une délégation-sûreté, le délégué s’engage donc auprès d’un créancier pour éteindre une dette qui lui est étrangère et il dispose par la suite d’un recours contre le délégataire. A ce titre son engagement peut être qualifié de  sûreté personnelle.

La Cour de Cassation a expressément reconnu la possibilité de conclure de tels engagements. Tout d’abord, elle a admis, que le délégué pouvait s’engager sous la condition que le délégant serait ultérieurement son créancier[478]. Puis elle a considéré, « qu’il importait peu que (le délégué) ait été ou non, débiteur à l’égard du délégant »[479].

 

Si dans ce cadre, cette sûreté personnelle emprunte bien à une technique issue du Code civil, le résultat est tellement éloigné du postulat de départ, que l’on peut certainement parler à cet égard de contrat innomé. Il s’agirait là d’un contrat « innomé-décomposition » selon la terminologie propre à F. Terré[480].

 

Lorsque la délégation imparfaite constitue une sûreté, le délégué ne peut opposer aucune exception tenant à ses rapports personnels avec le délégant. C’est ce qui fait l’originalité de la délégation par rapport à la cession de créance. Cette règle s’applique aussi en matière de cautionnement et de garantie autonome, ce qui ne doit pas surprendre, car c’est la solution adoptée pour toute sûreté personnelle[481]. Il est en effet possible de considérer, que les raisons pour lesquelles le garant s’oblige sont en principe étrangères au créancier garanti[482].

 

Quant à l’opposabilité par le délégué au délégataire des exceptions tirées du rapport délégant-délégataire, il faut à nouveau faire une distinction au sein de la catégorie des délégations imparfaites.

Il est ici nécessaire de distinguer entre délégation certaine et délégation incertaine[483]. S’il s’agit d’une délégation incertaine (incerta), le délégué doit alors payer ce que doit le débiteur principal délégant[484]. Le rapprochement, voire la confusion, avec le cautionnement semble alors s’imposer. Si la délégation est certaine (certa), le délégué est alors un garant qui doit payer sans référence à la dette du débiteur principal délégant[485]. Cette solution a pu conduire certains auteurs à opérer un rapprochement étroit entre garantie autonome et délégation certaine[486]. Dans le cadre d’une délégation incertaine, le délégué pourra soulever les exceptions tirées du rapport principal entre le créancier délégataire et le débiteur délégant, alors qu’en matière de délégation certaine, il ne le pourra pas.

 

Ces éléments plaident en faveur d’un rapprochement de la délégation imparfaite utilisée sous cette forme avec la garantie autonome. Pour autant, plusieurs arguments incitent à ne pas confondre ces deux mécanismes[487]. D’ailleurs, la Cour de Cassation elle-même fait clairement la distinction puisque dans un arrêt du 12 décembre 1984, elle a pu juger, que l’engagement du garant « ne constituait pas plus un cautionnement qu’une délégation, mais une obligation autonome… »[488].

 

On rappellera tout d’abord, que pour certains auteurs, même minoritaires, la délégation imparfaite utilisée sous forme de sûreté personnelle, n’a plus d’une délégation que le nom[489]. Mais nous l’avons évoqué, la jurisprudence[490] et la doctrine[491] rejettent fermement cette conception restrictive de la délégation. Pour autant, on ne peut nier, que la délégation est avant tout un mode d’extinction des obligations. Si elle peut être mise en œuvre en tant que sûreté personnelle, ces applications sont marginales eu égard au cautionnement (qui s’apparenterait donc à une delegatio incerta) et à la garantie autonome(qui se rapprocherait donc d’une delegatio certa).

 

Alors que le caractère original de la garantie autonome serait remis en cause par le biais de la delegatio certa. Personne ne songe véritablement à remettre en cause la qualification de cautionnement, au motif qu’il s’apparenterait à une delegatio incerta[492]. Alors même qu’il semble que la parenté ici soit plus grande, qu’entre garantie autonome et delegatio certa[493]. L’origine romaine de la distinction entre delegatio certa et delegatio incerta, ne peut constituer un argument en faveur de l’analogie entre délégation imparfaite et garantie autonome. En effet, le cautionnement était lui aussi, connu du droit romain[494]. La distinction s’imposait donc déjà et elle doit encore être faite. Tout comme doivent être distinguées garantie autonome et délégation incertaine.

 

L’étude du régime juridique propre à chacun de ces mécanismes est une raison de plus au rejet de l’analogie.

 

Comme le relève M. Simler[495], l’obligation du délégué n’est jamais exécutoire à première demande, il peut donc solliciter des délais de grâce, ce qui est impossible pour un garant à première demande.

En outre, le principe de l’inopposabilité des exceptions est beaucoup moins rigoureux en matière de délégation. Il a été observé, qu’en matière de garantie autonome, le donneur d’ordre ne peut en aucun cas s’opposer à l’exécution de son obligation par le garant. Dans le cadre d’une délégation imparfaite, si le délégant est lui-même créancier du délégataire, il peut s’opposer au paiement de son obligation par le délégué par une demande de mise sous séquestre ou, par une saisie-arrêt. La Cour de Cassation a pu le confirmer par son arrêt du 12 décembre 1984[496].

Enfin, selon Ph. Simler[497], si comme en matière de garantie autonome, l’engagement du délégué doit être paralysé en cas de fraude ou d’abus manifeste du créancier, cette fraude ou cet abus n’a pas à être manifeste. Le délégué devant « être autorisé à prouver par tous moyens, conformément au droit commun, que l’action en exécution du délégataire est frauduleuse ou abusive ».

Le régime de cette délégation-sûreté est donc moins rigoureux à l’égard du délégué, que ne l’est celui de la garantie autonome envers le garant. Etant en présence de deux régimes juridiques distincts, il faut bel et bien considérer, que la garantie autonome n’est pas une forme particulière de délégation.

Il faut par ailleurs signaler, qu’actuellement, la portée du principe d’inopposabilité des exceptions est plutôt incertaine en matière de délégation. Il existe en effet une divergence de jurisprudence entre la Chambre commerciale et la Première chambre civile de la Cour de Cassation.

Dans un arrêt du 17 mars 1992[498], cette dernière a pu juger sous le visa de l’article 1275 du Code civil, qu’en matière de délégation imparfaite, « sauf convention contraire, le délégué est seulement obligé au payement de la dette du délégant envers le délégataire, et qu’il se trouve déchargé de son obligation lorsque la créance de ce dernier est atteinte par la prescription ». Cela revient à affirmer, que la règle de l’inopposabilité des exceptions ne s’applique pas ici. Quant à la Chambre commerciale, quelques semaines plus tôt[499], elle a considéré de manière totalement contraire, « qu’en cas de délégation de payement imparfaite, le délégué ne peut, sauf clause contraire, opposer au délégataire les exceptions dont le délégant pouvait se prévaloir à l’égard de celui-ci ».

 

Ces incertitudes quant au principe d’inopposabilité des exceptions en matière de délégation imparfaite, misent en parallèle avec le caractère relativement stable à l’heure actuelle du régime juridique de la garantie autonome, n’incitent pas à considérer celle-ci comme une variété de celle-là.

 

La garantie autonome ne s’apparente véritablement à aucune de ces sûretés personnelles empruntant à des techniques issues du Code civil, même si, quelques hypothèses marginales de confusion sont apparues en pratique avec la délégation imparfaite.

 

 

§2. LES SURETES PERSONNELLES ISSUES DE LA PRATIQUE

 

 

Deux types de sûretés personnelles peuvent être étudiés dans un tel cadre. Les garanties « indemnitaires » (A), qui ont vocation, à indemniser le bénéficiaire du fait de l’inexécution du débiteur. Mais il est aussi nécessaire, d’évoquer le constitut, et le cautionnement dit « à première demande » (B).

 

 

A.     Les garanties « indemnitaires »

 

 

Au titre de ces garanties indemnitaires, figure la promesse de porte-fort lorsqu’elle est utilisée sous la forme d’une sûreté personnelle. Mais ce mécanisme ayant son fondement dans le Code civil, il a déjà été évoqué. La garantie autonome sera ici mise en parallèle, d’une part, avec la lettre d’intention, et d’autre part, avec les garanties indemnitaires présentes dans les droits étrangers.

 

 

 

 

1.      La lettre d’intention

 

La lettre d’intention, est une création relativement récente de la pratique[500], en tant qu’instrument de garantie. Elle peut se définir comme un « document par lequel un tiers exprime à un créancier, en des termes variables et généralement imprécis, son intention de soutenir son débiteur afin de lui permettre de remplir ses engagements »[501].

 

Mais le terme de « lettre d’intention » peut aussi être utilisé dans un contexte juridique très différent. Il peut désigner des engagements de principe qui sont pris par une partie au cours de la négociation d’un contrat. Par ces engagements, les futurs contractants définissent le cadre et les limites des négociations, ainsi que leur intention de parvenir à un accord. En raison de cette polysémie et pour éviter toute confusion, certains auteurs préfèrent donc les appellations de « lettre de confort » ou de « patronage », lorsque cet engagement vient jouer le rôle d’une garantie.

 

Les lettres d’intention se sont surtout développées dans le contexte des groupes de société. Le plus souvent, une société membre d’un groupe désire obtenir un crédit auprès d’une banque, qui lui demandera de fournir une garantie émanant d’un autre membre du groupe, généralement la société mère. Cette société mère va alors adresser une lettre d’intention à la banque, c’est-à-dire un document lui promettant de faire « tout le nécessaire » ou « tout son possible » pour que sa filiale soit en mesure de remplir les engagements qu’elle aura contractés envers la banque.

La lettre d’intention aurait vocation à se développer dans un climat de confiance, alors que la garantie autonome naîtrait dans un climat de suspicion[502]. En effet, l’honorabilité de l’auteur de la lettre est censée aux yeux des destinataires conforter le crédit du débiteur initial. La sécurité du créancier proviendrait précisément de l’influence exercée, en droit ou en fait, par l’auteur de la lettre de confort sur le débiteur garanti[503].  Mais la nature juridique de la lettre d’intention est en réalité susceptible de plusieurs analyses, qui ne posent pas toutes les mêmes difficultés au plan de la qualification.

 

 

a.      Nature juridique

 

La notion de lettre d’intention en tant que sûreté personnelle peut recouvrir différentes formes. La Cour de Cassation l’a expressément affirmé dans un arrêt du 21 décembre 1987[504].

Parfois, la lettre d’intention contiendra une simple promesse morale, un engagement d’honneur ne liant pas juridiquement son auteur[505]. Dans d’autres hypothèses, plus nombreuses, la lettre d’intention fera naître un véritable engagement juridique, mais cet engagement peut lui-même avoir une portée variable.

 

Il se peut que l’engagement dissimule en réalité un véritable cautionnement, l’auteur de la lettre s’engageant à payer à la place du débiteur[506]. Cet acte doit alors être requalifié en tant que tel. Mais d’autres lettres d’intention, les seules susceptibles de répondre à la qualification de sûreté personnelle de substitution au cautionnement, comportent des engagements de faire ou de ne pas faire (plus rarement), constitutifs, tantôt d’une obligation de moyens, tantôt d’une obligation de résultat.

La lettre d’intention est constitutive d’un engagement non de payer, mais de faire en sorte que le débiteur soit en mesure de payer[507]. Ce n’est pas la même chose, car une telle obligation de faire peut être satisfaite de diverses manières, qui n’impliquent pas nécessairement un paiement à la place du débiteur garanti : apport en capitaux, des avances en compte courant, l’octroi de garanties réelles ou personnelles, la fourniture de marchés…

Selon Ph. Simler[508], la sanction d’une telle obligation de faire résidant comme le prévoit l’article 1142 du Code civil en « un paiement de dommages et intérêts. La garantie constituée par une lettre d’intention, si elle renferme une telle obligation, est donc une autre espèce du genre des garanties indemnitaires ».

 

Si le souscripteur est tenu d’une obligation de résultat, il doit faire en sorte que le débiteur exécute ses obligations, sachant que s’il n’y arrive pas, il est de plein droit tenu de réparer le préjudice subi par le créancier du fait de cette inexécution, sauf à rapporter la preuve d’une cause étrangère. S’il n’est tenu que d’une obligation de moyens, le créancier devra prouver la faute commise par le souscripteur dans l’exécution de son obligation de faire. Selon qu’il s’agit d’une obligation de moyens ou de résultat, les problèmes de qualification posés ne seront pas les mêmes.

 

 

b.      Problèmes de qualification

 

Avant toute chose, il est nécessaire de relever que la lettre d’intention se distingue du cautionnement. En effet, le souscripteur s’est engagé à faire « tout son possible » ou à « mettre tout en œuvre » pour que le débiteur puisse remplir ses engagements envers le destinataire de la lettre. Mais il ne s’engage pas comme la caution à payer la dette de celui-ci s’il s’avère défaillant.

 

Par rapport à la garantie autonome, seules les lettres d’intention comportant une obligation de résultat peuvent éventuellement en être rapprochées. Pour celles comportant une obligation de moyens, c’est au créancier de prouver la faute commise par le souscripteur dans l’exécution de son obligation de faire, ce qui ne saurait être admis en matière de garantie autonome.

Il serait possible de considérer, que les lettres d’intention contenant une obligation de résultat ne donnent pas prise à l’opposabilité des exceptions, et qu’en ce sens, elles se rapprochent de la garantie autonome. Le souscripteur est tenu de réparer le préjudice et ce, en raison d’une obligation de résultat, il ne saurait donc s’y soustraire. Mais comme l’écrit Ph. Simler[509], comme pour la promesse de porte-fort, le problème de l’opposabilité ou non des exceptions pour ce type de garanties ne se pose même pas, « dès lors que leur objet est la réparation d’un préjudice causé par l’inexécution de l’obligation garantie »[510].

 

Surtout, alors que le garant est tenu de payer une somme déterminée, sans que cet engagement ne soit en rapport avec un quelconque préjudice subi par le bénéficiaire, le souscripteur d’une lettre d’intention est tenu d’une obligation de faire[511], obligation qui se résout en dommages-intérêts, comme le prévoit l’article 1142 du Code civil. Si l’obligation principale était de somme d’argent, le résultat sera peut être le même que si le souscripteur avait été tenu de payer la ou les dettes garanties mais le fondement sera différent. L’objet est ici encore un instrument décisif quant à la qualification[512].

 

La distinction entre garantie autonome et de telles lettres d’intention se poursuit d’ailleurs quant à leurs régimes juridiques respectifs. On prendra pour exemple l’application de l’article 1326 du Code civil, qui s’il est applicable aux garanties autonomes, ne doit pas l’être en principe pour les lettres d’intention. L’engagement est en général dépourvu de contre-partie, mais il n’est ni de « payer une somme d’argent », ni de « livrer un bien fongible »[513].

 

Si lettre d’intention et garantie autonome ne semblent pas devoir être confondues. La situation est moins claire quant à la distinction entre certaines lettres d’intention et la promesse de porte-fort.

En effet, comme nous avons pu l’évoquer, lorsque le souscripteur d’une lettre d’intention est tenu d’une obligation de résultat, il est tenu de plein droit d’indemniser le bénéficiaire en cas d’inexécution sauf à prouver que celle-ci est due à une cause étrangère. L’objet de son obligation réside donc dans l’indemnisation du préjudice causé par l’inexécution. Or, tel est également l’objet de l’engagement du porte-fort[514] lorsque celui-ci a promis l’exécution d’un contrat par un tiers. Ce porte-fort ne s’oblige ni à payer la dette de ce tiers (cautionnement) ni à exécuter une obligation nouvelle et indépendante souscrite à titre de garantie (garantie autonome), mais à réparer le préjudice causé au créancier par l’inexécution de l’obligation garantie.

Comme le souligne Ph. Simler[515], « par définition, cette obligation du porte-fort est de résultat ». Aussi, le souscripteur d’une lettre d’intention comportant une obligation de résultat est tenu exactement de la même manière que ce porte-fort. Leur engagement à tous deux consiste à réparer le préjudice causé au créancier par l’inexécution de l’obligation garantie. Il semble donc, qu’il faille considérer, que « rien, hormis l’appellation, ne différencie les deux hypothèses. Ce qui est identique mérite une dénomination identique » [516]. Seules subsisteraient dans une telle optique, les lettres d’intention n’étant constitutives que d’une obligation de moyens, car elles ne seraient réductibles à aucune autre notion.

 

La confusion entre ces garanties indemnitaires que sont la promesse de porte-fort sûreté et la lettre d’intention avec la garantie autonome doit donc pouvoir être évitée en pratique, car elles n’ont pas le même objet[517]. Mais une telle étude se devait de confronter la garantie autonome à ces nouvelles formes de sûretés personnelles. Mais entre promesse de porte-fort sûreté et certaines lettres d’intention, nous l’avons vu, la ligne de partage est floue, au point, qu’il est possible de considérer que la distinction ne se justifie pas toujours.

 

Cette éventuelle identité ne doit pas surprendre. En effet, les garanties indemnitaires issues des droits étrangers se rapprochent nettement de ces deux procédés, au point qu’elles en constituent peut être le fondement commun. Dans le même temps, la garantie autonome a pu être présentée comme une application de ces garanties indemnitaires présentes dans les droits étrangers et notamment du « garantievertrag » allemand. Mais nous allons pouvoir observer, que si les liens sont étroits entre ces garanties indemnitaires étrangères et les lettres d’intention ou la promesse de porte-fort, l’analogie avec la garantie autonome doit être rejetée et ce, pour les mêmes raisons qui ont conduit à repousser une éventuelle confusion entre garantie autonome et promesse de porte-fort ou lettres d’intention.

 

 

2.      Les garanties indemnitaires en droits étrangers

 

 

Avant même le développement des garanties autonomes dans le cadre du commerce international, le droit allemand connaissait déjà une sûreté personnelle non accessoire, le « contrat de garantie » ou « garantievertrag » (a), qui a son équivalent en droit anglais avec le « contract of indemnity » (b).

Il s’agit là, de deux garanties indemnitaires, aussi M. Ancel les regroupe sous une définition commune[518], « il s’agit d’un contrat par lequel une personne (le garant) s’engage de manière indépendante à indemniser une autre personne (le bénéficiaire) pour le cas  celle-ci ne recevrait pas une prestation qui lui a été promise par un tiers ». Les effets de ces mécanismes sont proches de ceux de la garantie autonome en tant que substitut du cautionnement, mais leur fondement est profondément différent.

 

 

a.      le « garantievertrag » de droit allemand

 

Ce contrat de garantie est connu de longue date en Allemagne, puisque la première étude le concernant est datée de 1886[519]. Son origine historique remonterait à Rome,  où sous le nom de promissio indemnitatis ou fidejussio indemnitatis[520], il consistait pour la personne obligée à répondre du fait d’autrui et à indemniser le cocontractant, au cas d’inexécution par le tiers du fait promis.

Mais par la suite, la notion se serait élargie jusqu’à désigner au Moyen Age, toute forme de sûreté personnelle y compris le cautionnement et l’assurance. Ce n’est qu’à partir du XVIIIeme siècle que la distinction entre les différentes variétés de sûretés personnelles serait réapparue[521], c’est-à-dire entre la garantie au sens strict,  où l’obligation du garant est autonome, et le cautionnement accessoire.

 

Ce contrat de garantie n’a aucun fondement légal. Pour Boetius, auteur d’une thèse sur le « garantievertrag »[522], « il s’agit d’un contrat synallagmatique par lequel le garant assure un intérêt patrimonial du bénéficiaire en lui promettant de réparer le dommage né de la non-réalisation de cet intérêt ». Mais pour le Bundesgerichthof[523], il s’agit au contraire, d’un « contrat unilatéral par lequel l’un des contractants assume la responsabilité pour l’avènement d’un certain risque ». La validité de ce contrat est fondée sur le respect de l’autonomie de la volonté[524]. Quant à sa nature juridique, la majorité des auteurs affirment son caractère abstrait[525].

 

La différence avec le cautionnement, réside dans le caractère non-accessoire du contrat de garantie. Le garant indemnitaire ne s’engage pas à exécuter l’obligation du débiteur primitif mais s’oblige à titre personnel à indemniser le bénéficiaire. Cette séparation stricte entre garantie et cautionnement accessoire se retrouve en droit suisse et autrichien[526] mais aussi en droit anglais.

 

 

 

 

b.      Le « contract of indemnity » de droit anglais

 

De la même manière que les droits germaniques, le droit anglais connaît à côté du cautionnement dit « guarantee », une sûreté personnelle non accessoire dénommée « contract of indemnity ». Il semble là encore, s’agir d’un dérivé de la promissio indemnitatis romaine[527].

Ce contrat de garantie se définit comme, « un contrat par lequel le garant s’engage à réparer le dommage que le bénéficiaire peut subir du fait de sa participation à une affaire déterminée »  [528]. Selon P.C. Curtis[529], le promettant (promisor) contracte là, une obligation originale et indépendante d’indemnisation, distincte d’un contrat collatéral comme la « guarantee ». Le « contract of indemnity » correspond donc parfaitement au « garantievertrag », ce qui accrédite leur origine romaine commune.

 

Il est ici intéressant de rappeler, que le droit suisse connaît aussi une garantie indemnitaire, que les juristes suisses germanophones dénomment aussi « garantievertrag »[530]. Cette doctrine suisse se réfère d’ailleurs, aux travaux de Stammler qui a mis à jour le contrat de garantie en Allemagne, et au-delà, à la promissio indemnitatis[531]. Cette garantie indemnitaire non accessoire est rattachée par les juristes suisses à l’article 111 du Code des obligations suisse, qui est généralement considéré comme l’équivalent de l’article 1120 du Code civil français prévoyant la promesse de porte-fort.

Promesse de porte-fort sûreté et lettres d’intention contenant une obligation de résultat se révèlent donc très proches de ces garanties indemnitaires existant à l’étranger et découlant de la promissio indemnitatis romaine. La parenté ne semble pas aussi évidente avec la garantie autonome et pour les mêmes raisons que celles conduisant à rejeter l’analogie avec la promesse de porte-fort et les lettres d’intention.

 

Toutefois, la doctrine française a souvent été tentée, de se référer au « garantievertrag » pour rendre compte des garanties autonomes[532] ou tout au moins, de considérer que la garantie autonome a une nature de garantie indemnitaire[533]. Cela ne doit pas étonner, puisque selon M. Ancel[534], il semble qu’en Allemagne aussi, garantie indemnitaire et garantie autonome soient souvent confondues, à quelques exceptions près[535].

 

Mais à l’heure actuelle, bon nombre d’auteurs considèrent[536] que la garantie autonome n’a pas une nature indemnitaire, elle n’a pas pour fonction de réparer forfaitairement un préjudice éventuel. L’appel en paiement de la garantie peut avoir lieu, quelle que soit la situation du bénéficiaire que celui-ci ait subi un préjudice ou non. Ainsi, le bénéficiaire est entièrement libre d’appeler le garant en paiement, alors même que le donneur d’ordre peut avoir parfaitement exécuté les obligations mises à sa charge en vertu du rapport fondamental. La question de l’inopposabilité des exceptions ne se pose pas dans les mêmes termes, dans la mesure  l’objet de ces garanties indemnitaires est la réparation d’un préjudice causé par l’inexécution de l’obligation garantie[537].

 

Il semble qu’il soit possible de considérer avec M. Simler[538], qu’il existe en réalité, deux familles de garanties « non accessoires ». Les unes ont en commun, l’inopposabilité des exceptions relatives à l’obligation garantie, ce sont les garanties autonomes lato sensu, en ce que leur régime n’est pas tributaire dans une mesure variable de celui de l’obligation principale. Entrent dans cette famille, la délégation mise en œuvre comme technique de garantie, le constitut et les garanties autonomes stricto sensu.

Les autres ont pour objet la réparation par un tiers du préjudice subi par le créancier garanti. Elles consistent dans l’engagement pris par un tiers de prendre en charge le préjudice pouvant être causé au créancier en raison de l’inexécution de l’obligation garantie. Selon cet auteur, elles ont par conséquent pour objet une obligation de faire et non, comme les précédentes, de payer ; en cela leur régime n’est pas directement tributaire d’une opposabilité ou inopposabilité des exceptions tenant à l’obligation principale mais seulement de l’existence ou non d’un préjudice résultant de l’inexécution de cette obligation. Font partie de cette famille, les lettres d’intention, la promesse de porte-fort, et il est possible d’y ajouter, le garantievertrag ou le contract of indemnity.

Il règne actuellement une grande incertitude au sein de ces garanties indemnitaires[539], alors que dans le même temps la qualification et le régime juridique de la garantie autonome semblent se stabiliser. La légitimité et l’originalité de ces nouvelles qualifications doivent donc être appréciées par rapport à la garantie autonome et non l’inverse. Elles peuvent avoir leur place dans la catégorie des sûretés personnelles mais il faut considérer qu’en cas de doutes, elles ont un caractère subsidiaire par rapport à la garantie autonome qui n’est pas entourée d’autant d’incertitudes.

 

D’autres sûretés personnelles quant à elles, n’ont pas pour finalité l’indemnisation du créancier en cas d’inexécution du débiteur initial, mais d’assurer la satisfaction de ce créancier car elles ont pour objet non la « dette même » du débiteur, mais la « même dette ». Ce type d’engagement est relativement indépendant, ce qui peut conduire à les rapprocher de la garantie autonome. Il s’agit là du constitut, qui semble être redécouvert par la doctrine comme par la jurisprudence, et du cautionnement à première demande, dont il faut se demander s’il peut être admis en droit français.

 

 

B.     Constitut et cautionnement à première demande

 

Toujours pour échapper aux règles protectrices de la caution, deux nouvelles formes de garanties personnelles ont pu être évoquées. L’une d’entre était déjà connue du droit romain, il s’agit du pacte de constitut ou, constitutum debiti alieni. Mais au-delà même de ce retour aux sources, la possibilité d’un cautionnement « à première demande », c’est-à-dire, dépourvu de caractère accessoire, a pu être envisagée.

 

 

1.      Le pacte de constitut[540]

 

Le droit romain classique, connaissait le cautionnement (fidejussio), mais ce n’était pas la seule sûreté personnelle. En effet, le préteur a en plus, ajouté l’actio pecunia constituta à une convention nue (c’est-à-dire sans stipulatio formelle), action qui est à l’origine du pacte prétorien dit « de constitut »[541].

 

La différence par rapport à la caution réside dans le caractère autonome d’un tel engagement de payer la dette d’autrui. Le constituant, c’est-à-dire le souscripteur du constitut, est redevable d’une obligation qui lui est réellement propre et non d’une obligation qui tire sa subsistance de l’obligation de quelqu’un d’autre, elle est « pleine et entière » comme l’écrit F. Jacob[542]. Aussi, on comprend, que pendant un temps, un certain nombre d’auteurs ont cru voir dans la garantie autonome une résurgence du constitut romain[543]. Cet engagement, qui se situe entre cautionnement et garantie autonome, a peut être la place pour y exprimer son originalité.

 

Le constituant s’engage comme la caution à éteindre la dette du débiteur garanti. Mais l’obligation du constituant n’est pas comme celle de la caution, une pure adhésion à l’obligation pour laquelle le pacte est fait[544]. Son engagement est indépendant et non accessoire. Plus précisément, selon F. Jacob, le constituant s’oblige à payer « non la dette même du débiteur garanti, mais la même dette »[545]. Le tiers qui a contracté un constitut est considéré comme un débiteur à titre principal et non comme une caution.

Aussi, son obligation ne suit pas comme celle d’une caution le sort de l’obligation principale. Elle peut donc être plus onéreuse que celle-ci. De même, alors que la dette du débiteur principal serait conditionnelle ou non exigible, celle du constituant pourrait être pure et simple ou immédiatement exigible[546].

 

L’obligation du constituant est comme à Rome, une obligation nouvelle et autonome, mais l’objet et le quantum de cette obligation sont tout de même déterminés par rapport à l’obligation pesant sur le débiteur au titre du contrat de base[547], ce qui constitue une différence fondamentale par rapport à la garantie autonome.

Le principe de l’inopposabilité des exceptions règne là encore, ce qui rapproche cet engagement de la garantie autonome. Le constituant ne peut invoquer les bénéfices de division ou de discussion et il ne peut opposer au créancier ni les exceptions personnelles au débiteur principal, ni même celles qui seraient inhérentes à la dette. Autre avantage du constitut par rapport au cautionnement, le créancier bénéficiaire du constitut peut agir contre le souscripteur de l’engagement alors même qu’il n’aurait pas déclaré sa créance au représentant des créanciers[548].

 

Mais à la différence du garant autonome, le constituant ne s’engage pas à payer une somme forfaitairement prédéterminée. La dette garantie doit exister et être liquide (ce qui n’est pas exigé pour une garantie autonome), mais il n’est pas nécessaire qu’elle soit certaine et exigible[549], ce qui exclut que le constitut soit « payable à première demande ». La dette principale vient ici jouer le rôle d’un instrument de mesure du quantum de l’obligation propre du constituant[550]. Il en résulte, qu’à la différence d’un garant autonome, le constituant ne saurait être engagé pour un montant supérieur à celui de la dette principale[551]. La définition de l’objet de l’engagement doit là encore permettre de faire la distinction entre constitut et garantie autonome.

 

Le principe d’inopposabilité des exceptions n’est pas aussi absolu qu’en matière de garantie autonome. En effet, il semble que le garant puisse opposer les exceptions tenant à l’inexistence initiale de la dette garantie ou à son extinction, soit par la renonciation volontaire du créancier, soit par la satisfaction directe ou indirecte de ce dernier, emportant disparition de toute obligation de règlement[552]. Enfin, le constituant peut à l’évidence invoquer la fraude ou l’abus de droit, sans pour autant qu’il n’ait à en prouver le caractère manifeste.

 

Il est possible de trouver trace en jurisprudence de certains engagements répondant à la définition du constitut[553]. Cela laisse à penser que cette convention peut trouver une place au sein du droit français des sûretés personnelles, entre cautionnement et garantie autonome. Mais s’il se confirme que le constitut retrouve une seconde jeunesse, cela risque de fermer définitivement la porte en droit français à l’admission du cautionnement dit « à première demande », qui lui aussi, se situerait entre cautionnement accessoire traditionnel et garantie autonome.

 

 

2. De l’admission en droit français d’un cautionnement à première demande

 

Depuis 1979[554], le droit allemand[555] connaît un cautionnement dit « à première demande », alors même que comme en droit français, le principe de l’accessoire y est considéré comme étant de l’essence du cautionnement[556].

Dans l’affaire du 2 mai 1979, il s’agissait d’une « déclaration de cautionnement » souscrite par un établissement financier qui faisait état de la volonté de celui-ci, de renoncer aux bénéfices de « contestation » et de compensation, et d’autre part, de sa volonté de payer « à première demande » du créancier. Le Bundesgerichtshof appelé à interpréter la convention considéra qu’il s’agissait bien là d’un cautionnement, mais il énonça aussi, que « bien que l’accord sur le paiement à première demande soit considéré comme un indice de la présence d’une garantie (« autonome »), une telle clause ne doit pas toujours exclure le cautionnement ». Cette décision a par la suite été confirmée à plusieurs reprises[557].

 

Dans le cadre d’un cautionnement à première demande, la caution doit donc payer immédiatement, mais elle a ensuite la possibilité d’exercer contre le bénéficiaire un recours en remboursement fondé sur l’enrichissement sans cause[558], recours à l’occasion duquel elle pourra lui opposer toutes les exceptions normalement opposables par une caution (et notamment toutes celles appartenant au débiteur principal)[559].

 

Par la suite, la jurisprudence a précisé le régime juridique de cette sûreté personnelle. Ainsi, il a été posé en règle qu’en cas de recours de la « caution » contre le créancier, c’était à ce dernier, pourtant défendeur, qu’il appartenait de prouver que le paiement lui était dû[560]. En cas d’échec de celui-ci, la prétention de la caution doit être considérée comme fondée. Par ailleurs, la possibilité de recourir à un tel engagement a été limitée par la jurisprudence, puisqu’en 1990, le Bundesgerichtshof a jugé, que la souscription de tels engagements devait être réservée aux seuls établissements de crédit[561].

 

Ce cautionnement à première demande a reçu un accueil mitigé de la part de la doctrine allemande[562]. Certains auteurs se sont accommodés de cette jurisprudence en considérant, que l’existence d’un recours a posteriori au profit de la caution dans le cadre d’un procès,  la preuve de la réalité et de l’exigibilité de la dette principale est mise à la charge du créancier défendeur, permettrait de respecter la nature accessoire du cautionnement. Pour d’autres, notamment M. Weth[563], le cautionnement accessoire est incompatible avec la clause « à première demande ». Malgré l’existence d’un recours a posteriori au profit de la caution, cet auteur fait remarquer, que le paiement par la caution a pour effet d’éteindre la dette principale. Dès lors, si la dette principale est éteinte, l’engagement de la caution ne peut plus être considéré comme accessoire à cette dette principale ou comme « rétabli » dans son caractère accessoire par la possibilité du recours. De la même manière, cet auteur note que l’engagement de garantie lui-même doit s’éteindre par le paiement, aussi la question de son caractère accessoire ne se pose plus.

 

En quelque sorte, le cautionnement à première demande serait soumis jusqu’au paiement par le garant au régime juridique de la garantie à première demande et dans un second temps, lors du recours de la caution, il serait soumis aux principes gouvernant le cautionnement[564]. Dans cette hypothèse, le cautionnement à première demande serait proche de la thèse ne voyant dans la garantie autonome qu’un avantage d’ordre purement procédural pour le créancier par rapport au cautionnement[565].

 

Mais cette forme de sûreté personnelle n’est pas admise en droit français et la majorité de la doctrine est résolument contre[566], là aussi en raison de l’incompatibilité de principe existant entre le cautionnement par essence accessoire et la clause de « paiement à première demande ». Le cautionnement à première demande occuperait une place intermédiaire entre cautionnement traditionnel et garantie autonome. Or, il semble que le constitut remplisse déjà une telle fonction, aussi, on voit difficilement comment cette sûreté personnelle pourrait être admise en droit français qui en compte un nombre déjà très (trop ?) important.

 

 

Dans le cadre d’une telle étude, il était impossible de mettre en parallèle la garantie autonome avec tous les mécanismes ayant vocation à pouvoir jouer le rôle de sûreté personnelle ou de garantie. Nous avons choisi des engagements plutôt originaux et peu pratiqués, mais d’autres auraient mérité d’être évoqués.

 

Ainsi, certains auteurs ont été tentés d’analyser l’indépendance de la garantie autonome en recourant au mécanisme de la lettre de change[567]lorsqu’elle est utilisée à titre de garantie. Dans la lettre de change le porteur veut éviter que le tiré ne soulève des moyens de défense issus du contrat fondamental ; dans la garantie indépendante, le bénéficiaire veut que les exceptions que le garant pourrait invoquer soient inopposables. Mais la garantie autonome n’est pas un effet de commerce, à ce titre, elle n’est donc pas soumise au formalisme cambiaire. La lettre de change est en effet soumise à des conditions de forme extrêmement précises, dont le défaut peut entraîner la nullité de la traite. Aussi, une confusion semble inimaginable en pratique. Mais il faut reconnaître qu’en la matière, le principe de l’inopposabilité des exceptions revêt une même portée.

 

De la même manière, la garantie autonome se révèle très proche d’un autre acte abstrait, le crédit documentaire irrévocable[568], dans lequel les droits et obligations du banquier sont définis exclusivement par la lettre de crédit. Le banquier ne peut se soustraire à ses engagements en invoquant soit les exceptions résultant de ses rapports avec le donneur d’ordre (faillite du donneur d’ordre, absence de provision, révocation des ordres…), soit les exceptions résultant de l’inexistence, de la nullité, de l’inexécution ou de la mauvaise exécution du contrat commercial entre bénéficiaire et donneur d’ordre. Comme la garantie autonome, le crédit documentaire irrévocable est insaisissable par le donneur d’ordre[569]. Mais la finalité de ces deux engagements est fondamentalement différente. Le crédit documentaire irrévocable est avant toute chose un crédit, avant d’être un instrument de garantie[570]. D’ailleurs, le crédit documentaire, s’il peut jouer le rôle de garantie, ne répond pas à la définition de la sûreté personnelle, le critère de l’absence de contribution à la dette par le garant n’est pas respecté[571]. Le banquier, lorsqu’il ouvre un crédit à son client, contracte un engagement personnel de payer, le fait que le paiement soit effectué au tiers créancier n’en change pas la nature. Le crédit documentaire irrévocable est en fait, surtout proche de la garantie documentaire, qui n’est pas la forme la plus pratiquée de garantie autonome.

 

Certains éléments de la garantie autonome peuvent donc se retrouver dans un grand nombre de mécanismes. Pour autant, l’analogie n’est jamais totale. Selon les cas ; la rigueur, la finalité ou l’objet de l’engagement ne correspondent pas à une garantie autonome. Il n’est donc pas forcément souhaitable de vouloir réduire la garantie autonome à un modèle préexistant ou à venir, au prix d’une méconnaissance de son originalité.

 

De la même manière qu’une mauvaise compréhension du mécanisme pouvait être source d’ambiguïtés dans l’acte des parties, la proximité d’un nombre sans cesse croissant de nouvelles sûretés personnelles ayant toutes vocation à échapper au caractère accessoire du cautionnement  a pu enrichir la confusion.

Cette confusion devait naturellement avoir pour conséquence de susciter l’intervention du juge pour redresser les qualifications incorrectes. Cette intervention judiciaire n’a pas toujours été exclusive de reproches, le juge intervenant parfois à tort pour requalifier l’acte. Mais comme nous avions pu l’évoquer dans le titre premier de cette étude, au stade de la reconnaissance en droit français de la garantie autonome, cette intervention du juge sur la qualification était inéluctable. Une création de la pratique telle que la garantie autonome doit être consacrée par le juge, toutefois, celui-ci ne dispose que d’un pouvoir temporaire, au stade de la reconnaissance du contrat innomé[572]. Mais une fois que le contrat innomé devenu nommé, le pouvoir du juge se réduit, alors que celui des parties s’accroît.

 

Il nous faut donc nous intéresser à la mise en œuvre des pouvoirs du juge eu égard à la qualification de garantie autonome. A cette occasion il sera possible d’observer, que si ces interventions  ont pu être nombreuses et paraître parfois aléatoires, la précision dont jouissent à l’heure actuelle les éléments de qualification et le régime juridique de cette convention, confère aux parties une plus grande sécurité. Lorsqu’elles respectent la spécificité de ce mécanisme, le juge ne peut que consacrer leur volonté, en cela, il est possible de considérer qu’elles maîtrisent la qualification de garantie autonome.

 


 

                                                                                                                                        

                                                             CHAPITRE II

 

 

                                       LES MOYENS D’ACTION DU JUGE,

 

 

                                     REDRESSEUR DE QUALIFICATIONS

 

 

 

 

Nous avons pu l’aborder, la maîtrise des parties sur la qualification de garantie autonome est en quelque sorte conditionnelle. Elle suppose une absence d’ambiguïtés et de confusion dans l’engagement du garant.

Cette condition  n’est parfois qu’imparfaitement réalisée. Il se peut, que dans l’instrumentum, un doute apparaisse quant à la volonté réelle des parties de conclure une garantie autonome, mais il est également possible, que la convention conclue ne réponde pas aux exigences propres à cette qualification.

De cette confusion, il peut résulter une intervention du juge, qui n’est pas sans conséquences sur la qualification. Cette possibilité d’intervention du juge pourrait alors laisser penser, au vu d’un nombre important de requalification, qu’il existe un certain aléa en matière de garantie autonome. Aléa qui pourrait se traduire par une méconnaissance de la volonté des parties.

 

Le risque existe il est vrai, que le juge, « sous prétexte de traduire une volonté des particuliers incertaine ou incomplète, substitue son point de vue à celui qui a inspiré les particuliers, sa propre volonté à la leur, et cela dans le dessein d’adopter en définitive une qualification plutôt qu’une autre »[573]. Les signes d’hostilité manifestés par certaines juridictions du fond à l’encontre des garanties autonomes ainsi que leurs hésitations quant à ce concept, tout comme celles de la Cour de Cassation, auraient en effet pu laisser craindre, que l’aléa domine cette qualification. Or, aléa et imprécision sont totalement incompatibles avec une quelconque idée de maîtrise. Les parties seraient sous la menace constante, d’une remise en cause de leurs prévisions. Sécurité juridique et liberté contractuelle seraient alors des principes vides de sens.

 

Mais dans notre entreprise d’une détermination des éléments de qualification de la garantie autonome, nous avons tenté de montrer à quel point ces éléments pouvaient se montrer rigides, ce dont découle une qualification précise et exigeante. Autant de caractères qui nous l’observerons, tendent à limiter le rôle du juge.

Dans le cadre de cette action du juge, il nous faut examiner de quelle manière celle-ci s’exerce ou a pu s’exercer. Le rôle des juges du fond, s’il a pu être important, tend à décroître actuellement en raison d’une plus grande précision des éléments de qualification de cette convention, à laquelle la Cour de Cassation n’est pas étrangère. Il nous faut ainsi ici étudier successivement, les pouvoirs des juges du fond quant à la qualification de garantie autonome (section 1) puis l’action de la Cour de Cassation sur celle-ci (section 2).

 

  SECTION 1. L’EXERCICE DES POUVOIRS DES JUGES DU FOND QUANT A LA

                         QUALIFICATION DE GARANTIE AUTONOME

 

 

 

Souvent, interprétation et qualification ou requalification sont liées, il s’agit alors de deux démarches successives dans l’esprit du juge. En effet, qualifier une situation suppose les faits établis, qu’ils soient tenus pour constants par les parties ou que le juge doive les interpréter. L’interprétation est alors un préalable à l’opération de qualification. Mais lorsque les faits sont certains, la requalification n’impose pas forcément, une recherche de volonté.

 

Pour agir sur la qualification de garantie autonome, les juges du fond dispose ainsi de deux pouvoirs, ayant des conséquences plus ou moins directes sur celle-ci. En effet, si l’acte est obscur ou ambigu, les juges du fond pourront faire usage de leur pouvoir souverain d’interprétation et éventuellement requalifier cette convention  en application de l’article 12 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile[574](§1). Mais de manière directe, plus rarement, il semble possible de considérer, que s’il s’avère que le mécanisme tel qu’il est détaillé dans le corps de l’acte ne correspond pas à sa dénomination, le juge, toujours en vertu de l’article 12, pourra alors procéder à sa requalification (§2) sans avoir  rechercher l’intention des parties.

 

 Dans la première hypothèse, le contrat est obscur ou ambigu, aussi, le juge s’attachera à déterminer ce que les parties ont voulu, ce qui pourra éventuellement déboucher sur la requalification de l’acte. Alors que dans la seconde, le juge va s’intéresser à ce que les parties ont fait, afin de déterminer si ce qu’elles ont fait correspond à la dénomination de leur convention, il n’est pas alors indispensable, en théorie, de procéder à l’analyse de l’intention des parties.

 

 

§1. LE ROLE DE L’INTERPRETATION SUR LA QUALIFICATION DE

      GARANTIE AUTONOME

 

 

Pour que les juges du fond exercent leur pouvoir d’interprétation, il est nécessaire que l’acte en cause soit obscur ou ambigu. En présence d’un tel acte, la Cour de Cassation leur impose même de procéder à une interprétation[575]. Toutefois, lorsque l’acte est clair est précis, ils ne peuvent l’interpréter, sous peine d’encourir la censure de la Haute Cour pour dénaturation[576].

Pour MM. Marty et Raynaud[577], « Interpréter un contrat, son existence et sa teneur établies, c’est dans le cadre de cette teneur, préciser sons sens et sa portée et les obligations qu’il fait naître ».

Au sein de l’interprétation, il est classiquement distingué entre interprétation subjective et objective du contrat. La première forme se traduit par une recherche de la commune intention des parties afin de déterminer le sens qu’elles ont voulu donner à leur convention. Alors que l’interprétation objective, illustrant le recul du volontarisme, conduit, sans véritablement procéder à une recherche d’intention des parties, à se « demander ce qui est socialement le plus juste ou ce que la justice indique comme devant être les conséquences de l’acte »[578].

 

Ces deux méthodes d’interprétation peuvent avoir une influence sur la qualification de garantie autonome. Il nous faut donc étudier, d’une part, l’interprétation subjective (A), et d’autre part, l’interprétation(B) objective, appliquées à la garantie autonome.

 

 

A.     Le rôle de l’interprétation subjective

 

 

Historiquement, sous l’influence du dogme de l’autonomie de la volonté, l’interprétation subjective était la seule concevable. Cette méthode fait du juge « le serviteur de la volonté des parties »[579]. Le contrat étant le produit du libre accord des volontés, l’interpréter c’est-à-dire déterminer son contenu, ne peut se faire que par une recherche de la commune intention des parties. Les conclusions qu’il en tirera seront susceptibles d’être décisives au plan de la qualification.

 

- Recherche de la commune intention des parties :

Pour cela, le Code civil énonce un certain nombre de directives aux articles 1156 à 1164, directives qualifiées par le doyen Carbonnier de « petit guide-âne »[580].

Au sein de ces directives énoncées par le Code civil, toutes n’apparaissent pas comme des directives d’interprétation subjective[581]. Mais parmi celles-ci, l’article 1156 pose en principe, « On ne doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des termes ».

Certes, la Cour de Cassation considère que ces directives d’interprétation sont dépourvues de force obligatoire et doivent être comprises comme de simples conseils donnés au juge[582]. Mais par ailleurs, elle estime, que l’interprétation du contrat doit se faire par référence à la volonté commune des parties contractantes[583]. Ce qui tempère l’absence de caractère obligatoire de ces articles.

 

Les juges du fond sont donc tenus de se référer à la commune intention des parties dans l’hypothèse  un engagement de garantie se révèlerait confus ou ambigu. Or, nous avons pu voir, que ces hypothèses d’ambiguïtés ou de confusion étaient relativement fréquentes en matière de garantie autonome et plus généralement de sûretés personnelles.

Face à cela, on comprend mieux l’importance qui a pu un temps, être conférée aux clauses dites de « paiement à première demande » ou « d’inopposabilité des exceptions ». Ce type de clauses est insusceptible, au même titre que la dénomination de la convention ou une référence aux règles propres au cautionnement, à emporter ou à faire rejeter la qualification de garantie autonome. Mais tous ces éléments et principalement, la stipulation de l’inopposabilité des exceptions pourront constituer des indices pour le juge, dans sa recherche de la commune intention des parties.

 

Les autres directives d’interprétation subjective présentes dans le Code civil, que sont les articles 1157, 1158, 1161, 1163 et 1164 (ces deux derniers semblent très peu usités), se présentent comme des corollaires de la nécessaire recherche de la commune intention des parties, et ne présente pas ici d’intérêt particulier.

 

         La Cour de Cassation a semblé vouloir faciliter cette recherche de la commune intention des parties par le juge. En effet, cela a déjà pu être évoqué, il a été jugé[584],  «  qu’un engagement de garantie à première demande doit être exprès ». Mais cela ne signifie pas, qu’en cas d’imprécision du texte de l’engagement, celui-ci devrait être considéré comme un simple cautionnement. La portée de cette affirmation est donc à relativiser.

Il faut attribuer à cette formule la même signification qu’à l’article 2015 du Code civil selon lequel, « Le cautionnement ne se présume pas ; il doit être exprès et on ne peut l’étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté »[585]. Il en résulte que la garantie doit être exécutée dans les termes même où  elle a été donnée et seulement dans la limite de ses termes. Elle ne peut être appelée que pour l’opération sous jacente qu’elle a vocation à garantir[586].

 

Dans le même ordre d’idée, l’exigence de la mention manuscrite, telle qu’elle est formulée par l’article 1326 du Code civil peut venir aider le juge dans cette recherche de la commune intention des parties. Même s’il faut rappeler que cette mention manuscrite n’est exigée que lorsque la garantie est souscrite par un garant profane, ce qui, loin s’en faut, ne constitue pas la majorité des cas.

 

Le propos n’est pas dans une telle étude de regretter le pouvoir d’intervention du juge pour interpréter la convention. Elle est le plus souvent nécessaire face à la prolifération de garanties qualifiées d’autonomes par certains créanciers, à seule fin d’échapper aux rigueurs et incertitudes du régime du cautionnement. Toutefois, il est indéniable que l’interprétation du juge vient amoindrir la maîtrise que les parties peuvent avoir de la qualification de garantie autonome. Lorsqu’elles ne respectent pas scrupuleusement les éléments de qualification de cette convention, la menace d’une requalification plane.

 

- Conséquences sur la qualification :

Comme a pu l’écrire un auteur, « l’ambiguïté des termes devient pour lui (le juge) source de liberté d’interprétation, alors que la clarté limite ses choix »[587]. Le risque est alors de voir le juge, substituer « à la volonté des particuliers ses propres conceptions, c’est la conséquence inéluctable de toute interprétation »[588].

 

Le juge sous prétexte d’une recherche de l’intention des parties, peut en effet agir de manière efficace sur une qualification telle que celle de garantie autonome. Il pourra imposer ses propres valeurs aux contractants. La garantie autonome étant réputée une convention dangereuse pour le garant, notamment lorsque celui-ci est un profane, la tentation est alors grande pour le juge d’user à mauvais escient de son pouvoir d’interprétation, dans le contexte décrit de grande confusion quant à cette notion.

 

En raison d’une méconnaissance des caractères propres à la garantie autonome, nombre de juges du fond se sont en effet retrouvés face à des engagements empruntant pour partie au cautionnement et pour partie à la garantie autonome.

Dans la majorité des cas, l’interprétation de la convention va permettre une juste qualification de l’engagement. Ainsi, nous avons pu observer, que par le biais de l’interprétation, les tribunaux ont tantôt pu retenir la qualification de garantie autonome en dépit de l’emploi des termes « caution » ou « cautionnement », dès lors que par ailleurs, la volonté des parties de mettre en œuvre une telle garantie apparaissait clairement, par une clause d’inopposabilité des exceptions ou de paiement à première demande. A condition toutefois, que ces clauses ne soient pas contredite par une mauvaise définition de l’objet de l’engagement du débiteur[589]. Ils ont ainsi pu disqualifier des garanties prétendument autonomes, mais ne révélant pas les caractéristiques essentielles propres à de telles garanties[590].

 

Mais les juges du fond ont également pu, en se fondant sur la commune intention des parties, qualifier à tort des engagements de « garantie autonome », alors même que l’objet de l’obligation du garant n’apparaissait pas indépendant par rapport à l’engagement principal[591]. Certes, la commune intention des parties, n’est dans ces hypothèses certainement pas de conclure un cautionnement accessoire, puisqu’elles entendent précisément exclure l’opposabilité des exceptions qui y est attachée. En effet, il est ici possible de considérer que leur volonté va plutôt dans le sens de la conclusion d’un engagement tel qu’un constitut, puisque le garant s’engage à payer la même dette que le débiteur principal. C’est la confusion régnant dans l’esprit des contractants quant à la nature et à la spécificité de la garantie autonome qui les conduit précisément à imaginer que leur engagement correspond à ce schéma.

Or, nous avons pu montrer que tel n’est pas le cas, et que c’est à tort, que les juges du fond, dans leur recherche de la commune intention des parties ont parfois cru pouvoir déceler dans de tels actes des garanties autonomes stricto sensu. Mais ces cas de « fausses » garanties autonomes non disqualifiées en cautionnement ou plus rarement, et il est possible de le regretter, en constitut, sont en voie de diminution, en raison de la meilleure connaissance des critères de qualification propres à cette nouvelle sûreté personnelle non accessoire.

 

Plus rarement, il est même arrivé, « que la commune intention des parties devienne entre les mains du juge pure fiction »[592]. Des engagements ont ainsi pu être requalifiés en cautionnements, non parce que l’interprétation de la commune intention des parties commandait cette solution, mais en raison de l’hostilité profonde de certaines juridictions face à cette nouvelle forme de sûreté personnelle.

Ainsi, la Cour d’appel de Paris a pu juger[593], que constituent des cautionnements et non des garanties à première demande, les engagements souscrits par des personnes physiques, « quelle que soit la qualification donnée par le créancier dans les documents soumis à l’adhésion des obligés ». Dans le même esprit, le Tribunal de commerce de Versailles a considéré[594], que « devant le risque de généralisation de ces garanties à première demande, il incombe à l’institution judiciaire de veiller à ce que leurs signataires bénéficient d’une protection analogue à celle qui est assurée aux cautions ». Le tribunal conclut, non sans dénaturer la volonté des parties, que la garantie dont il a à connaître est un cautionnement[595]. Plus que d’une dénaturation, il est possible de considérer, qu’il s’agit là d’une négation de la volonté des parties.

Mais ces décisions sont tout de même restées marginales, à plus forte raison après que la Cour de Cassation ait fixé sa jurisprudence par l’arrêt du 13 décembre 1994 et ceux qui l’ont suivi.

 

La recherche de la commune intention des parties par le juge, quel qu’en soit le résultat, et quelles que soient ses intentions, est donc susceptible de venir déjouer les prévisions des parties et leur retirer toute maîtrise de la qualification.

 

 

B. Le rôle de l’interprétation objective

 

 

Selon MM. Ghestin, Jamin et Billiau[596], l’interprétation subjective permettrait de révéler le contenu du contrat, alors que l’interprétation objective serait un mode de détermination du contenu du contrat. Cette interprétation objective conduit, « à se demander ce qui est socialement le plus juste ou ce que la justice indique comme devant être les conséquences de l’acte »[597]. Plus généralement, il s’agit d’un mode d’interprétation de la convention[598], sans avoir recours à une volonté supposée des parties, mais en puisant dans des éléments extérieurs  à celle-ci. Ce pourra être l’équité, la justice, la bonne foi ou encore les usages.

 

Les articles 1134 alinéa 3 et 1135 du Code civil, sont généralement présentés comme les fondements de ce mode d’interprétation dont découle notamment le phénomène dit de « forçage du contrat ». Mais en tant que tel, le forçage du contrat n’intéresse pas directement le problème de la qualification de garantie autonome. On notera toutefois, que la Cour de Cassation considère sans surprise, que le banquier qui met en place une garantie autonome à la demande de son client est tenu d’une obligation de conseil à l’égard de celui-ci. Il doit le mettre en garde contre les dangers d’une telle opération[599].

 

Mais au titre des directives d’interprétation des conventions envisagées par le Code civil aux articles 1156 à 1164, figurent certaines dispositions, qu’il est possible de considérer comme relevant de l’interprétation objective, sans pour autant qu’il y ait là véritablement un « forçage du contrat ». La convention ne sera pas ici, interprétée en recourant à une analyse de volonté des parties. Mais il n’y sera pas non plus ajouté d’obligations accessoires non prévues par les parties.

 

Tel est le cas de l’article 1162 du Code civil. Un arrêt de la Cour d’appel de Versailles[600] a ainsi expressément pu énoncer, que lorsque « l’acte est rédigé de manière imprécise et ambiguë et exige d’être interprété ; conformément aux dispositions de l’article 1162 du Code civil, la convention s’interprète contre celui qui a stipulé, et en faveur de celui qui a contracté l’obligation ; que ce principe conduit en l’espèce à interpréter l’acte dans le sens du cautionnement plutôt que dans le sens de la garantie autonome ».

La qualification de cautionnement étant plus favorable à celle de garantie autonome pour le débiteur, la première doit prévaloir.

 

Toujours au titre des directives d’interprétation objective, il est possible d’évoquer l’article 1159 du Code civil selon lequel, « Ce qui est ambigu s’interprète par ce qui est d’usage dans le pays  le contrat est passé ». Selon les pays en cause, il est possible de considérer que ce texte n’irait pas forcément dans le sens d’une qualification de garantie autonome. En toute hypothèse, cette disposition n’a vocation à régir que les garanties autonomes émises au plan international.

La référence à l’usage dans l’article 1159 rejoint l’idée selon laquelle, en cas de doute, au plan national l’usage étant de conclure des cautionnements, cette qualification doit prévaloir. Alors que dans le cadre du commerce international, la pratique n’a jamais été de délivrer des cautionnements, aussi le doute devrait profiter à la qualification de garantie autonome[601].

 

 

§2. UN POUVOIR DIRECT DE REQUALIFICATION 

 

 

Si le plus souvent, l’action du juge du fond sur la qualification de garantie autonome se fait par le biais de l’interprétation de l’acte. Il est théoriquement possible pour lui, de rectifier la qualification incorrecte donnée par les parties, sans pour autant qu’il ait à se prêter à une analyse de la volonté des parties.

 

Nous avons pu observer, qu’à condition que l’acte soit obscur ou ambigu, le juge peut interpréter la convention, et selon le résultat de cette interprétation, qualifier le contrat (dans l’hypothèse où les parties ne l’auraient fait) ou le requalifier. Dans une telle hypothèse, le juge s’attache à déterminer ce que les parties ont voulu. Mais il se peut aussi, qu’il procède à la requalification de la convention, alors même que l’instrumentum constatant l’accord de volonté des parties pourrait apparaître clair et précis. Dans une telle hypothèse, la recherche du juge ne porte pas sur la volonté des parties, mais simplement sur des données objectives.

Ainsi, il semble possible de considérer, que si un tribunal constate que l’engagement du garant dépend d’une manière ou d’une autre de l’exécution du contrat principal par le débiteur, et qu’il en conclut que dans ces conditions il y a cautionnement et non garantie autonome, il n’interprète pas la volonté des parties, mais il constate objectivement que la qualification donnée par les contractants à l’engagement ne correspond pas à la réalité, c’est-à-dire, à ce qu’ils font[602]. Or, il est admis que ce que font les parties importe plus que ce qu’elles disent. Le juge reste maître du droit, s’il observe que la qualification de garantie autonome donnée par les parties à leur convention ne correspond pas à ce qu’elles font, en vertu de l’article 12 alinéa 1er du NCPC, il restituera à la convention sa juste qualification. Comme a pu l’écrire Josserand, « …une erreur d’étiquette ne modifie pas le contenu d’un flacon… »[603].

 

Si le juge peut en vertu de l’article 12 alinéa 1er du NCPC requalifier un tel acte, il semble qu’il ne soit pas tenu de redresser une qualification pourtant inexacte, en l’absence de conclusions en ce sens de l’une des parties[604]. Si la qualification de l’acte lui est demandée, il ne peut refuser d’y procéder, auquel cas il méconnaîtrait les termes du litige et violerait l’article 4 du NCPC[605].

 

La distinction entre ces deux hypothèses d’intervention du juge, selon qu’il interprète ou pas la convention, n’est pas sans conséquences, puisque lorsqu’il requalifie la convention sans recourir à son interprétation, il ne saurait lui être fait grief d’avoir dénaturé la volonté des parties.

Pour autant, il ne faut pas en conclure que toute dénaturation de l’instrumentum par les juges du fond est impossible. Il peut y avoir dénaturation lorsque le juge procède à la qualification du contrat, mais il doit s’agir d’une méconnaissance par les juges du fait de stipulations claires et précises ayant une incidence sur la qualification du contrat[606]. Or, nous avons pu observer, que la dénomination « cautionnement » ou « garantie autonome », tout comme la clause de « paiement à première demande » ne sont pas décisives quant à la qualification de l’acte.

 

Si objectivement l’acte ne correspond pas à une garantie autonome, il semble qu’il soit possible de le requalifier sans avoir eu auparavant à l’interpréter. La jurisprudence semble en ce sens en matière de contrat de travail[607].

Toutefois, lorsque les tribunaux ne se bornent pas à constater ce que font les parties, mais interprètent une volonté claire et précise pour en déduire une qualification, ils s’exposent à la censure éventuelle de la Cour de Cassation pour dénaturation.

 

En matière de garantie autonome, les hypothèses dans lesquelles les juges du fond ont procédé à la requalification en cautionnement de conventions dénommées « garantie autonome » alors que le garant s’engageait à payer la dette du débiteur ont été nombreuses[608]. Dans de telles hypothèses, les créanciers ont avant toute chose, la volonté d’échapper aux rigueurs du cautionnement et dénomment « garantie autonome » des conventions qui en réalité répondent à la définition du cautionnement. Il semble alors, même s’il n’y a pas de jurisprudence sur ce point, qu’il soit possible de considérer, que le juge ne se livre à aucune interprétation de volonté ou du moins, qu’il n’a pas à le faire. Il lui suffit d’observer que la réalité ne correspond pas à la dénomination de la convention. Les parties ne sauraient alors lui reprocher d’avoir dénaturé leur volonté.

 Toutefois, il leur serait toujours possible de contester la qualification adoptée par les juges du fond, puisque la qualification est une question de droit, qui relève du contrôle de la Cour de Cassation, à la différence de la l’interprétation, qui est une question de fait, laissée à l’appréciation souveraine des juges du fond[609].

 

Certes, la ligne de partage peut ne pas s’avérer très nette en pratique entre le juge se bornant à observer les faits et à requalifier éventuellement la convention, et celui qui aurait dénaturé la volonté des parties. Mais cette distinction peut se révéler importante, car selon les cas, le contrôle exercé par la Cour de Cassation n’est pas de même nature.

 

L’action des juges du fond, par son caractère inconstant, a pu être un obstacle à la maîtrise de la qualification de garantie autonome par les parties. Mais depuis le fameux arrêt du 13 décembre 1994, la Cour de Cassation n’a cessé de préciser les éléments de qualification propres à cette convention, et notamment le principal d’entre eux, l’autonomie effective de l’objet de l’engagement du garant. Critère qui nous l’avons vu, n’est pas sans conséquences sur la rédaction de l’acte de garantie et sur la détermination du montant et de la durée de l’engagement du garant.

Or, il s’agit là d’éléments objectifs, n’imposant nullement le recours à une recherche de l’intention des parties. Les juges du fond n’ayant plus à rechercher cette commune intention des parties, leur marge d’appréciation se rétrécit, alors que les contractants voient leur volonté plus sûrement consacrée. Ce mouvement est appelé à se perpétuer, et la Cour de Cassation n’y est pas étrangère.

 

 

 


 

 

SECTION 2. L’ACTION DE LA COUR DE CASSATION SUR LA QUALIFICATION

                       DE GARANTIE AUTONOME

 

 

Selon M. Marty, toute qualification doit être contrôlée par la Cour suprême. Ce contrôle est nécessaire, car, par « l’identification d’une certaine situation de fait avec une notion légale, toute qualification entraîne indirectement une définition de cette notion »[610]. La référence faite par cet auteur à une « notion légale », n’est pas gênante dans le cadre de notre étude. Nous avons en effet eu l’occasion de souligner, qu’un fondement légal n’est pas nécessaire pour faire accéder un contrat au rang de contrat nommé.

 

La qualification de garantie autonome, au même titre que n’importe quelle qualification doit donc être contrôlée par la Cour de Cassation. Par son contrôle, la Haute Cour va notamment, venir préciser la notion de garantie autonome. Pour autant, cela ne contredit en rien l’affirmation selon laquelle les parties maîtrisent cette qualification.

Au sens  nous l’entendons, cette maîtrise signifie, rappelons-le, que lorsque les parties ont soigneusement respecté les principes de qualification propres à cette convention, tels que nous avons pu les mettre en évidence, leur volonté de conclure un tel contrat ne peut pas ou difficilement, être remise en cause par les juges du fond.

Affirmer la maîtrise de cette qualification par les parties n’entraîne pas obligatoirement, une apologie du dogme de l’autonomie de la volonté. Ce n’est pas là l’objet de cette étude. En effet, il s’agit ici de souligner la faible marge de manœuvre laissée aux juges du fond lorsque les parties ont soigneusement défini leur convention. Il n’est donc pas contradictoire, d’affirmer que la Cour de Cassation n’est pas étrangère à l’étroitesse de cette marge d’appréciation et corrélativement, à la maîtrise qui en résulte au profit des parties.

 

Dans un tel cadre, il nous faut donc examiner successivement, le mode d’action de la Cour de Cassation sur la qualification de garantie autonome (§1), puis, la manière dont cette action de la Cour de Cassation, vient garantir la maîtrise de la qualification de garantie autonome par les parties (§2).

 

 

§1. LES MODES D’ACTION DE LA COUR DE CASSATION

 

 

Comme l’écrit F. Terré[611], il y a en réalité, « une politique jurisprudentielle des qualifications menée par la Cour suprême ». Selon les cas, et conformément à cette politique, « la Cour de Cassation laisse aux juges du fond une marge plus ou moins étendue de liberté, soit que la qualification se relie intimement aux éléments de fait, auquel cas la qualification apparaît comme un aspect de l’interprétation, soit que, pour prendre un autre exemple, la Cour suprême attende qu’une nouvelle notion soit devenue suffisamment familière à l’interprète et qu’elle ait fait l’objet d’une certaine acclimatation »[612].

Il semble bien, que la garantie autonome participe du deuxième exemple évoqué par M. Terré, à savoir la nécessité d’une acclimatation à la notion de garantie autonome. L’acclimatation faîte, la Haute Cour ne se prive pas d’exercer son contrôle sur les juridictions du fond. On retrouve ici l’idée selon laquelle la marge de manœuvre laissée aux juges quant à cette qualification n’était que temporaire, au stade de la reconnaissance de la garantie autonome en tant que contrat innomé.

 

La Cour de Cassation agit de manière générale sur les qualifications, à la différence des juges du fait. Pour cela, elle dispose de deux moyens, qui s’ils sont distincts, n’en forment pas moins un tout, du point de vue de sa politique jurisprudentielle. Il s’agit du contrôle de la dénaturation (A) et de celui de la qualification(B).

 

 

A.     Le contrôle de la dénaturation

 

 

Depuis 1808[613], la Cour de Cassation abandonne au pouvoir souverain des juges du fond l’interprétation des conventions, notamment parce que cela relève du domaine du fait. Mais nous avons pu l’évoquer, ce pouvoir est subordonné à une ambiguïté de l’acte. Autrement dit, les juges du fond ne peuvent exercer leur pouvoir d’interprétation lorsque l’acte (l’instrumentum) est clair et précis. En effet, la Haute Cour se reconnaît depuis un arrêt du 15 avril 1872[614], le droit de censurer les décisions des juges du fond, lorsque les termes employés par les parties sont clairs et précis et que les obligations résultant du contrat ont été dénaturées par les magistrats. La dénaturation a pu être définie comme, « la méconnaissance par le juge du fond du sens clair et précis d’un écrit »[615].

 

Le pouvoir d’interprétation des juges du fond n’est donc pas totalement souverain. Par ce contrôle de la dénaturation, la Haute Cour veut éviter que les juges du fond ne refassent le contrat en équité sous prétexte de l’interpréter. En interprétant un contrat qui n’a pas lieu de l’être, afin de faire prévaloir son point de vue sur les termes de l’acte, le juge viole la volonté des parties et par la même l’article 1134 du Code civil.

Par le biais de la dénaturation, la Cour de Cassation vise à censurer les décisions arbitraires. Comme l’écrit un auteur[616], « La Cour de Cassation s’est réservée un redoutable pouvoir souverain : celui de décider de la clarté ou de l’ambiguïté des termes d’un acte juridique ».

 

Si pour certains, le grief de dénaturation est souvent invoqué mais peu accueilli[617], peut-être en raison de la difficulté pratique à faire la distinction entre la « dénaturation censurée et la fausse interprétation inattaquable »[618]. Il est tout de même possible de voir qu’en matière de garantie autonome, la Cour de Cassation n’a pas hésité à censurer les juges du fond pour avoir « méconnu la loi des parties »[619].

 

Sous le visa de l’article 1134 du Code civil, la Haute Cour a pu censurer une cour d’appel ayant disqualifié en cautionnement un engagement de garantie autonome, en considérant[620], « …qu’en statuant ainsi, alors que les garanties étaient stipulées irrévocables et inconditionnelles, « nonobstant toute contestation du donneur d’ordre ou d’un tiers », et que leur étendue fixée au moment de leurs conclusions, était indépendante, dans son exécution, d’éventuelles défaillances du débiteur, alors que de telles garanties ne sont pas privées d’autonomie par de simples références au contrat de base, n’impliquant pas appréciation des modalités d’exécution de celui-ci pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité, la cour d’appel a méconnu la loi des parties. »

Certes la Cour de Cassation ne parle pas expressément de dénaturation de la volonté des parties[621]. Mais il semble bien, que c’est de cela qu’il s’agit, et plus précisément, d’une dénaturation intellectuelle du sens ou de la portée de l’acte.

Fidèle à ses habitudes, la Cour de Cassation n’est pas très explicite et certains pourraient considérer, que dans cet arrêt du 18 mai 1999, il s’agit d’un simple contrôle de la qualification adoptée par les juges du fond. Toutefois, en examinant les références au contrat de base en cause et en énonçant qu’elles ne sont pas susceptibles de priver l’engagement d’autonomie, la Haute Cour vient contrôler l’interprétation que les juges du fond ont fait de ces mêmes références. Elle s’abrite derrière des formules d’ordre général, mais il n’empêche, qu’elle sort ici du domaine du droit pour s’immiscer dans celui du fait, ce qu’elle ne peut faire que par le biais du contrôle de la dénaturation.

La ligne de partage entre contrôle des qualifications et contrôle de la dénaturation peut apparaître floue, ce qui illustre qu’il ne s’agit là que de deux instruments commodes au service d’une même fin.

 

La Cour de Cassation n’hésite donc pas à censurer une méconnaissance de la volonté des parties par les juges du fond. Ce faisant, il est indéniable qu’elle précise par la même, les éléments de qualification de la garantie autonome. En effet, il ressort de cet arrêt de principe du 18 mai 1999, que des références au contrat de base n’impliquant pas appréciation des modalités d’exécution de celui-ci pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité ne privent pas l’engagement d’autonomie. Autrement dit, ces simples références permettent l’identification de l’acte sans pour autant le rendre ambigu.

La volonté des parties s’est clairement exprimée, et considérer que l’acte est privé d’autonomie en raison de simples références au contrat de base, revient à méconnaître la loi des parties.

 

En énonçant, que ce type est d’engagement est clair et non ambigu, la Haute Cour vient réduire la marge d’appréciation des juges du fond. Or, cette clarté résulte des exigences qu’elle a elle-même posées en matière de référence au contrat de base. Exigences, qui comme nous l’avons vu, s’imposent à raison de l’autonomie de l’engagement du garant et ne sont pas édictées arbitrairement par la Cour de Cassation.

Nous l’avons observé, ces règles découlent de la volonté des parties par le truchement de l’autonomie de l’engagement, il ne pourrait en être autrement. Mais le mérite de la Cour de Cassation, est de les réaffirmer constamment, voire de les préciser, mais en aucun cas elle ne les découvre artificiellement.

 

Les exigences de rédaction du contrat de garantie confèrent un caractère rigide à la qualification de garantie autonome. Force est ici de constater, que cette rigidité, loin d’être une entrave à la volonté contractuelle, vient garantir les contractants contre une possible intervention des juges du fond, qui en interprétant la convention pourrait venir imposer leur volonté. Le contrôle de la dénaturation ou du respect de la loi des parties selon la manière dont on le nomme, participe donc bien de cette politique jurisprudentielle des qualifications, au même titre que le contrôle des qualifications.

 

 

B. Le contrôle des qualifications

 

 

Tout juge du fond est conduit à contrôler si les qualifications adoptées par les contractants sont conformes à la réalité. Ce qui peut conduire, comme nous l’avons vu, à ce que celui-ci substitue son propre point de vue à celui qui inspirait les parties et choisisse une qualification plutôt qu’une autre[622].

Mais ils ne disposent pas en la matière d’une totale liberté. Lorsque les juges du fond qualifient une convention, ils sont soumis au contrôle de la Cour de Cassation qui vérifiera si la qualification retenue est conforme aux faits qu’ils auront souverainement constaté. La qualification fait partie du domaine du droit et s’oppose au fait, ce qui explique ce contrôle exercé par la Haute Cour. L’opération de qualification est intermédiaire et se situe entre la constatation des données de fait et l’application à celles-ci d’un régime juridique. Le contrôle de cette opération, participe donc, tout comme celui de la dénaturation, à la politique jurisprudentielle des qualifications menée par la Cour de Cassation[623].

 

Par ce contrôle, l’action de la Cour de Cassation sur les qualifications est particulièrement sensible. Son exercice conduit à préciser les concepts juridiques, mieux encore que le contrôle de la dénaturation, puisqu’il est d’utilisation beaucoup plus fréquente. Il est alors possible de parler de « fonction unificatrice »[624] de la Cour de Cassation.

Ce phénomène est visible en matière de garantie autonome. Ainsi en est-il, avec l’arrêt du 13 décembre 1994[625]. Dans cet arrêt, la Cour de Cassation casse la décision des juges du fond ayant retenu la qualification de garantie autonome en considérant, « qu’en dépit de l’intitulé de l’acte et de la mention même manuscrite, de paiement à première demande, l’engagement litigieux ayant pour objet la propre dette du débiteur principal, n’était pas autonome ». Nous avons pu le voir, la Haute Cour consacre dans cet arrêt l’autonomie de l’objet comme instrument décisif de la qualification[626]. Ce faisant, elle censure la cour d’appel qui ayant constaté cette absence d’autonomie de l’objet de l’engagement du garant, n’en a pas pour autant tiré toutes les conséquences quant à la qualification.

Il ne s’agit pas ici d’une question d’interprétation, la Cour de Cassation a simplement censuré une qualification inexacte. En statuant ainsi sur l’objet de l’engagement du garant, la Haute Cour, non seulement apporte des précisions quant au problème de la qualification de garantie autonome, ce dont nous avons déjà pu traiter. Mais plus fondamentalement, elle vient préciser la définition de cette notion et dissiper une bonne part de la confusion y étant attachée.

 

De la même manière, toujours par le biais du contrôle des qualifications, lorsque la Chambre commerciale de la Cour de Cassation dans son arrêt du 27 juin 2000[627], casse l’arrêt d’appel qualifiant un engagement de garantie autonome, alors que le garant, qui se déclarait « caution solidaire », s’engageait à payer au bénéficiaire, « toutes sommes pouvant lui être dues par la société E… », en énonçant, qu’en statuant ainsi, alors « ..qu’un engagement ne peut être qualifié de garantie autonome que s’il n’implique pas une appréciation des modalités d’exécution du contrat de base pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité et s’il comporte une stipulation de l’inopposabilité des exceptions, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations », la Haute Cour veut de manière non négligeable préciser cette notion.

 

En effet, la cassation de l’arrêt s’imposait pour qualification inexacte, sans même, qu’il soit nécessaire de renouveler la formule déjà présente dans l’arrêt du 18 mai 1999 à propos des références au contrat de base. Le fait que le garant déclarait s’engager à payer, « toutes sommes pouvant lui être dues par la société E… », était suffisant pour justifier une cassation. La présence de cette formule, qui devient traditionnelle[628], ne peut s’expliquer que par une volonté renouvelée de la Cour de Cassation de préciser les éléments de qualification de la garantie autonome, et par la même, cette notion elle-même, ce qui aboutit à limiter la marge d’appréciation des juges du fond.

 

Si le motif de cassation diffère, les attendus de principe sont strictement identiques. Ce qui illustre à merveille, le fait, que ces deux contrôles participent d’une même politique jurisprudentielle de la qualification de garantie autonome. Ils se relaient utilement pour faire prévaloir auprès des juges du fond, les critères propres à cette qualification.

Il y aura donc cassation, si les juges du fond donnent aux faits souverainement constatés et appréciés par eux une qualification inexacte. Mais s’ils se bornent à interpréter une clause obscure, leur pouvoir d’appréciation sera souverain. Ils  ne peuvent toutefois interpréter une clause claire et précise.

Enfin, si ces mêmes juges interprètent à juste titre la volonté des parties mais n’en tirent pas toutes les conséquences au plan de la qualification, ils seront censurés pour mauvaise qualification.

 

Cette « politique » de la Cour de Cassation a incontestablement contribué à préciser la notion de garantie autonome et donc à rendre sa qualification moins aléatoire. Les justiciables sont les premiers à en bénéficier. Au terme de cette étude, il nous faut donc étudier, comment cette politique jurisprudentielle de la Cour de Cassation a vocation à renforcer la maîtrise de la qualification de garantie autonome par les parties.

 

 

§2. L’ACTION DE LA COUR DE CASSATION AU SERVICE DE LA

      VOLONTE CONTRACTUELLE

 

 

Une création de la pratique telle que la garantie autonome se devait d’être consacrée par le juge pour avoir droit de cité dans l’ordre juridique français, ce qu’a fait la Cour de Cassation dès 1982[629]. En cela, la liberté contractuelle pourrait apparaître fortement relativisée. Toutefois, nous avons pu observer, que lorsqu’un tel contrat remplit les conditions de validité des conventions et qu’il présente un caractère effectivement nouveau par rapport aux cadres nommés voisins, le juge ne peut véritablement s’y opposer.

 

Or la nouveauté de la convention de garantie autonome réside essentiellement dans l’autonomie de l’engagement du garant. Engagement qui ne peut être autonome et indépendant, que s’il ne dépend en rien des conditions d’exécution du contrat de base. Cette autonomie ayant pour corollaire le principe d’inopposabilité des exceptions.

 

Cette convention étant admise en droit français pas la Cour de Cassation, celle-ci s’emploie à en préserver l’originalité, même si en raison de la nouveauté du procédé, le parcours fut long, pour déboucher sur la définition précise dont on dispose à l’heure actuelle de la garantie autonome. La Haute Cour aurait pu choisir de laisser une marge de manœuvre assez importante aux juges du fond quant à cette qualification. Mais par le biais des deux instruments de sa politique des qualifications précédemment énoncés, elle a plutôt été conduite à restreindre leur liberté.

En effet, lorsque la Haute Cour réaffirme, que des références au contrat de base impliquant une appréciation des modalités d’exécution de celui-ci pour la détermination des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité empêchent de qualifier un engagement de garantie autonome, elle n’énonce pas grand chose de plus (sauf la référence à la durée de l’engagement), que lorsqu’elle considère, que n’est pas une garantie autonome, l’acte par lequel une personne s’engage à payer ce que doit ou devra le débiteur.

Fondamentalement, il s’agit de la même chose, elle censure pour mauvaise qualification, car l’engagement n’apparaît pas véritablement autonome à la lecture de l’acte. Mais la première affirmation est plus précise que la seconde, que l’on trouve notamment dans l’arrêt du 13 décembre 1994.

 

Ce surcroît de précision ne s’explique que par une volonté de limiter l’action des juges du fond. La Cour de Cassation, peut être échaudée par les quelques abus commis en la matière, donne aux juges du fond des directives aussi bien, pour l’interprétation de l’acte, que pour sa qualification. Ainsi, la Haute Cour censurera les mauvaises qualifications, et au cas où, les juges du fond chercheraient à s’abriter derrière une prétendue ambiguïté de l’acte, mettant alors en avant leur pouvoir souverain d’interprétation, le contrôle de la dénaturation viendra utilement prendre le relais de celui des qualifications.

 

A condition toutefois que les parties aient soigneusement défini leur convention, les juges du fond ne pourront requalifier ce contrat par le biais de l’interprétation, la Cour de Cassation y veille. L’étroitesse de cette marge d’appréciation des juges du fond, s’explique en fait, par la nature objective des éléments de qualification de la garantie autonome. Nature objective qui, qu’on le veille ou non, est mise en exergue par la Cour de Cassation dans ses arrêts de principe.

En effet, l’exigence d’autonomie de l’engagement du garant, qui se manifeste à travers la rédaction du contrat de garantie, et la stipulation de l’inopposabilité des exceptions, apparaissent comme des éléments objectifs de qualification[630].

L’autonomie de l’objet s’apparente à un élément objectif matériel, et la stipulation d’inopposabilité des exceptions à un élément objectif formel. Ces  éléments objectifs de qualification s’opposent aux éléments dits « subjectifs », moins faciles à discerner, car à base de volonté et d’intention[631]. Tel est par exemple le cas de l’intention libérale, qui est nécessaire pour qualifier une libéralité. Selon les cas, les qualifications reposent sur des éléments objectifs, subjectifs ou le plus souvent sur une combinaison des deux qui pourra voir les éléments objectifs avoir plus d’importance et inversement.

 

La qualification de garantie autonome, apparaît essentiellement à base d’éléments objectifs, leur présence ne se vérifie normalement pas par une recherche de volonté ou d’intention particulière. Une certaine intention n’est pas non plus directement exigée en tant que critère de qualification, même si bien entendu, les parties doivent tout de même être animées de la volonté de conclure une garantie autonome. Mais ce n’est pas là un critère de qualification. Les éléments objectifs prédominent, et comme l’écrit F. Terré[632], « lorsqu’il s’agit d’éléments objectifs, les volontés individuelles bénéficient d’une plus grande liberté à l’égard du juge du fait que s’il s’agit d’éléments subjectifs ».

 

En effet, une qualification à base d’éléments subjectifs donne plus de pouvoirs aux juges du fond, car rien n’est plus variable que l’intention des parties. Or, s’agissant de reconnaître cette intention, le juge du fait est souverain et peut donc, « dans le dessein d’adopter une qualification plutôt qu’une autre, admettre ou nier assez facilement l’existence de l’élément subjectif. Ce faisant, il jouit d’une grande liberté dans le choix de la qualification »[633].

 

On comprend donc, qu’en matière de garantie autonome, le juge du fond voit sa marge d’appréciation relativement réduite, pour peu que la volonté des parties n’ait pas été confuse car cela restaurerait son pouvoir. L’exemple de la garantie autonome confirme donc, que « la nature objective d’un élément, loin d’être une limite infranchissable par les volontés, apparaît comme une garantie accordée à celles-ci »[634].

 


 

                        CONCLUSION DU TITRE II

 

 

 

Si les parties maîtrisent la qualification de garantie autonome, cette maîtrise n’est donc, comme nous l’avons vu, que conditionnelle. Mais n’en irait-il pas de même pour toute qualification, dont le sens et la portée auraient été si mal compris par les parties, qu’une autre qualification voisine apparaîtrait finalement plus appropriée ?

 

Il semble, qu’il faille considérer, que toutes les hésitations évoquées en la matière soient appelées à disparaître. C’est le cas, pour la confusion vis-à-vis des autres formes de sûretés personnelles non accessoires, même s’il est possible de considérer que pour la lisibilité du droit, il ne serait pas forcément souhaitable qu’elles se généralisent toutes en droit interne. D’autant plus, que certaines d’entre elles ont des finalités et des effets pour le moins identiques[635].

Quant à la mauvaise compréhension du mécanisme lui-même, la définition de la garantie autonome semble stabilisée et appliquée de manière relativement uniforme par les tribunaux, ce qui comme nous avons pu le voir, n’a pas toujours été le cas.

Il semble donc qu’il soit possible de mettre sur le compte de la nouveauté du procédé en droit français, les incertitudes qui ont pu y être attachées.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

                        CONCLUSION GENERALE

 

 

 

Longtemps, à la différence de nombre de droits étrangers, le droit français n’a pas connu d’autres formes de sûretés personnelles que le cautionnement. Mais la situation a considérablement évolué, au point qu’il semble possible de parler à l’heure actuelle, d’un « pullulement » de nouvelles sûretés personnelles, qui ont toutes vocation, à échapper d’une manière ou d’une autre aux rigueurs du cautionnement.

 

Certes, le mouvement législatif et jurisprudentiel sans cesse croissant en faveur de la protection des cautions semble être arrivé à son terme ou tout du moins marquer une pause. Néanmoins, dans le cadre d’une économie de marché, le besoin de crédit toujours grandissant, ne peut être assouvi sans qu’une certaine sécurité ne soit accordée au créancier contre les risques courus. Or, la garantie autonome, est parmi d’autres, un moyen de réduire considérablement ce risque. Il n’est d’ailleurs pas étonnant, qu’elle se soit développée en premier lieu en matière de commerce international, où le danger pour le créancier, a toujours été plus important que dans le cadre de relations internes.

La situation des créanciers se dégradant de manière significative en droit interne, il n’est pas surprenant, qu’ils se soient tournés vers des formes de garanties plus « dures », ayant fait leur preuve au plan international, pour restaurer leur sécurité.

 

Nous l’avions souligné au début de cette étude, ces nouvelles garanties ont pu être perçues comme marquant une régression au plan du droit. La garantie autonome serait alors, au même titre que d’autres nouvelles sûretés personnelles non accessoires[636]de substitution au cautionnement, un exemple de retour à l’archaïsme, pour reprendre les termes de M. Oppetit[637].

Selon cet auteur, le droit contemporain des sûretés[638] offrirait en effet, une manifestation éclatante d’épanouissement de l’archaïsme. On se trouverait ici en présence, « d’un retour à des concepts ou des institutions parfois très frustres, qu’une évolution bimillénaire, par un effort constant de perfectionnement de la technique et d’abstraction, avait progressivement abandonné au profit de formes plus adaptées aux nécessités et à l’esprit du temps »[639]. Il s’agirait là, d’une véritable régression. Que penser de ces considérations, au moment de conclure cette étude ?

 

Certes, la garantie autonome n’a pas d’origines romaines directes, mais c’est le cas de certaines formes de sûretés personnelles voisines, telles que le constitut (constitutum debiti alieni), les garanties indemnitaires (qui selon les cas, dérivent plus ou moins de la promissio indemnitatis) ou encore la délégation-sûreté (delegatio certa). Il est par ailleurs vrai, qu’au plan de la technique, la garantie autonome n’est pas un mécanisme des plus raffinés.

Néanmoins, on est en droit de s’interroger. Le cautionnement marquerait-il un progrès technique par rapport à ces sûretés arriérées, il n’en demeure pas moins, que « les aberrations jurisprudentielles et législatives » relevées par M. Oppetit lui-même[640], l’ont véritablement travesti. Au point que bon nombre de cautions ont bénéficié de facto, « d’un droit légal de ne pas payer leurs dettes » pour reprendre la fameuse formule du doyen Ripert[641].

Entre cautionnement et garantie autonome, il est donc possible de se demander laquelle de ces deux sûretés correspond le mieux aux réalités sociales actuelles. Probablement ni l’une ni l’autre, puisque aucune ne parvient à réaliser un compromis satisfaisant entre les droits du débiteur et ceux du créancier.

 

Peut être faut-il, finalement considérer avec M. Aynés, que le droit des sûretés dans son ensemble, obéit à une dialectique permanente[642]. D’une part, une dialectique de la complexité et de la simplicité, toute sûreté étant initialement simple et tendant progressivement à se compliquer, jusqu’à ce que son excès de lourdeur oblige à un retour à la simplicité. D’autre part, une dialectique de l’accroissement et de la diminution, ce que résume l’auteur par une formule « trop de sûretés pas de sûretés ». L’inflation des sûretés, de même que celle de la monnaie ou des diplômes, portant en elle-même les germes de leur disparition.

La situation a donc vocation à évoluer, vers une complexification de la garantie autonome, ce qui pourra s’apparenter à un enrichissement technique, mais symbolisera dans le même temps leur déclin inéluctable. D’autre part, il est concevable, que de toutes les sûretés personnelles évoquées dans cette étude, un certain nombre soient vouées à disparaître, ce que nous pressentions déjà, en énonçant leur trop grand nombre et l’absence d’originalité de certaines d’entre elles.

 

En attendant que ne se dégage une voie médiane, si tant est que cela soit possible, rien ne s’oppose en droit positif à la validité des garanties autonomes dans le cadre de relations purement internes. Ce mécanisme doit donc figurer au nombre des choix possibles en matière de sûretés personnelles.

Si la liberté contractuelle n’est pas un principe totalement vide de sens, il faut considérer que les parties sont donc libres, sous le respect des conditions de validité des conventions, de recourir à des mécanismes aussi frustres soient-ils, telle que la garantie autonome.

 

 

                

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

  BIBLIOGRAPHIE

 

 

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                                 TABLE ANALYTIQUE

 

 

INTRODUCTION…….………………………………………………………………………...p.1

 

TITRE I. UNE MAITRISE DE PRINCIPE DE LA QUALIFICATION DE GARANTIE                                                            

         AUTONOME PAR LES PARTIES…..….……..…………………………………p.14                     

 

CHAPITRE I. Du libre choix de la qualification de garantie autonome……………………....p.15

 

Section 1. Validité de la garantie autonome en droit interne…………………………….…….p.15

 

§1. Portée de la rupture du lien d’accessoire…………………………………………………..p.15

 

    A.L’absence d’un principe d’ordre public « d’accessoriété » des garanties………………...p.16

    B.L’existence d’une cause de la garantie issue du contrat de base………………………….p.17

        1. La controverse acte abstrait/acte causé………………………………………………...p.17

        2. Détermination de la cause de la garantie autonome……………………………………p.21

           a. La conclusion du contrat de base, cause de l’engagement du garant………………...p.22

           b. La cause de la garantie autonome dans les relations garant-donneur d’ordre……….p.23

 

§2. L’absence de fraude à la loi………………………………………………………….…….p.25

 

    A. L’inapplicabilité a priori de la théorie de la fraude à la loi………………………………p.25

    B.  La garantie autonome, substitut d’un cautionnement légal ou judiciaire………………..p.27

 

Section 2. La garantie autonome, un contrat originairement innomé………………………….p.28

 

§1. Les conditions à la reconnaissance de la garantie autonome en tant que structure   

      innomée…………………………………………………………………………………….p.29

 

    A. L’incidence des contrats nommés voisins………………………………………………..p.29

    B. L’exigence d’originalité de la garantie autonome en tant que contrat innomé…………..p.31

         1. L’originalité issue d’une cause atypique………………………………………………p.32

         2. L’originalité issue d’un nouvel objet de contrat………………………………………p.35

 

§2. Les principes actuels de qualification……………………………………………………...p.36

 

    A.L’autonomie de l’objet de l’obligation du garant, principe premier de qualification…….p.37

    B. La stipulation de l’inopposabilité des exceptions, principe second……………………...p.40

 

 

CHAPITRE II. La volonté contractuelle, source d’un régime juridique  original……………..p.42          

 

 

Section 1. Les règles issues de la volonté contractuelle……………………………………….p.43

 

§1. Le principe de l’inopposabilité des exceptions…………………………………………….p.44

 

          A. Fondements de l’inopposabilité des exceptions………………………………………….p.44

1. L’autonomie de l’objet de la garantie, fondement de l’inopposabilité des   

                exceptions……………………………………………………………………………..p.44

           2. L’action de la volonté sur la cause, fondement de l’inopposabilité des exceptions…...p.45

       B. Applications du principe d’inopposabilité des exceptions……………………………….p.48

          1. L’inopposabilité des exceptions tirées du rapport d’ordre……………………………...p.48

          2. L’inopposabilité des exceptions tirées du contrat de base……………………………...p.49               

 

§2. Les règles gouvernant la rédaction de l’acte de garantie…………………………………….p.52

 

       A. Les éventuelles références au contrat de base……………………………………………p.52

        1. Les références interdites………………………………………………………………....p.52

        2. Les références possibles………………………………………………………………….p.54

       B. L’exigence d’une durée et d’un montant déterminé……………………………………...p.58

        1. Un montant déterminé……………………………………………………………………p.58

        2. Une durée déterminée…………………………………………………………………....p.60

 

Section 2. L’application résiduelle de principes issus de la théorie générale des contrats…….p.61

 

§1. La soumission de la garantie autonome au « statut contractuel primaire »………………..p.61

 

         A. L’application de règles générales issues du Code civil…………………………………...p.62

         B. L’application de principes de la théorie générale des contrats…………………………....p.65

            1. Notions d’appel manifestement abusif ou frauduleux de la garantie…………………....p.65

            2. Caractère manifeste de la fraude ou de l’abus…………………………………………..p.67

 

§2. L’originalité de la garantie autonome, obstacle au raisonnement analogique……………..p.68

 

Conclusion du Titre premier…………………………………………………………………...p.72

 

 

 

TITRE II. UNE LARGE CONFUSION, SOURCE D’UN EVENTUEL CONTROLE 

                 JUDICIAIRE DE LA QUALIFICATION…..….……………………………….p.75

 

CHAPITRE I. L’origine de la confusion quant à la qualification de garantie autonome……...p.77

 

Section 1. Les ambiguïtés issues de la notion même de garantie autonome…………………...p.77

 

§1. Une confusion intellectuelle……………………………………………………………….p.77

 

      A. La confusion législative………………………………………………………………..…p.78

      B. La confusion doctrinale…………………………………………………………………...p.79

      C. La confusion jurisprudentielle…………………………………………………………….p.80

 

§2. Les ambiguïtés matérielles présentes dans l’acte de garantie……………………………...p.83

 

     A. L’importance de la dénomination…………………………………………………………p.83

        B. La présence de clauses contractuelles « caractéristiques »………………………………..p.84

          1. Les références aux règles du cautionnement……………………………………………..p.84

           2. La présence de clauses caractérisant l’autonomie……………………………………….p.85

 

Section 2. Une confusion issue de la confrontation à d’autres sûretés personnelles…………..p.87

 

§1. Les sûretés personnelles empruntant à des techniques issues du code civil……………….p.88

 

       A. La solidarité passive……………………………………………………………………...p.88

          B. La promesse de porte-fort………………………………………………………………..p.89

          C. La délégation imparfaite………………………………………………………………….p.92

 

§2. Les sûretés personnelles issues de la pratique……………………………………………..p.96

 

    A. Les garanties « indemnitaires »…………………………………………………………..p.96

             1. La lettre d’intention……………………………………………………………………..p.97

               a. Nature juridique……………………………………………………………………….p.97

               b. Problèmes de qualification…………………………………………………………….p.98

             2. Les garanties indemnitaires en droits étrangers……………………………………….p.100

               a. La « garantievertrag » de droit allemand……………………………………………p.101

               b. Le « contract of indemnity » de droit anglais………………………………………..p.102

 

    B. Constitut et cautionnement à première demande……………………………………….p.104

             1. Le pacte de constitut…………………………………………………………………..p.104

             2. De l’admission en droit français du cautionnement à première demande…………….p.106

 

 

CHAPITRE II. Les moyens d’action du juge, redresseur de qualifications………………….p.110

 

Section 1. L’exercice des pouvoirs des juges du fonds quant à la qualification de garantie

                 autonome……………………………………………………………………….p.111  

                                                                                        

§1. Le rôle de l’interprétation sur la qualification de garantie autonome…………………….p.111

 

 A. Le rôle de l’interprétation subjective…………………………………………………...p.112

 B. Le rôle de l’interprétation objective…………………………………………………….p.116

 

§2. Un pouvoir direct de requalification……………………………………………………...p.117

 

Section 2. L’action de la Cour de Cassation sur la qualification de garantie autonome……...p.120

 

§1. Les modes d’action de la Cour de Cassation……………………………………………..p.120

    A. Le contrôle de la dénaturation…………………………………………………………..p.121

          B. Le contrôle des qualifications…………………………………………………………..p.124

 

§2. L’action de la Haute Cour au service de la volonté contractuelle………………………..p.126

 

Conclusion du titre deuxième………………………………………………………………...p.128

 

CONCLUSION GENERALE………………………………………………………………...p.129

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] Ph. MALAURIE et L. AYNES, Cours de droit civil, Les sûretés, la publicité foncière, par L. AYNES, Cujas, 2000/2001, n°1.

[2] Se porter garant pour quelqu’un, quelle que soit la sûreté personnelle envisagée nécessite également une certaine confiance en la personne garantie. Ainsi, selon le proverbe, Est court de sens qui tope dans la main et pour son prochain se porte caution, (Livre des proverbes, 17 et 18, cité par M. CABRILLAC et Ch. MOULY, Droit des sûretés, Litec 1999, n°23.

[3] Voir à cet égard, L. AYNES, Les garanties du financement, Rapport de synthèse présenté au 82e congrès des notaires, Defresnois 1986, page 909 et s., art. 33779 (page 911), pour qui, historiquement, les sûretés sont inévitables. Même si ce ne sont pas toujours les mêmes, aucun droit ne vit sans sûretés. L’histoire des obligations est accompagnée par celle des sûretés. Selon cet auteur, « toute sûreté est une injure à la force obligatoire des conventions. Elle se nourrit de l’infirmité du droit et de l’impuissance de l’exécution forcée ».

[4] Cass.com. 20 décembre 1982, Bull.civ. IV, n° 417, JCP G 1983, IV, 79 et CI 1983, II, 14001, n°116, obs. Gavalda et Stoufflet, D. 1983 page 365, obs. M. Vasseur, RTDcom. 1983 page 446, obs. Cabrillac et Teyssié.

[5] Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, Litec 1999, n°857. Rappr. La définition de MM. (H.J. et L.) MAZEAUD et F. CHABAS, Leçons de droit civil, T. 3, vol. 1, Les sûretés, la publicité foncière, par Y. PICOD, Montchrestien 1999, n°53-1. Voir aussi, la définition de MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit. n°396, pour qui il s’agit, « d’un engagement de payer une somme déterminée, donnée à l’occasion et en garantie d’une opération économique mais rendu indépendant de cette opération par l’inopposabilité au bénéficiaire des exceptions inhérents à cette opération ». Toutefois, cette définition est moins satisfaisante, elle tend en effet, à considérer que l’inopposabilité des exceptions rend cet engagement indépendant, ce qui revient à définir l’acte par ses effets. Comme nous essaierons de le montrer plus tard, il faut plutôt considérer avec M. Simler, que l’inopposabilité des exceptions caractérise cet engagement mais ne fonde pas son indépendance. L’inopposabilité des exceptions est le corollaire de l’autonomie de l’engagement mais n’en est pas la source.

[6] Cette liste n’a rien de limitatif ; on citera ainsi pour mémoire, une garantie spécifique au droit maritime qu’est la garantie pour absence de connaissement, mais il existe aussi, des garanties dites de “transit communautaire” , de franchise douanière, la garantie de découvert bancaire local ou encore la garantie de paiement d’un prix. Sur ces distinctions, voir Ph. SIMLER, op.cit. n°913.

[7] Ph. SIMLER, op.cit. n°914.

[8] Voir en ce sens, B. OPPETIT, Les tendances régressives dans l’évolution du droit contemporain, Mélanges Holleaux, pages 317 et s. Cet auteur ne s’exprime pas spécifiquement sur les garanties autonomes, mais évoque la décadence des sûretés traditionnelles, notamment du cautionnement, et le recours à des substituts aux modalités arriérées et dépassées sur le plan technique. Mais une telle réflexion englobe nécessairement l’hypothèse de la garantie autonome, qui est la sûreté de substitution au cautionnement la plus efficace. Mais une sûreté ne se doit-elle pas d’être simple pour être attrayante ? En ce sens, L. AYNES a pu écrire (art. prèc. n°6), « le cautionnement doit son succès à la simplicité. L’alourdir serait le condamner ».

[9] B. TEYSSIE, préface de la thèse d’A. PRUM, Les garanties à première demande : essai sur l’autonomie, Litec 1994.

[10] On signalera qu’étymologiquement, qualifier vient du latin qualificare, qui signifie, dire lequel parmis plusieurs.

[11] MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, Traité de droit civil, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n°56. Rappr. La définition d’H. CAPITANT, Vocabulaire juridique, 1936 page 397, « La qualification est la détermination de la nature d’un rapport de droit à l’effet de le classer dans l’une des catégories juridiques existantes ».  F. TERRE, L’influence de la volonté individuelle sur les qualifications, thèse Paris, LGDJ, 1957, n°111, selon qui, « il ne faut jamais perdre de vue que toute qualification contribue à traduire en terme de droit des données concrètes, dans le dessein de leur appliquer un régime juridique déterminé ». J. F. OVERSTAKE, Essai de classification des contrats spéciaux, thèse Bordeaux, LGDJ 1969, page 15, pour qui, « rechercher la nature d’un contrat, c’est chercher à identifier ce contrat pour le faire rentrer dans une catégorie préétablie dont les règles s’appliqueront au rapport contractuel envisagé ».

[12] Ibid.

[13] Voir notamment sur ce point, F. TERRE, thèse prèc. n°3.

[14] Voir, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, loc.cit.

[15] Cf ; S. VELU, Les garanties à première demande en droit belge, colloque de Tours, 1980, FEDUCI, page 227. Voir aussi, L. SIMONT, L’engagement unilatéral, in, Les obligations en droit français et en droit belge, Dalloz et Bruylant, 1994, page 17, spéc. n°2 et 9. Contra, Y. POULLET, L’abstraction de la garantie bancaire automatique, thèse Louvain La Neuve, 1982, n°249 et s., cité par A. PRUM, op.cit. n° 225. selon cet auteur, « L’idée de contrat rend mieux compte de la réalité unique de cette opération tripartite que celle d’acte unilatéral ».  Voir l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles, 15 octobre 1987, Banque, mars-avril 1988, page 29, obs. D. Devos, D. 1989, somm. page 244, obs. M. Vasseur. Selon cet arrêt, « …L’engagement du garant est pleinement efficace indépendamment de toute acceptation par le bénéficiaire, et ce par le seul effet de l’émission de la lettre de garantie…cette règle est exprimée par le caractère unilatéral de la garantie à première demande ».

[16] En ce sens, B. KLEINER, Bankgarantie, Die Abgrenzung der garantie von der Bürgschaft und anderer Vertragstypen mit besonderer Berücksichtigung des Bankgarantie-geschäftes, Zurich, 3e éd., 1979, pages 24 et 142, cité par A. PRUM, op.cit., n°223.

[17] En ce sens, voir ; Ph. SIMLER, op.cit. n°866 ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n°396-2 ; L. AYNES, op.cit. n° 333 ; Ch. GAVALDA et J. STOUFFLET, La lettre de garantie internationale, RTDcom 1980, pages 1 et s., n°6 ; A. PRUM, op.cit., n°222 et s. ; Ch. LEGUEVAQUES, Garanties autonomes en droit interne, A la recherche de l’autonomie, Droit et Patrimoine, avril 1997 pages 34 et s. (page 38) ; M. VASSEUR, colloque de Tours 1980, prèc., Rapport général, pages 319 et s., ainsi que son commentaire sous CA Bruxelles 15 octobre 1987 prèc.,  il estime, qu’il « est vraisemblable qu’en France…les tribunaux…auraient jugé différemment… ». Contra, la position tout à fait isolée de T. BONNEAU, Droit bancaire, Montchrestien, 3e éd. 1999, n°672.

[18] Voir, Cass.com. 2 février 1988, Bull.civ. IV, n° 55, JCP G 1988, IV, 113, D. 1988, somm. page 239 obs. Vasseur et page 274 obs. Aynès. Dans cet arrêt, la Cour de Cassation qualifie expressément la garantie autonome de contrat. Voir aussi ; Tcom. Paris, 26 mai 1989, D. 1990, somm. page 206 obs. Vasseur ; CA Paris 1er avril 1997, D. 1997, inf.rap., page 116.

[19] Voir, J. MARTIN DE LA MOUTTE, L’acte juridique unilatéral, thèse Toulouse, 1951.

[20] Sur la nature juridique de ce rapport d’ordre, voir, A. PRUM, op.cit. pages 9 et s.

[21] Voir notamment ; L. AYNES, Les garanties du financement, Defresnois 1986, prèc. n°3 ; C. GINESTET, La qualification des sûretés, Defresnois 1999, art. 36927, pages 80 et s., n° 9 et 21 ; L. AYNES, Les sûretés, prèc. n°5 ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit. n° 24 et s.

[22] Selon la formule de L. AYNES, Droit des sûretés, prèc. n°2.

[23] Voir notamment, MM. CABRILLAC et MOULY, loc.cit. ; L. AYNES, Les garanties de financement, rapport français, journées portugaises 1996, Travaux de l’association Henri Capitant, pages 375 et s., n°6.

[24] Une garantie pouvant être définie comme « tout mécanisme qui prémunit une personne contre une perte pécuniaire » (C. GINESTET, art. prèc. n°6, citant le Vocabulaire juridique, PUF).

[25] L. AYNES, art.prèc. Defresnois 1986. n°3.

[26] Ibid.

[27] La première décision relative à la garantie autonome serait celle de la Cour d’appel de Paris du 2 juin 1967, Journal des agréées, 1967, 709. Voir aussi ; Paris 3e ch., 15 juin 1973, Rev.jur.com. 1973 page 273. Pour d’autres décisions de juridictions du fond intervenues avant l’arrêt de la Cour de Cassation du 20 décembre 1982, voir Ch. GAVALDA et J. STOUFFLET, La lettre de garantie internationale, RTDcom. 1980 pages 1 et s., n°11 note 7.

[28] Art. prèc. n°2.

[29] Ph. SIMLER, op.cit. n° 860.

[30] Cf ; A. PRUM, op.cit. n°10.

[31] Loc.cit.

[32] En jurisprudence, certaines décisions ont ainsi pu souligner expressément le lien existant entre cette sûreté personnelle qu’est la garantie autonome et le dépôt de garantie, qui apparaît comme une sûreté réelle. Voir CA Paris 29 janvier 1981, et TGI Paris 11 juillet 1980, D. 1981, page 336 note Vasseur ; voir aussi, CA Paris 7 mars 1995, Juris-Data n°020320, qui énonce que la caractéristique de la garantie à première demande est, « que le bénéficiaire peut en exiger l’exécution avec la même facilité que s’il disposait des fonds en espèce dans son coffre », décision citée par Ph. SIMLER, op.cit., n°861.

[33] Nous n’évoquerons ici, que les textes les plus connus, pour une liste plus complète de ces initiatives (aucune n’a de force contraignante), voir, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit. n°402.

[34] RUGC : Doc. CCI n° 325.

[35] RUGD: Doc. CCI n° 458. Voir sur ce texte, Ph. SIMLER, Règles uniformes de la CCI relatives aux garanties sur demande, Petites Affiches, 13 mai 1992, n°58 page 25 ; S. PIEDELIEVRE, Remarques sur les nouvelles règles uniformes…, RTDcom. 1993 page 615.

[36] Ph. SIMLER, op.cit., n°950.

[37] Voir à titre d’exemple, Cass.com. 3 juin 1986, JCP G 1986, I, 3265, et E 1986, II, 14778, n°117, D. 1987, somm. page 174, obs. M. Vasseur ; Cass.com. 16 mai 1995, JCP E 1995, II, 734 et N 1995, II, 385, note Leveneur.

[38] Voir, Cass.com. 19 février 1991, JCP G 1991, II, 21670 et E 1991, II, 163 note Vasseur ; Cass.com. 3 novembre 1992, Bull.civ. IV, n°335, JCP G 1993, II, 22080, note Delebecque et E 1993, 454, note Jacob.

[39] Voir, S. PIEDELIEVRE, Le projet de convention de la Commission des Nations-Unies pour le commerce international sur les garanties indépendantes et les lettres de crédit stand-by, RTDcom. 1996 page 633. On signalera, que les lettres de crédit stand-by sont en fait des garanties indépendantes émises par les banques américaines, qui ont tourné l’interdiction qui leur est faite de fournir des garanties personnelles en recourant à la forme d’une lettre de crédit.

[40] J. TERRAY, Le cautionnement, une institution en danger, JCP G 1987, II, 3295, n°1.

[41] Cf ; J. DEVEZE, Aux frontières du cautionnement : lettres d’intention et garanties indépendantes, Petites Affiches, n°79, 3 juillet 1991 page 27. Cet auteur souligne par ailleurs (page 31), que « Les garanties indépendantes se développent en droit interne pour remplir, plus énergiquement, les mêmes fonctions que le cautionnement ».

[42] Op.cit. n°13.

[43] Ch. MOULY, Pour la liberté des garanties personnelles, Banque 1987, page 1166.

[44] Voir infra, pages 102 et s. Il s’agit là des garanties autonomes lato sensu (étudiées dans le chapitre I du titre II de cette étude), qui ne s’apparentent pas au premier chef, à la sûreté faisant l’objet de cette étude, on devrait donc plutôt parler de sûretés « non accessoires » et réserver le qualificatif, « autonome », à la garantie autonome stricto sensu.

[45] Article 48 de la loi n°84-148 du 1er mars 1984.

[46] Pour un panorama des différentes interventions législatives en faveur des cautions, voir Ph. SIMLER, op.cit. n°4. Voir notamment la loi du 31 décembre 1989 relative au crédit à la consommation (art. L 313-7 du C.consom.) et celle du 11 février 1994 sur l’habitat (art. 22-1 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliore les rapports locatifs), qui toutes deux, prévoient un formulaire manuscrit à peine de nullité de l’engagement. Ces lois prennent donc le relais de la jurisprudence érigeant la mention manuscrite de l’article 1326 en condition de validité de l’engagement, abandonnée par, Cass. civ.1, 20 octobre 1992, Bull.civ. I, n°259 ; Cass.com. 1er juin 1993, Bull.civ.IV, n°213.

[47] Ph. SIMLER, loc.cit.

[48] Cass.com. 17 juillet 1990, trois arrêts, Bull.civ.IV, n°214 et 215, D. 1994, page 494 note A. Honorat.

[49] Voir, Cass.civ.1, 24 janvier 1995, Bull.civ.1, n°51.

[50] Le garant peut en effet être appelé en paiement alors même que le donneur d’ordre ne doit rien ou que l’obligation principale est éteinte ou nulle.

[51] J. TERRAY, art. prèc. n°4.

[52] Voir par exemple, J. DEVEZE, art. prèc. page 32 ; voir aussi, Ch. MOULY, L’avenir de la garantie indépendante en droit interne, Mélanges Breton-Derrida, pages 267 et s., qui estime que la technique de la garantie autonome ne devrait être tolérée en droit interne, que dans sa fonction de substitut d’un dépôt de garantie.

[53] cf : notamment, A. PRUM, Les garanties à première demande : essai sur l’autonomie, Litec 1994 n°26 et n°90; Ph. DELEBECQUE, les garanties autonomes en droit interne, Bull Joly, avril 1992, page 374 ; H. L. et J. MAZEAUD et F. CHABAS , Leçons de droit civil, T.3, vol.1, Sûretés, publicité foncière, par Y. PICOD, Paris, Montchrestien 1999, n°53-7 ; S. PIEDELIEVRE, les sûretés, 2eme éd 2000, Armand Colin, page 81 ; L. AYNES, les sûretés, prèc., n°319 ; Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, prèc., n°920 ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, les rapports entre la garantie à première demande et le contrat de base en droit français, Mèl. Roblot page 413, n°17 ; F. JACOB, Le constitut ou l’engagement autonome de payer la dette d’autrui à titre de garantie, thèse Strasbourg, LGDJ 1998 n°2.

[54] Cass.com, 20 dèc 1982, deux arrêts, Bull civ. IV, n°417 ; JCP G 1983, IV, 79 ; D. 1983, p.365, note VASSEUR

[55] Cf : notamment ; Cass.com, 20 dèc 1982 prèc.  – Cass.com.,17 octobre 1984 et 5 février 1985, D. 1985 page 269 note VASSEUR – Cass.com., 20 février 1985, Bull Civ. IV n°74  – Cass.com., 29 avr. 1986, Bull Civ. IV, n°73-20 janv.1987 ; JCP G 1987, II, 20764, et E 1987,II, 14882, note STOUFFLET – Cass.com., 2 fév.1988, D. 1988, inf.rap. page 46

[56] Voir en ce sens, D. GRILLET-PONTON, Nouveau regard sur la vivacité de l’innommé en matière contractuelle, D. 2000, chroniques page 331 et s., spé. page 334, cet auteur semble toutefois, faire une confusion entre garanties autonomes et lettres d’intention.

[57] Par exemple, l’échange de paroles solennelles (contrat verbis) ou la nécessité d’un écrit consigné dans un registre (contrat littéris).

[58] Ce que traduit l’adage ex nudo pacto actio non nascitur, d’un pacte nu ne peut naître aucune action en justice.

[59] En droit romain, une partie à un contrat innomé ne pouvait demander à un juge de condamner l’autre à s’exécuter. Cette solution était source d’inconvénients, aussi, on a finit par doter de tels contrats, d’une action pour permettre à une partie ayant exécuté de son côté ses obligations, de demander en justice la contre-prestation, c’est l’action praescriptis verbis. Si cette action peut constituer une étape vers la reconnaissance de la valeur juridique de toutes les conventions, la distinction restait capitale en doit romain.

[60] Article 1107 du Code civil : « Les contrats, soit qu’ils aient une dénomination propre, soit qu’ils n’en aient pas, sont soumis à des règles générales, qui sont l’objet du présent titre ».

[61] On notera toutefois que le consensualisme préexistait au Code civil. En effet, sous l’ancien droit, les canonistes ont promu le respect de la parole donnée (pacta sunt servanda) et pour BEAUMANOIR déjà, « Toutes convenances sont à tenir » (Coutumes de Beauvaisis, 1283, n°999). Au XVIIe  siècle pour DOMAT  (Loix civiles, Livre I, t. I, page 20 n°7), « ces subtilités qui ne sont point de notre usage, embarrasseraient inutilement car toutes les conventions, soit qu’elles aient ou qu’elles n’aient point de nom, ont toujours leur effet, et elles obligent à ce qui est convenu », ce qui préfigure l’article 1107 du Code civil. Voir J. HUET, op.cit., n°10.

[62] Classification synthétique des contrats, Rev. crit. lég. jur. 1904, pages 470 et s., cité par D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°13.

[63] Voir en ce sens : D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. page 19 ; F. TERRE, thèse prèc. n°591 ; Ph. MALAURIE et L. AYNES, Les contrats spéciaux civils et commerciaux, par P.Y. GAUTIER, Cujas 1998, n°6 ; J. HUET, loc.cit., pour qui, « ce qu’enseigne la pleine reconnaissance des contrats innomés est que les sujets de droit ont la faculté de forger de toutes pièces le cadre contractuel dans lequel ils désirent évoluer. C’est la liberté de créer. »

[64] En ce sens, voir, F. TERRE, thèse prèc. n°597 et s. ; D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°286 ; MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°106.

[65] Cf ; M.L IZORCHE, l’autonomie de la volonté, in, Droits de l’homme et libertés fondamentales, Dalloz 1994 page 107 s.

[66] Voir, D. GRILLET-PONTON, Essai sur le contrat innomé, thèse Lyon, dactyl., 1982, n°17. Pour une critique d’ordre plus général, voir par exemple, R. DEMOGUE, Traité des obligations, T. I, Sources des obligations, Paris 1923, n°28, pour qui, « La théorie de l’autonomie de la volonté, sans être complètement fausse apparaît comme pleine d’exagérations ».

[67] D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°17.

[68] Ibid.

[69] Ibid.

[70] Ph. JESTAZ, La qualification en droit civil, Droits, 1993, page 45.

[71] Il est généralement considéré que les parties apportent au juge un lot de fait qu’il lui appartient de qualifier, ce qu’illustre l’adage, da mihi factum, tibi dabo jus, c’est-à-dire, donne-moi le fait, je te donnerai le droit.

[72] F. TERRE, L’influence de la volonté individuelle sur les qualifications, thèse prèc. n° 212.

[73] Réglementé aux articles 2011 à 2043 du code civil

[74] Op.cit. n°4. La volonté pour les créanciers d’échapper aux rigueurs du cautionnement semble ancienne, puisque M. SIMLER, cite FOURNIER, Le cautionnement solidaire, Rev. Crit. Lég. et jurisp. 1886, pages 695 et s. et 1887 pages 40 et s.,n°13, qui relevait déjà, que « la pratique montre désormais que, dans tous les contrats de cautionnement, on fait engager les cautions comme cautions solidaires ».

[75] C. GAVALDA et J. STOUFFLET, la lettre de garantie internationale, RTDcom 1980 page 1 et s, spé n°11

[76] GILISSEN, cité par Y. POULLET et M. BELLIS, colloque de Tours FEDUCI 1981 éd. Moniteur, énonçait déjà, « quoique très répandu, ce caractère accessoire de la sûreté personnelle n’est toutefois pas un élément essentiel de l’institution, il ne tient pas à l’essence de celle-ci ».

[77]On signalera par ailleurs, qu’en matière de sûretés réelles, le caractère accessoire peut aussi être écarté, tel est le cas de la fiducie-sûreté qui est une sûreté réelle non accessoire de la créance qu’elle a pour finalité de garantir

[78] Ph. SIMLER, op.cit., n°47

[79] Cf ; notamment un arrêt, CA Paris du 15 juin 1973, Rev. Jur. Comm 1973 page 273, qui refuse de reconnaître la validité d’une garantie autonome, cet arrêt suivant un raisonnement selon lequel, il n’existe qu’une forme de sûreté personnelle, celle prévue par la loi, à savoir le cautionnement accessoire.

[80] TROPLONG. R., Du cautionnement et des transactions, Paris 1846, cité par A. PRUM, op.cit., n°90 ; voir aussi sur ce point, Y. POULLET, Les garanties contractuelles dans le commerce international, DPCI, septembre 1979, t. 5, n°3 pages 387-442 (n°13). 

[81]Il faut noter qu’un texte semblable existe en droit italien, avec l’article 1939 du code civil italien, et il est intéressant de remarquer que c’est en se fondant sur ce texte permettant la fidéjussio d’un incapable, que la Cour de Cassation italienne a admis l’indépendance de la garantie à première demande avec un arrêt du 3 septembre 1966 ; cf, B. Borsa e Tit. di Créd., 1967, II,38 et s., selon cet arrêt, en autorisant la fidéjussio d’un incapable, le code civil n’entend pas conférer à la règle de l’accessoire la valeur d’un principe d’ordre public régissant l’ensemble des sûretés personnelles.

De la même manière, en droit suisse, la doctrine assimile le cautionnement d’une dette nulle pour erreur ou incapacité (art. 502 du code suisse des obligations), à un véritable contrat de garantie, indépendant par nature du rapport sous-jacent ; voir sur ce point, A. PRUM, loc.cit., et Y. POULLET, art. prèc. n°14.

[82] RIPERT et BOULANGER, Traité de droit civil, t. II, Obligations, Droits réels, LGDJ 1957, n°307.

[83] De manière voisine, pour M. J.L. RIVES-LANGE, Existe-t-il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier ?, Revue Banque 1985, page 902 et s. n°2, « La promesse abstraite est celle dont la cause n’est pas prise en considération par le droit et le juge pour déterminer sa validité ; elle doit s’exécuter même s’il est prouvé qu’elle est sans cause….cette abstraction élude le contrôle du juge ; elle empêche toute contestation et par là affaiblit, voire supprime, la protection du débiteur .»

[84] Sur ce point, voir J. GHESTIN, Traité de droit civil, t.2, Les obligations, La formation du contrat, LGDJ 1993, 3e éd., n°706 et s. ;M. VIVANT, Le fondement juridique des obligations abstraites, D. 1978, chron. Page 39 et s.

[85] Ph. SIMLER, op.cit.,, n°938

[86] Plusieurs décisions se sont d’ailleurs efforcées d’identifier cette cause : cf, notamment ; TGI Montluçon, 9 janvier 1981, D. 1981, 390, obs. M. Vasseur ; CA Riom, 14 mai 1980, D. 1981 p. 336, 2eme esp. note VASSEUR ; CA Paris, 29 janvier 1981, D. 1981, p. 336, 1ere esp. note Vasseur; CA Paris 27 novembre 1990, Juris-Data n°025939 ; D. 1991, som., page 200, obs. Vasseur.

[87] Cf : S. PIEDELIEVRE, op.cit., Page 85 ; L. AYNES, op.cit., n°335 ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art prèc., RTDCom 1980 n°12 ; C. MOULY, l’avenir de la garantie indépendante en droit interne français, Mèl. Breton-Derrida pages 267 et s.(page 272 sur ce point) ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, Les rapports entre la garantie à première demande et le contrat de base en droit français, Mèl. Roblot n°19 ; M. DUBISSON, Le droit de saisir les cautions de soumission et les garanties de bonne exécution, DPCI, 1977, page 423 ; A. PRUM, op.cit., n° 122, pour qui, « la volonté privée demeure impuissante à donner naissance à un acte abstrait innomé ».

[88] Art.1131 civ. « L’obligation sans cause ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet ».

[89] Voir notamment, Ph. SIMLER, op.cit., n° 941.

[90] Voir, J. L. RIVES-LANGE, art. prèc. à la Revue Banque, n°20, qui parle pour ces engagements abstraits ne reposant pas sur un texte, auxquels il ajoute la garantie autonome, « d’abstraction partielle ».

[91] Cf, toutefois, Cass.com. 24 novembre 1982, arrêt n°987, Société Générale c. Daudraj van Cauwenberghe et fils, Rodriguez ELI S.A et autres, non publié, cité par A. PRUM, op.cit., n°123, note 43, selon cet arrêt, « mais attendu que la cour d’appel…sans se contredire, à fait ressortir, à bon droit, que l’engagement de la banque avait sa cause dans l’obligation solidairement souscrite avec la société X, d’indemniser la société Y de la totalité des dommages résultant du retard dans la délivrance du connaissement original… ».

Néanmoins, il faut remarquer que cet arrêt a été rendu, avant même les arrêts de principe du 20 décembre 1982. Depuis cette date, la notion de garantie autonome s’est considérablement affinée. De grandes incertitudes régnaient à l’époque sur ce mécanisme, ainsi cet arrêt parle d’une « obligation solidairement souscrite ». Il semble que depuis cette date, aucun arrêt de la Cour de Cassation n’ait formulé un rejet de principe quant à une éventuelle nature abstraite de la garantie autonome, aussi, une trop grande portée ne doit pas être accordée à cet arrêt.

[92] Cass.com, 20 dèc. 1982, D. 1983, jurisprudence page 365, note Vasseur.

[93] Cf : principalement ; H. CAPITANT, De la cause des obligations, Thèse Paris 1929, Dalloz, spé. n° 31 p 64 et n°184 p 400-401 ; M. PLANIOL et G. RIPERT, Traité pratique de droit civil français, t 6, par P. ESMEIN n°269 ; C. BEUDANT par P. VOIRIN, Cours de droit civil français, t 13, n°75 p.82 ; G. BUFNOIR, propriété et contrat, Thèse, Paris 1900, page 533 ; E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial, n°1293 ; A. RIEG, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique en droit civil français et allemand, Thèse Paris, LGDJ 1961 n° 287.

[94] SAVIGNY, Le droit des obligations, T. II. Trad, GERARDIN et JOZON, Paris 1863, § 78.

[95] Cf ; notamment pour la Belgique, la Thèse de Y. POULLET, L’abstraction de la garantie bancaire autonome, Thèse dactyl., Louvain la neuve, 1981-1982, 2 volumes.

[96] Cf : J. GHESTIN, La formation du contrat, n°707 et s. ; J. Maury, Rep. Dr. Civ, v° cause, n°172 ; H. CAPITANT, thèse prèc. n°175 et s ; A. RIEG thèse prèc. n°286 et s. Et plus récemment, voir, C. LARROUMET, Droit civil, t 3, les obligations, le contrat, 4eme éd. 1998, Economica, n°477 et s.

[97] Il s’agit des titres nominatifs, des titres au porteur et des effets de commerce.

[98] Sur ce point, voir ; M. VIVANT, art. prèc., page 40 ; J. GHESTIN, La formation du contrat, 3e éd., n°707.

[99] Cf ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, art.prèc. n°19

[100] Cf ; C. MOULY, art. prèc. page 272, citant ; Ph. MALAURIE et L. AYNES, Droit civil, les sûretés, 3eme éd. n°335-338 et P. THERY, Sûretés et publicité foncière, PUF 1988, n°111, 113 et 116.

[101] Cass. belge 13 novembre 1969, Pas. 1970, I, 234 ; Cass. Belge 5 novembre 1976, Pas. 1977, I, 267.

[102] Voir ; H. VAN LIER, Les garanties dites « à première demande » ou abstraites, J.T. belge, 1980, 351 ; P. VAN OMMESLAGHE, Observations sur la théorie de la cause, note sous Cass. belge, 13 novembre 1969, RCJB 1970, 362 ; S. VELU, M. DE LIERNEUX, J. LEVY MORELLE, Les garanties payables à première demande, colloque FEDUCI Bruxelles, octobre 1983, P. I, 62 ; auteurs cités par A. PRUM, op.cit., n°121, note 34.

[103] P. VAN OMMESLAGHE, op.cit., page 362, cité par A. PRUM, op.cit., n°121.

[104] Cf ; en ce sens, la sentence arbitrale de la CCI du 19 septembre 1979 rendue en droit belge, Clunet 1980, 970, obs. Y. Derains, « …le commerce et la pratique des affaires ont développé pour leurs propres besoins des actes légaux qui sont détachés de leur cause et fondés sur le principe d’autonomie de la volonté. », cité par A. PRUM, op.cit., n°121, note 37.

[105] Voir notamment, BGH 16 décembre 1960, W.M. 1961, 204, cité par Y. POULLET, art. prèc. page 400 note 51.

[106] Voir notamment, Schinnerer E., Bankvertrage, T. II, pp. 212 et s., cité par Y. POULLET, art. prèc. page 401 note 53.

[107] Sur l’ensemble de cette question voir le panorama assez complet dressé par Y. POULLET, art. prèc. page 400 et 401.

[108]Cf ; TGI Paris, réf, 13 mai 1980, JCP G 1981, II, 19550 note Vasseur, dans cette décision, le tribunal a estimé qu’une « …garantie s’analyse…comme un engagement abstrait devant jouer d’une façon détachée, par rapport aux relations existant entre les signataires du marché commercial de base.» ; voir aussi, CA Paris 27 octobre 1981, JCP G 1981, II,19702.

[109] Cf ; MM. CABRILLAC et MOULY op. cit., n°427, P. ANCEL, thèse prèc. n°183 ; N. MONACHON DUCHENE, La garantie à première demande en matière de crédit à la consommation, Gaz. Pal, 24 dèc.1994 page 1410 ; Ch. LARROUMET, op.cit.,, n°480, pour qui, l’engagement du garant est un engagement abstrait comme celui de la caution, mais contrairement à celui de la caution, il n’est pas accessoire ; M. VASSEUR, note sous Cass.com, 20 déc. 1982 prèc. n°9 ; J. TERRAY, Le cautionnement, une institution en danger, JCP G 1987, I, 3295 ; J.L. RIVES-LANGE ; Existe-t-il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier, Revue Banque 1985 page 902 et s. ; du même auteur, Travaux de l’Association H. Capitant, t. 35, La responsabilité du banquier : aspects nouveaux, 1984, Rapport français, pages 301 et s., et dans le même ouvrage, aussi en faveur de la qualification d’acte abstrait, F. MOLENAAR, Rapport général, pages 217 et s.

[110] P. ANCEL, thèse prèc. n°174 ; J.L. RIVES-LANGE, art. prèc.

[111] A. RIEG, thèse prèc. n°277 ; voir aussi, RIPERT et BOULANGER, op.cit., n° 309 ; on remarquera aussi, que M. VASSEUR sous Cass.com, 20 dèc 1982 prèc., reprend en la modifiant légèrement la phrase d’A. RIEG, puisqu’il écrit, « l’engagement autonome indépendant n’est pas dépourvu de cause, il en est seulement détaché », ce qui semble indiquer, que cet auteur se prononce en faveur de la qualification d‘acte abstrait.

[112] Cf  notamment; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art.prèc.n°8 ; P. SIMLER, op.cit., n°938, pour qui, les questions quant à savoir quelle est la cause de la garantie autonome et quel rôle peut-elle jouer, n’ont d’intérêt que si l’on écarte la qualification d’acte abstrait.

[113] Cf ; P. ANCEL, thèse prèc. n°175

[114] Cf ; d’une manière plus générale sur la cause dans les actes abstraits et son rôle, avant et après le paiement, voir ; A. RIEG, thèse prèc. n°292 ; DE PAGE, L’obligation abstraite en droit interne et en droit comparé, Thèse Bruxelles, 1957, spé. page125 et s.

[115] Cf ; sur cet effet de l’abstraction, A. RIEG, thèse prèc. n°277, DE PAGE, thèse prèc . page 104 et s.

[116] P. ANCEL, thèse prèc. n°176

[117] Ph. SIMLER, op.cit., n° 939 ; dans le même sens, P. ANCEL, thèse prèc. n°178.

[118] Cf ; notamment ; CA Paris 29 juin 1981, D. 1981, jurisprudence, page 336, note VASSEUR, arrêt qui considère que le contrat de base constitue la cause de la garantie.

[119]Cf : SIMLER et DELEBECQUE, Les sûretés, La publicité foncière, Précis Dalloz 1999, n° 219 ; Ph. SIMLER, op.cit., n°939 ; RIVES-LANGE et CONTAMINE-RAYNAUD, Droit bancaire, 6eme éd, n°792 ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art prèc. n°19 ; voir aussi, S. PIEDELIEVRE, op. cit., page 85.

[120] Ph. SIMLER, op.cit., n°939.

[121] Cass 8 novembre 1972, D. 1973, 753, note Ph. MALAURIE.

[122] M. VASSEUR,V°, Garantie indépendante, Rep.dr.com, Dalloz, n°42.

[123] Cf ; P. ANCEL, thèse prèc. n°181.

[124] Cf ; C. GAVALDA et J. STOUFFLET, art.prèc., RTDCom 1980, 1, n°12 ; M. VASSEUR, art. prèc. n°44 ; J-L. RIVES-LANGE, Existe-t-il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier, Banque, 1985, p.902 et s., n°18 page 911 ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, art. prèc. page 426, n°24.

[125] Cf : notamment ; S. VELU, intervention au colloque de Tours, Les garanties bancaires, éd. du Moniteur, page 231 ; M. DUBISSON, Le droit de saisir les garanties bancaires émises dans les marchés internationaux, JCP éd. CI, 1982, II,13813, n°28 et 36 ; BERLIOZ, JCP éd. CI, 1980, II, 13224, n°8 ; L. AYNES, op.cit., n°336, MARTY RAYNAUD et JESTAZ, op.cit., n°639 ; MAZEAUD et CHABAS par Y. PICOD, op.cit., n°53-9, P. THERY, op.cit., n°111 ; de manière plus originale, voir A. PRUM, op.cit., n°134, qui considère, « que la cause objective de la garantie doit être recherchée non point dans la créance appartenant à son bénéficiaire sur le donneur d’ordre, mais dans une considération de pur fait : le risque auquel le premier se trouve exposé. » Cela permettant selon cet auteur de différencier la cause objective d’une garantie autonome de celle du cautionnement.

[126] En ce sens ; CA Bruxelles, 8 dèc. 1981, Revue belge de la banque, 1982, p. 99.

[127] Op.cit., n°335.

[128] Cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n°939

[129] Sur ce point, voir, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n°426 ; P. ANCEL, thèse prèc.n°180.

[130] Voir ; P. ANCEL, thèse prèc. n°183 ; MM. CABRILLAC et MOULY, loc.cit ; N. MONACHON DUCHENE, La garantie à première demande en matière de crédit à la consommation, Gaz. Pal, 24 dèc.1994 page 1410 ; Ch. LARROUMET, op.cit., n°480, pour qui, l’engagement du garant est un engagement abstrait comme celui de la caution, mais contrairement à celui de la caution, il n’est pas accessoire ; J. TERRAY, art. prèc. n°6.

[131] Voir, A. RIEG, thèse prèc. n°292 et s, qui étudie l’exemple d’acte abstrait le plus connu des juristes français, la reconnaissance de dette abstraite du §781 du BGB. Le débiteur qui a payé alors que la dette reconnue n’existait pas à un recours fondé sur le §812 du BGB relatif à l’enrichissement sans cause. L’exception pour défaut de cause pourrait même être invoquée par le débiteur avant le paiement pour repousser la demande du créancier. On voit donc que l’abstraction des promesses ( §780 du BGB) et reconnaissances de dette en droit allemand est beaucoup moins absolue qu’on ne le croit habituellement.

Voir aussi, sur le sens de l’abstraction dans les § 780 et 781 du BGB ; De Page, L’obligation abstraite en droit interne et en droit comparé, Bruxelles 1957, spéc. page 125 et s., cité par P. ANCEL, thèse prèc. n°175.

[132] Voir, Ph. SIMLER, op.cit.,n°941

[133] H. CAPITANT, De la cause des obligations, thèse prèc. n°9

[134] Voir aussi en ce sens ; C. LARROUMET, Droit civil, le contrat, 4eme éd., Economica, 1998, n°477, pour qui, « s’il n’est pas douteux que l’acte abstrait n’existe pas en droit français en ce qui concerne la promesse qui suppose des relations exclusivement bilatérales, c’est-à-dire entre un créancier et un débiteur et dont la cause doit être recherchée dans les seuls rapports existant entre les deux parties à l’acte juridique, il n’est pas du tout certain qu’il en aille de même en ce qui concerne, soit les opérations à trois personnes, soit même un acte juridique bilatéral dans lequel la cause de l’obligation du débiteur doit être recherchée dans les relations de celui-ci avec une troisième personne qui n’est pas partie à l’acte juridique ». Pour cet auteur, « l’acte abstrait serait susceptible d’expliquer que le débiteur ne puisse se prévaloir envers le créancier de moyens de défense tenant à la cause de son engagement et qu’il puiserait dans ses relations avec une autre personne ».

 Contra ; J. GHESTIN, La formation du contrat, n°707 et s, qui limite fortement l’existence d’actes abstraits en droit français ; dans le même sens, M. VIVANT, art. prèc., page 40.

[135] S. PIEDELIEVRE, op.cit., page 85.

[136] Voir en ce sens, l’arrêt ; Cass.com 13 dèc.1994, D. 1995, jurisprudence page 209, avec le rapport du conseiller référendaire M. Henri LE DAUPHIN et la note de L.AYNES.

[137] Cité par MM. GHESTIN et GOUBEAUX et Mme FABRE-MAGNAN, Traité de droit civil, Introduction générale, LGDJ, 4eme éd., n°816.

[138] H. LE DAUPHIN, rapport prèc. page 211.

[139] Pour une opinion contraire, voir, Ph. DELEBECQUE, Les garanties autonomes en droit interne, Bull Joly, avril 1992 page 374 et s ( page 608 sur ce point), pour cet auteur, il y aurait place pour l’annulation de certaines garanties autonomes en droit interne sur le fondement d’une atteinte à l’ordre public ou d’une fraude à la loi.

[140] Voir par exemple, J. TERRAY, art. prèc. n°7,  qui proposait de réserver la garantie autonome aux cas ou le garant est une banque et le donneur d’ordres un professionnel, pour qu’elle retrouve sa vocation première, c’est-à-dire faciliter les échanges commerciaux.  

[141]Déjà, CA Paris 5eme Ch., 12 fèv. 1992, D. 1993, IR, page 121 ;voir aussi ; CA Reims 30 nov 1995, Juris –Data n° 052007, qui considère que les garanties autonomes sont en principe valables en droit interne faute de contrariété à une règle d’ordre public, et qu’il n’appartient pas aux tribunaux d’interdire tel type de contrat à telle catégorie de sujets de droits.

[142]A titre d’exemples, voir notamment ; CA Paris, 27 juin 1990, Defresnois 1990, art.34917 page 1349 note Aynès, qui annule une garantie autonome souscrite par une personne physique pour dol, l’élément central de ce dol étant le caractère inusité de cette forme de garantie pour le genre d’opération en question ; voir aussi, CA Paris 26 janv 1993, D. 1993, inf rap page 93, qui énonce que constituent des cautionnements et non des garanties autonomes, les engagements souscrits par des personnes physiques « quelle que soit la qualification donnée par le créancier dans les documents soumis à l’adhésion des obligés » ; Voir infra, page 115, pour plus de détails. 

[143] Ph. SIMLER, op.cit., n°922

[144]Il est possible d’échapper à cette retenue en fournissant au maître de l’ouvrage, pour un montant égal, « une caution personnelle et financière émanant d’un établissement financier » (art. 1er ). L’article 3 de cette loi prévoit que les arrangements ou clauses qui auraient pour effet de faire échec à ces dispositions sont nuls et de nul effet. Aussi, il a été jugé sur la base de ces textes que le maître de l’ouvrage ne peut exiger la fourniture d’une garantie autonome ; voir notamment, CA Rouen, 2 février. 1984, RJ com.1984 page 289, note Deleau-Deshayes ; Cass com, 11 dèc. 1985, Bull Civ, IV n°293, Gaz Pal. 1986, 2, pan.jurisp. page 68.

[145] Voir, Cass. civ.3, 27 septembre 2000, RJDA 2/01 n°233, qui casse l’arrêt d’appel qui a rejeté la demande en paiement du bénéficiaire au motif que la garantie de substitution est un cautionnement et qu’il n’est pas établi que le créancier soit fondé à réclamer le montant de cette garantie de substitution. La Cour de Cassation censure cette décision, en considérant que l’engagement litigieux est une garantie autonome et non un cautionnement ayant vocation à se substituer à la retenue de garantie. Cet arrêt n’est pas en contradiction avec la jurisprudence précédente ni même avec les termes de la loi, puisque l’engagement en cause, se bornait à une référence à la commande sans spécifier que la garantie était donnée en substitution de la retenue de garantie, aussi l’engagement se trouvait en dehors du champ d’application de la loi du 16 juillet 1971, sans qu’il n’y ait là une quelconque fraude à la loi.

[146] Voir, T. HASSLER, note sous CA Paris, 27 juin 1990, JCP ed E, II, 118-119, pour qui, dans une telle hypothèse les éléments de la fraude à la loi sont réunis ; DELEBECQUE, art.prèc.n°7 page 374 ; Ph. SIMLER, op.cit., n°922 ; J. DEVEZE, Aux frontières du cautionnement : lettres d’intention et garanties indépendantes, Petites Affiches 3 juillet 1991page 32.

[147] Cf ; GHESTIN et GOUBEAUX, Traité de droit civil, Introduction, 2e éd., n°754, ces auteurs opposent la fraude qui consiste à éluder une règle dont les conditions d’application sont réunies, et l’habileté, qui se réduit au fait de se placer en dehors de ces conditions.

[148]Voir notamment ; L. AYNES, note sous Cass.com. 10 janvier 1995, D. 1995, jurisprudence page 201 et s. (page 202) ; L. LEVENEUR, Contrats, conc., consom., mars 1991, n°51 ; N. MONACHON DUCHENE, art. prèc, beaucoup plus indécis, une garantie autonome serait possible en la matière si le garant était aussi bien informé qu’une caution, tout dépendrait de la rédaction de l’acte de garantie.

[149] Voir l’arrêt du 27 septembre 2000 prèc., sur les retenues de garantie en matière de marchés de travaux, il semble que le même raisonnement puisse être mené dans le cadre des garanties de crédit à la consommation.

[150] F. TERRE, L’influence de la volonté individuelle sur les qualifications, Thèse Paris 1957, n°563. Sur l’utilité de l’innomé pour échapper aux dispositions d’ordre public régissant un contrat nommé, voir aussi, D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°286, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°106.

[151] F. TERRE, thèse prèc. n°559.

[152]Voir notamment ; Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, Litec 1999 n°864 ; MAZEAUD-CHABAS par Y. PICOD, op.cit., n° 53-1 ; L. AYNES, op.cit., n°333 ; J. ROCHFELD, Cause et type de contrat, Thèse Paris, LGDJ, 1999, n°58 ; D. GRILLET-PONTON, Nouveau regard sur la vivacité de l’innomé en matière contractuelle, D. 2000, chron., pages 331 et s. spé. page 334, qui semble toutefois confondre, garanties autonomes et lettres d’intention. La Cour de Cassation a par ailleurs confirmé, la nature innomée de la garantie autonome dans ses deux arrêts du 20 dèc. 1982 prèc.

Contra : quelques auteurs pour qui la garantie autonome ne serait qu’un dérivé du cautionnement ; LOUSSOUARN, Les sûretés personnelles traditionnelles en droit international privé, in FEDUCI, Les garanties bancaires dans les contrats internationaux, éd. Moniteur, 1981, rapport de synthèse, page 326 et s. ; MARTY, RAYNAUD, JESTAZ , op.cit., n°628 ; P. ANCEL, thèse prèc. n°141 et s.. 

[153] voir infra pages 92 et s.

[154] Voir infra pages 104 et s.

[155] F. TERRE, thèse prèc. n°565 ; dans le même sens, voir , J. GHESTIN, La formation du contrat, n°103.

[156] F. TERRE, thèse prèc. n°566

[157] F. TERRE, thèse prèc.n°567 ; D. GRILLET-PONTON, Essai sur le contrat innomé, Thèse Lyon, 1982, n°152.

[158] F. TERRE, thèse prèc. n°604.

[159] J. ROCHFELD, Cause et type de contrat, Thèse Paris, LGDJ, 1999, n°58.

[160] Terminologie empruntée par l’auteur à J. M. MOUSSERON, Technique contractuelle, Editions Francis Lefebvre, 1988, n°287.

[161] Il est assez difficile de faire une synthèse de la terminologie en la matière, il semble qu’il y ait en fait au sein de la théorie des contrats innomés, autant de classifications que d’auteurs s’étant penchés sur le sujet.

[162] J. ROCHFELD, thèse prèc.n°60 et 139 et s.

[163] Voir même si sa théorie se révélait très restrictive à l’égards des contrats innomés puisqu’il n’y avait pas selon cet auteur de contrats totalement innomés, ceux-ci se ramenant en fait toujours à un type de contrat connu, M. PLANIOL, Classification synthétique des contrats, Rev.crit.lèg.jur.1904. pages 470 et s, notamment pages 484-486 ; D. GRILLET-PONTON, thèse prèc n°132 et s. ; MM. GHESTIN, JAMIN, BILLIAU, Les effets du contrat, op.cit., n°110 et s. 

[164] F. TERRE, thèse prèc. n°274.

[165] Dans cette optique la cause objective serait ainsi toujours la même lorsque l’on a affaire à tel type de contrat, qu’il s’agisse d’une vente, d’un dépôt, d’un bail, d’une location…De cette manière, il serait aisé de distinguer les différents types de contrat existants.

[166] M.C. DEMOLOMBE, Cours de Code napoléon, t. XXIV, Traité des contrats et des obligations conventionnelles en général, 3eme éd., 1863-1867, n°355 page 340, cité par J. ROCHFELD thèse prèc. n°135.

[167] Cf ; J. ROCHFELD, thèse prèc. n°134.

[168] R. LE BALLE, Cours de droit civil, Licence 2eme année, Paris 1948-49, page 99, cité par F. TERRE, thèse prèc. page 236.

[169] Cette théorie classique qui « détache la cause du réel » comme l’écrit F. Terré (thèse prèc. n°251 page 236), conduisait donc à admettre un système de causes nommées et l’impossibilité de créer d’autres types contractuels fondés sur une cause non « identique ».

[170] J. ROCHFELD, thèse prèc. n°136.

[171] L. BOYER, La notion de transaction. Contribution à l’étude des concepts de cause et d’acte déclaratif, thèse Toulouse, 1947.

[172] H. CAPITANT, De la cause des obligations, thèse prèc. n°8.

[173] L. BOYER, thèse prèc. pages 104-120..

[174] L. BOYER, thése prèc. page 196.

[175] Voir l’exposé de cette critique dans la thèse de J. ROCHFELD, thèse prèc. n°141.

[176] J. ROCHFELD, thèse précitée, voir notamment n°60 avec la note de bas de page n°18, voir aussi, n°140 et s.

[177] On citera l’exemple classique du contrat de vente, la cause de l’obligation du vendeur est donc le paiement du prix, alors que la cause de l’obligation de l’acheteur réside dans le transfert de propriété de la chose.

[178] Voir les difficultés suscitées par la cause du cautionnement, avec l’arrêt Lempereur de la Cour de Cassation du 8 novembre 1972, Dalloz 1973, jurisprudence, page 753, note Ph. Malaurie.

[179] Voir, Ch. LARROUMET, op.cit., n°474.

[180] J.F. OVERSTAKE, Essai de classification des contrats spéciaux, préface J. BERTHE de la GRESSAYE, LGDJ, Bibliothèque de droit privé, t. 91, 1969 pages 171 et s, spéc. page 185, pour cet auteur, « si la cause est l’élément qui permet de cataloguer l’acte juridique, de dire qu’il est onéreux ou à titre gratuit, il convient néanmoins de préciser que la cause en tant que critère de classification ne joue pas un rôle aussi important que l’objet car elle ne présente pas des contours aussi fermes. Elle ne pourra répondre dans tous les cas à la fonction qui lui est assignée. » Cet auteur concède toutefois, « Elle demeure cependant le seul critère de détermination des actes à titre gratuit et des actes à titre onéreux. » 

[181]  J.F. OVERSTAKE, thèse prèc. pages 162 et s.

[182] Cf ; MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, Les effets du contrat, op.cit., n°110 ; D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°126 et s.

[183] J. GHESTIN, La formation du contrat, 2e éd., n° 512.

[184] Cf ; MAZEAUD (H., L. et J.), Leçons de droit civil, t. II, page 201 n°244, 1963, cité par J. F OVERSTAKE, Essai de classification des contrats spéciaux, thèse Bordeaux, LGDJ 1969 ; voir aussi, Ph. SIMLER, op.cit., n°944, pour qui, « l’objet de la garantie autonome au sens d’objet du contrat, instrument de qualification, n’est autre chose que la sûreté procurée à son bénéficiaire au moyen de l’engagement de payer qu’elle implique. L’objet de l’obligation du garant est le paiement du montant tel qu’il est déterminé par les parties ». Il s’agit bien là de la conception selon laquelle l’objet du contrat est défini comme l’opération juridique que les parties cherchent à réaliser.

[185] Cf : J. GHESTIN, Le contrat : Formation, n°512 ; et J. F. OVERSTAKE, thèse prèc. page 24.

[186] RIPERT et BOULANGER, Traité de droit civil, t. II, n°241 ; voir aussi, J. GHESTIN, op.cit.,n°513 ; Pour une explication de cette conception, J. F. OVERSTAKE, thèse prèc. page 26.

[187] GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, Les effets du contrat prèc., n°110, D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°112 ; voir encore sur cette définition de l’objet, H. MAYER, L’objet du contrat, thèse dactyl. Bordeaux 1968 page 69 ; A. GHOZI, La modification de l’obligation par la volonté des parties, thèse Paris, ed 1980, LGDJ pages 30 et s ; J. FLOUR et J.L. AUBERT, Les obligations, vol 1, Les actes juridiques, 1975, n°232 page 170.

[188] On notera, que pour J. ROCHFELD, thèse prèc. n°143, cette notion d’objet n’est efficace que parce qu ‘elle prend les attributs de la cause, c’est-à-dire parce qu’elle intègre le but, la raison de l’engagement de chacun, voire « l’opération économique » à réaliser, pour cet auteur, cette définition de l’objet correspond à la cause, plus précisément à la cause du contrat, c’est-à-dire l’opération économique à réaliser. L’objet pris en compte au travers de « l’obligation caractéristique » ne serait ainsi, qu’ « épiphénomène de la cause ».

[189] Cf ; MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, loc.cit., pour qui la garantie autonome est un exemple marquant de contrat innomé né de la création d’un nouvel objet de contrat.

[190] POTHIER, Traité des obligations, Œuvres de Pothier, Paris 1846 page 449.

[191] E. A. POPA, Les notions de « Debitum » et « Obligatio » et leurs applications en droit français moderne, Paris 1935, page 306, cité par A. PRUM, n°147. Cet auteur met en avant la distinction entre la « dette » et la « responsabilité », distinction qui reposerait sur une analyse dualiste des obligations d’origine romaine entre « debitum » et « obligatio », et qui aurait été reconnue en France sous l’influence de la doctrine allemande, qui emploie elle, les termes « shuld » et « haftung ». Sur cette distinction, voir aussi, J. CARONNIER, Droit civil, Les obligations, PUF 1985 page 529.

[192] L. AYNES, Droit des sûretés, prèc. n°336.

[193] Voir sur cette confusion, infra page 80.

[194] Cass.com, 13 déc. 1994 : Bull civ, IV, n°375 ; D. 1995, page 209 avec le rapport de M. LE DAUPHIN et la note de L. AYNES ; JCP G 1995, I, 3851, n°11, obs. Simler ; Defresnois 1995, art. 36040, page 421 note Aynès; RTDCom 1995 page 458, obs. Cabrillac ; RD bancaire et bourse 1995, page 150 obs. Contamine-Raynaud ; plus récemment, voir Cass com., 9 déc. 1997, D. Aff . 1998, page 199, RD bancaire et bourse 1998 page 66, note Contamine-Raynaud ; Cass civ.1, 23 février 1999 : Juris-Data n°000784, JCP G 1999, I, 156, n°6, obs. Simler.

[195] Voir, des décisions de juridictions du fond annonciatrices de cette solution ; CA Paris, 21 février 1992, JCP E 1992, Pan. 435, et N 1993, II, 172 ; CA Paris, 12 février 1993, RTD Com 1993, page 555, obs. Cabrillac et Teyssié, arrêt qui décide que le titre de garantie autonome donné à l’engagement ne correspondait pas au mécanisme détaillé dans le corps de l’acte, cet engagement étant conçu comme indissociable du contrat de base, cause de cet engagement, puisque le garant indiquait que le montant de sa garantie dépendait de l’accomplissement des obligations du débiteur, le lien entre ces deux contrats était incompatible avec l’autonomie affichée et révélait au contraire une relation d’accessoire. Dans le même sens, CA Aix-en-Provence, 19 mai 1993, Juris-Data n°043444 ; JCP G 1993, IV, 2571, et E 1993, Pan, 1387.

[196] P. ANCEL, Les sûretés non accessoires en droit français et en droit comparé, thèse Dijon 1981, n°165.

[197] M. CONTAMINE-RAYNAUD, sous Cass.com 13 mars 1996 RD bancaire et bourse 1996, page 123, cet auteur se demande s’il s’agit là, de  « la fin des garanties autonomes ».

[198] Voir notamment ; Cass.com, 13 mars 1996 ; JCP G 1997, I, 3991, n°11, obs. Simler ; Cass. com 11 mars 1997, JCP G 1997, IV, 987 et E 1997, pan. 472, RTDCom 1997 page 302 obs. Cabrillac ; Cass. civ .1, 18 mars 1997 : Juris-Data n°001265 ; Cas. Com, 9 déc.1997, D. Aff  1998, page 199 ; Cass.civ. 1, 23 févr 1999, JCP G 1999, I, 156, n°6 obs. Simler et II, 10189, note Ginestet.

[199] CA Rennes, 2 mars 1995 : Juris-Data n°043794 ; CA Aix-en-Provence, 23 mars 1995, JCP G 1995, IV, 1981 et E 1995, pan., 1111 ; CA Rennes 30 avril 1998 : Juris-Data n°044748, qui juge qu’ « aux termes d’une jurisprudence constante, il convient de requalifier en acte de cautionnement l’engagement…lorsqu’il a pour objet la dette »du débiteur principal ; et plus récemment, voir, CA Toulouse, 21 octobre 1999 : Juris-Data n°045136 ; et pour une liste plus exhaustive, voir Ph. SIMLER, op.cit., n°928 note 271. 

[200] Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, op.cit., n°928.

[201] Cass.Ass.plen. 4 juin 1999, JCP G 1999, II, 10152 et E 1999 page 1294, note, M. Behar-Touchais, JCP E 2000 page 414, note Ph. Simler, RTDciv. 1999 page 665, obs. P. Crocq ; confirmé par Cass.com. 3 mai 2000, Revue de droit bancaire et financier, sept-oct 2000, page 299 n°195.

[202] Voir infra, page 80 et s.

[203] La Cour de Cassation, si elle contrôle les qualifications adoptées par les juges du fond et peut les censurer, ne peut pas en principe, substituer une qualification à une autre car cela relève du domaine du fait. Voir sur ce point, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°136.

[204] Cass.civ.1, 12 décembre 2000, arrêt n°1914 F-D, Juris-Data n°007389.

[205] Cité par D. LEGEAIS, note sous Cass.com. 30 janvier 2001, JCP E 2001, jur., pages 568 et s.

[206] Cf ; Cass.com. 30 janvier 2001, Bull.civ.IV n°25 page 23, JCP E 2001, jur., pages 568 et s., note D. Legeais ;  voir aussi, Cass.com. 14 juin 2000, Juris-Data n°002621, RD bancaire et financier, nov-déc. 2000 n°° 226, Droit et patrimoine 2001 page 92, note B. Saint-Halary, JCP G 2001, I, 315, obs. Ph. Simler. La Haute Cour casse l’arrêt attaqué ayant qualifié l’engagement de garantie autonome, alors qu’il avait pour objet, « le paiement des sommes dues ou restant dues par le débiteur au titre du contrat de crédit-bail ».

[207] Loc.cit.

[208] Beaucoup plus sûrement d’un constitut que d’un cautionnement à première demande, car, comme nous l’observerons dans la suite de cette étude, beaucoup d’obstacles existent quant à l’admission en droit français d’un cautionnement dit « à première demande », alors qu’il est déjà possible de trouver trace en jurisprudence de constituts.

[209] Ph. SIMLER, note préc.

[210] Cass com, 27 juin 2000, RJDA, 12/00, n°1169.

[211] Cf ; Cass com., 3 novembre 1992, Bull Civ . IV, n°335, JCP G 1993, II, 22082, note Delebecque, et E 1993, II, 454, note Jacob.

[212] Sur ce débat, voir, D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°17 et s.

[213] C. GOYET ; Louage, propriété et financement des investissement, thèse dactyl., Strasbourg 1981, n°411 page 380.

[214] Il serait possible d’ajouter à cette phrase, « et par la création de contrats inédits ».

[215] F. TERRE, thèse prèc. n°11.

[216] D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°25.

[217] Sauf éventuelle application de règles par analogie, mais nous verrons que l’originalité de la garantie autonome est un obstacle à l’analogie.

[218] Dans de telles hypothèses, ce seront alors elles, qui détermineront la nature des justifications requises, ou dans le cas d’une garantie documentaire, les documents requis.

[219] Cf ; L. AYNES, op.cit., n°336 ; A. PRUM, op.cit.,n° 364 et s. et n° 380 ; MARTY RAYNAUD et JESTAZ, op.cit., n°638.

[220] Cf ; supra page 22.

[221] A cet effet, l’article 2036 du Code civil dispose, « La caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette ;

    Mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur. 

[222] MARTY RAYNAUD et JESTAZ, op. cit. ; voir aussi, A. PRUM, op.cit., n°364 et s. et 380.

[223] M. BILLIAU, dans sa thèse, La délégation de créance, Paris LGDJ 1989 n°316 et 321,  énonce dans le domaine voisin de la délégation, que l’inopposabilité des exceptions en la matière ne découle pas de la notion d’acte abstrait mais du principe de l’effet relatif des contrats, c’est-à-dire de la nouveauté de l’engagement du garant.

[224] On signalera, que cette théorie peut s’expliquer  par le fait, qu’à l’époque où MM. MARTY RAYNAUD et JESTAZ ont écrit leur ouvrage (1987), ils considéraient que, dès lors que l’inexistence de la dette se trouvait établie de façon certaine au moment de l’appel de la garantie par le bénéficiaire, notamment en cas de résiliation de résolution ou d’annulation du marché par une décision de justice devenue définitive, le garant devait refuser de payer. Ils réservaient ainsi une exception pour inexistence prouvée de la dette. Ce qui nous le verrons, n’a pas été consacré par la jurisprudence, même si cela peut servir de base à une action en appel manifestement abusif ( voir n°636).

[225] Cass.com. 20 dèc. 1982 prèc.

[226] Cf ; MM. CABRILLAC et MOULY op.cit., n°427, P. ANCEL, thèse prèc. n°183 ; N. MONACHON DUCHENE, La garantie à première demande en matière de crédit à la consommation, Gaz. Pal, 24 dèc.1994 page 1410 ; Ch. LARROUMET, op.cit., n°480, pour qui, l’engagement du garant est un engagement abstrait comme celui de la caution, mais contrairement à celui de la caution, il n’est pas accessoire ; M. VASSEUR, note sous Cass.com, 20 déc. 1982 prèc., n°9 ; J. TERRAY, Le cautionnement, une institution en danger, JCP G 1987, I, 3295 ; J.L. RIVES-LANGE ; Existe-t-il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier, Revue Banque 1985 page 902 et s. ; du même auteur, Travaux de l’Association H. Capitant, t. 35, La responsabilité du banquier : aspects nouveaux, 1984, Rapport français, pages 301 et s. ; dans le même ouvrage, aussi  en faveur de la qualification d’acte abstrait, F. MOLENAAR, Rapport général, pages 217 et s.

[227] Cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n°993 et s., sur la question des recours. 

[228] Cf : Ph. SIMLER, op.cit., n° 938 ; S. PIEDELIEVRE, op.cit., page 85 ; L. AYNES, op.cit.,n°335 ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art prèc., RTDCom 1980 n°12 ; C. MOULY, l’avenir de la garantie indépendante en droit interne français, Mèl. Breton-Derrida pages 267 et s. (page 272 sur ce point) ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, Les rapports entre la garantie à première demande et le contrat de base en droit français, Mèl. Roblot n°19 ; M. DUBISSON, Le droit de saisir les cautions de soumission et les garanties de bonne exécution, DPCI, 1977, page 423 ; A. PRUM, op.cit., n° 122, pour qui,« la volonté privée demeure impuissante à donner naissance à un acte abstrait innomé ».

[229] A. PRUM, op.cit., n° 117 et s. (spé. n°119).

[230] Cf ; notamment, P. ESMEIN, Etude sur le régime juridique des titres à ordre ou au porteur et en particulier l’inopposabilité des exceptions en matière d’effets de commerce, RTD civ. 1921, page 47, pour qui la règle de l’inopposabilité des exceptions s’explique non par la nature abstraite de la lettre de change mais par des raisons de pure pratique ; FRIEDEL, De l’inopposabilité des exceptions en matière d’effets de commerce, thèse Paris 1951, n° 69, qui considère que « les motifs d’ordre pratique et économique qui ont imposé la règle, en constituent la seule justification » ; J. STOUFFLET, Le crédit documentaire, thèse Bordeaux 1957, n° 489, qui énonce que ce sont « finalement les besoins de la vie des affaires et la nécessité de sécurité, sans laquelle aucun échange ne serait possible, qui seuls justifient la règle de l’inopposabilité des exceptions ». Auteurs cités par M. VIVANT, Le fondement juridique des obligations abstraites, D. 1978, pages 39 et s. (spé. page 41).

[231] M. VIVANT, Loc.cit.

[232] Cet auteur se réfère à la thèse du Professeur CALAIS-AULOY, Essai sur la notion d’apparence en droit commercial, thèse Montpellier, Paris, 1961.

[233] Cf ; C. GAVALDA et J. STOUFFLET, La lettre de garantie internationale, RTDCom 1980, 1, n°12 ; M. VASSEUR, art. prèc. n°44 ; J-L. RIVES-LANGE, Existe-t’il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier, Banque, 1985, p.902 et s., n°18 page 911 ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, art. prèc. page 426, n°24 ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 942, J. GHESTIN, La formation du contrat, prèc., n°714-2.

[234] Sur ce point, voir ; Ph. SIMLER, op.cit.,, n°942 ; P. ANCEL, thèse prèc. n°176.

[235] Cass.com 20 dèc. 1982 prèc ; et déjà, CA Paris 24 nov. 1981, D. 1982. 296, note Vasseur, qui énonçait, que les engagements à première demande sont « des engagements qui doivent recevoir exécution, indépendamment du contentieux qui oppose par ailleurs les contractants ».

[236] Voir notamment, S. PIEDELIEVRE, op.cit.,, page 85.

[237] Cf ; les articles 2021 et 2026 du code civil, mais ces dispositions peuvent être écartées conventionnellement. En pratique, c’est le cas le plus souvent.

[238] Bénéfice dit de « subrogation » ou de « cession d’actions».

[239] Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, op.cit., n°883.

[240] Voir Cass.com, 21 mai 1985, Bull civ., IV, n°160 ; Gaz. Pal, 1985, 2, page 770, note S. Piédelièvre ; Cass.com, 7 octobre 1997, Juris-Data n°003833, JCP G 1997, IV, 2252, et E 1998 page 226, note Legeais ; il faut réserver les hypothèses de fraude et d’abus de droit qui viennent limiter la portée de ce principe, mais il s’agit plus de l’application de principes généraux du droit que de véritables exceptions au principe (voir infra).

[241] Voir, Ch. GAVALDA et J. STOUFFLET, art prèc. n°4 ; M. DUBUISSON, art.prèc., page 425, qui écrit, « La position de demandeur dans un litige international est une position dangereuse ».

[242] Voir, Y. POULLET, Les garanties contractuelles dans le commerce international, art. prèc. n°30.

[243] Cf ; notamment ; Cass.com 27 février 1990, D. 1990, som., page 213 obs. Vasseur ; Cass.com 19 novembre 1985, Bull. civ IV, n°274, page 231, D. 1986, inf. rap, page 153 obs. Vasseur ; CA Versailles 13 juin 1990, D. 1991, somm., page 191 obs. Vasseur.

[244] Sur ces points, voir A. PRUM, op.cit., n° 380.

[245] Cf ; Cass.com. 27 février 1991 prèc. ; Cass.com. 19 novembre 1985 prèc. ; CA Aix-en-Provence, 12 décembre 1985, D. 1988, somm. page 241, obs. Vasseur.

[246] Voir sur ce point, A. PRUM, op.cit., n° 381, qui cite notamment une décision, T.C La Roche-sur-Yon 14 septembre 1981, D. 1982, inf. rap. page 199, obs. Vasseur.

[247] Voir notamment, CA Paris, 9 juillet 1986, D. 1988, somm. page 243, obs. Vasseur.

[248] A. PRUM, loc. cit.

[249] Voir en doctrine, notamment ; A. PRUM, op.cit., n° 380 ; M. VASSEUR, Rep. Com., v° garantie indépendante, n° 100, et rapport de synthèse au colloque de Tours précité, page 347 ; Voir notamment pour la jurisprudence, Cass.com. 27 février 1990, D. 1990, somm. page 213, obs. Vasseur.

[250] CA Paris 29 janvier 1981, D. 1981, page 336, note Vasseur.

[251] Cf ; Cass.com. 20 décembre 1982, prèc.

[252] Cass.com. 13 décembre 1983, D. 1984, page 420, note Vasseur. ; voir aussi, CA Poitiers 30 avril 1996, Juris-Data n° 056631, cité par Ph. SIMLER, op.cit., n°884, qui juge que le défaut de pouvoir du président d’une association pour la signature du contrat principal est sans incidence sur la garantie à première demande souscrite par le même à titre personnel, et écarte l’allégation de dol du créancier qui aurait voulu  se soustraire aux règles du cautionnement.

[253] Voir notamment, CA Paris, 13 février 1987, D. 1987, somm. page 172, obs. Vasseur ; CA Paris, 15 déc. 1991, Juris-Data n°025149, RD bancaire et bourse 1992 page 174, obs. Contamine-Raynaud.

[254] CA Paris, 17 janvier 1983, JCP G 1983, II, 19966, note Stoufflet, arrêt qui affirme la règle sans l’appliquer en l’espèce ce qui conduit à sa cassation par Cass.com 17 oct. 1984, D. 1985 page 269, 1ere esp. note Vasseur ; voir aussi, Cass.com 10 juin 1986, Gaz. Pal. 1987, 1, page 75, obs. , S. Piedelievre.

[255] Voir notamment,  CA Paris 28 septembre 1978, Banco Espagnol en Paris c. Société Générale, inédit, cité par A. PRUM, op.cit., n°385 note 71.

[256] CA Paris, 7 nov. 1983, D. 1984, inf. rap. Page 205, obs. Vasseur.

[257] CA Paris, 23 oct. 1992, RD bancaire et bourse 1993, page 137, obs. Contamine-Raynaud.

[258] Cass. com, 15 novembre 1994, Juris-Data n°002200, cité par Ph. SIMLER, op.cit., n° 884.

[259] CA Douai 18 avril 1991, Juris-Data n° 050990 ; CA Rennes, 6 nov. 1991, Juris-Data n° 048834 ; CA Douai, 18 mars 1993, Juris-Data n° 043223, cités par Ph. SIMLER, loc. cit. Principe récamment affirmé par la Cour de Cassation chambre commerciale, 30 janvier 2001, D. 2001, page 1024. Voir aussi, Cass.com. 6 mars 2001, D. cah. Dr. Aff., jur., page 1174, obs. A. Lienhard, qui refuse au garant créancier du débiteur garanti tombé en redressement judiciaire, la possibilité d’échapper à l’interdiction des paiements postérieurs au jugement d’ouverture en invoquant l’exception de compensation pour dettes connexes.

[260] CA Paris, 1er oct. 1986, D. 1987, somm. page 171, note Vasseur.

[261] Ce point est discuté en doctrine, voir Ph. SIMLER, loc.cit., en faveur de l’inopposabilité de la cession, selon cet auteur, l’autonomie de la garantie postule qu’elle subsiste, contra, M. VASSEUR, rép. Com. Dalloz, v° garantie indépendante, n°50, pour qui le caractère intuitu personae du contrat de garantie emporte son extinction en cas de cession du contrat de base.

[262] CA Riom, 14 mai 1980, JCP CI 1981, II, 13506 n°101 ; Cour de justice de Genève 24 juin 1983, D. 1983, inf. rap. page 486, obs. Vasseur ; Cass. com. 5 février 1985, D. 1985, page 269 note Vasseur ; contra, certaines décisions ayant accordé une mise sous séquestre de la garantie pour de telles raisons, CA Paris, 29 nov. 1982, D. 1983, inf. rap. page 302 obs. Vasseur. 

[263] Voir notamment, CA Paris, 1er juillet 1986, D. 1987, somm. page 171, obs. Vasseur.

[264] Comme l’écrit Ph. SIMLER, op.cit.,, n° 967, il s’agit là d’une problématique propre aux garanties internationales, où l’on se trouve en général en présence d’une garantie de premier rang et d’une contregarantie. Le contentieux porte quasi-exclusivement sur l’exécution de la contregarantie, ce qui explique qu’il soit presque toujours suscité par le donneur d’ordre et non par le garant.

[265] Cette défense de payer ne s’oppose pas à une éventuelle condamnation du garant à des dommages-intérêts pour refus injustifié de paiement, voir, Ph. SIMLER, op.cit., n°964.

[266] Cf ; notamment, CA Paris 14 déc. 1987, Banque 1988, page 236, obs. Rives-Langes, pour un tableau complet de la jurisprudence en la matière, voir, Ph. SIMLER, op.cit., n° 970, note de bas de page n°430.

[267] Cass.com, 21 mai 1985, D. 1986 page 213, 1ere esp. note Vasseur.

[268] Pour une liste exhaustive de ces hypothèses, cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 971.

[269] Cass.com 18 mars 1986, D. 1986, inf. rap. page 166, obs. Vasseur.

[270] T.com Bruxelles, 13 mars 1984 et 26 juin 1984, D. 1985, inf. rap. page 239 obs. Vasseur.

[271] Cf ; CA Paris, 10 avril 1986 et 17 juin 1987, D. 1988, somm. pages 244 et 245, note Vasseur, le second arrêt confirme une ordonnance de référé ayant prononcé la mise sous séquestre de l’acte de « caution » entre les mains du Bâtonnier de l’ordre des avocats, en raison d’un appel manifestement abusif de la garantie.

[272] Cf ; notamment, Cass. com, 27 nov. 1984, D. 1985, page 269, 2eme esp. note Vasseur, Cass.com, 15 juin 1999, Juris-Data n° 002485, JCP E 1999, pan. page 1462, obs. Bouteiller, D. Cah. Dr. Aff., 2000, jur., page 112, note Y. Picod.

[273] Ph. SIMLER, op.cit., n° 975.

[274] Cf, infra pages 65 et s.

[275] A. PRUM, op.cit., n°106.

[276] Ph. SIMLER, op.cit., n°924.

[277] Toutefois, pour A. PRUM, op.cit., n°109, le fait que l’objet de l’engagement du garant ne soit pas défini de façon autonome mais par rapport à la dette du débiteur principal, ne doit pas dégrader la garantie autonome en simple cautionnement si l’acte contient les clauses de « paiement à première demande » et « d’inopposabilité des exceptions », clauses qui seraient significatives de la volonté du garant de s’engager inconditionnellement. Néanmoins, il faut remarquer qu’au numéro suivant, l’auteur nuance son analyse, en amorçant une distinction entre les garanties de droit interne et celles souscrites dans le cadre du commerce international. A l’époque le critère de l’objet n’était pas encore affirmé en jurisprudence, ce qui peut expliquer cette analyse.

[278] Pour un exemple illustratif des hésitations des juges du fond en la matière, CA Douai 27 février 1992, Juris-Data n°040510, JCP G 1992, I, 3623 n°14 obs. Simler, RTDciv 1993 page 869, obs. Lucet et Vareille, arrêt qui décide que la garantie « des sommes dues aux termes du contrat (de bail) à première demande du bailleur » est une garantie autonome et que l’indétermination du montant de l’obligation et la référence aux « sommes dues aux termes du contrat » sont indifférentes ; voir aussi, CA Paris 5 avril 1994, JCP G 1994, I, 3807, n° 14 obs. Simler ; CA Amiens, 11 décembre 1992, JCP G 1993, I, 3717 n°10.

[279] Hésitations connues par la Cour de Cassation elle-même, Cass.com. 1er février 1994, D. 1995, somm. page 11, obs. Vasseur, arrêt qui ne remet pas en cause la qualification de garantie autonome d’un acte de « caution bancaire » par lequel la banque s’était engagée, « en cas de défaillance (du débiteur) à payer…toutes sommes à concurrence de…dues par la société…et ce, à première demande » ; voir aussi, Cass.com. 5 février 1985, D. 1985, 271, note Vasseur cassant pour dénaturation de la volonté des parties, Paris 2 juin 1982, D. 1983, 437, concl. Flipo, note Vasseur, décision qui avait requalifié des actes en cautionnement car ceux-ci stipulaient, « …nous nous engageons à vous payer tout ou partie des sommes qui pourraient vous être dues compte tenu des dispositions du marché dans le cas où le donneur d’ordre n’exécutera pas ses obligations contractuelles ».

[280] Cass.com, 13 décembre 1994, D. 1995, 209, rapp. Le Dauphin, note Aynès, JCP G 1995, I, 3851, n°11, obs. Simler ; arrêt confirmé notamment, Cas.com, 15 décembre 1995, RJDA 1996, n°386 ; Cass.civ 1, 13 mars 1996, RD bancaire et bourse 1996 page 123, obs. Contamine-Raynaud.

 

[281] Les règles uniformes de la CCI relatives aux garanties sur demande sont de nature à induire en erreur, en effet, bien que la mise en jeu des engagements soumis à ces Règles soit en principe, subordonné à une « demande appuyée d’une déclaration écrite stipulant que le donneur d’ordre a manqué à son ou ses obligations selon le(s) contrat(s) de base » ( article 20 ).

[282] Ph. SIMLER, op.cit., n°924

[283] Ibid.

[284] Voir, J. L’HOMME, Garantie à première demande, un critère clair à l’attention des praticiens, D., cahier droit des affaires, 6 janvier 2000, n°1, point de vue page 3.

[285] M. VASSEUR, Rep. Com. Dalloz prèc. n°59.

[286] A ce sujet, on peut remarquer qu’en matière internationale, les règles uniformes de la CCI relatives aux garanties sur demande prévoient à l’article 3 : « Ainsi toute garantie devra énoncer (…) la transaction de base cause de l’émission de la garantie ». De même, l’acte uniforme portant organisation des sûretés en date du 14 avril de l’OHADA (art. 30) prévoit : « les conventions de garantie et de contre-garantie ne se présument pas, elles doivent être constatées par un écrit mentionnant, à peine de nullité (…) la convention de base, l’action ou le fait cause de l’émission de la garantie ». Textes cités par M. Contamine-Raynaud, note sous Paris 15eme ch. A, 1er décembre 1998, RD bancaire et bourse, mai-juin 1999 page 103.  

[287] Cf ; Paris, 14 nov. 1978, D. 1979, 259, note Vasseur ; 24 janvier 1984, D. 1984, inf.rap. page 203, obs. Vasseur.

[288] CA Paris, 12 mars 1999, JCP G 1999, I, 156 n°6, obs. Simler.

[289] Cass. com. 7 octobre 1997, Bull. civ. IV, n°242 ; RTDcom 1998, page 189, obs. M. Cabrillac ; JCP E 1998 page 226, note D. Legeais ; RD bancaire et bourse 1998 page 17, obs. M. Contamine-Raynaud ; JCP G 1998, I, n°149, n°8, obs. Simler.

[290] Cass.civ.1, 23 février 1999, JCP G 1999, I, n°156, n°6, obs. Ph. Simler ; JCP G 1999, II, n°10189, note C. Ginestet, Dalloz Affaires 1999, page 593, obs. J.F.

[291] A ce sujet, voir : Y. PICOD, note sous les arrêts Cass.com du 18 mai 1999 et du 15 juin 1999, Dalloz, Cahier droit des affaires 2000, jurisprudence page 112 ; voir aussi, H. J. L MAZEAUD et F. CHABAS, Sûretés et publicité foncière, Leçons de droit civil, par Y. PICOD, lectures pages 119 et s., Montchrestien, 7eme éd. 1999 ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 928.

[292] Cass.com 18 mai 1999 ; JCP G 1999, II, n°10199, note J. Stoufflet, Dalloz, Cahier droit des affaires, 2000, jurisprudence page 112, note Y. Picod. Voir aussi, Cass. civ. 3, 27 septembre 2000, RJDA 2/01 n°233 cassant  l’arrêt de la Cour d’appel de Nancy 2eme chambre du 28 octobre 1998. D’une manière un peu plus ambiguë, la Cour de Cassation considère, que c’était à tort qu’une cour d’appel avait pu juger qu’un acte était accessoire au contrat de base et devait donc être qualifié de cautionnement, alors que le garant « s’était engagé irrévocablement à payer à la société PAM toute somme jusqu’à concurrence d’un montant représentant 5 % de celui, toutes taxes comprises, de la commande, immédiatement, à sa première demande, sans pouvoir différer le paiement ou soulever de contestation ». Dans ce cadre, le garant s’engageait en fait à payer une certaine somme représentant un pourcentage d’une commande émise par le débiteur principal, mais il ne s’engageait pas à payer ce que doit celui-ci.

[293] Cass.com. 15 juin 1999 préc.

[294] Ph. SIMLER, op.cit., n° 924.

[295] Cf, cité par Ph. Simler, loc.cit. ; CA Paris, 14 octobre 1994, Sté Christie Tyler Cont. c/ Créd. Lyonnais et a., inédit.

[296] CF ; là encore cités par Ph. Simler ; CA Paris, 16 février 1996, Juris-Data n°020195, arrêt qui retient la qualification de garantie autonome d’un acte intitulé « cautionnement », le garant s’étant obligé à payer à première demande, sans pouvoir opposer aucune exception, non ce que devrait le donneur d’ordre, mais la somme figurant au contrat principal ; dans le même sens, CA Paris 15 mars 1996, Juris-Data n°020796 ; CA Paris 23 avril 1998, Juris-Data n° 021155.

[297] Cette position jurisprudentielle a été confirmée par un arrêt Cass.com du 27 juin 2000, RJDA 12/00 n°1169, selon cet arrêt, « un engagement ne peut être qualifié de garantie autonome que s’il n’implique pas une appréciation des modalités d’exécution du contrat de base pour l’évaluation des montants garantis ou pour la détermination des durées de validité et s’il comporte une stipulation de l’inopposabilité des exceptions ». Voir aussi, dans le même sens, Cass.com.31 janvier 2001, Bull.civ.IV, n°25, JCP E 2001, jur. page 568 note D. Legeais.

[298] Cf ; A. CERLES, Garanties bancaires, contre le mélange des genres, Dalloz Affaires n°115, jeudi 30 avril 1998 page 747 ; M. CONTAMINE-RAYNAUD, note sous Cass.com. 11 mars 1997, RD bancaire et bourse 1997 page 123.

[299] Cf ; l’article 1129 al. 1 du Code civil : « Il faut que l’obligation ait pour objet une chose au moins déterminée quant à son espèce », l’alinéa 2 précisant, « La quotité de la chose peut être incertaine, pourvu qu’elle puisse être déterminée ». 

[300] Remarquons, que selon Ph. SIMLER, op.cit.,n°948., si une garantie autonome dont le montant serait seulement déterminable est valable et mérite sa qualification dès lors que les paramètres de sa détermination ne renvoie pas au contrat de base, une telle modalité que n’exclut pas le projet de convention de la CNUDCI, rend la garantie plus dangereuse encore, le garant ne connaissant pas le montant de son engagement au moment de sa souscription, voir à ce sujet, S. PIEDELIEVRE, Le projet de convention…, RTD com. 1996 page 637.

[301] Ainsi plutôt que d’arrêter le montant du règlement dès l’origine, certaines lettres de garantie, comme les garanties pour absence de connaissement, prévoient simplement un mécanisme de détermination, sur ce point, voir J. P. MATTOUT, Droit bancaire international : Rev. Banque, Paris, 1987, n° 323.

[302] Sur ce point, cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n°944 ; L. AYNES, op.cit., n°336 ; A. PRUM, thèse prèc. n°182 ; Ch. LEGUEVAQUES,  A la recherche de l’autonomie…, Droit et Patrimoine, avril 1997 pages 34 et s. (spéc. page 40). Pour autant, comme l’écrit Ph. Simler (op.cit. n°948), « l’obligation principale qu’il s’agit de garantir est un élément décisif de cette détermination, ce qui ne contredit nullement l’autonomie de la garantie, dans la mesure où, dès l’instant où le montant est fixé et la garantie souscrite, celle-ci se détache du contrat de base et son montant, par conséquent, cesse d’être tributaire du sort de ce contrat ».

[303] Voir, Trib. com. Paris, ord. réf., 7 octobre 1988, D. 1989, somm. page 145, obs. Vasseur.

[304] Dans cette hypothèse, le montant de la garantie représente en général entre 5 et 10 % du prix.

[305] C’est généralement le cas pour les garanties de restitution d’acomptes ou d’avances. Voir par exemple, Trib. com. Paris 7 septembre 1983, D. 1987, somm. page 174 obs. Vasseur ; CA Paris 15 eme ch. B, 30 mars 1990, D. 1990, somm. page 199 obs. Vasseur.

[306] CA Paris, 14 octobre 1983, D. 1984, inf.rap, page 202 obs. Vasseur.

[307] Cf ; Trib. com. Nantes, 22 septembre 1983, D. 1984, inf. rap. page 202, obs. Vasseur ; et les observations de  M. VASSEUR sous Cass. com. 16 juin 1992, D. 1993, somm. page 97.

[308] CA Paris 15 eme ch. B, 30 mars 1990, prèc.

[309] CA Paris 16 mars 1988, D. 1989, somm. page 147, et sur pourvoi, Cass.com. 5 décembre 1989, D. 1990, somm. page 207, obs. Vasseur, cités par Ph. SIMLER, op. cit. (note 337).

[310] Voir sur ce point, Cass.com. 6 avril 1993, D. 1995, somm. page 20, note Vasseur.

[311] Voir notamment, A. PRUM, op.cit., n° 218 et s. ; Ch. GAVALDA et J. STOUFFLET, art. prèc. n°22 ; Ph. SIMLER, op.cit., n°952.

[312] Pour Ph. Simler (op.cit. n°952), il existerait toutefois une possibilité pour admettre plus facilement ce type d’engagements. Cela consisterait à subordonner le droit de résiliation unilatérale à un délai de préavis, de telle manière que le bénéficiaire de la garantie soit en mesure d’appeler celle-ci dans ce délai, sans que cet appel puisse être considéré comme abusif.

[313] Il faut noter que les RUGD de la CCI (article 3) prévoient dans le même sens, que la garantie doit indiquer « …la date d’expiration… et/ou le fait entraînant l’expiration de la garantie ».

[314] Ph. SIMLER, op.cit., n° 953.

[315] Voir, CA Rennes 22 mai 1992, Juris-Data n° 044128, cité par Ph. SIMLER, op.cit., n° 953 note 348.

[316] Voir sur ce point, Ch. GAVALDA et J. STOUFFLET, art. prèc. n° 22 et 24.

[317] Voir, Cass. com. 13 décembre 1983, D. 1984, somm. page 420, note Vasseur.

[318] Selon l’expression de D. GRILLET-PONTON, Essai sur le contrat innomé, thèse prèc. n° 322 page 363.

[319] Voir, J. GHESTIN, Le contrat : Formation, prèc. n° 100.

[320] Articles 1109 à 1122.

[321] Articles 1123 à 1125-1.

[322] Articles 1126 à 1130.

[323] Articles 1131 à 1333.

[324] Cf ; Ph. SIMLER, op.cit.,, n° 933 ; CABRILLAC et MOULY, op.cit., n°471-4, le rapprochement peut à cet égard être fait avec l’article 2015 du Code civil, « Le cautionnement ne se présume point ; il doit être exprès, et on ne peut pas l’étendre au delà des limites dans lesquelles il a été contracté. »

[325] Ph. SIMLER, op.cit.

[326] Cf, sur ce point ; A. PRUM, op.cit., n°92 ; Ph. SIMLER, op.cit., n°934.

[327] Voir Ph. SIMLER, loc.cit.

[328] Voir en ce sens ; un arrêt très remarqué, CA Paris 27 juin 1990, JCP G 1990, IV, 359 et E 1991, II, 119, note Hassler, Defresnois 1990, art. 34917 page 1349, obs. Aynès, D. 1991, somm. page 193, obs. Vasseur, RD bancaire et bourse, 1991, page 27, obs. Contamine-Raynaud, arrêt qui annule pour dol une garantie autonome souscrite par une personne physique, en raison d’une information insuffisante du garant sur cette forme inusitée de garantie pour le type d’opération en cause. De l’avis des commentateurs, le dol n’était pas constitué en l’espèce. Voir dans le même sens, CA Montpellier 30 janvier 1992, Juris-Data n°034027, et ; CA Poitiers 15 juin 1994, Juris-Data n° 051874, cités par Ph. SIMLER, op.cit., n° 921, ce dernier arrêt annulant la garantie, sans qualifier le vice, pour « absence d’information suffisante des garants sur la nature et la portée de leur engagement ». 

[329] Ph. SIMLER, loc.cit.,

[330] Voir, Cass.com. 18 décembre 1990, D. 1991 page 193 obs. Vasseur.

[331] Ph. SIMLER, op.cit., n° 935.

[332] Ph. SIMLER, op.cit., n° 864.

[333] Article 1326 : « L’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite de sa main, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l’acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres. » 

[334] Il faut rappeler, que selon une jurisprudence constante, l’article 1326 ne trouve pas à s’appliquer, lorsqu’il s’agit, à l’égard de commerçants, de prouver des actes de commerce, lesquels, conformément à l’article 109 du Code de commerce, peuvent se prouver par tout moyens. Voir notamment, Cass.com. 15 novembre 1988, D. 1990. 3, note P. Ancel ; Cass. com. 12 mai 1998, Bull. civ. IV, n° 150, D. Affaires 1998, page 1174, obs. J.F. De même, la Cour de Cassation considère, que la mention manuscrite est également superflue lorsque, l’engagement de garantie est pris par un dirigeant de la société débitrice, qui a généralement négocié lui-même le contrat principal. Pour la jurisprudence, les dispositions de l’article 1326 du Code civil sont constitutives de règles de preuve qui ont une finalité protectrice, dont les dirigeants de société, parfaitement informés de la nature et de l’étendue des engagements n’ont nul besoin. Voir ainsi, Cass.com. 19 juin 1990, Bull.civ. IV, n°180, JCP G 1991, II, 69, obs. D. Legeais.

[335] Cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 932 ; L. AYNES, note sous Cass.com. 10 janvier 1995, D. 1995, jurisprudence, page 201 ; CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 470-1 ; L. AYNES, Droit des sûretés, op.cit., n° 340 ; contra, M. BILLIAU, note sous Cass.com. 10 janvier 1995 prèc., JCP E 1995, II, 691 ; MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit., n° 113.

[336]Cf ; Cass.com. 10 janvier 1995 prèc., Bull.civ., IV, n° 13 ; voir aussi ; Cass.com 22 novembre 1996 JCP G 1997, I, 4033, n° 10, RTDciv 1997 page 183, obs. Bandrac ; CA Montpellier 18 décembre 1991, Juris-Data n° 034962 ; CA Rouen 19 février 1992, RJDA 10/1992, n° 947, D. 1993 somm. page 108, obs. Vasseur ; CA Paris 1er avril 1997, D. 1997, inf.rap., page 116.

[337] M. BILLIAU, note prèc., MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, loc.cit.

[338] Voir notamment, CA Grenoble, 9 septembre 1996, JCP G 1997, I, 4033 ; CA Toulouse 12 décembre 1996, Juris-Data n° 055956 ; CA Dijon 26 février 1992, D. 1992, somm. page 399, obs. Fortis, qui a pu prononcer la nullité d’une  garantie autonome au motif que les prescriptions de l’article 1326 ne constituaient pas de simples règles de preuves mais avaient pour finalité la protection du garant.

[339] C’est à dire, les cas d’obligation indéterminée ou d’extension du cautionnement aux accessoires de la dette principale.

[340] Cf ; L. AYNES, note sous Cass.com. 10 janvier 1995 prèc.

[341] Cf ; M. VASSEUR, Rep.dr.com. prèc. n°119 et s., J.L RIVES-LANGE, art.prèc. n°23 ; GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. n°17 ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 980 et s. ; A.PRUM, op.cit., n°427 et s.

[342] Voir, T.com. Paris, 14 décembre 1990, D. 1991, somm. page 201 obs. Vasseur.

[343] Cf ; J. GHESTIN et G. GOUBEAUX, Introduction générale, 3e éd., n°741.

[344] G. CALBAIRAC, Considérations sur la règle fraus omnia corrumpit, D. 1961, chron. Page 169, cité par A. PRUM, op.cit., n° 436.

[345] Note sous Cass.com. 20 janvier 1987, JCP E 1987, II, 14882.

[346] Ph. SIMLER, op.cit., n° 985.

[347] Voir notamment, Civ.1, 17 octobre 1979, JCP G 1981, II, 19627, note J. Ghestin.

[348] Ph. SIMLER, loc.cit.

[349] Sur le problème de l’appel manifestement abusif ou frauduleux d’une contregarantie, voir, CA Lyon 23 mars 1992, RTDcom 1992 page 658 obs. Cabrillac.

[350] Sur cette différence théorique, voir notamment, A. PRUM, op.cit., n° 428 à 438.

[351] Ph. SIMLER, loc.cit., dans le même sens ; J.L RIVES-LANGE, Existe-t-il en droit français des engagements abstraits pris par le banquier, Banque, 1985, page 902 et s. n° 23 ; A. PRUM, op.cit., n° 449.

[352] Un arrêt CA Paris du 12 juin 1985, D. 1986, inf.rap. page 161 obs. Vasseur, a toutefois tenté d’établir une distinction entre ces deux concepts, en jugeant que l’appel manifestement abusif ne suffisait pas à justifier le refus ou l’interdiction de payer en l’absence de preuve d’une fraude. Cet arrêt a été cassé par la Cour de Cassation dans un arrêt remarqué du 20 janvier 1987, Cass.com. 20 janvier 1987, Bull.civ., IV, n°19, JCP G 1987, II, 20764, et E 1987, II, 14882, note Stoufflet, cet arrêt condamnant la conception restrictive de la notion de fraude adoptée par la cour d’appel.

[353] Voir notamment, CA Paris 6 mars 1991, D. 1992, somm. page 241, obs. Vasseur.

[354] Cass.com 18 décembre 1990, ; 1991, inf.rap. page 13 obs. Vasseur.

[355] CA Paris 18 mars 1986, D. 1987, somm. page 173 obs. Vasseur.

[356] Trib.com. Paris 15 octobre 1982, D. 1983, inf.rap., page 304, obs. M. Vasseur.

[357] En ce sens, voir, J.L. RIVES-LANGE, art.prèc. ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 984 ; contra ; J. STOUFFLET, note prèc. ; A. PRUM, Application de l’adage « fraus omnia corrumpit » à propos des garanties à première demande, DPCI 1987 page 121 ; voir aussi, Cass.com. 11 décembre 1985, JCP CI 1986, 14690 note Stoufflet, selon cet arrêt, la fraude « fait échec au principe de l’autonomie ».

[358] M. Vasseur, art. prèc. n°120.

[359] Voir en ce sens, cités par M. VASSEUR, loc.cit., le Tribunal de commerce et de la Cour d’appel de Luxembourg qui par jugement du 27 novembre 1980 et arrêt du 16 mars 1983 (D. 1981, inf.rap. 504 et D. 1983, inf.rap. 299, obs. Vasseur) ont estimé que, la fraude, l’abus n’étaient pas manifestes, « s’il s’avère nécessaire… de requérir la production de preuves supplémentaires, de procéder à des mesures d’instruction ou d’appeler des tiers à la cause ».

[360] Cass.com. 21 mai 1985, Gaz. Pal. 1985, 2, page 770, note S. Piedelievre ; voir dans le même sens, Cass.com. 19 février 1991, D. 1991, somm. page 199, note Vasseur, arrêt qui décide, que les seuls griefs tirés des conditions d’exécution du contrat de base, à les supposer établis, ne sont pas susceptibles d’apporter la preuve d’une fraude ou d’un abus manifeste dans l’appel de la garantie.

[361] Sur ce point, voir, Ph. SIMLER, op.cit., n°989 et s. ; A. Prum, op.cit., n° 478 et s.

[362] Voir toutefois, notamment, CA Paris 17 juin 1987, D. 1988, somm. page 245, obs. Vasseur.

[363] Voir, A. PRUM, op.cit., n° 135 et s. ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 940, pour qui dans une telle hypothèse, alors que le contrat de base serait parfaitement licite, une telle garantie devrait être annulée (n° 943).

[364] D. GRILLET-PONTON, Essai sur le contrat innomé, thèse prèc., n°341.

[365] Voir J. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit., n°116.

[366] F. TERRE, thèse prèc. n°619, citant sur ce sujet, Henri POINCARE, Dernières pensées, 1913 page 20, « C’est seulement dans la jeunesse des sciences, qu’elles emploient les raisonnements par analogie ».

[367] Thèse prèc. n° 389 ; voir aussi en ce sens, F. TERRE, thèse prèc. n° 619, pour qui, « la détermination du degré exact d’autonomie permettra d’appliquer dans une mesure variable, selon les hypothèses, les règles régissant les contrats voisins ».

[368] Pour MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, loc.cit., d’une manière générale, la méthode analogique est globalement peu pratiquée, car elle se concilie mal avec la spécificité du contrat innomé.

[369] Il faut remarquer, que l’hypothèse d’un recours avant paiement, tel que celui dont bénéficie la caution avec l’article 2032 du Code civil, semble devoir être exclu pour la garantie autonome, car cela irait à l’encontre de la finalité de cette sûreté. En ce sens, voir, Ph. SIMLER, op.cit., n° 996 ; Cass.com. 5 février 1985, D. 1985 page 269, 4eme esp. note Vasseur ; contra ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. note 3 page 20, qui n’excluent pas le raisonnement analogique sur ce point ; voir aussi , CA Paris 12 septembre 1996, Juris-Data n° 022300, qui admet un recours avant paiement entre deux garants, désignés comme étant des cautions, dont l’un avait souscrit une garantie à première demande au profit de l’autre.

[370] Cf ; CA Versailles 16 septembre 1992, D. 1993, somm. page 102, obs. Vasseur.

[371] Cf ; A. PRUM, op.cit., n° 57 ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art.prèc. page 21 ; P. ANCEL, thèse prèc. page 182.

[372] Cass. com. 9 mai 1990, Bull.civ. IV, n°146 ; Cass. civ.1, 7 novembre 1995, Bull.civ. I, n° 397, Defresnois 1996, art. 36354 n°60 ,note D. Mazeaud.

[373] CF ; L. AYNES, op.cit., n°344 ; Ph. SIMLER, op.cit., n°1001 ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 471-13 ; P. ANCEL, thèse prèc. n° 229 et s. ; contra ; MM. MARTY, RAYNAUD, et JESTAZ, op.cit., n° 632 et 634 ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. n° 29 ; A. PRUM, op.cit., n° 56 et s.

[374] Cf ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 994.

[375] Ainsi, Cass.civ.1, 4 avril 1984, Bull.civ. I, n° 131, RTDciv 1985 page 383 obs. Mestre, en l’espèce, un notaire, responsable du défaut de remboursement d’un prêt en raison d’une  méconnaissance de son devoir de conseil, qui a pris l’initiative de rembourser le prêteur, bénéficie de la subrogation légale.

[376] Article 51 de la loi du 24 juillet 1966, complétée par la loi n° 88-15 du 5 janvier 1988, article 6. loi du 24 juillet 1966 qui a été intégrée au Code de commerce. L’article 51 de la loi de 1966 correspond à l’article L. 223-21, et l’article 6, à l’article L. 210-7 de ce code.

[377] Voir notamment, Ph. SIMLER, op.cit., n° 936.

[378] Loi du 24 juillet 1966, article 98 al. 4, et 128 al. 2 (articles L. 225-35 et L. 225-68 du Code de commerce).

[379] Cass. com. 26 janvier 1993, D. 1995, somm. page 17 obs. Vasseur ; CA Paris 5 avril 1996, JCP G 1997, I, 4033, n° 11 ; dans le même sens, voir MM. CABRILLAC et MOULY,op.cit., n° 471-1.

[380] Voir notamment, CA Douai, 27 février 1992 JCP G 1993, I, 3656, n°8, obs. Simler ; CA Paris 3 novembre 1994, JCP G 1995, I, 3851, n°11 ; contra toutefois ; CA Douai 30 juin 1994, JCP G 1996, I, 3908, n° 14 obs. Simler qui écarte l’application de l’article 1415.

[381] F.TERRE, thèse prèc. n° 620.

[382] Voir en ce sens, L. JOSSERAND, Cours de droit civil positif français, t.II, Sirey, 2eme éd. 1933, n°19 page 11, cité par J. ROCHFELD, thèse prèc. n°46 ; D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°152, pour qui, la « nomination » par une autorité normative n’est ni nécessaire ni même suffisante, dès lors que « certains contrats innomés n’ayant pas fait l’objet d’une intervention législative ou réglementaire, mais seulement d’une reconnaissance judiciaire, peuvent à leur tour offrir un cadre pour l’analyse de nouvelles opérations, et même sans intervention judiciaire, par la pratique seule ».

[383] Voir D. GRILLET-PONTON, thèse prèc. n°4, sur l’ambiguïté du fondement historique du contrat innomé et sur ses répercussions dans la doctrine actuelle qui continue parfois a ranger dans l’innomé, les contrats, institutions de la pratique ou de la jurisprudence.

[384] Voir J.GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit., n° 75 et s.

[385] Cf ; J. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit., n°68.

[386] MM. RIPERT et BOULANGER, Traité de droit civil d’après le traité de Planiol, t.II, Obligations, Droits réels, Paris, LGDJ 1957, n°308.

[387] F. TERRE, thèse prèc. n°18, à ces éléments objectifs, l’auteur oppose les éléments subjectifs de qualification, qui s’apparentent à des éléments intellectuels. Il s’agirai d’un vocable générique comprenant out aussi bien la volonté interne, la connaissance, le consentement, l’intention, les motifs ou les mobiles (voir n°200).

[388] F. TERRE, thèse prèc. page 492.

[389] F. TERRE, thèse prèc. n° 212.

[390] F. TERRE, thèse prèc. n° 211.

[391] Thèse prèc. n° 712.

[392] Incertitude qui se répercuterait logiquement sur l’éventuel régime juridique applicable à telle ou telle convention, l’idée de sécurité juridique serait par la même sérieusement entamée.

[393] La distinction du fait et du droit, thèse Toulouse, 1928, n° 115, cité par F. TERRE, thèse prèc. n° 3.

[394] Cass.com. 13 décembre 1994, Bull.civ. IV, n° 375, D. 1995 page 209, rapp. M. H. Le Dauphin et note L. Aynès.

[395] Sur ce problème, voir ; J.L. COURTIER, La garantie à première demande : une nouvelle sûreté pour les créanciers, Revue des huissiers 1993 page 1265 ; H. LESGUILLONS, Histoire, signification et pratique des garanties, colloque de Tours 1980, prèc.; P. ANCEL, thèse prèc. n° 135 et s. ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 920.

[396] Pour une hypothèse voisine, voir aussi, l’article 405 du Code des douanes.

[397] Voir ainsi ; G. POURRET, Les cautions des marchés réglementés, caution ou garantie à première demande ? Petites Affiches 19 juin 1992 page 10 ; voir aussi, CA Paris 22 juin 1978, D. 1978 page 259 note Vasseur.

[398] Thèse prèc . n° 135 bis. Toutefois, cet auteur n’affirmait pas expressément qu’il s’agissait là d’une garantie autonome, mais selon lui, on était, « bien proche dans ce cas d’une garantie à première demande ».

[399] Voir Ph. SIMLER, loc.cit.

[400] Article 131 du Code des marchés publics.

[401] Article 133 du Code des marchés publics.

[402] JO 22 décembre 1993 page 17850 ; JCP G 1994, III, 66550.

[403] CE 10 mai 1996, Juris-Data n° 050457, RD bancaire et bourse 1996 page 179, obs. M. Contamine-Raynaud.

[404] Voir le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 29 décembre 1995, RFDA 1996 page 1136, obs. Ph. Simler.

[405] P. ANCEL, Les sûretés non accessoires en droit français et en droit comparé, thèse Dijon 1981, n° 141.

[406] P. ANCEL, thèse prèc. n°140.

[407] P. ANCEL, ibid.

[408] P. ANCEL, thèse prèc. n° 143.

[409] P. ANCEL, Ibid.

[410] VON CAEMMERER, Bankgarantien in Aussenhandel, Festschrift für Otto Riese, 1964 pages 295 et s., II-2, spé. page 306, cité par P. ANCEL, thèse prèc. n°143.

[411] P. ANCEL, thèse prèc. n°141.

[412] Voir notamment en ce sens, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 26.

[413] P. ANCEL, loc.cit.

[414] Une telle renonciation est toutefois admise en droit espagnol et en droit italien voir à ce propos, le rapport de synthèse de M. VASSEUR, colloque de Tours, 1980, Le droit des garanties bancaires dans les contrats internationaux en France et dans les pays de l’Europe de l’ouest, FEDUCI, page 319 et s. (sur ce point, page 326 et s.). Nous verrons aussi plus loin, que le droit allemand connaît un « cautionnement à première demande », à côté du cautionnement accessoire et de la garantie autonome.

[415] Cass. com. 13 décembre 1994, Bull.civ. IV, n° 375, D. 1995 page 209, rapp. Le Dauphin et note L. Aynès, JCP G 1995, I, 3851 n° 11 obs. Simler, RTDcom. 1995 page 458 obs. Cabrillac. Arrêt qui rappelons-le, affirme de manière forte, qu’un acte intitulé « engagement autonome de garantie exécutable à première demande » stipulant le « remboursement de …toutes sommes dues par le débiteur comme décrit ci-dessus », ne pouvait être un engagement indépendant dès lors qu’il avait « pour objet la propre dette du débiteur ».

[416] Voir les arrêts cités page 55, notamment, Cass. com. 18 mai et 15 juin 1999.

[417] Voir le très grand nombre de décisions en ce sens de la part des juges du fond, citées par Ph. SIMLER, op.cit., n° 928 note 271. Voir aussi ; CA Paris 15 septembre 1995, Gaz. Pal. 1996, 2, page 435 note S. Piedelievre ; et l’arrêt CA Versailles du 4 mars 1999, RJDA 6/1999 n° 721, exemplaire pour sa clarté.

[418] Voir les décisions, même minoritaires, en nombre assez important pour être inquiétant, citées par Ph. SIMLER, op.cit., n° 928 note 272 et notamment, CA Grenoble 9 septembre 1996, Juris-Data n° 046248, qui déduit de la qualification erronée de garantie autonome que les dispositions de l’article 1326 du Code civil sont inapplicables ; CA Paris 8 novembre 1996, Juris-Data n° 023984 ; voir aussi, CA Paris 28 novembre 1998, Juris-Data n° 023731, qui infirme le jugement ayant disqualifié en cautionnement l’engagement de rembourser à première demande toutes sommes dues par le débiteur à hauteur d’un certain montant ; CA Paris 15 janvier 1999, Juris-Data n° 020106. 

[419] Voir, CA Versailles 21 mars 1997, Sté Propex EURL c/ Noël, cité in JCP G 1998, I, 103, n° 17, qui disqualifie en garantie autonome, un acte intitulé cautionnement et comportant de manière claire l’engagement de la banque de se porter caution solidaire d’avances de démarrage et d’achèvement de travaux pour un montant déterminé, au motif que l’acte ne comporterait aucune stipulation dont il résulterait que la banque ait entendu constituer une sûreté accessoire.

[420] Cass. Ass. Plen. 4 juin 1999, immédiatement publié au Bulletin d’information de la Cour de Cassation, n° 497, 15 juillet 1999, page 2 et s. avec les conclusions du Premier avocat général M. JOINET et le rapport de M. le Conseiller rapporteur TOITOT ; voir les commentaires de cet arrêt ; JCP G 1999, II, 10152 et E 1999 page 1294 note M. Béhar-Touchais, JCP E 2000 page 414 obs. Simler, RTDciv. 1999 page 665, obs. P. Crocq, Banque et droit sept-oct 1999 page 46 note N. Rontchewski.

[421] Pour un résumé de ces divergences, voir la note de M. BEHAR-TOUCHAIS prèc. et celle de P. CROCQ prèc. Les différentes chambres de la Cour de Cassation ont surtout hésité entre les qualifications de cautionnement ; exemple, Cass.com. 1er oct. 1991, JCP G 1993, II, 21990 note Béhar–Touchais ; et la qualification d’action directe, exemple, Civ.2, 22 février 1995, Bull.civ. II, n°60, RTDciv. 1995 page 928 et s. note crit. M. Bandrac ; mais actuellement il est possible de voir notamment avec l’arrêt du 4 juin 1999, que c’est la qualification de garantie « autonome » lato sensu, qui est plutôt à l’ordre du jour.

[422] Cass.civ.3, 12 mars 1997, Bull.civ. III, n°53, RD bancaire et bourse 1997 page 124 et s. obs. M. Contamine-Raynaud, JCP G 1998, I, page 103 n° 17 obs. Simler. ; arrêt confirmé par Cass.civ. 3, 14 janvier 1998 JCP G 1998, I, page 149, note Simler.

[423] Cass.com. 23 mai 2000, Revue de droit bancaire et financier, sept-oct 2000 page 299 n° 195.

[424] Loi du 13 mars 1917 sur la société de caution mutuelle.

[425] Voir notamment, Ph. SIMLER, note sous cet arrêt au JCP G 1999, II, 10152.

[426] Voir en ce sens, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, Les effets du contrat, prèc. n°136.

[427] Voir, M. BEHAR-TOUCHAIS, note sous Cass. Ass. Plen. 4 juin 1999 prèc. Cet auteur se fonde pour cela sur la thèse de Mme FEVILIYE-DAWEY, La garantie financière professionnelle, thèse Rouen 1999, pour qui, puisque la garantie financière n’est pas un cautionnement alors qu’elle utilise indubitablement la forme et la technique du cautionnement, c’est qu’il faut distinguer l’institution de la garantie financière de la technique juridique utilisée comme support.

[428] Pour une position contraire, voir la note sous l’arrêt du 4 juin 1999 de P. CROCQ, RTDciv. 1999 pages 665 et s. (spé page 670), pour qui cette solution ne doit pas pouvoir être étendue à toutes les garanties professionnelles.

[429] S. CABRILLAC, Les garanties financières professionnelles, Thèse Montpellier 28 janvier 2000, sous la direction de Ph. PETEL.

[430] I. RIASSETTO, Réflexions sur la nature juridique des garanties professionnelles, Petites affiches, 16 décembre 1996, page 4 et s. Nous traiterons de ces garanties indemnitaires que sont le garantievertrag (droit allemand) et le contract of indemnity (droit anglais) dans la section 2 de ce chapitre.

[431] Cass.com. 27 juin 2000, RJDA 12/00 n° 1169. Voir aussi, Cass.com. 31 janvier 2001, prèc.

[432] Ainsi, voir A. PRUM, op.cit., n° 99 et s. regroupant ensemble ces deux questions sous le titre « Les contradictions éventuelles de l’autonomie ».

[433] Y. POULLET, art. prèc. page 143.

[434] La jurisprudence allemande était déjà fermement établie en ce sens ; voir, Landesgericht Francfort 16 octobre 1962, W.M., 1963, page 450, cité par A. PRUM, op.cit., n°100, selon cet arrêt, « Le point de savoir s’il s’agit d’une caution ou d’une garantie ne peut être résolu par la dénomination employée. Il doit au contraire se déduire de l’ensemble du rapport et du contenu des déclarations ».Voir ; pour les premières décisions françaises en ce sens, Cass.civ. 1., 9 décembre 1970, arrêt n° 698, non publié, cité par A. PRUM, loc.cit. ; Cass.com. 8 décembre 1987, Bull.civ. IV, 1987, n° 261 page 196, D. 1988, somm. page 240, obs. M. Vasseur ; plus récemment, voir ; Cass.com. 7 octobre 1997, JCP E 1998, 126, note D. Legeais, JCP E 1998, 1596, n°8 obs. Simler, RD bancaire et bourse 1998, page 17, obs. M. Contamine-Raynaud ; Cass.com. 23 février 1999, JCP E 1999, act. 439, RTDcom. 1999, page 480, obs. M. Cabrillac. Voir aussi, CA Montpellier 10 janv. 1996, Juris-Data n°0340013 cité par Ph. SIMLER, op.cit., n°924, qui énonce, « la seule mention imprimée de garantie à première demande ne suffit pas à qualifier un contrat de garantie autonome en l’absence de volonté de désolidariser l’engagement du contrat ». Enfin voir, CA Paris 15eme ch. B. 28 avril 2000, Revue de droit bancaire et financier, sept-oct 2000, page 299 n° 196. Arrêt selon lequel, le mot « caution » est communément utilisé par les banques de manière générique et non juridique, ce qui implique qu’il peut viser soit un cautionnement soit une garantie à première demande. En l’espèce, l’arrêt requalifie un acte intitulé « cautionnement » en garantie autonome.

[435] Cass.com. 8 juin 1993, Bull.civ. IV, n° 225, JCP G 1993, I, 3717, n° 10 obs. Ph. Simler.

[436] Voir CA Riom, 14 mai 1980, D. 1981, page 338, obs. M. Vasseur ; Cass.com. 8 décembre 1987, Bull.civ. IV, 1987, n° 261 page 196, D. 1988, somm. page 240 obs. M ; Vasseur ; Cass.com. 2 février 1988, Bull.civ. IV, n° 55 page 39, D. 1988, somm. page 239 obs. M. Vasseur ; Cass.com., 3 novembre 1992, D. 1993, somm. page 96, obs. M. Vasseur. En ce sens en doctrine, voir, A. PRUM, op.cit., n° 101 ; Y. POULLET, art. prèc. n° 21 ; Ph. SIMLER, A propos des garanties autonomes de droit interne souscrites par des personnes physiques, JCP N 1991, I, page 343 et s.

[437] Cf ; Cass.com. 8 décembre 1987,prèc. ; Bordeaux 9 mars 1983, D. 1983, inf.rap., page 300 obs. M. Vasseur ; Voir aussi, T.com. Paris 23 novembre 1993, Gaz.Pal. 1994, 2, somm. page 464, qui a jugé qu’un cautionnement solidaire « à première demande » était une garantie autonome, mais il faut signaler qu’en l’espèce, l’objet de l’engagement du garant ne semblait pas être réellement autonome ; contra, TGI Paris 26 janvier 1983, D. 1983, inf.rap., page 297 (2eme esp.) obs. Vasseur.

[438] Op.cit., n° 94, M. PRUM cite aussi, un auteur allemand, Graf Von WESTPHALEN, pour qui la clause à première demande ainsi que les formules équivalentes apparaissent comme « les expressions stéréotypées de la volonté d’autonomie » (cité par A. PRUM, n° 95 note 22) ; en ce sens, voir aussi, Y. POULLET, art.prèc. n°21.

[439] Voir notamment Cass. com. 5 février 1985, D. 1985, 271, note M. Vasseur ; Cass.com. 20 février 1985, Bull.civ. IV, n°74 page 64, D. 1986, inf.rap., page 153 obs. M. Vasseur ; CA Versailles, ch. Réunies, 13 juin 1990, D. 1991, somm. page 191, obs. M. Vasseur.

[440] Voir la décision du Landesgericht Frankfurt du 16 octobre 1962, NJW 1963, page 450, cité par A. PRUM, op.cit., n°95 note 24.

[441] Cass.com. 2 février 1988, S Toit et joie, Bull.civ. IV, n° 55, arrêt qui décide de manière claire, que « viole l’article 1134, la cour d’appel qui, au motif que la clause d’un acte de garantie était ambiguë et devait être interprétée en faveur de celui qui avait contracté l’obligation, rejette la demande en paiement formée à l’égard d’une banque, sans reconnaître le caractère autonome de la garantie donnée par la banque, alors que, en dépit de la présence des mots « cautionnement », « caution personnelle » et « débiteur », ce caractère résultait de la clause par laquelle l’établissement financier s’engageait à ne pas différer le paiement lorsqu’il recevrait l’ordre d’y procéder, et à ne soulever aucune contestation que ce soit ».

[442] Cass.com. 28 janvier 1992. D. 1992, somm. page 234, obs. M ; Vasseur ; voir aussi, CA Bordeaux, 2eme ch., 7 mars 1991, D. 1992, somm. page 235, obs. M. Vasseur.

[443] Cass.com. 13 décembre 1994, D. 1995, jurisprudence page 209 et s. avec le rapport de M. H. Le Dauphin et la note de L. Aynès.

[444] Confirmant cette jurisprudence, voir Cass.com. 27 juin 2000 RJDA 12/00 n° 1169.

[445] Op.cit., n°98.

[446] Toutefois, si ces clauses peuvent être considérées comme révélatrices de l’intention du garant de s’engager de manière autonome. Le plus souvent, les actes de garantie sont adressés sous forme de télécopie et ne sont pas rédigés par le garant mais par le bénéficiaire. Il est donc possible de douter, qu’elles soient toujours significatives quant à l’intention du garant.

[447] Voir en ce sens, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., page 373 ; Y. POULLET, art. prèc. n° 21.

[448] M. CONTAMINE-RAYNAUD, notamment, sous Cass. com. 7 octobre 1997, RD bancaire et bourse 1998, page 17. Selon cet auteur, « la garantie est indépendante si les parties l’ont voulu telle », cette volonté se manifestant au travers notamment de la clause d’inopposabilité des exceptions. Cette position s’explique, car l’auteur minimise l’exigence d’autonomie de l’objet, notamment quant aux références au contrat de base.

[449] Voir infra pages 104 et s.

[450] Ph. SIMLER, A propos des garanties autonomes de droit interne souscrites par des personnes physiques, JCP N 1991, I, pages 343 et s., n° 25.

[451] Cf ; Cass.com. 19 janvier 1993, D. 1993, page 331, note A. Honorat et Patarin, JCP G 1993, II, 22056, note Petel ; Paris 25 juin 1993, D. 1994, page 195 et chron. Derrida, D. 1994, chron. page 108 ; Cass.civ.1, 17 novembre 1993, Bull.civ. I, n° 335.

[452] Il est même alors possible de se demander si la solidarité peut être qualifiée de sûreté. En ce sens, MM. CABRILLAC et MOULY (op.cit. n°28) s’interrogent sur le point de savoir, « si la solidarité doit faire l’objet d’une qualification unique- la présence d’une contribution justifiant le rejet d’une qualification de sûreté- ou d’une qualification double- la part non-contributive étant qualifiée de sûreté personnelle ». Pour une réponse affirmative, voir P. ANCEL, thèse prèc. n°10 page 10.

[453] D-R. MARTIN, L’engagement de codébiteur solidaire adjoint, RTDciv. 1994 page 49 (sur ce point, page 55).

[454] Voir, P. ANCEL, Cautionnement et autres garanties personnelles, CERCRID pages 104 et s., n° 233. Cet auteur ne relève entre 1986 et 1996 que 10 arrêts de la Cour de Cassation où l’article 1216 est appliqué à propos d’engagements solidaires conventionnels, faisant alors apparaître la solidarité comme une sûreté de substitution au cautionnement. Un seul de ces arrêts est publié ; Cass.civ.1, 21 juillet 1987, Bull.civ. I, n° 249 ; voir aussi non publiés ; Cass.com. 12 juillet 1994, pourvoi n° 92.16.182 ; Cass.com. 17 juillet 1990, pourvoi n° 88.11.839. Voir toutefois, les arrêts cités par Ph. SIMLER, op.cit., n°28 note 67, notamment, Cass. 17 novembre 1999, Juris-Data n° 004006, JCP G 2000, IV, 1002, D. 2000, Act. Page 47, RJDA 1/2000 n° 5.  Selon cet auteur, il y aurait de nombreuses applications de ce procédé en droit commercial, voir en ce sens, cité par Ph. SIMLER loc.cit., DERRIDA, De la solidarité commerciale, RTDcom. 1953 page 330, spécialement n° 7.

[455] MM. CABRILLAC et MOULY, loc.cit.

[456] Article 1120 : « Néanmoins on peut se porter fort pour un tiers, en promettant le fait de celui-ci ; sauf l’indemnité contre celui qui s’est porté fort ou qui a promis de faire ratifier, si le tiers refuse de tenir l’engagement.»

[457] MM. MARTY et RAYNAUD, Droit civil, Les obligations, t. II, n° 251. Dans le même sens, voir, MM. PLANIOL et RIPERT, Traité pratique de droit civil, 2eme éd., t.6, Obligations, par P. ESMEIN, 1952, n° 49, « l’engagement du porte-fort consiste à obtenir du tiers que suivant les termes de l’article 1120 il consente à ratifier ou à tenir l’engagement, c’est-à-dire à se l’approprier. Celui qui s’est porté fort est donc libéré dès que l’engagement a été assumé par le tiers : il n’est donc pas garant de l’exécution ».

[458] Voir en ce sens, M. STORCK, Juris-Classeur civil, art. 1120, n° 12 et s. ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. n° 10 note 6 ; P. ANCEL, thèse prèc. n° 51 et s. ; D. LEGEAIS, Sûretés et garanties du crédit, LGDJ 1996, n° 286 ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 38, voir aussi son article, Les solutions de substitution au cautionnement, JCP E 1990, II, 15659.

[459] A. PONSARD, Jcl Civil, art. 1120, promesse de porte fort n°11 et 9, cité par P. ANCEL, thèse prèc. n° 53. On remarquera que textuellement l’article 1120 du Code civil ne dit pas autre chose, puisqu’il dispose, qu’on « peut se porter fort pour un tiers en promettant le fait de celui-ci », la suite confirmant cette analyse, « …sauf l’indemnité contre celui qui s’est porté fort ou qui a promis de faire ratifier… ».

[460] Ph. SIMLER, op.cit., n° 900.

[461] Voir notamment, L. AYNES, op.cit., n° 321.

[462] Ph. SIMLER, op.cit., n° 900.

[463] MM. GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. n°11 note 6.

[464] Voir, M. CONTAMINE-RAYNAUD, Les rapports entre la garantie à première demande et le contrat de base en droit français, Mèl. ROBLOT page 411 et s. n° 6 et 14 ; Ch. MOULY, L’avenir de la garantie indépendante en droit interne français, Mèl. BRETON-DERRIDA page 268 ; A. TRIDI, Les garanties bancaires dans le commerce international, thèse Paris X, 1991 pages 219 et s.

[465] Ph. SIMLER, op.cit., n° 900.

[466] Analysée comme un acte abstrait par les auteurs allemands, voir infra page 101.

[467] Article 111 du Code des obligations suisse, « Celui qui promet à autrui le fait d’un tiers est tenu à des dommages-intérêts en cas d’inexécution de la part de ce tiers ».

[468] Voir, P.A. GILLIERON, Les garanties personnelles en matière bancaire, thèse Genève 1956, pages 168 à 170, cité par P. ANCEL, thèse prèc. n° 41.

[469] Ce qui serait contraire à l’article 1165 du Code civil édictant le principe de l’effet relatif des conventions.

[470] Voir, P. ANCEL, thèse prèc. n° 41.

[471] On trouve peu d’exemples jurisprudentiels d’une telle utilisation de la promesse de porte-fort. Voir toutefois ; CA Paris 24 avril 1984, Juris-Data n° 022203, un concessionnaire s’était « porté fort et garant solidaire » de l’exécution du contrat de concession par son locataire-gérant. Mais ce concessionnaire ne pouvait être porte-fort et garant solidaire. Si le porte-fort est tenu d’une obligation d’indemnisation, par définition de résultat, il ne peut être dans le même temps coobligé solidaire. Voir aussi plus cohérent, CA Paris, 21 avril 1992, Juris-Data n° 021306, JCP E 1992, pan. 1154, et JCP G 1993, I, 3680, chron. n° 9 obs. Simler. Dans cet arrêt, l’actionnaire majoritaire d’une société avait passé une convention avec un prestataire de service auquel était confié une mission de redressement de ladite société. Cette mission devait être rémunérée en cas de réussite, par la remise d’actions. Cet actionnaire majoritaire s’était porté fort de la bonne exécution de la convention par la société. Les engagements n’ayant pas été tenus, la Cour a pu juger, que l’article 1120 du Code civil réserve au créancier la possibilité de demander indemnisation à celui qui s’est porté fort.

[472] Cf; l’article de Ph. SIMLER, Peut-on substituer la promesse de porte-fort à certaines lettres d’intention comme technique de garantie ?, RD bancaire et bourse 1997, pages 223 et s. ; voir aussi, L. AYNES, in, Les garanties de financement, Travaux de l’association H. Capitant, journées portugaises 1996, rapport français pages 375 et s. (page 83 et s. sur ce point).

[473] Ph. SIMLER, op.cit., n° 897.

[474] WEILL et TERRE, Les obligations, Dalloz, 4eme éd., 1986 n°1060.

[475] Ce qui explique pour partie, que dans le Code civil, la délégation figure dans une section consacrée à la novation (articles 1271 à 1281).

[476] MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 473-2 et 473-3.

[477] Cf ; introduction de cette étude.

[478] Voir, Cass.civ.1, 9 décembre 1981, Bull.civ. I, n° 374, D. 1982, 445 note J. Mestre.

[479] Cass.com. 21 juin 1994, JCP G 1994, I, 3803, n° 10 obs. M. Billiau, RTDcom. 1993 page 113 obs. J. Mestre. Il faut noter, que cette décision vient directement contredire la théorie de M. BILLIAU défendue dans sa thèse, La délégation de créance. Essai d’une théorie juridique de la délégation en droit des obligations, LGDJ 1989 n° 10 et s. et n° 406 et s. Pour cet auteur, dans une telle hypothèse, cet engagement n’a plus que l’aspect d’une délégation. Selon lui, la délégation dans sa finalité de mode d’extinction des obligations suppose en effet une dette du délégué envers le délégant.

[480] Voir supra pages 27 et s..

[481] Cf ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 473-4.

[482] Cf ; L. AYNES, op.cit., n° 326.

[483] Cette dualité au sein de la délégation imparfaite résulterait de la distinction issue du droit romain entre delegatio certa et delegatio incerta, voir Ph. MALAURIE et L. AYNES, Les obligations, Cujas 1996 n° 1252 et 1255.

[484] Voir en ce sens, Cass.civ.1, 7 mars 1992, Bull.civ. I, n° 84, D. 1992, 481, note L. Aynès, JCP G 1992, II, 21922, 1er arrêt note M. Billiau, RTDciv 1992, page 765 obs. J. Mestre. Selon cet arrêt, « sauf convention contraire, le délégué est seulement obligé au paiement de la dette du délégant…et se trouve déchargé lorsqu’elle est atteinte par la prescription. »

[485] Voir, CA Paris 9 avril 1991, D. 1992 somm. page 307 obs. M. Vasseur, RTDcom. 1992, page 845 n°14 obs. Cabrillac et Teyssié. Un banquier est, en l’espèce, qualifié délégué plutôt que garant à première demande ou souscripteur d’un crédit documentaire. Voir aussi, CA Paris, 13 mai 1997, Juris-Data n° 021115 (cité par Ph. SIMLER, op.cit., n° 898 note 137),qui assimile totalement les deux procédés.

[486] Voir notamment, MM. MALAURIE et AYNES, Les obligations, Cujas, 1996, n° 1252, qui dans un tableau sur les fonctions de la délégation, considèrent que la délégation imparfaite certaine peut faire fonction de crédit documentaire ou de garantie indépendante. Voir aussi, L. AYNES, Les sûretés, prèc., n°324 à 326.

[487] On peut remarquer toutefois, que certains auteurs tel, L. Aynès (n° 319 et s.), placent sous une même rubrique intitulée « garantie autonome », la délégation imparfaite et la garantie autonome. D’ailleurs pour cet auteur (n° 326), « lorsqu’elle est certaine, la délégation peut servir de modèle à la garantie à première demande ».

[488] Cass.com. 12 décembre 1984, D. 1985, jurisprudence page 269, note M. Vasseur.

[489] Voir la thèse de M. BILLIAU, prèc. n° 10 et s. et n° 406 et s. ; voir assez nuancé, A. SERIAUX, Les obligations, n° 174 in fine ; voir aussi, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 473-6, qui relèvent « le curieux comportement de la communauté des juristes français » en s’étonnant du rejet par la doctrine majoritaire et la jurisprudence, de la thèse de M. BILLIAU qui limite la vraie délégation à l’opération fondée sur la dette préexistante (ou en germe) du délégué ; C. GINESTET, La qualification des sûretés, Defresnois 1999 pages 80 et s. spécialement n° 9, cet auteur lorsqu’il aborde la délégation imparfaite en tant que sûreté personnelle, n’évoque que l’hypothèse de la délégation simple, dans laquelle le délégué est à la fois le débiteur du délégant et du délégataire (contra, nous avons pu évoquer, que ce schéma ne répond pas à la définition d’une sûreté personnelle), cet auteur n’envisage donc pas le cas où le délégué ne serait pas à l’origine, débiteur du délégant. 

[490] Cf ; Cass.com. 21 juin 1994 prèc.

[491]Voir notamment ; Ph. SIMLER, op.cit., n°897 ; L. AYNES, op.cit., n°325 ; TERRE, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, n° 1345.

[492] Cf ; Cass.civ.1, 7 mars 1992 prèc.

[493] Il semble possible de considérer, que le caractère large de la notion de délégation, explique que l’on essaie de justifier un grand nombre de figures contractuelles originales par ce mécanisme. Ça a été le cas, sans grand succès, de la lettre de change (voir, M. BILLIAU, thèse prèc. n° 415). De même, MM. MALAURIE et AYNES (les obligations n° 1252), ont pu analyser la delegatio certa comme, « l’âme du crédit confirmé et documentaire » et surtout, «  de la garantie bancaire indépendante ou à première demande ». On vient aussi de souligner, qu’avec cette vision des choses, il devient possible d’affirmer que le cautionnement n’est lui aussi qu’une forme de délégation. N’y a t-il pas là, une espèce de « tarte à la crème juridique », consistant à forcer les traits de cette institution qu’est la délégation, pour tenter d’expliquer quantité de phénomènes contractuels originaux, qui dans leur finalité comme dans leur régime juridique en sont très éloignés.  Pour expliquer cette tendance, il semble qu’il faille considérer avec M. PERROT (De l’influence de la technique sur le but des institutions juridiques, thèse Paris 1947 page 152, cité par M. BILLIAU, prèc. n° 415), que « L’esprit humain a une tendance à procéder par raisonnement d’analogie, plutôt que de se mettre en face des réalités pour se dégager des formules techniques qui servent à les satisfaire .»

[494] La République connaissait déjà la sponsio et la fidepromissio (la première pour les citoyens romains, l’autre ouverte aux pérégrins). Puis le droit romain classique développera la fidejussio qui est véritablement l’ancêtre du cautionnement.

[495] Op.cit., n° 898.

[496] Cass.com. 12 décembre 1984 prèc. Dans cet arrêt, la Cour de Cassation approuve une cour d’appel d’avoir ordonné la mainlevée d’une contregarantie, au motif que l’engagement du contregarant, « ne constituait pas plus un cautionnement qu’une délégation, mais une obligation autonome », alors que selon le pourvoi, « en cas de délégation imparfait de créance, un créancier du délégataire peut saisir-arrêter entre les mains du délégant la créance qui n’a pas été éteinte par le règlement opéré par le délégué. » A contrario, il est donc possible de considérer, que si la qualification de délégation avait été retenue, une saisie-arrêt aurait pu être pratiquée.

[497] Ph. SIMLER, loc.cit.

[498] Cass.civ.1, 17 mars 1992, Bull.civ. I, n° 84, JCP G 1992, II, 21922 note Billiau, D. 1992, page 481 note Aynès.

[499] Cass.com. 25 février 1992, non publié au Bulletin civil, JCP G 1992, II, 21922, note Billiau

[500] Pour le 1er arrêt connu, voir CA Paris 25 janvier 1979, D. 1980, inf. rap. page 55 obs. M. Vasseur.

[501] Ph. SIMLER, op.cit., n° 1008, qui souligne par ailleurs l’origine anglo-saxonne de ce procédé (comfort letters).

[502] En ce sens, voir, J. DEVEZE, Aux frontières du cautionnement : lettres d’intention et garanties autonomes, Cah. Dr. Entr. 1992 pages 26 et s.

[503] Cf ; J. DEVEZE, art. prèc. n°2 ; Ph. SIMLER, Les solutions de substitution au cautionnement, JCP E 1990, II, 15659, n° 16.

[504] Cass.com. 21 décembre 1987, Bull. civ. IV, n° 281, D. 1989 page 112, note Brill, JCP G 1988, II, 21113, note Montanier, Banque 1988, page 361, obs. Rives-Lange, RD bancaire et bourse 1988, page 101, obs. M. Contamine-Raynaud. Dans cet arrêt, la Haute Cour considère que la lettre d’intention peut s’entendre de divers engagements. Elle énonce ainsi, « malgré son caractère unilatéral, une lettre d’intention peut, selon les termes, lorsqu’elle a été acceptée par son destinataire, et eu égard à la commune intention des parties, constituer à la charge de celui qui la souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas faire, pouvant aller jusqu’à l’obligation d’assurer un résultat, si même elle ne constitue pas un cautionnement ».

[505] Voir en ce sens, CA Paris, 30 avril 1984, Banque 1985 page 75, obs. J.L. Rives-Lange, dans l’hypothèse d’une simple lettre de recommandation.

[506] C’était notamment le cas dans l’arrêt de la Cour de Cassation du 21 décembre 1987 prèc.

[507] Ph. SIMLER, art.prèc. page 8.

[508] Ph. SIMLER, ibid.

[509] Ph. SIMLER, Cautionnement et garanties autonomes, prèc. n° 900.

[510] On notera toutefois, que la doctrine est partagée quant aux lettres d’intention, sur le point de savoir si elles sont accessoires à l’obligation garantie. En effet, pour certains auteurs ces lettres d’intention sont accessoires de l’obligation principale, voir ; MM. CABNRILLAC et MOULY, op.cit., n° 484 ; Lamy droit du financement, n° 3179 ; J. DEVEZE, art. prèc. ; R. BAILLOD, Les lettres d’intention, RTDcom. 1992, page 547, spéc. n° 51. Pour d’autres auteurs il n’en est rien, ainsi nous avons pu voir que selon M. SIMLER (loc.cit.) la question ne se pose pas en ses termes, mais ces lettres d’intention ne sont pas accessoires au sens  le cautionnement est accessoire. Dans le même sens, voir H. SYNVET, note Rev.soc. 1988, page 404.

[511] Enoncé expressément, par Cass.com. 21 décembre 1987 prèc. Voir aussi en doctrine ; Ph. SIMLER, loc.cit. ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 487 ; L. AYNES, rapport français, Trav. Assoc. H. Capitant, 1996, prèc. page 384. J. DEVEZE, loc.cit., souligne à ce titre, que la lettre d’intention constitue « une nouvelle manifestation de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui » mais qui est ici, « voulue et organisée par les parties ».

[512] Voir très clairement, L. AYNES, loc.cit.

[513] MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 487 ; dans le même sens, Ph. SIMLER, Les solutions de substitution au cautionnement, art. prèc. page 8.

[514] Lorsque celui-ci vient, comme on l’a vu précédemment, garantir l’exécution d’un contrat par un tiers, engagement qui répond alors à la qualification de sûreté personnelle et non pas lorsque le porte-fort vient garantir la conclusion d’un contrat par ce tiers. Dans l’hypothèse d’une promesse de porte-fort sûreté, rappelons en effet, que le tiers a déjà ratifié le contrat et que le porte-fort garantit l’exécution de ce contrat.

[515] Ph. SIMLER, Peut-on substituer la promesse de porte-fort à certaines lettres d’intention comme technique de garantie ?, RD bancaire et bourse 1997 pages 223 et s. n° 2.

[516] Ph. SIMLER, loc.cit.

[517] Il semble en effet que c’est avec le cautionnement que la confusion soit possible, voir par exemple, CA Paris 12 avril 1995, SOBI c/ CORBET, Juris-Data n° 021315. Dans cette affaire, est qualifié de lettre d’intention, avec obligation de résultat, un engagement pris par un tiers de virer au compte du débiteur dans les livres de la banque créancière la somme de 10.000 francs, montant de l’ouverture de crédit consentie. Il n’y avait pas là, une obligation de faire, mais un véritable engagement de payer, constitutif d’un cautionnement, voire d’un constitut (engagement autonome de payer la dette d’autrui, si le virement pouvait être appelé en l’absence de clôture du compte).

[518] P. ANCEL, thèse prèc. n° 32.

[519] R. STAMMLER, Der Garantievertrag, Archiv für die zivilistische Praxis, 1886, t. 69, pages 1 et s., cité par P. ANCEL, thèse prèc. n° 31.

[520] L 42 Dig. De rebus creditis, X, II, 1.

[521] Sur cette évolution historique, voir la thèse de P. ANCEL, prèc. n° 31.

[522] Der garantievertrag, Diss München, 1966, pages 15 et s. cité par P. ANCEL, loc.cit.

[523] BGH B.B. 1964, 1360, cité par P. ANCEL, loc.cit.

[524] Finger P., Formen und Rechtsnatur…, B.B., 1969, n°4; Lieseke W., Rechtsfragen...W.M., 1968 page 24; Boetius J., prèc. Pages 15 et s. ; Pleyer K. Die Bankgarantien…, W. M., 1973, pages 8 et s., auteurs cités par Y. POULLET, Les garanties contractuelles dans le commerce international, DPCI 1979 pages 387 et s. n° 10.

[525] BGH, 16 septembre 1960, W.M. 1968, page 204, voir en doctrine ; Lieseke, op.cit. ; Pleyer, op.cit. ; Auhagen U., Der Garantie einer Bank… pages 44 et s. Auteurs cités par Y. POULLET, loc.cit., qui dresse un état complet de la doctrine allemande et relève aussi, les quelques positions minoritaires affirmant le caractère causal de cet engagement.

[526] Sur ce point, voir Y. POULLET, loc.cit.

[527] Sur ce point, voir P. ANCEL, thèse prèc. n°42.

[528] T.C. HARTLEY, Le droit du cautionnement dans le Royaume-Uni et en Irlande, Etudes de la Commission des comptes européennes, Bruxelles 1974, n° 12, cité par P. ANCEL, thèse prèc. n° 43.

[529] Cité par P. ANCEL, thèse prèc. n° 43.

[530] Selon T. Bär, Zum Rechtsbegriff der garantie insbesondere im bankgeschäft, Winterthur, 1963 page 8, cité par P. ANCEL, n°40, définit ce contrat de garantie comme, « un contrat par lequel le garant s’oblige envers le bénéficiaire de la garantie à répondre des suites dommageables d’un évènement dangereux ».

[531] Voir P. ANCEL, thèse prèc. n° 40.

[532] F. EISENMANN, arbitrage et garanties contractuelles, Rev. Arbitrage 1972, page 379 et s. n° 9 ; M. DUBISSON, Le droit de saisir les garanties bancaires émises dans les marchés internationaux, JCP CI 1982, II, 13813, n°3 ; voir aussi, l’auteur belge Y. POULLET,art.prèc. n° 15 et s.

[533] Voir en ce sens, M. CONTAMINE-RAYNAUD, art.prèc. Mèl. ROBLOT n°6 et 14 ; A. TRIDI, Les garanties bancaires dans le commerce international, thèse Paris X, 1991 pages 219 et s. ; MARTY, RAYNAUD et JESTAZ, op.cit., page 432, pour qui la garantie autonome permettrait d’obtenir un « dédommagement immédiat » face à une mauvaise exécution du marché ; J. DEVEZE, art. prèc. n° 79 page 27 ; voir aussi, M. VASSEUR, note au D. 1983, sous Cass.com. 20 décembre 1982 prèc. spé. page 367 ; F. JACOB, note sous Cass.com. 3 novembre 1992, JCP N 1993, II, page 153.

[534] Op.cit., n° 139.

[535] Voir notamment, T. BAR, thèse prèc. §13 page 62, cité par P. ANCEL, loc.cit.

[536] Voir notamment, Ph. SIMLER, op.cit., n°900 ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit. n° 431 et s. ; SABEH AFFAKI, L’unification internationale du droit des garanties indépendantes, thèse Paris II, 1995 pages 171 et s. ; P. ANCEL, thèse prèc. n° 139 ; L. AYNES, rapport français, travaux de l’association H. Capitant, journées portugaises, prèc. page 383 ; Logoz, La protection de l’exportateur face à l’appel abusif d’une garantie bancaire, Droz, Genève 1991; C. GINESTET, art. prèc. n° 9; Y. PICOD, op.cit., n° 53-2 et s. 

[537] Comme le fait remarquer M. SIMLER, op.cit., n° 900, il faut que l’obligation du débiteur initial ait existé et qu’elle ait été valable et exigible, mais la question qui se pose alors est celle de la réalité du préjudice et du lien de causalité entre ce préjudice et l’inexécution alléguée, et non celle de l’opposabilité d’exception tenant à l’obligation garantie.

[538] Op.cit. n°855.

[539] Nous entendons par-là ; promesse de porte-fort sûreté, lettres d’intention contenant une obligation de résultat, dont le fondement commun semble donc résider dans les garanties indemnitaires connues dans les droits étrangers découlant elles-mêmes de la promissio indemnitatis.

[540] Sur l’origine romaine du pacte de constitut, voir notamment la thèse de F. JACOB, Le constitut ou l’engagement autonome de payer la dette d’autrui à titre de garantie, thèse Strasbourg, LGDJ 1998, n° 16 et s.

[541] Cette action a été accordée dans la Rome classique, notamment lorsque le créancier avait accordé à son débiteur un délai supplémentaire sans renouveler les formalités du contrat ; le débiteur déjà tenu s’engage à payer à une date nouvelle (constituere veut d’ailleurs dire : fixer un jour). Le domaine d’application d’abord restreint du constitut a progressivement été étendu en droit prétorien (Selon MM. A.E. GIFFARD et R. VILLERS, droit romain et ancien droit français, Précis Dalloz, 3eme éd. 1970 n° 180, cela remonterait au début de la procédure formulaire). Ce pacte revêt alors deux formes ; le constitut inter easdem personas (Dig. 13, 5, 3, 2, 18, 1) qui intervient entre les mêmes personnes d’un rapport obligatoire antérieur, et le constitut inter novas personas qui supposait l’adjonction d’une troisième personne au rapport d’obligation préexistant. Dans ce deuxième cas de figure, parmis différentes possibilités (apparition d’un nouveau créancier par exemple), le pacte de constitut peut introduire dans le rapport obligatoire antérieur un nouveau débiteur qui vient se placer auprès du premier débiteur pour le « cautionner » ( Selon les termes de MM. GIFFARD et VILLERS, op.cit. n° 182.). Cette dernière forme de constitut, appelée constitutum debiti alieni, était relativement usitée (voir F. JACOB, thèse prèc. n° 27). Enfin, il semble, que le pacte de constitut soit inspiré d’un autre pacte romain, le receptum argentari, qui était un pacte par lequel un banquier (argentarius) se chargeait de payer, pour le compte de son client, la dette de celui-ci vis-à-vis d’un tiers créancier. Par une Constitution de l’an 531, l’Empereur Justinien a d’ailleurs fusionné ces deux pactes, mais seuls les termes propres au constitut ont subsisté au Digeste. 

[542] Loc.cit. n° 67.

[543] Voir en ce sens, Ph. SIMLER, Le cautionnement, éd. Litec 1982 n° 28 (cette proposition faîte en 1982 ne figure pas dans les rééditions de cet ouvrage, sous le titre « cautionnement et garanties autonomes »,  parues en 1991 et 1999 ; voir encore, Ph. DELEBECQUE, Rep. dr. civ. Dalloz, V° Cautionnement, n° 14, (“Le caractère accessoire du cautionnement permet encore d’opposer cette sûreté à l’engagement de payer la dette d’autrui, hier appelé constitut et aujourd’hui garantie à première demande ») ; MM. MARTY, RAYNAUD et JESTAZ, op.cit., n° 637 (« Nouvelle, la garantie autonome l’est d’ailleurs moins qu’on ne la cru car elle remet à l’honneur le pacte dit de constitut ou engagement autonome de payer la dette d’autrui »).

[544] En ce sens, POTHIER, Traité des obligations, nouvelle édition, t.1, 1805, page 383, cité par F. Jacob, loc.cit.

[545] F. JACOB,thèse prèc., n° 68. Il faut remarquer, que pour cet auteur, il en va de même pour la caution, selon lui, « si la caution est tenue de la dette même du débiteur principal, elle ne doit pas la chose même ( mais seulement une même chose) », voir dans le même sens, Ch. MOULY, Les causes d’extinction du cautionnement, Litec 1979, n° 18. Cette affirmation ne doit pas surprendre, elle s’explique aisément par le caractère fongible de l’argent.

[546] Ph. SIMLER, op.cit., n° 31.

[547] Sur ce point, voir F. JACOB, note au JCP N 1993, II, pages 150 et s., sous Cass.com. 3 novembre 1992.

[548] Cf ; Cass.com. 3 janvier 1995, RTDciv. 1995, 888, obs. J. Mestre, cet auteur analysant l’engagement en cause comme un constitut.

[549] Ph. SIMLER, op.cit., n° 899.

[550] F. JACOB, thèse prèc. n° 263.

[551] Voir F. JACOB, note sous Cass.com. 3 novembre 1992 prèc.

[552] Voir Ph. SIMLER, loc.cit.

[553] Voir notamment, CA Paris 19 mars 1987, RD bancaire et bourse 1987 page 96 obs. M. Contamine-Raynaud, cet arrêt, sans préciser la qualification, valide l’engagement d’un dirigeant de société envers la banque créancière de verser telle somme par mois jusqu’à apurement du solde débiteur du compte courant de sa société. Or cet engagement ne pouvait être qualifié de garantie autonome puisqu’il avait pour objet la propre dette du débiteur, mais il ne pouvait pas d’avantage être qualifié de cautionnement puisqu’il avait pour objet une dette non exigible. Bien que l’arrêt ne l’énonce pas, il semble qu’il s’agissait là d’un constitut. Voir aussi, CA Reims 16 octobre 1991, RD bancaire et bourse 1992 page 253 obs. M Contamine-Raynaud ; Cass.com. 3 janvier 1995, prèc. ; CA Paris 3 mars 1995, RTDciv. 1995, 888, obs. J. Mestre, cet auteur commentant ces deux arrêts, y voit des engagements répondant à la définition du constitut ; voir aussi, d’anciens arrêts rattachés à la notion de constitut de manière plus ou moins discutable, Cass.civ. 17 janvier 1849, S. 1849, 1, page 228, DP 1849, 1, page 49 ; Cass.req. 5 mai 1868, DP 1869, 1, page 285, S. 1868, 1, page 251. Ces deux arrêts sont cités par Ph. SIMLER, op.cit., n°31 note 78.

[554] Depuis la décision du BGH du 2 mai 1979, W.M. 1979, 691 et 692.

[555] Si le droit allemand connaît à côté du cautionnement traditionnel et de la garantie autonome, ce cautionnement à première demande, il faut noter, que les droits espagnols et italiens, s’ils connaissent la garantie autonome, ont tendance à la considérer comme une variété de cautionnement. Ces engagements pourraient alors être rapprochés du cautionnement à première demande allemand. Sur ces points, voir notamment, le rapport de synthèse, de M. VASSEUR, pages 319 et s. spéc. page 326 et le rapport de M. A. MAZZONI, Les garanties bancaires en droit italien, pages 79 et s., in colloque de Tours, 1980, Le droit des garanties bancaires dans les contrats internationaux en France et dans les pays de l’Europe de l’ouest, FEDUCI.

[556] RG, 20 mai 1935, RGZ 148 page 65 ; BGH 19 septembre 1985, BGHZ 95, 350 et s., spéc. 356 et s. Voir aussi les § 767 et 768 du BGB (références citées par A. ROHMERT, Le cautionnement à première demande en droit allemand, une sûreté hybride, RD bancaire et bourse 1994 page 122 note 2).

[557] Voir notamment, BGH 24 novembre 1983, W.M. 1984 pages 44 et s. Voir aussi les décisions citées par A. ROHMERT, art.prèc. page 123.

[558] Cf ; le § 812 du BGB, « quiconque, du fait de la prestation d’autrui ou de toute autre manière, fait acquisition sans fondement juridique, aux dépens de ce dernier, est tenu à son égard de restitution… Trad. éd. Jupiter, article cité par F. JACOB, thèse prèc. n° 136.

[559] Voir BGH 2 mai 1979 prèc.

[560] Voir A. ROHMERT, art.prèc.. page 123.

[561] BGH 5 juillet 1990, NJW-RR 1990, 1265 et s., cité par A. ROHMERT, art.prèc. page 123 note 16.

[562] Cf ; A. ROHMERT, art.prèc. page 124 et s.

[563] S. WETH, Bürgschaft und Garantie auf erstes Anforden, ACP 189 (1989) 303-341, cité par A. ROHMERT, art.prèc. page 124.

[564] D. LEGEAIS, Sûretés et garanties du crédit, LGDJ, 2eme éd. 1999 n° 328.

[565] Voir en ce sens, P. ANCEL, thèse prèc. n° 143.

[566] Voir Ph. SIMLER, op.cit., n° 896 ; L. AYNES, Les sûretés, op.cit., n° 123, qui a pu qualifier le cautionnement à première demande de « monstre juridique » ; MM. MARTY, RAYNAUD et JESTAZ, op.cit., n° 637 ; en faveur de l’admission en droit français d’un tel engagement, voir D. LEGEAIS, op.cit. n° 325 et s., et son article, Le cautionnement à première demande, Mélanges Vasseur, sous la direction de T. Bonneau, éd. Banque, 2000, pages 87 et s. Cet auteur voit dans les garanties personnelles consenties au profit de l’administration ( voir début  de ce chapitre), les prémices d’une éventuelle reconnaissance.

[567] MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n°436-1.

[568] Proximité soulignée par de nombreux auteurs ; MM. GAVALDA et STOUFFLET, art. prèc. RTDcom 1980 page 1 et s. n° 11 ; MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit., n° 448 ; BONTOUX, Les garanties bancaires dans le commerce international, Banque 1982, pages 171 et s. ; Ph. SIMLER, op.cit., n° 901.

[569] Voir CA Paris 27 octobre 1981, JCP G 1981, II, 19702.

[570] Voir en ce sens, MM. CABRILLAC et MOULY, loc.cit., Ph. SIMLER, loc.cit. pour qui, « le crédit documentaire est un instrument facilitant l’exécution d’une convention, alors que la garantie autonome est un moyen de remédier à son inexécution ».

[571] Voir notamment, MM. CABRILLAC et MOULY, op.cit. n°26.

[572] F. TERRE, thèse prèc. page 492.

[573] F. TERRE, thèse prèc. n°623.

[574] Article 12 al. 1er NCPC : « Il (le juge) doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé ».

[575] Obligation imposée aux juges du fond depuis, Cass.com. 7 janvier 1975, D. 1975 page 516, note Ph. Malaurie, JCP G 1975, II, 18167, note J. Ghestin ; sur ce point, voir J. BORE, La cassation en matière civile, Sirey 1980, préface P. RAYNAUD, n° 1234 et s., voir aussi, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, Les effets du contrat, op.cit., n° 30.

[576] Voir J. BORE, op.cit., n° 2306 et s.

[577] Les obligations, 2eme éd., Sirey 1988, n° 240 ; dans le même sens, pour MM. TERRE, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, prèc. n°419, « Interpréter c’est déterminer le sens et la portée des obligations contractées ».

[578] J. LOPEZ SANTA MARIA, Les systèmes d’interprétation des contrats, thèse Paris, dactyl. 1968, page 2, cet auteur ajoute, «  la volonté n’étant plus l’âme du contrat, elle ne peut plus être la mesure de son interprétation ». Auteur cité par MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°11 note 26.

[579] MM. TERRE, SIMLER et LEQUETTE, op.cit. n°423.

[580] J. CARBONNIER, Les obligations, t.4, n°68 page 234 éd. 1976, cité par J. DUPICHOT, Pour un retour aux textes, défense et illustration du « petit guide-âne » des articles 1156 à 1164 du Code civil, Etudes Jacques Flour pages 179 et s. note 7.

[581] Contrairement à l’opinion émise semble t’il par MM. Malaurie et Aynès, Les obligations, Cujas, 9eme éd. 98/99 page 359, selon lesquels, les rédacteurs du Code civil n’auraient envisagé l’interprétation qu’au sens d’une recherche de la volonté des parties. Tel semble être le cas, des articles 1159, 1160 et 1162. On notera, que la question est plus discutée concernant l’article 1159 selon lequel, « Ce qui est ambigu s’interprète par ce qui est d’usage dans le pays  le contrat est passé ».  Pour certains auteurs comme M. DUPICHOT (art.prèc. n° 9), cet article ne serait que le corollaire de l’article 1156, car le texte vise à élucider une volonté exprimée et pas totalement absente. Alors que pour d’autres (en ce sens, MM. TERRE, SIMLER et LEQUETTE, Les obligations, prèc. n° 426), le recours aux usages est nécessairement extérieure à la volonté des parties. Il s’agirait donc là d’une règle d’interprétation objective au même titre que les articles 1160, 1162, mais surtout 1134 al. 3 et 1135 du Code civil.

[582] Voir très tôt, Cass.Req. 18 mars 1807, S. 1807, 1, 361, D. 1807, 1, 241 ; Cass. Req. 24 février 1968, D.P 1868, 1, 308, arrêt selon lequel, « Les dispositions précitées (art. 1156 et s.) n’ont pas un caractère impératif ; que par leur nature même, elles constituent des conseils donnés au juge par le législateur pour l’interprétation des conventions, et non des règles absolues dont l’inobservation entraînerait l’annulation de la décision qui l’aurait consacrée ». Voir plus récemment, Cass.soc. 3 juin 1981, Bull.civ.IV, n°490 page 369.

On remarquera toutefois, que selon J. DUPICHOT (art.prèc. n° 3 note 15), la volonté intime des rédacteurs du code de 1804 reste fort douteuse sur ce point. Cet auteur cite ainsi FAVARD, dans son rapport au Tribunat, selon lequel, « Les juges doivent suivre, dans cette pénible recherche, certaines règles universelles. Le projet de loi en présente plusieurs qui ont reçu l’approbation de tous les siècles » (FENET, t. 13 page 325 cité in, MM. MAZEAUD par f. CHABAS, t. 2,  vol.1, 6eme éd. 1978 n° 340). Mais aussi DOMAT (Lois civiles, Livre I, Titre I, section II, al. X à XXIV), qui d’après J. DUPICHOT, semblait considérer ces préceptes comme de véritables normes juridiques.

[583] Voir l’arrêt de principe, Cass. civ.1, 20 janvier 1970, Bull. civ. I, n° 24 page 24, rendu sous le visa des articles 1156 et s.

[584] Cass.com. 1er décembre 1998, JCP E 1999, chronique page 765 note J. Stoufflet.

[585] Voir dans le même sens, pour une hypothèse identique en matière de cautionnement, Cass.com. 25 novembre 1997, Bull.civ.IV. n° 300.

[586] Voir, Cass.com. 18 avril 2000, RJDA 7-8/00, n°803. en l’espèce une garantie à première demande couvrait une opération de prêt. Le bénéficiaire a appelé le garant en paiement du montant de la garantie mais eu égard à un autre crédit que celui visé dans la lettre de l’engagement. Le montant du prêt était identique, mais sa destination et sa durée ne l’était pas. Aussi,  la Cour de Cassation approuve la cour d’appel d’avoir retenu le caractère manifestement abusif de l’appel en paiement et énonce la nécessité du caractère exprès de l’engagement du garant. Rappr., Cass.com. 2 décembre 1997, RJDA 2/98 n°223.

[587] Th. IVAINER, La lettre et l’esprit de la loi des parties, JCP G 1981, I, 3023, n°5.

[588] F. TERRE, thèse prèc. n° 212 page 198.

[589] Voir supra page 85.

[590] Ibid.

[591] A titre d’exemple, voir, CA Paris, 4eme ch. B., 14 février 1991, JCP N 1991, I, page 347, arrêt qui considère, qu’il « résulte clairement qu’en dépit de la formulation erronée figurant dans l’assignation devant le tribunal de commerce, la commune intention des parties a été de s’affranchir des règles du cautionnement ». L’arrêt en conclut, qu’il s’agit donc d’une garantie autonome. Or, le garant s’engageait à payer à « première demande », « toutes sommes restant dues » notamment en cas de cessation des paiements. L’engagement ne pouvait donc être une garantie autonome malgré les termes employés, puisque il était intitulé « garantie autonome », et que le garant s’engageait « à payer à première demande », et « sur simple demande écrite ». Dans cette arrêt, la cour d’appel a expressément visé l’article 12 al. 1er du NCPC. Voir aussi ; T.com. Paris, 3 octobre 1989, D. 1990, somm. page 202 ; CA Douai 27 février 1992, JCP G 1992, I, 3623 n°14 obs. Simler, arrêt qui juge, que la garantie « des sommes dues aux termes du contrat (de bail) à première demande du bailleur » est une garantie autonome et que l’indétermination du montant de l’obligation et la référence aux « sommes dues aux termes du contrat » sont indifférentes ; voir aussi, CA Paris 20 novembre 1998, Juris-Data n° 023731, qui infirme le jugement ayant disqualifié en cautionnement l’engagement de rembourser à première demande toutes sommes dues par le débiteur à hauteur d’un certain montant ; CA Versailles, 21 mai 1997, S propex EURL c/ Noël, JCP G 1998, I, 103 n°17.

[592] Th. IVAINER, art.prèc. n°54.

[593] CA Paris 26 janvier 1993, D. 1993, inf.rap. page 93.

[594] Jugement du 11 décembre 1991, S Le crédit général industriel c/ S Minotor Yvelines, RTDcom. 1992, 434, obs. Cabrillac et Teyssié.

[595] Voir aussi, CA Paris 5 février 1992, Juris-Data n° 020451, D. 1993 somm. page 107, obs. Vasseur. Voir aussi supra, page 62, note 328, illustrant le mouvement d’hostilité à l’égard des garanties autonomes, les annulations prononcées sur le fondement d’un dol, sans que celui-ci ne soit véritablement caractérisé, même s’il ne s’agit pas là, à proprement parler, d’une question d’interprétation.

[596] Op.cit. n°12.

[597] J. LOPEZ SANTA MARIA, loc.cit.

[598] Pour peu qu’il soit encore possible de parler d’interprétation dans ce type d’hypothèse.

[599] Voir Cass.com. 18 décembre 1998, D. 1991, somm. 193, obs. Vasseur. Selon cet arrêt, manque de base légale l’arrêt ayant condamné une société  à exécuter la garantie autonome par elle souscrite à l’instigation de la banque, sans rechercher si le manquement de celle-ci à son devoir de conseil ne constituait pas une réticence dolosive. Voir aussi, Cass.com., 26 janvier 1993, D. 1995, somm. page 14, obs. Vasseur et Cass.com. 3 mai 2000, RJDA 7-8/00 n° 802, dans ces deux arrêts, l’obligation d’information est reconnue, mais il n’y en a pas violation.

[600] CA Versailles 4 mars 1999, 13eme ch., S SGE Environnement c/ Banque Populaire de la Région Economique de Strasbourg, RJDA 6/99, n°721.

[601] Voir en ce sens, A. PRUM, op.cit., n°103 et 104. Cet auteur cite à l’appui de cette idée, un jugement du Tribunal Fédéral suisse, 1ere Cour civ., 25 juillet 1988, La semaine juridique (suisse), 1988, n°34 page 550, D. 1990, somm. page 195 obs. Vasseur. Selon cet arrêt, « …En cas de doute, le juge doit opter pour le cautionnement en raison du caractère protecteur de la législation en la matière. En revanche, les obligations de garantie assurées par les instituts bancaires expérimentés et les sûretés accordées aux contrats internationaux laissent présumer l’existence d’une garantie indépendante ».

[602] Voir sur ce point, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°125, qui montrent que la reconnaissance du pouvoir de qualification et plus généralement de requalification au profit du juge a longtemps pu sembler subordonnée à une imprécision de l’acte. L’interdiction de dénaturer les termes clairs et précis d’un acte aurait alors constitué la limite au pouvoir de qualification du juge. Ainsi, lorsque les parties déclarent formellement conclure un cautionnement, le juge aurait été tenu d’adopter cette qualification. La Cour de Cassation a d’abord éludé la question, en considérant que dès lors que l’acte ne correspondait pas à la réalité, il devenait nécessairement ambigu, ce qui autorisait les juges du fond à passer outre et contre l’écrit. Puis, la Haute Cour a amorcé une évolution, tout d’abord par un arrêt du 2 mars 1982 ( Cass.com. 2 mars 1982, Bull. civ. IV, n°85 page 76), puis par une autre décision de 1988 (Cass.soc. 21 avril 1988, Bull.civ. V, n°244 page 159). En l’espèce, il était reproché à une cour d’appel d’avoir violé l’article 1134 en retenant l’existence d’un contrat de travail liant les parties alors que celles-ci avaient qualifié leur accord de contrat de gérance non salarié. La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi, en considérant que les juges du fond avaient à bon droit requalifier le contrat, la réalité ne correspondant pas à la qualification donnée à leur contrat par les parties. La cour d’appel n’a pas été considérée comme ayant dénaturé la volonté des parties, car elle n’a pas interprété le contrat. Voir récemment, un important arrêt s’inscrivant dans cette ligne, toujours en matière de contrat de travail, Cass.ch.mixte, 12 février 1999, Bull. civ. Ch.mixte, n°1 page 1, Bull. inf. rap. C. cass., 1999, n°492 page 2, concl. Joinet, rapp. et note Bouret

[603] Cité par MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°121.

[604] En ce sens, MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°127.

[605] Article 4 NCPC : « L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties »

[606] Pour exemple, voir, Cass.com. 18 novembre 1986, Bull.civ.IV, n°216 page 188.

[607] Voir supra, note 601.

[608] A titre d’exemple, voir ; CA Rennes, 2 mars 1995, Juris-Data n° 043794 ; CA Versailles 18 mai 1995, Juris-Data n°041841 ; CA Grenoble 24 mai 1995, Juris-Data n°044798 ; arrêts cités par Ph. SIMLER, op.cit. n°928 note 271.

[609] Sauf grief de dénaturation d’une volonté claire et précise.

[610] La distinction du fait et du droit. Essai sur le pouvoir de contrôle de la Cour de Cassation sur les juges du fait, thèse Toulouse, Sirey 1929, pages 216 ets., cité par F. TERRE, thèse prèc. n°678.

[611] Thèse prèc. n°684.

[612] F.TERRE, thèse prèc. n°686. Voir déjà en ce sens, M. Le doyen MAURY, La distinction du fait et du droit devant la Cour de Cassation, Rev. crit. dr. Intern. privé., 1931 page 586, cité par F.TERRE, loc.cit. Selon M. MAURY, « Le contrôle sur la qualification ne doit jouer que dans la mesure ou la décision du juge du fait permet au tribunal suprême de redresser ou de formuler un concept juridique, il est à la fois fonction et facteur de développement du droit, de l’appréhension des faits par le droit : il dépend pour une large part de la « politique » de la Cour de Cassation…. »

[613] Cass.chbres. réunies, 2 février 1808, Sirey 1808, 1, 183 ; jur. Gén., V° Société, n°1093, concl. Merlin.

[614] Cass.civ. 15 avril 1872, DP 1872, 1, 176 ; Sirey 1872, 1, 232.

[615] J. BORE, Un centenaire : le contrôle par la Cour de Cassation de la dénaturation des actes, RTDciv.1972, n°6 page 254, cité par MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°25.

[616] Th. IVAINER, art.prèc. n°15.

[617] MM. Malaurie et AYNES, Les obligations, prèc. n°631.

[618] MM. TERRE, SIMLER et LEQUETTE, loc.cit.

[619] Voir , Cass.com. 19 mai 1992, BFCE c/ S Desse frères et autres, RTDcom. 1992 page 657, obs. Cabrillac, qui casse un arrêt d’appel sous le visa de l’article 1134 et rappelle les juges au respect de « la loi du contrat ». Voir aussi, Cass.com. 2 février 1988, Bull. civ. IV, n°55, arrêt qui décide de manière claire, que « viole l’article 1134, la cour d’appel qui, au motif que la clause d’un acte de garantie était ambiguë et devait être interprétée en faveur de celui qui avait contracté l’obligation, rejette la demande en paiement formée à l’égard d’une banque, sans reconnaître le caractère autonome de la garantie donnée par la banque, alors que, en dépit de la présence des mots « cautionnement », « caution personnelle » et « débiteur », ce caractère résultait de la clause par laquelle l’établissement financier s’engageait à ne pas différer le paiement lorsqu’il recevrait l’ordre d’y procéder, et à ne soulever aucune contestation que ce soit ».

Voir, plus discutable, Cass.com. 3 novembre 1992, Bull.civ. IV, n°335, JCP G 1993, II, 22082, note Delebecque, et E 1993, II, 454 note Jacob, D. 1993, somm. page 96 obs. Vasseur. Arrêt qui casse un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 3 avril 1990 (JCP E 1990, I, 20042, D. 1990, somm. page 197 obs. Vasseur) pour méconnaissance de la loi du contrat. En l’espèce, deux actes pour le moins ambigus étaient soumis à l’appréciation des juges. Ces deux actes intitulés « caution » stipulaient, que la banque garante s’engageait à verser « tout ou partie des sommes faisant l’objet du présent engagement de caution » (l’acte n’indiquait à aucun moment quelles étaient ces sommes), l’un « à première demande », l’autre « dans les quinze jours d’une simple mise en demeure », « sans pouvoir élever aucune exception ou soulever de contestation de quelque nature que ce soit pour différer ou refuser le versement ». La Cour de Cassation aurait pu et même du rejeter le pourvoi, puisqu’il semblait bien y avoir matière à interprétation, en considérant que cela relevait du pouvoir souverain des juges du fond. Mais elle a préféré casser l’arrêt d’appel, pour méconnaissance de la loi du contrat au visa de l’article 1134 du Code civil. Elle n’a pas pour autant énoncé qu’il s’agissait là d’une garantie autonome (elle ne peut pas substituer une qualification à une autre, car cela relève du domaine du fait), aussi, pour certains auteurs, il s’agissait là, en réalité, de garanties indemnitaires (voir la note de F. JACOB).

[620] Cass.com. 18 mai 1999, D. cah. dr. Aff., 2000, jur., page 113, note Y. Picod ; JCP G 1999, II,10199, note J. Stoufflet. Arrêt qui se situe dans la droite ligne d’un arrêt de rejet cette fois, de la même chambre, 7 octobre 1999, Bull.civ. IV, n°242, RTDcom. 1998, page 189 obs. Cabrillac ; JCP E 1998, page 226 obs. Legeais ; JCP G 1998, I, page 149, n°8 obs. Simler, arrêt qui, dans les mêmes termes que celui du 18 mai 1999, avait rappelé que la référence au contrat de base n’excluait pas nécessairement l’autonomie.

[621] En effet, si la Cour de Cassation ne parle pas de dénaturation, il est toutefois possible de considérer que l’on est bien en présence d’un cas de dénaturation. C’est à tort que la cour d’appel a cru devoir interpréter un acte qui était on ne peut plus clair. Cette différence terminologique peut certainement s’expliquer, par le fait, que jusqu’en 1995 (Cass.com. 31 janvier 1995 (formation plénière), JCP G 1995,II, 22385, note Perdriaux, et déjà, Cass.com. 6 juillet 1993, JCP G 1993, II, 22126, note Boré), la Cour de Cassation considérait qu’une dénaturation d’ordre intellectuel, c’est-à-dire le fait pour les juges du fond de n’avoir pas ou mal apprécié la portée juridique des écrits soumis à leur sagacité, ne pouvait donner lieu à cassation. Les parties ne pouvaient donc reprocher aux juges du fond d’avoir dénaturé le sens ou la portée d’un document. La Haute Cour n’admettait en effet, que la dénaturation dite « matérielle », qui correspond à l’hypothèse où les juges du fond auront mal lu  ou incomplètement lu un écrit qui leur était soumis, ou ajouté ou omis un mot à ceux figurant dans l’écrit. La dénaturation sanctionne alors une erreur de fait (voir par exemple, Cass. com. 2 mars 1993 (2 arrêts), JCP G 1993, II, 22072, obs. Perdriaux).

C’était là une vision particulièrement réductrice de la dénaturation. Comme l’écrit M. GUINCHARD (J. VINCENT, S. GUINCHARD,Procédure civile, Précis Dalloz, 25eme éd. 1999, n°1522 page 1028), cela « aboutissait « à cette absurdité que serait accueilli le grief de dénaturation pour erreur involontaire du juge mais pas dans le cas ou il aurait volontairement (cyniquement ?) fait dire au document le contraire de ce qu’il dit ! ». Cet auteur explique ensuite, que si l’article 978 du NCPC exige que chaque moyen précise le cas d’ouverture à cassation invoqué, la partie critiquée de la décision et ce en quoi elle encourt le reproche allégué (al.2). Aucun texte n’exige que le demandeur qualifie le grief. Aussi, avec la conception purement matérielle de la dénaturation qui prévalait, si le demandeur invoquait simplement « la violation de la loi du contrat » en visant l’article 1134 du Code civil sans qualifier ce grief de dénaturation, son pourvoi serait recevable. Alors que si il qualifie le grief de dénaturation au lieu de violation de la loi du contrat, son pourvoi sera irrecevable, sur le fondement de ce même article 1134. On comprend dès lors mieux dans ce contexte, que les arrêts rapportés en matière de garantie autonome évoquent une méconnaissance de la loi du contrat ou de la loi des parties par les juges du fond. L’arrêt du 18 mai 1999 est postérieur au revirement de la Chambre commerciale sur la dénaturation intellectuelle, mais il est possible de considérer que si le grief de dénaturation proprement dit n’a pas été soulevé, c’est par habitude d’esprit. Mais il s’agit bien là d’un cas de dénaturation intellectuelle. Les juges du fond ont dénaturé le sens et la portée de l’acte en considérant que les références au contrat de base le rendaient ambigu.

[622] Cf ; F.TERRE, thèse prèc. n°671.

[623] Voir, sur l’apparition de ces deux contrôles, F.TERRE, thèse prèc. n°673, qui souligne que dès l’arrêt de 1808, où sous l’influence de Merlin, la Cour de Cassation a cessé de contrôler l’interprétation faîte par les juges du fond pour leur laisser une compétence exclusive en ce domaine, la Haute Cour fait la distinction entre interprétation et qualification. En matière de qualification, elle se réserve « le droit d’intervenir si le contrat dont les dispositions avaient été souverainement constatées et interprétées par les juges du fond avait été rangé à tort dans l’une des catégories réglementées par la loi ». A partir de 1872, elle contrôlera également la dénaturation du contrat par les juges du fond.

[624] MM. GHESTIN, JAMIN et BILLIAU, op.cit. n°135.

[625] Cass.com. 13 décembre 1994, Bull.civ.IV, n°375, D. 1995 page 209, rapp. Le Dauphin, note Aynès , JCP G 1995, I, 3851, n°11, obs. Simler, RTDcom. 1995 page 458 obs. Cabrillac, RD bancaire et bourse 1995 page 150 obs. Contamine-Raynaud.

[626] Voir en ce sens, le rapport de M. LE DAUPHIN, prèc., prônant l’adoption de cette solution.

[627] Cass.com. 27 juin 2000, RJDA 12/00 n°1169 page 929, cassant CA Paris 2 juillet 1996.

[628] C’est ainsi, que cette formule est renouvelée, par, Cass.com. 30 janvier 2001, Bull.civ.IV, n°25, JCP E 2001, jur. pages 568 et s. note D. Legeais. Cet arrêt approuve la décision de la cour d’appel d’avoir retenu la qualification de garantie autonome et rappelle avec force cet attendu de principe.

[629] Cass.com.20 décembre 1982, Bull.civ.IV, n°417, JCP G 1983, IV, 79 et CI 1983, II, 14001, n°116, obs. Gavalda et Stoufflet, D. 1983 page 365, note Vasseur.

[630] Selon la terminologie de F. TERRE, thèse prèc. n°18, qui fait la distinction entre éléments objectifs et subjectifs de qualification.

[631] Voir, F. TERRE, thèse prèc. n°200, qui précise que les éléments subjectifs s’apparentent à des éléments intellectuels, il s’agirait là d’un vocable générique comprenant tout aussi bien la volonté interne, la connaissance, le consentement, l’intention, les motifs ou encore les mobiles.

[632] Thèse prèc. n°688.

[633] Ibid.

[634] F. TERRE, thèse prèc. n° 702.

[635] Ainsi par exemple, avons-nous souligné la proche parenté existant entre la promesse de porte-fort utilisée à titre de sûreté et les lettres d’intention comportant une obligation de résultat. Voir sur ce point, l’article de Ph. SIMLER, Peut-on substituer la promesse de porte-fort à certaines lettres d’intention comme technique de garantie ?, RD bancaire et bourse, nov./déc. 1997 page 223.

[636] Telles que le constitut, la délégation imparfaite ou toutes les formules de garanties indemnitaires.

[637] B. OPPETIT, Les tendances régressives dans l’évolution du droit contemporain, Mélanges HOLLEAUX, pages 317 et s.

[638] Art.prèc. page 321.

[639] Art.prèc. page 320.

[640] Art.prèc. page 321.

[641] Cité par D. GRILLET-PONTON, Nouveau regard sur la vivacité de l’innomé en matière contractuelle, D. 2000, chron., page 333.

[642] Op.cit. n°17.

[643] Seules les principaux arrêts seront ici recensés.