UNIVERSITE DE NANCY II
FACULTE DE
DROIT, SCIENCES ECONOMIQUES ET DE GESTION
_____________________________________________________
COMPARAISON
FRANCO-ALLEMANDE DES
DROITS ET
OBLIGATIONS DES PARTENAIRES
D’UN PARTENARIAT
ENREGISTRE
(PACTE CIVIL DE SOLIDARITE
ET LEBENSPARTNERSCHAFT)
_______________
MEMOIRE
DE
DEA DE DROITS EUROPEENS COMPARES
Présenté par
Stéphanie ROSATI
Année universitaire 2000 / 2001
A |
toutes les
personnes qui m’ont guidée par leurs conseils et par leurs suggestions,
à tous ceux qui m’ont
aidée dans mes recherches et m’ont permis d’accéder aux sources de document et
d’information,
j’adresse mes plus vifs
remerciements ;
à M. François Jacquot,
à Mme Françoise Furkel,
j’exprime ma
reconnaissance toute particulière.
« La faculté n’entend
donner ni approbation, ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire,
celles-ci devant être considérées comme propres à leur auteur »
LISTE DES
ABREVIATIONS
Abs. Absatz
Abschnitt section
Al. alinéa
AN Assemblée Nationale
art. article
Art. Artikel
AusLG
Ausländergesetz
BGB Bürgerliches Gesetzbuch vom 18.8.1896
BT-Drucks
Bundestag Drucksache
BverfG Bundesverfassungsgericht
C. Code
CA Cour d’appel
Cass. 1ère civ. Cour de Cassation, première chambre civile
Cass. 3ème civ. Cour de Cassation, troisième chambre civile
C.Civ Code Civil
CGI Code Général des Impôts
CSP Code de la Santé Publique
CSS Code de la Sécurité Sociale
C.trav Code du Travail
D. Dalloz
Defrénois Répertoire du notariat Defrénois
Droit de la famille Revue Droit de la famille, éditions
du Juris-Classeur
éd. édition
éd. G édition générale
FamRZ Zeitschrift für das gesamte Familienrecht
GG Grundgesetz
InfAuslR Informationsbrief Ausländerrecht
JCP Semaine juridique
JCP éd. N Semaine juridique édition notariale et immobilière
J.O. Journal Officiel
JR Juristische Rundschau
JW Juristische Wochenschrift
JZ Juristen-Zeitung
LPartG Lebenspartnerschaftsgesetz vom 16.02.2001
LPartGErgG Lebenspartnerschaftsgesetzergänzungsgesetz
MDR Monats-schrift für Deutsches Recht
NJW Neue Juristische Wochenschrift
Nr Numer
n° numéro
p. page
PACS pacte civil de solidarité
RIDC Revue internationale de droit comparé
RnotZ Rheinische Notar-Zeitschrift
RTDCiv. Revue trimestrielle de droit civil
S. Seite
StAG Staatsangehörigkeitsgesetz
StGB Strafgesetzbuch
StPO Strafprozessordnung
TA Tribunal administratif
TGI Tribunal de grande instance
TI Tribunal d’instance
ZPO Zivilprozessordnung
ZRP
Zeirschrift für Rechtspolitik
§ paragraphe
Introduction
Chapitre I :
Les relations de couple :
les droits et les
obligations des partenaires
Section 1 :
Les rapports non
patrimoniaux entre les partenaires
Section 2 :
Les rapports patrimoniaux
entre les partenaires
Chapitre II :
Les droits et les
obligations vis-à-vis des tiers au couple
Section 1 :
Les relations
personnelles entre tiers et partenaires
Section 2 :
Les relations
patrimoniales entre tiers et partenaires
Conclusion
Bibliographie
Table des matières
Annexes (non
jointes à ce document en raison de leur volume)
L |
e droit doit-il suivre ou
précéder l'évolution sociologique ? Le législateur doit-il prévoir ce que
seront les besoins de ses concitoyens et y répondre avant même qu'ils ne se
soient exprimés, ou matérialiser des réponses à des attentes clairement
formulées par la population, voire par une minorité de celle-ci?
En matière d'encadrement
juridique des unions de fait homosexuelles (symboles des mutations
considérables qui touchent le droit de la famille), le législateur, allemand ou
français, a préféré la seconde voie, faisant du droit l'écho des revendications. C'est à cette occasion qu'apparaît la
dimension sociologique du droit. En effet, le droit, avant d'être une
discipline autonome, est lié à la réalité sociale dans laquelle il agit et tire
son efficacité de cette application concrète dans la société.
La situation qui a précédé les législations mérite
d’être exposée (section 1) car les textes législatifs adoptés en sont la
conséquence directe (section 2).
Section 1: L’état des lieux avant
l'adoption d'une réglementation sur les
partenariats enregistrés
Force est de constater que
les propositions qui se sont succédées (§2) ont voulu combler un
manque (§1).
§1: Le constat d'un
manque
Le mouvement, d'envergure
européenne, est né de la revendication des couples homosexuels qui veulent
qu'un statut leur soit reconnu[1].
Pourquoi y aurait-il en effet des différences entre les couples homosexuels et
les couples hétérosexuels, notamment du point de vue des droits conférés au
partenaire (prestation de sécurité sociale, continuation du bail en cas de
décès du titulaire) et fondées seulement sur l’orientation sexuelle?
Le débat devient aussi
présent sur la scène politique française puisque, lors de la campagne
électorale de 1981, le candidat François Mitterrand se prononce sur
l'homophobie en déclarant : « l'homosexualité doit cesser d'être un
délit ». Parallèlement, en Allemagne, le législateur est intervenu pour la
dépénaliser en 1969.
Cette volonté de
légaliser le couple homosexuel est le corollaire de la volonté de
reconnaissance juridique du concubinage ; le phénomène a pris une ampleur
considérable, dans la mesure où aujourd'hui ce mode de vie à deux est très
largement répandu.
En effet, depuis 1990, en France, plus d'un
million de personnes s'installent, par an, en concubinage (statistiques de
l'INSEE), alors qu’environ 300 000 mariages sont célébrés pour une même
période. En outre, le concubinage homosexuel représente une large part des
couples non mariés. Il y aurait, entre 20 000 et 45 000 couples homosexuels
masculins. En Allemagne, en 1992, le nombre de personnes vivant en union libre
était huit fois plus élevé qu’en 1972, d’après une estimation de l’office
fédéral des statistiques[2],
et aujourd’hui, l’Allemagne compterait plus de 41 000 couples homosexuels[3].
Le mouvement se fonde sur
le principe d'égalité entre les couples, du point de vue de leur reconnaissance
et des droits des partenaires, quelle que soit leur orientation sexuelle et peu
importe que la relation soit officialisée par les liens du mariage ou non.
Cette égalité revendiquée n'est que la traduction de l'obligation de
non-discrimination fondée sur l'orientation sexuelle d'un individu.
La Cour de Cassation
française avait refusé de reconnaître le concubinage homosexuel (Cass. 3ème
civ, 17 décembre 1997) en remarquant que « le concubinage ne peut résulter
que d'une situation stable et continue ayant l'apparence du mariage, donc entre
un homme et une femme »[4].
La Cour réitère dans cet arrêt une position déjà adoptée en 1989 et qui définit
le concubinage comme « la situation de fait consistant dans la vie commune
de deux personnes ayant décidé de vivre comme des époux, sans pour autant
s'unir par le mariage, ce qui ne peut concerner qu'un couple constitué d'un
homme et d'une femme ».[5]
De façon marginale, certaines juridictions avaient admis, dans un souci
d’équité, la reconnaissance des couples homosexuels.[6]
Comme la jurisprudence
française, le juge allemand se montrait particulièrement sévère à l'égard non
seulement des couples de concubins hétérosexuels, mais plus encore à l'égard
des couples de même sexe, qu'il ignorait purement et simplement. Un progrès
avait été fait en faveur du concubin hétérosexuel, la Cour Fédérale de Justice
ayant admis en 1993 la continuation du bail au profit « de la personne
ayant vécu avec le locataire décédé au sein d'une communauté semblable au
mariage » (par interprétation analogique du §569a, Abs 2, S.1 du
BGB).[7]
Or, cette communauté « semblable au mariage » vise uniquement
les communautés formées d'un homme et d'une femme, excluant le concubinage
homosexuel. La Cour Constitutionnelle Fédérale le rappelle en définissant le
mariage, au sens de la Loi Fondamentale, comme « l'union d'un homme et
d'une femme en vue de former une communauté essentiellement
indissoluble ».
La nécessité d'agir était
d'autant plus importante que l'exclusion du concubinage homosexuel de la
société juridique se trouvait aggravée par le problème tragique du sida. Par
ailleurs, ce mouvement s'inscrivait dans une dynamique européenne, diverses
lois ayant déjà été votées en Europe (dans les pays scandinaves, en Catalogne)
ou des projets sérieux étant à l'étude (Luxembourg, Portugal, Finlande, …).
Parallèlement, l'abolition des inégalités de traitement fondées sur
l'orientation sexuelle des citoyens européens est aussi une priorité pour les
institutions de l'Union. Le Parlement européen avait adopté une résolution en
ce sens le 8 février 1994; de même, la Cour Européenne des Droits de l'Homme
condamne cette discrimination.
Le législateur a donc dû
intervenir pour répondre à ces attentes, mais le travail ne fut pas sans
peine .
§2 : Les difficultés
rencontrées et les propositions qui se sont
succédées
Se pose en premier lieu
un problème lié à l’évolution des mœurs, l’homosexualité étant mal acceptée.
Les débats parlementaires français ont montré combien ce problème est présent
notamment avec quelques réflexions comme : « pratique de la contamination
sidaïque » pour parler du PACS ou encore en se référant au lieu
d'enregistrement du pacte : « la direction des services vétérinaires ».[8]
Bien que les débats aient
été moins houleux en Allemagne, les obstacles qui ont jalonné le parcours de
création et d'adoption des lois (loi du 15 novembre 1999 en France sur le pacte
civil de solidarité[9] et loi du 16
février 2001 sur le partenariat enregistré[10])
traduisent les difficultés d'évolution d'une société dont le modèle
traditionnel est celui du couple homme-femme. L'homosexualité est une notion
qui dérange; or les législateurs ne sauraient prétendre ignorer un phénomène
social simplement parce qu'il heurte une partie de la population, fût-ce la
majorité. Il en va de l'intérêt des citoyens, n'oublions pas que les minorités
elles aussi, constituent la Nation, Une et Indivisible.
Plus encore, en second
lieu, se pose le problème de l’encadrement juridique de l’homosexualité.
S’exprime ici toute la difficulté
d'adaptation du modèle rigide, qu'est le mariage, aux évolutions d'une société
qui aspire à aller plus loin que la simple reconnaissance de fait du couple.
En France, cela s'est
traduit par la nécessité de trouver un juste équilibre entre le mariage
classique et le concubinage de fait, pour ne pas trop s'approcher de l'un ou de
l'autre tout en s'en inspirant. Ces difficultés expliquent les rapports
successifs (et d'ailleurs aussi les difficultés d'adoption de la loi du 15
novembre 1999). Plusieurs textes avaient été élaborés à propos de
l'organisation d'une communauté de vie entre personnes de même sexe ou non,
voire même entre frères et sœurs, mais aucun n'avait abouti. Toutefois, le
PACS, tel qu'il existe aujourd'hui, est le résultat de cette longue évolution,
et les propositions qui se sont succédées ont contribué à la construction de
son armature. Retracer cette évolution dans ses moindres détails n’est pas
nécessaire, mais il est intéressant d'en donner les étapes essentielles.
Dès mai 1990, le sénateur
Jean-Luc Mélanchon propose une loi sur le partenariat civil, qui vise entre
autres à conférer aux couples homosexuels un statut similaire aux mariés, à
l'image de ce qui existe au Danemark ; cependant, elle n'est pas discutée à
l'Assemblée Nationale. En 1992 et 1993, la proposition relative au Contrat
d'Union Civile (CUC), soutenue par le collectif pour le Contrat d'Union Civile
et par Jean-Paul Pouliquen est présentée, mais l'Assemblée Nationale refuse de
l'examiner. En septembre 1995, un avant-projet voit le jour ; le ministre
de la justice s'y oppose (le Contrat
d'Union Sociale). En janvier et février 1997, Parti Communiste et Parti
Socialiste déposent chacun une proposition de loi, or la dissolution de l'Assemblée
Nationale en avril 1997 rend caduque toutes ces propositions. Le débat
s'intensifie. Un rapport (rédigé par le professeur Jean Hauser sur la
possibilité d'un « modèle fondé sur la communauté de vie et la mise en
commun d'un certain nombre de biens ») est remis au Garde des Sceaux en
février 1998. Enfin, un troisième projet est proposé par la sociologue Irène
Théry. En mai 1998, Patrick Bloche (PS) et Jean-Pierre Michel (Mouvement des
Citoyens), membres de la Commission des lois, rendent une proposition de loi
relative au pacte civil de solidarité, résultat de l'harmonisation des
différents projets présentés auparavant.
En Allemagne, la loi sur
le partenariat enregistré est également le résultat de diverses initiatives
prises au cours des années passées, afin que soit créée en faveur des couples homosexuels
une forme juridique adaptée à leur couple. Dès 1995, des propositions variées
avaient été présentées au Bundestag, certaines osant établir des règles propres
aux couples homosexuels et d'autres, au contraire, visant les couples non
mariés dans leur ensemble. Des projets avaient vu le jour en 1995[11],
en 1997[12],
et en 1998[13], mais sans
succès. En 1998, le Bundestag invita le Gouvernement Fédéral à introduire une
institution juridique pour les couples de même sexe[14].
En automne de la même
année, les élections au Bundestag ont été suivies de discussions à propos de la
création d'une loi de lutte contre la discrimination, qui instaurerait
l'égalité de traitement entre les couples homosexuels et les couples
hétérosexuels, et introduirait le concept d'un partenariat enregistré (avec des
droits et obligations à la charge de ses membres). En 1999, un projet de loi
concernant les règles régissant les rapports de droit au sein d'un tel
partenariat (« eingetragene Lebenspartnerschaft ») est déposé ;
le 4 juillet 2000, ce projet est retenu, et s'intitule: « projet de
loi sur la fin de la discrimination à l'égard des communautés de vie formées
par des personnes de même sexe : partenariat de vie »[15].
Il avait été déposé par le groupe parlementaire SPD et l'alliance 90/les Verts.
Depuis quelques mois, également, les couples homosexuels peuvent
« s’unir » devant un officier d’état civil à Hambourg. Cette
« union » (« Hamburger Ehe ») est bien plus symbolique
qu’elle n’est créatrice de droit, puisqu’il n’y a aucun lien juridique entre
les partenaires ainsi liés.
Comment ces divers
projets sont-ils devenus les lois actuelles ?
Section 2: L'adoption de la loi du 15
novembre 1999 relative au PACS et de la loi du 16 février 2001 relative à la
fin de la discrimination à l'égard des concubins de même sexe ( Lebenspartnerschaft
ou partenariat de vie)
Le texte présenté en France en mai 1998 est examiné en octobre de la même année, dans le cadre de la niche parlementaire réservée au groupe socialiste; toutefois, la gauche plurielle est faiblement présente et la droite rejette le texte. Le 24 octobre, le projet est soumis à l'Assemblée, mais le Sénat s'y oppose en mars 1999. En seconde lecture, le texte est voté par les députés, mais les sénateurs renvoient le vote à l'automne. Le projet est finalement adopté le 13 octobre 1999 par l'Assemblée Nationale, à 315 voix contre 253, et le PACS voit le jour avec la loi du 15 novembre 1999, publiée au Journal Officiel du 16 novembre 1999, et immédiatement entrée en vigueur.
A l'image de la course d'obstacles qui a caractérisé l'adoption du texte français, le vote de la loi allemande a soulevé de nombreuses difficultés. Le projet devait obtenir l'assentiment du Bundesrat, or il contenait certains points contestés par celui-ci. La commission de médiation (« Rechtsausschuss ») du Bundestag décida alors de diviser le projet initial en deux projets distincts ; le premier s'intitule « Lebenspartnerschafts-gesetz » (LPartG), et reprend tous les points principaux du projet initial ne nécessitant pas l'assentiment du Bundesrat. Le second, « Lebenspartner-schaftsgesetzergänzungsgesetz » (LPartGErgG), rassemble les points litigieux devant obtenir l'accord du Bundesrat. Ces deux projets ont été traités en deuxième et troisième lectures le 10 novembre 2000, et ont été adoptés à la majorité des partis de la coalition.
Le Bundesrat les examina ensuite, les 1er et 6 décembre 2000. Il refusa de donner son approbation au LpartGErgG. En revanche, il accepta le premier projet. La LPartG a donc été votée en tant que loi le 16 février 2001[16], et est entrée en vigueur le 1er août 2001. Notons que la LpartGErgG contient un certain nombre de dispositions, notamment des règles procédurales concernant la compétence et les modalités d’enregistrement du partenariat, mais que, n’ayant pas encore reçu l’assentiment du Bundesrat, elle ne peut s’appliquer (son sort est encore incertain, et dépendra du comité de médiation du Bundestag).
Les Länder ont donc dû combler ce vide en adoptant des lois d'application (« Ausführungsgesetze zum Lebenspartnerschaftsgesetz »), qui désignent l'autorité compétente pour recevoir la déclaration des partenaires. Ils ont dû le faire avant le 1er août 2001 ; rappelons qu'il existe, à l'égard des Etats Fédérés, une obligation de se comporter loyalement envers la Fédération (« Bundestreue »), en vertu de laquelle ils n’ont pu refuser d'adopter ces lois d'application. L’Etat de Bavière s’obstine à boycotter la loi, et ne souhaite adopter la loi d’application qu’en automne ; un recours a été déposé par une association homosexuelle bavaroise, devant la Cour Constitutionnelle Fédérale. En ce qui concerne l’« autorité compétente », l'officier d'état civil est le plus apte à recevoir cette déclaration, mais un bémol existe, certains Länder préférant réserver aux communes le soin d’organiser elles-même les modalités de l’enregistrement.[17]
§1: Bref exposé des deux lois
La loi allemande (§1 Abs1 LPartG) dispose qu'un Lebenspartnerschaft[18] est conclu dès lors que deux personnes de même sexe expriment, en même temps et en présence l'une de l'autre, leur volonté d'être liées à vie dans un partenariat (« Auf Lebenszeit »).Ces personnes ne doivent pas être mineures (§ 1 Abs 2 LpartG).
L'article 515-5 C.Civ dispose « qu'un pacte civil de solidarité est un contrat conclu par deux personnes physiques majeures, de sexes différents ou de même sexe, pour organiser leur vie commune ».
Ces deux définitions expriment la volonté des législateurs d'établir un cadre juridique pour des couples hors mariage. Toutefois, une différence capitale existe quant aux destinataires des deux lois : alors que le partenariat allemand n'est réservé qu'aux homosexuels, le législateur français a cru bon d'accorder la possibilité de « se pacser » à des couples aussi bien homosexuels qu'hétérosexuels.
Le législateur allemand, en osant réserver cette loi aux seuls couples de même sexe, est allé jusqu'au bout de sa logique, puisqu'à l'origine, la revendication n'émanait que des couples homosexuels ; pourquoi, en effet, faire bénéficier les couples hétérosexuels d’un cadre juridique alors qu’ils le refusent dans le mariage ? Il a su, encore une fois, faire preuve de l'audace catégorique qui le caractérise, en adoptant une position tranchée, et en faisant du Lebenspartnerschaft une quasi-copie du mariage allemand (comme nous l'expliquerons dans les développements qui suivront).
Le législateur français, au contraire, est marqué par un esprit de compromis; il est partagé entre le désir de certaines minorités d'être reconnues juridiquement et l'esprit de modération qui est le sien. Dans la continuité des réformes qui ont modifié le droit de la famille depuis quelques décennies, la loi sur le PACS traduit la « volonté de s'investir entre les deux pôles de la conservation et de la novation »[19].
En outre, les deux lois reposent sur des motivations tout à fait différentes, bien qu'elles poursuivent le même but qui est l'établissement d'un cadre juridique pour le couple hors mariage; cela se traduit par leur intitulé; en effet, la loi allemande se présente avant tout comme une réglementation de lutte contre la discrimination, et assoit ainsi sa légitimité sur la Loi Fondamentale, les Droits Fondamentaux ayant une importance considérable en Allemagne (Art. 3 I GG, selon lequel « tous les êtres humains sont égaux devant la loi », Art. 3 III GG qui stipule « nul ne doit être privilégié en raison de son sexe…de ses opinions… » et Art. 2 selon lequel « chacun a droit au libre épanouissement de sa personnalité »)[20]. Le législateur allemand insiste sur la fonction symbolique de la loi, et institue un partenariat dont les modalités de constitution sont à l'image du sacrement du mariage[21] ; en revanche, le législateur français ne souligne que le côté pratique : il ne mentionne que le but du texte (l'organisation de la vie commune), ainsi que les préoccupations matérielles ou techniques. La loi sur le Lebenspartnerschaft est le symbole de l'égalité retrouvée entre les couples, à l'image de la loi portant réforme du droit de l'enfant, qui est, quant à elle, le symbole de l'égalité retrouvée entre les enfants naturels et légitimes en matière de filiation et d'autorité parentale.[22] Pour les Allemands, la personne et son développement méritent avant tout considération, et les lois réformatrices qui ont ponctué le droit de la famille ces dernières années sont marquées par ces valeurs (loi sur l’égalité civile de l’homme et de la femme du 18 juin 1957, loi sur les enfants naturels du 19 août 1969, entrée en vigueur le 1er juillet 1970, loi portant réforme du droit de la filiation du 16 décembre 1997...)[23].
Une autre question se pose, concernant la nature juridique des entités ainsi créées: sont-elles des contrats ou des institutions à l'image de l'Institution civile qu'est le Mariage? Les approches sont nettement différentes dans les deux pays.
En Allemagne, le législateur ne définit pas la nature du Lebenspartnerschaft, alors que l'article 515-1 C.Civ fait expressément référence à un « contrat conclu entre deux personnes… ». Cependant, les auteurs allemands s'accordent pour parler d'une institution juridique (« Rechtsinstitut »)[24] et les juges de la Cour Constitutionnelle Fédérale d’une « nouvelle institution du droit de la famille »[25] ; les références nombreuses au droit du mariage attestent de cette assimilation. Certains parlent même du « Homo-Ehe », ou « mariage homosexuel »[26] (cependant, ce terme ne fait pas l’unanimité chez les auteurs défenseurs du texte[27]).
En outre, le tribunal compétent pour les questions qui concernent le partenariat (« Lebenspartnerschaftsache ») est le tribunal de la famille ou "Familiengericht", également compétent en ce qui concerne le mariage et le couple (« Ehesachen » et « Familiensachen ») ; l'assimilation entre mariage et Lebenspartnerschaft est quasi totale, on peut presque parler de "mariage bis". Pourquoi ne pas avoir alors étendu le mariage traditionnel aux couples homosexuels? La réponse est simple: les Allemands, comme les Français d'ailleurs, sont très attachés au mariage qui doit rester uniquement l'union d'un homme et d'une femme; faire du partenariat une union proche du mariage est nécessaire conformément aux principes constitutionnels. Faire du Lebenspartnerschaft le mariage est inconcevable.
En France, certains ont accusé le PACS de concurrencer et menacer le mariage, d'être une « Institution-substitution » de celui-ci. Des auteurs ont contesté cela[28]. Le Conseil Constitutionnel, interrogé entre autres à ce propos, a répondu à ceux qui soutenaient que le PACS était un mariage homosexuel, que « la conclusion d'un pacte civil de solidarité ne donne lieu à l'établissement d'aucun acte civil, l'état civil des personnes qui le concluent ne subissant aucune modification…en instaurant un contrat nouveau ayant pour finalité l'organisation de la vie commune des contractants … », mais aussi que « les dispositions générales du code civil relatives aux contrats et aux obligations conventionnelles auront par ailleurs vocation à s'appliquer…en particulier, les articles 1109 et suivants du code civil, relatifs au consentement, sont applicables au pacte civil de solidarité… ».[29] Le Conseil Constitutionnel cantonne donc le PACS à une dimension purement et simplement contractuelle, qu'il renforce en faisant référence au juge des contrats (TGI ou TI) comme juge des litiges découlant du PACS ( à l'exception des questions de filiation).
C'est un contrat synallagmatique, car les parties ont des obligations réciproques (qui seront expliquées ultérieurement) ; c'est un contrat intuitu personae et à exécution successive, à titre onéreux (du fait des prestations que les parties se doivent, des dépenses communes), commutatif, puisque les prestations réciproques des parties sont établies et connues au moment de sa conclusion; il est enfin consensuel, car la loi n'impose aucune formalité ad validitatem.
Or, même si le législateur et le Conseil Constitutionnel ont souhaité faire du PACS un contrat spécifique, des doutes subsistent. L'influence du mariage se ressent à un tel point que certains parlent de « l'essence matrimoniale du PACS » ( interdiction de la bigamie, de l'inceste, ce qui n'existe pas pour le simple concubinage)[30], et M. Malaurie résume parfaitement sa nature ambiguë: « un entre deux, plus stable qu'une union libre, moins contraignant que le mariage: une institutionnalisation de l'union libre et une contractualisation du mariage »[31]. En outre, le PACS est inséré dans le livre 1er du code civil sur les personnes…
Ces lois ont donc pour but l'encadrement juridique d'un couple particulier, le couple hors mariage. Ceci passe exclusivement par l'organisation des relations patrimoniales et personnelles des intéressés, c'est-à-dire la «judiciarisation» des droits et obligations qui existent à l'état de fait ou sous forme d'obligations naturelles entre eux[32] (aussi bien au cours de leur partenariat qu’à la fin de celui-ci, dans un souci de protection du partenaire le plus faible). C'est cette étude des droits et des obligations mises à la charge des partenaires qu'il est important de mener, pour voir comment, à partir d'une même revendication, les législateurs y ont répondu, et pour montrer que ce qui se dit hors mariage peut être tout aussi contraignant que le mariage (en Allemagne) voire même plus (en France, pour quelques aspects du PACS). Il est en outre intéressant de comparer ce que peuvent apporter à des couples hors mariage, d'une part une loi qui est la copie quasi-conforme du mariage (loi allemande), et d'autre part une loi que le législateur a voulu étrangère au mariage ( loi française).
Cependant, de nombreuses incertitudes ponctuent la loi française, ce qui a soulevé le problème de son adéquation à la Constitution. Le problème de la conformité des dispositions concernant le Lebenspartnerschaft à la Loi Fondamentale allemande s'est posé de la même manière.
§2 :
Le problème de
la conformité des lois aux Constitutions
respectives
De nombreux griefs ont motivé la saisine du Conseil Constitutionnel, entre autres: violation du principe d'égalité, atteinte au mariage républicain et au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, atteinte au respect de la vie privée, aux droits des concubins…Dans une longue décision, le Conseil répond point par point aux attaques des opposants au PACS, en concluant sur la conformité de la loi du 15 novembre 1999 à la Constitution française (après avoir tout de même admis de nombreuses réserves d'interprétation). Il laisse des questions en suspend, en reléguant par exemple le PACS au rang de simple contrat, pour ne pas admettre que celui-ci puisse être une institution concurrente du mariage.
En Allemagne, les Etats de Saxe, de Bavière et de Thuringe ont, dès juin 2001, attaqué la loi allemande du 16 février 2001 devant la Cour Constitutionnelle Fédérale (« Normenkontrollklagen »). Ils estiment que cette loi est contraire à l’article 6 de la Loi Fondamentale et demandent que son entrée en vigueur, prévue pour le 1er août 2001, soit repoussée[33]. L’article 6 stipule que le mariage et la famille sont placés sous la protection de l'Etat, et d’après la jurisprudence de la Cour Constitutionnelle Fédérale, seuls les couples mariés, et non « les unions qui leur ressemblent » sont protégés ; si d'autres droits fondamentaux risquent de menacer le mariage ou la famille, ils ne doivent par conséquent pas recevoir application. Le Lebenspartnerschaft est la traduction de droits fondamentaux tels le droit au libre épanouissement de sa personnalité ; certains estiment que ce partenariat menace mariage et famille, puisqu’en étant mis sur un plan d’égalité avec le mariage, il le dépouille de cette protection de l’article 6. Cependant, dans quelle mesure le partenariat allemand menacerait-il le mariage puisqu'il ne concerne pas les couples hétérosexuels? Par ailleurs, les états opposants soutiennent que retarder l’entrée en vigueur de la loi pour permettre un examen plus approfondi serait moins préjudiciable que de l’appliquer pour un temps très court, s’il s’avère qu’elle est abrogée dans le futur, du fait de son inconstitu-tionnalité. Enfin, ils font remarquer que l’adoption par chaque état de ses propres règles procédurales risque de conduire à des disparités.
Le Premier Sénat de la Cour (« Erste Senat ») s’est prononcé le 18 juillet 2001, à cinq voix contre trois, en faveur de l’entrée en vigueur de la loi sur le Lebenspartnerschaft le 1er août 2001, attestant ainsi de la constitutionnalité de celle-ci[34]. La cour allemande précise expressément que l’entrée en vigueur de la loi sur le partenariat enregistré n’aura aucune conséquence préjudiciable à l’encontre du mariage, que le fondement du mariage restera inchangé[35]. Elle démontre que les conséquences juridiques d’un partenariat conclu (droit de succession, refus de témoigner…) ne seraient pas anéanties, quand bien même la loi serait ultérieurement déclarée contraire à la Constitution. Elle ajoute en outre que les divergences entre les lois d’application prises dans les différents Länder ne sont que l’expression de la compétence dont ils bénéficient grâce à la Loi Fondamentale. Enfin, elle rappelle que retarder l’entrée en vigueur de cette loi serait une atteinte considérable à la « liberté de création » ( Gestaltungsfreiheit ) du législateur.
Les relations entre les partenaires ne se limitent pas aux seuls rapports dans le partenariat, les législateurs ayant également prévu des effets à l'égard des tiers. Des droits et des obligations vont donc exister à l'intérieur même du couple, entre les partenaires (chapitre premier), mais aussi à l'égard des tiers au partenariat conclu (chapitre second).
Dans la perspective d'une recherche de solutions concrètes aux interrogations suscitées par les textes de loi nouveaux non encore précisés par la jurisprudence, il est nécessaire de se référer aux modèles connus que sont le mariage et le concubinage, ce qui va permettre quelquefois des raisonnements par analogie.
CHAPITRE I
LES RELAIONS DE COUPLE :
LES DROITS ET OBLIGATIONS DES PARTENAIRES
Q |
u’il
soit un contrat ou qu’il soit une institution quasi identique à celle du
Mariage, le partenariat enregistré est avant tout la consécration d’un lien
entre deux personnes. De ce lien juridiquement établi vont naître non seulement
des obligations pécuniaires (section 2), mais encore des obligations non matérielles (section 1). Ces
multiples obligations constituent le cœur des partenariats, elles matérialisent
et renforcent, dans certaines circonstances, les relations à l’intérieur du
couple.
Section 1: Les rapports non
patrimoniaux entre les partenaires
Tant
en France qu’en Allemagne, les rapports extra patrimoniaux des partenaires se
résument en l’obligation de vie commune (§1), en la présence éventuelle de
devoirs moraux des partenaires (§2) ; le choix d’un nom commun complète le
dispositif allemand (§3).
§1: L'obligation de vie commune,
fondement des partenariats
Bien
que les textes soient équivoques au sujet de l’obligation de vie commune (A),
celle-ci est fondamentale et ses constituants méritent d’être précisés (B).
A. Des textes équivoques
L'art.
515-1 C.Civ stipule que le PACS est un contrat par lequel deux personnes
physiques majeures organisent leur
vie commune. L'organisation de la vie commune constitue donc la cause du
contrat, mais cela implique-t-il la vie commune ? Les partenaires sont-ils obligés
à une communauté de vie, à l’image de l’art. 215 C.Civ ? Une simple
relation stable, notoire et durable suffit-elle pour que soit admis le
partenariat, comme en matière de concubinage? Le texte légal peut être
équivoque à certains égards ; d’une part, le législateur prévoit
l’organisation de la vie commune sans précision supplémentaire, mais d’autre
part, il établit qu’en cas de rupture d’un commun accord du PACS, les
partenaires peuvent remettre une déclaration écrite aux greffes du tribunal
« dans le ressort duquel l’un d’entre eux au moins a sa résidence »
(article 515-7 C.Civ). La vie commune est donc exigée des partenaires.
La
même question se pose en Allemagne : les Lebenspartner[36]
sont-ils tenus de vivre ensemble ? Aucune disposition de la loi du 16
février 2001 ne l’exige expressément, et aucun article de cette loi ne renvoie
à cette obligation légalement prévue pour les conjoints par le paragraphe
1353 BGB[37] (alors même
que d’autres dispositions de ce paragraphe sont reprises en matière de partenariat,
comme la notion de perpétuité du partenariat[38]
et le fait que les conjoints soient responsables l’un de l’autre). Or, le
législateur allemand prend soin de régler la vie séparée des partenaires (Getrenntleben,
à rapprocher de la notion française de séparation de fait)[39] ;
la vie séparée est donc permise, à la différence du droit français, elle est
l’exception, la vie commune reste le principe ; le législateur ne le dit
pas, mais c’est déduit des dispositions légales. Alors qu’en France, la vie
commune est le fondement du PACS puisque les déclarations et l’enregistrement
ne constituent que des formalités d’opposabilité, elle est moins essentielle en
Allemagne où la déclaration de volonté des partenaires devant l’autorité
compétente prime car elle permet la constitution du partenariat. Certains
auteurs doutent du caractère obligatoire de cette vie commune[40].
Toutefois, elle doit être considérée comme telle, sinon le Lebensparterschaft
perdrait sa symbolique et sa raison d’être.
B. Les constituants
de la vie commune
Il
convient de préciser quels sont les constituants de cette vie commune, dans la
mesure où le législateur français ne le spécifie pas. Or, le Conseil
Constitutionnel a rappelé que « …la vie commune suppose, outre la résidence
commune, une vie de couple… ». La résidence commune est donc l'élément de
base du partenariat, auquel les « pacsés» ne peuvent pas se
soustraire : c’est la vie «sous le
même toit». Le Conseil Constitutionnel a bien pris soin d'évoquer la notion de
résidence commune et non pas le domicile commun, rendant vraisemblablement
applicable aux partenaires la jurisprudence concernant les époux (ceux-ci
peuvent avoir un domicile distinct, mais doivent avoir une résidence commune,
selon l’article 108 C.Civ). La résidence commune matérialise la stabilité
et la notoriété de la relation, d'autant plus nécessaire que l'enregistrement
n'est pas une condition de formation du pacte. A défaut de résidence commune,
il n'y a pas de vie de couple[41].
De la
même manière en Allemagne, la vie commune implique un logement commun et le
législateur l’évoque seulement en ce qui concerne son sort en cas de vie
séparée ou de rupture du Lebenspartnerschaft.
Comme la vie commune des partenaires est à l’image de celle des conjoints, le
logement commun (gemeinsame Wohnung) des partenaires a pour modèle celui
des époux ; le législateur les aborde en des termes identiques, que le
couple soit marié ou en partenariat. Il s’agit d’une communauté de résidence[42],
notion identique à celle du droit français.
La
seule résidence commune n'est pas suffisante en France ; le Conseil
Constitutionnel dégage implicitement trois autres conditions, lorsqu'il précise
que le PACS n'implique « pas seulement une communauté d'intérêt et une
simple cohabitation entre deux personnes » et que « la vie commune
suppose…une vie de couple ». La communauté d'intérêts fait référence à des
intérêts patrimoniaux communs comme une communauté de dépenses[43];
la cohabitation est englobée dans la notion de résidence commune, mais suggère
en outre l'obligation de recherche d’une certaine entente entre les
« pacsés » (que l'on pourrait considérer comme une obligation de
moyens et non de résultats) ; enfin, la vie de couple doit être comprise comme
une communauté de lit. Les avis sont partagés à ce sujet[44].
Toutefois, avec la prohibition des PACS entre alliés ou frères et sœurs (art.
515-2 C.Civ), le législateur entend prohiber l'inceste, ce qui suggère bien
l’implication des relations sexuelles. Bien qu’elle ne soit pas expressément
mentionnée dans la loi allemande, l’union charnelle doit être également
considérée comme une obligation, car cette notion est inhérente à l’obligation
de vie commune, par analogie avec le mariage (dans lequel la « communauté
sexuelle » (Geschlechtsgemeinschaft) résulte de la communauté de
vie). Il est facile d’en faire une obligation, il sera plus difficile de
vérifier que le partenariat a bien été « consommé », car cela touche
à la vie privée des personnes.
Ces
conditions sont cumulatives et, en France, toute clause établissant une
résidence séparée serait nulle (nullité relative). La non-exécution par l’un
des partenaires de cette obligation pourrait entraîner l’engagement de sa
responsabilité contractuelle (une exécution forcée de cette obligation de vie commune,
ou obligation de faire, serait impossible en vertu de l’article 1142 C.Civ,
applicable car le PACS est un contrat).
En
Allemagne, une action en établissement ou en rétablissement de la vie commune
pourrait être intentée contre le partenaire qui s’y refuse, sur le modèle de
l’action entre conjoints (sur le fondement du § 1353 BGB et du § 606 ZPO,
l’Art3 §16 Nr.10 LPartG renvoyant à ces dispositions) ; mais, en matière
de mariage, aucune exécution forcée de la décision du tribunal de la famille
n’est possible, l’Etat ne devant pas s’introduire dans cette sphère privée des
individus (§ 888 ZPO). Une incertitude subsiste à propos de l’application de
cet article aux partenaires, dans la mesure où la loi sur le partenariat n’y
fait pas référence.
Une
question demeure : l’obligation de vie commune est–elle renforcée par des
obligations morales entre les partenaires, comme elle les implique pour les
conjoints ?
§2: Les devoirs moraux des
partenaires, des notions divergentes
Alors
que le législateur allemand a légalement établi des obligations morales à
l’égard des Lebenspartner, le législateur français n’en prévoit pas,
laissant le soin aux « pacsés » d’en créer contractuellement s’ils le
souhaitent (A). En outre, les caractéristiques de la rupture attestent, en
France, d’un manque de considération morale (B) ; enfin, la création d’un lien
familial entre partenaires, en Allemagne, renforce le lien qui les unit (C).
A. Un régime facultatif en France, des devoirs légaux en_Allemagne
Le
législateur allemand met à la charge des partenaires une obligation de soin et
d’assistance, à l’image de celles qui existent pour les époux
(Art .1 §2 LPartG)[45] ;
il précise expressément que ces obligations sont mutuelles. Un auteur a suggéré
à ce propos qu’elles sont identiques à l’obligation d’assistance due par les
parents à leurs enfants, prévue par le §1618a BGB[46].
Dans
le même paragraphe, il poursuit en expliquant que les partenaires sont
responsables l’un de l’autre, formant ainsi une « communauté de
responsabilité » (Verantwortungsgemeinschaft), non pas au sens
pénal du terme ou en matière de responsabilité civile, mais dans le sens d’une
prise en charge mutuelle. La jurisprudence a déjà pu constater le caractère
obligatoire pour les époux d’une telle prescription[47],
ce qui est donc valable pour les partenaires. Ce devoir de responsabilité
commune est, en droit de la famille, une clause générale, à l’image du §242 BGB
relatif au « Treu und Glauben » en droit des contrats. La communauté
de responsabilité est liée à l’obligation pécuniaire qui unit les partenaires.
Les
prescriptions de l’Art.1 §2 LPartG sont des considérations qui fondent tout
lien de couple, et qui impliquent la considération de l’autre, son soutien,
qu’il soit dans une situation de détresse ou non. Elles symbolisent le devoir
moral de conseil et de respect réciproque liant les partenaires. Elles sont la
base du partenariat allemand, comme elles sont celles du couple et sont
désignées sous le terme de Grundpflichten.
Par
ailleurs, les Lebenspartner sont obligés, par l’Art.1 §2 LPartG, à une organisation de vie commune (qui doit
être distinguée de l’obligation de vie commune, qu’elle n’implique pas[48]).
Elle est une obligation de
codécision, de partage et de compromis supposant l’adéquation de leurs modes de
vie[49].
Le
législateur allemand n’a donc pas hésité à faire de l’obligation morale de soin
et d’assistance le premier devoir des partenaires. Une précision doit être
immédiatement apportée à ce sujet : un partenaire ne pourrait se voir
reprocher d’avoir agi avec un manque de considération à l’égard de l’autre
ou des affaires personnelles de celui-ci, dès lors qu’il a fait preuve à cet
égard d’autant de diligence qu’il en aurait fait preuve pour ses propres
affaires (Art.1 §4 BGB). Enfin, ces dispositions sont obligatoires, et si, lors
de la déclaration constitutive du Lebenspartnerschaft, les partenaires
s’y refusent, le partenariat est privé d’efficacité (Unwirksamkeit);
il n’est pas valable (Art.1 §1 Abs.2 Nr.4 LPartG).
En
revanche, en lisant à la lettre le seul article du code civil qui aborde la
question des obligations inter-parties[50],
il ressort que seules des obligations matérielles sont à leur charge,
n’impliquant aucun devoir moral.
Doit-on
pour autant considérer qu’aucune obligation morale, à l’image de la
« morale conjugale légale »[51], n’est
à leur charge ? Il est vrai, en effet, que le législateur n’a pas repris à leur
intention la formule de l’art. 213 C.Civ qu’il consacre aux époux (« les
époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la
famille »). Ne considérant pas le couple « pacsé » comme une
famille, il n’a pas jugé utile de reproduire cette obligation ; le choix
des mots par le législateur, et surtout le « non-choix » de certains mots
est lourd de sens : c’est encore la preuve que le législateur n’a pas
voulu une correspondance parfaite entre partenaires et époux, du point de vue
des relations personnelles du couple. Toutefois, l’obligation morale
n’existe-t-elle pas dans les faits ? Toute personne n’a-t-elle pas
l’obligation d’assurer la protection morale de l’entité constituée par
elle-même, son partenaire éventuel et les enfants qui vivent avec eux ? Le
contraire ne peut être affirmé, surtout si des enfants sont à la charge des
partenaires. Pourtant, non seulement le législateur l’ignore, mais il ne
reprend pas non plus les obligations qui fondent tout devoir moral (la
fidélité et l’assistance de l’art.214C.Civ), le dotant ainsi d’un régime
facultatif. Les parties pourraient–elle alors organiser conventionnellement une
obligation de fidélité ? La majorité de la doctrine l’admet ;
néanmoins, un auteur exprime une opinion contraire en estimant que la liberté
sexuelle ne peut avoir de limite que par l’effet de la loi, et non pas contractuellement[52].
Cependant,
bien que les partenaires ne soient pas légalement tenus à des obligations
morales l’un envers l’autre, la jurisprudence a toujours admis une obligation
de « loyauté » entre concubins. Il reste à espérer que les tribunaux
appliqueront cette jurisprudence aux « pacsés » qui n’auraient rien
prévu contractuellement. De même, serait-il possible de considérer que l’art.
1134 al.3 C.Civ (qui prévoit l’exécution de bonne foi des contrats) imposerait
aux partenaires non seulement une
obligation de fidélité[53],
mais aussi de se comporter avec respect en ne rompant pas abusivement le
contrat, l’abus s’appréciant eu égard aux circonstances de vie des partenaires.
Encore une fois, la jurisprudence se prononcera, en vertu de ce qu’elle voudra
favoriser : l’aspect contractuel ou la dimension sociale du PACS.
Le
texte allemand ne crée pas non plus expressément à la charge des partenaires
une obligation de fidélité (Traue Pflicht). Toutefois, elle pourra être
déduite de dispositions du mariage auxquelles il est fait référence, notamment
au § 1353 BGB, duquel la jurisprudence la déduit pour les époux. Les auteurs de
la loi[54]
parlent à ce propos de l’obligation « d’exclusivité », comme c’est le
cas pour les époux (« Exklusivität wie in der Ehe »).
B. Une répudiation libre en France, une rupture
encadrée en_Allemagne
Les
modalités de rupture du PACS attestent également de cette absence d’engagement
moral entre les partenaires ; le droit allemand est plus protecteur.
1.
Les
modes de rupture en France : absence de considération de la personne de
l’autre.
En
effet, l’art. 515-7 al.2 C.Civ stipule que l’un des partenaires peut mettre fin
au pacte civil de solidarité par décision unilatérale. La porte est donc
ouverte à une rupture non discutée, qui, bien qu’expresse, n’exige ni le
consentement de l’autre (sa seule
information suffit), ni même qu’une quelconque justification ne soit
requise de la part de celui qui a pris l’initiative de la rupture. En d’autres
termes, la rupture est libre et discrétionnaire, celui qui la provoque n’est
pas dans l’obligation de la motiver. Certains parlent de répudiation
unilatérale[55], d’autant
plus inadmissible qu’elle est considérée comme contraire à l’ordre public en
matière de mariage.
Le
caractère purement contractuel du lien créé entre les partenaires est nettement
établi et n’inclut pas, aux yeux du législateur, l’affectif et la symbolique
d’une relation de couple. Le Conseil Constitutionnel, interrogé au sujet de
l’inconstitutionnalité de cette répudiation unilatérale, a éludé la question en
estimant que le PACS est étranger au mariage, et que de ce fait, la rupture
unilatérale ne peut être qualifiée de répudiation. Comment justifier cette
possibilité offerte par le législateur français à l’un des partenaires de
quitter l’autre sans motif et de rompre unilatéralement le lien juridique
qu’ils ont créé à deux ? Il paraît en effet choquant qu’un contractant
puisse détruire de sa seule initiative ce que la volonté collective a établi,
sans intervention judiciaire pour valider la séparation. Le législateur a
encore voulu marquer la différence de nature entre mariage et PACS : le
premier est une institution et le second n’est qu’un contrat à durée
indéterminée, librement résiliable d’après le droit commun des contrats, mais
aux seules conditions que la rupture ne soit pas abusive, et qu’un préavis soit
respecté[56].
En ce
qui concerne la première condition, la réparation du préjudice est toujours
possible ; notons que les circonstances de la rupture, même si elles sont
abusives, ne sont pas un motif de
maintien du partenariat. En ce qui concerne la seconde exigence, le législateur
a-t-il prévu un préavis à respecter pour que la rupture soit effective ?
L’art. 515-7 C.Civ prévoit que si l’un des partenaires veut mettre fin au pacte
civil de solidarité, il doit signifier à l’autre sa décision, le pacte prenant
fin trois mois après cette signification. Il s’agit du préavis exigé, mais ces
règles sont purement contractuelles et ne prennent pas en compte la dimension
morale, affective et personnelle du partenariat, dans la mesure où la
possibilité est bien laissée à l’un d’abandonner l’autre sans explication.
Le
Conseil Constitutionnel, qui souhaite considérer les partenaires comme de
simples contractants, a refusé le qualificatif de répudiation
unilatérale (qu’il réserve au seul mariage) ; si du point de vue du
langage, ce n’est pas une répudiation, n’en est-elle pas toutefois
une dans les faits ? Le législateur français en voulant insister sur la
différence de nature entre rupture du PACS et divorce, a facilité les modalités
de séparation des partenaires.
La
rupture unilatérale peut aussi découler du mariage de l’un des partenaires avec
un tiers. Celui qui se marie doit, d’après l’art. 515-7al.3 C.Civ,
informer l’autre par voie de signification. Dans ce cas particulier, le
législateur prend soin de préciser que le pacte prend fin au jour du mariage
(art. 515-7 al.7 C.Civ), impliquant ainsi que le PACS n’est pas rompu trois
mois après la signification en question. N’y aurait-il alors aucun préavis à respecter dans ce cas ?
La loi est ambiguë à ce sujet, et bien que le Conseil Constitutionnel ait donné son feu vert à ce type de rupture
en vertu du principe de la liberté matrimoniale, il n’en reste pas moins que
cette hypothèse donne lieu à des séparations brutales, pires encore que la
répudiation avec préavis. Pourrait-on considérer la durée de publication des
bans (dix jours) comme le préavis nécessaire ? Il semblerait artificiel
d’admettre cela, mais la jurisprudence aura l’occasion de le préciser.
Enfin,
la rupture peut être demandée par un des partenaires, dès lors que l’autre est
placé sous tutelle (art. 506-1 al.2 et art.515-7 al.2 C.Civ). C’est pousser
loin l’absence de devoir moral, car l’incapable est abandonné à un moment où il
a besoin de soutien.
Finalement,
M. Malaurie souligne clairement qu’il est « choquant » de parler de
l’engagement des partenaires du PACS comme d’« un engagement que l’on
puisse librement et unilatéralement rompre, surtout lorsqu’il s’agit d’un
engagement de couple ».
2.
La
rupture encadrée en Allemagne, preuve de l’engagement moral
La fin
du partenariat obéit à d’autres modalités en Allemagne[57].
En premier lieu, l’Art.1 §1 LPartG stipule que le Lebenspartnerschaft
est conclu pour la vie. Bien que cela n’atteste pas de l’indissolubilité du
partenariat, dans la mesure où la rupture est envisagée, le législateur a voulu
donner une force certaine à l’institution, et a rappelé par ces propos que la
dissolution du partenariat mérite réflexion. Comme en France, la rupture est
sur l’initiative de l’un ou des deux partenaires ; en revanche son
prononcé nécessite l’intervention d’un juge (Art.1 §15 LPartG). Elle est donc
encadrée, alors qu’elle ne l’est pas en France. Le législateur explique dans
quelles conditions le tribunal est autorisé à prononcer la rupture, et dans
tous les cas, la personne qui prend l’initiative de la dissolution doit en
exprimer la volonté, en expliquant au juge qu’elle désire mettre un terme au
partenariat (Art.1 §15 LPartG).
La séparation ne peut être prononcée par le
juge qu’après l’écoulement de délais longs (Art.1 §15 LPartG), qui laissent aux
partenaires la possibilité de réfléchir au bien-fondé de la rupture, à leur
volonté réelle de se séparer, pour éventuellement revenir sur leur décision
(Art.1 §15 Abs.3 LPartG fait mention de la révocabilité de la décision de
rupture). Les délais en question sont différents suivant l’auteur de la
rupture ; lorsque les deux partenaires expliquent qu’ils veulent rompre,
le tribunal prononcera la rupture douze mois après cette déclaration de
volonté. Quand l’un seulement des partenaires prend cette initiative, le
tribunal prononcera la rupture trois ans après que le demandeur ait notifié son
intention de rompre à l’autre. Même unilatérale, la rupture est loin d’être une
répudiation. Une dernière hypothèse est soulevée par le législateur
allemand : si la continuation du partenariat s’avère d’une dureté
insurmontable pour l’un des partenaires, en raison de la personnalité de
l’autre, le tribunal peut prononcer la rupture, quand bien même les délais
précités ne seraient pas arrivés à leur terme. C’est une situation d’urgence
qui exige que la continuation du partenariat soit particulièrement
insupportable pour le demandeur.
En
matière de divorce, la loi allemande impose une séparation de fait d’une
certaine durée (un an ou trois ans) avant que ne puisse être prononcé le
divorce. Les délais visés par le §15 LPartG sont-ils aussi des délais de
séparation de fait ? La loi du 16 février 2001 ne l’exige pas pour que
soit prononcée la rupture, et un auteur parle à ce propos de « résiliation
facilitée » du Lebenspartnerschaft[58].
Elle est certes une rupture facilitée pour le juriste allemand, elle n’en
reste pas moins une rupture encadrée pour le juriste français. Néanmoins, cette
simplification n’est que formelle, et dans les faits, elle risque d’aboutir à
des litiges, dans la mesure où le délai requis court à partir de la déclaration
de volonté ou sa notification au partenaire défendeur (Trennungserklärung),
et non pas à partir de la séparation factuelle des partenaires. Bien qu’ils
aient vécu séparés pendant ce délai de réflexion, le tribunal sera dans
l’impossibilité de prononcer la dissolution du Lebenspartnerschaft dès
lors que la déclaration de volonté requise n’a pas été effectuée.
Une
précision doit toutefois être apportée concernant les motifs de la rupture. Une
déclaration de volonté doit certes être produite, mais les partenaires n’ont
aucune obligation de motiver cette volonté de rompre : le tribunal n’a pas
à apprécier les raisons de la rupture (sauf en ce qui concerne la dureté
déraisonnable éventuellement invoquée), et en particulier, la rupture n’est pas
conditionnée par l’échec du partenariat, comme elle l’est en matière de
divorce ; elle n’exige aucun trouble profond et irréparable de la relation
des partenaires. La rupture n’en devient pas brusque et irréfléchie pour
autant.
La
dimension morale est grandement présente dans les rapports de couple des Lebenspartner.
Toutefois, un oubli du législateur risque de briser cette protection qu’il
s’est efforcé de construire, et finalement, dans une hypothèse ponctuelle, la
répudiation française n’est pas loin ; il s’agit du cas où l’un des
partenaires se marie avec un tiers avant l’échéance des délais prévus, et particulièrement
avant la fin du délai de trois ans (lorsque la volonté de rompre est
unilatérale). Un tel mariage est tout à fait possible, puisque l’existence d’un
partenariat n’a pas été érigée en empêchement à mariage. Peut-on admettre
qu’une personne soit liée par deux unions : le mariage d’une part et le
partenariat enregistré d’autre part ? Aucune disposition ne permettrait à
l’officier d’état civil de refuser la conclusion du mariage dans un tel cas.
Dans le silence de la loi, le partenariat doit être considéré comme ipso facto
dissout, avec toutes les conséquences qu’une rupture implique[59].
De la
même manière, une atténuation est à relever quant à l’affirmation selon
laquelle les partenaires ne se doivent, en France, aucune obligation morale: le
Conseil Constitutionnel parle de « cohabitation » des partenaires, ce
qui peut être entendu comme la recherche d’une entente entre eux, le devoir de
coopérer pour éviter les conflits, « mettre de la bonne volonté »
dans le partenariat.
Une
seconde limite doit être soulevée : les obligations morales réciproques ne
sont certes pas légalement prévues,
mais elles ne sont pas pour autant interdites, et les parties disposent
alors de la possibilité d’en établir, et d’équilibrer contractuellement des
rapports qui ne le seraient pas. Par exemple, pourrait être insérée une clause
prévoyant l’obligation d’informer le partenaire de toute acquisition au cours
du contrat de vie commune, une clause obligeant à un soutien moral, une clause
d’assistance mutuelle spécifique (en cas d’accident par exemple), une clause de
contribution à l’éducation des enfants…
De
façon similaire, l’incorporation de telles dispositions (règles de droit à
aliments ou de droit à entretien) dans les partenariats allemands risque d’entraîner la non-validité du
partenariat sur le fondement de l’Art.1 § 1 LPartG, qui exige que la
déclaration de volonté constitutive du partenariat soit faite sans condition.
Il serait judicieux de conseiller aux partenaires qui veulent insérer une telle
clause dans le partenariat de conclure un contrat strictement séparé du Lebenspatnerschaft.
La
liberté est donc plus grande en France pour organiser ses relations à
l’intérieur du partenariat ; le législateur allemand est certes plus
précis, plus catégorique, plus directif que le législateur français, mais les
partenaires allemands seront tous soumis au même cadre restrictif, sans
possibilité d’aménagement de leur relation ; cette diversité fait la
richesse du PACS français, quand bien même elle serait source de difficultés.
Les parties devront être conseillées à ce sujet dans la rédaction d’un
partenariat, ce qui ne sera pas nécessaire sur ce point en Allemagne.
C. L’appartenance familiale en
Allemagne
L’Art.1 §11
Abs.1 LpartG crée un lien familial entre les deux partenaires : chacun
d’eux est considéré comme « membre de la famille de l’autre » (Familienangehörige),
dès lors qu’ils n’en conviennent pas autrement. Outre le caractère moral que
cela souligne, les conséquences sont importantes dans plusieurs domaines juridiques.
D’un
point de vue civil tout d’abord, toute disposition du BGB visant les membres de
la famille d’un individu ou ses proches
s’appliquera par extension au partenaire de cet individu, puisqu’il est membre
de sa famille. Par exemple, le §530 BGB prévoit la révocation possible d’un don
dès lors que le gratifié aurait commis une faute qualifiée d’ingratitude à
l’égard du donateur ou de ses proches. La révocation sera alors possible si la
faute est commise à l’encontre du partenaire.
Il est
intéressant de noter un paradoxe au sujet de l’appartenance familiale :
les Lebenspartner sont membres de la même famille, mais ils ne créent
pas une famille ! Cela pose encore une fois la question de la définition
de la famille, qui, en raison des évolutions sociologiques, et de l’ouverture
d’un statut aux couples homosexuels, mériterait peut être d’être reconsidérée
par la Cour Constitutionnelle Fédérale[60].
Ce
lien familial se traduit également par le droit, offert à chaque partenaire, de
refuser de témoigner à l’encontre de l’autre (Zeugnisverweigerungsrecht )
dans les procédures civiles ou judiciaires dans lesquelles celui-ci serait
impliqué, afin de tenir compte d’un éventuel cas de conscience ; le droit
de refuser de prêter serment dans de telles circonstances existe aussi (Art.3
§§ 16 Nr.9 et 18 Nr.2 LPartG modifiant respectivement le §383 du Zivilprocessordnung
ou code de procédure civile et le Strafprocessordnung ou code de
procédure pénale)[61].
En
matière procédurale, le partenaire détient, du fait de son statut, un droit de
participation dans les procédures concernant l’autre. Il dispose, par exemple,
de la possibilité d’être entendu dans les procédures qui concernent
l’attribution d’un droit de soin sur l’enfant, lorsqu’il est le partenaire du
demandeur (Art.3 §19 Nr.9 LPartG). Il peut également être auditionné dans toute
procédure de placement ou d’internement de l’autre ( Art.3 §19 Nr.19
LPartG), et enfin, il peut jouer un rôle dans les procès concernant
l’établissement de la paternité, dès lors que le prétendu père est décédé
(Art.3 §18 Nr.3 LPartG).
En
outre, le législateur veut préserver une communauté émotionnelle et intime
entre les partenaires. Pour cela il institue au profit de chaque partenaire un
droit de participation à des décisions concernant les affaires personnelles de
l’autre. Il met le partenaire au rang des plus proches parents de l’autre,
comme le conjoint, et lui reconnaît de ce fait le droit de prendre des
décisions touchant à sa santé ou ses traitements médicaux (Art. §7 Nr.1 et
2 LPartG, qui modifie la loi sur la transplantation). Il lui accorde en outre,
en tant que proche, un droit d’information (Auskunftrecht) en vertu
duquel, par exemple, il a l’obligation d’être informé de l’état de santé de
l’autre ou de sa situation patrimoniale.
Les
prémices d’une éventuelle évolution font leur apparition en France au sujet de
l’appartenance familiale. Bien que le texte légal français ne crée aucun lien
familial entre les parties au pacte, le Conseil Constitutionnel a laissé
sous-entendre que les personnes concluant un tel pacte sont parentes[62],
ce qui donne un poids moral au lien qui les unit.
La
dimension morale de la relation est renforcée par le choix d’un nom commun.
§3: Le nom commun des partenaires:
légal en Allemagne, ignoré en France
En
Allemagne, les partenaires peuvent porter un nom commun , le Lebenspartnerschaftsname
ou « nom du partenariat » (« Die Lebenspartner können einen
gemeinsamen Namen bestimmen », Art.1 §3 Abs1 LPartG ). Ce n’est pas
une obligation pour les partenaires d’adopter ce nom commun, dans la mesure où
le législateur utilise le terme « sie können », qui n’implique
aucun devoir pour eux de le faire ; la possibilité leur en est simplement
offerte[63].
Le rapprochement avec le mariage est évident, et cette unité de nom traduit
l’unité du foyer, c’est le ciment du couple que recherche le législateur
allemand pour les partenaires, à l’image des couples mariés.
En
France, les partenaires ne peuvent pas adopter de nom commun, la possibilité
pour la femme d’utiliser le nom de son mari en tant que nom d’usage n’étant
réservée qu’aux époux, car découlant du lien matrimonial. Cependant, souvent
dans les faits, les concubines portent le nom de leur concubin, donnant ainsi
l’apparence du mariage. Toutefois, c’est un usage illicite du nom du concubin,
puisqu’il n’existe aucune règle juridique prévoyant cette possibilité d’usage.
Ce n’est pas une autorisation légale, mais une simple tolérance de la
jurisprudence, qui prend soin de rappeler que « l’usage non autorisé du
patronyme, par la concubine doit être interdit »[64] ;
a contrario, si le concubin ne s’y oppose pas, l’usage en sera admis par la
jurisprudence. Il faut toutefois remarquer qu’en droit français, le seul usage
du nom de l’autre est toléré ; en revanche, en Allemagne, c’est plus qu’un
usage par l’un du nom de l’autre, puisqu’en devenant nom commun, le nom de l’un
devient aussi la propriété de l’autre, un élément de sa personnalité sur lequel
il a des droits.
Les
partenaires qui choisissent un nom commun en déclarent la volonté au moment de
la constitution du partenariat (Art.1 §3 Abs.1 LPartG), et ceci devant
« l’autorité compétente » (« zustandige Behörde »)
désignée par la loi d’application adoptée par chaque Land. A défaut de
déclaration de volonté devant l’autorité compétente, le choix d’un nom commun
serait inefficace (Unwirksam). Les partenaires, s’ils décident d’opter
pour un tel nom commun, peuvent le déterminer après la constitution du
partenariat ; la validité de ce choix ultérieur sera soumise à l’authentification publique de la
déclaration.
Les
partenaires ont certes la liberté de déterminer le « nom du
partenariat » (« Lebenspartnerschatfsname »), mais cette
possibilité est limitée dans la mesure où ils ne peuvent choisir que le nom de naissance d’un des partenaires
comme nom commun[65]. Une option
supplémentaire est néanmoins mise à la disposition du partenaire dont le nom
n’a pas été choisi comme nom commun (Art.1 §3 Abs2 LPartG): il pourra
joindre à ce Lebenspartnerschaftsname son propre nom en tant que nom
d’accompagnement (« Begleitname », qui est soit son nom de
naissance, soit le nom qu’il portait au moment de la conclusion du
partenariat). Cette option existe pour les époux, le Lebenspartnerschaftsname
est mis sur un plan d’égalité avec le nom commun des époux, symbole de l’unité
conjugale et même familiale.
Les
partenaires ont également la possibilité de conserver, même après la rupture du
partenariat, le nom commun. C’est le principe. Le fait de reprendre son nom de
naissance ou le nom porté au moment de la conclusion du partenariat (ou d’opter
pour le seul nom commun) est l’exception ; les raisons d’un tel choix
doivent être expliquées.
C’est
bien l’application du principe de propriété du nom ; il devient véritablement
un droit de la personnalité. En France, l’inverse se produit dans la mesure où
après un divorce, chacun reprend l’usage de son propre nom (art.264 C.Civ). La
possibilité de continuer à utiliser le nom du mari est ouverte à la femme, mais
à certaines conditions précises prévues par l’art.264C.Civ (divorce demandé par
le mari, ou si, quel que soit le divorce, il en va de son intérêt ou de celui
des enfants).
Ce
choix d’un nom commun en Allemagne n’est pas une condition de formation du
partenariat. Enfin, la détermination d’un nom commun par les partenaires n’aura
aucune influence sur le nom des enfants de chacun d’eux. En principe en effet,
le §1617c BGB permet le changement de nom d’un enfant lorsque le nom de famille
de l’auteur, dont le nom de l’enfant est dérivé, est modifié. Or, l’Art.2 Nr.10
LPartG crée expressément une dérogation à cette exception : l’enfant
n’acquiert pas le nouveau nom de son auteur, lorsque ce nom est celui d’un
nouveau mariage ou d’un nouveau partenariat.
Les
engagements juridiques moraux qui lient les partenaires sont légaux en
Allemagne, contractuels ou inexistants en France puisque faisant partie d’un
régime facultatif ; en revanche, les obligations patrimoniales qui sont à
leur charge entrent dans un régime obligatoire (tout au moins au cours du
partenariat), auquel les parties ne peuvent se soustraire.
Section 2: Les rapports
patrimoniaux entre les partenaires
Les
relations pécuniaires des parties, bien que contrepartie de leur obligation de
vie commune, ne se limitent pas aux
rapports au cours de cette vie commune (§1), dans la mesure où la fin du
partenariat implique des obligations pécuniaires particulières (§2).
§1: Les
rapports au cours du partenariat
Etablissant
un statut juridique pour les couples, les législateurs ont prévu un statut
patrimonial des relations entre les partenaires. En effet, comment les
partenaires vont-ils gérer leurs relations patrimoniales ? Quel va être le
statut des biens acquis au cours du partenariat, et celui des biens appartenant aux parties avant sa
conclusion ? Ces questions sont
inévitables, puisque toute vie commune engendre dépenses, achats,
enchevêtrement des patrimoines, voire même assistance financière de l’un par
l’autre quand le besoin s’en fait sentir. Les lois instaurent donc, en
contrepartie des avantages successoraux ou fiscaux dont bénéficient les
partenaires, des obligations patrimoniales (A) ; elles envisagent le
régime de gestion applicable à leurs biens (B), dispositions complétées en
Allemagne seulement par l’instauration de rapports patrimoniaux au cours de la
séparation de fait des partenaires (C).
A.
Les obligations pécuniaires des partenaires : une
notion
plus large en Allemagne qu’en France
Exposons clairement
chaque définition avant d’en préciser le champ d’application.
1. Définitions
a – La définition
française de l’obligation pécuniaire entre partenaires
L’article
515-4 du code civil stipule que les partenaires s’apportent une aide mutuelle
et matérielle. Cela rappelle l’obligation des époux aux charges du ménage (art.
214 C.Civ ). Le principe d’un engagement réciproque entre les partenaires est
ainsi établi par la loi. Cependant, la législation ne précise pas ce que
recouvre l’aide mutuelle et matérielle. Or, le législateur a prévu, dans le
même article, que les modalités de cette aide seront fixées par le pacte. Il
revient en conséquence aux parties de définir comment s’établit cette aide
mutuelle et matérielle, d’inclure librement ce qu’elles veulent sous ce
concept, et d’organiser leurs rapports patrimoniaux comme elles le désirent[66].
Néanmoins, deux limites
restreignent cette liberté : d’une part, les parties ne peuvent exclure
totalement de s’apporter une aide mutuelle et matérielle, puisqu’il s’agit du
régime obligatoire du PACS. Le Conseil Constitutionnel a d’ailleurs expliqué
que «… serait nulle toute clause méconnaissant le caractère obligatoire de
ladite aide… ». C’est une obligation légale incontournable, comme le
paiement du prix dans tout contrat à titre onéreux. Remarquons que c’est le
Conseil Constitutionnel qui en forge le caractère obligatoire, et qui précise
que la nullité est encourue par toute clause qui méconnaîtrait lesdites
obligations[67]. D’autre
part, les parties en établissant des
obligations réciproques, ne doivent pas mettre en place de manière non
justifiée des rapports déséquilibrés, car ceci reviendrait à un abus de
droit : abus du droit de recevoir une aide de l’autre. En effet, puisque
les parties disposent de liberté dans la rédaction de leur contrat, les excès
sont possibles, notamment de la part de la partie économiquement forte ;
il faut éviter que celle-ci impose des obligations trop contraignantes à la
partie faible. Par conséquent, non seulement chacun des partenaires y prend
part, mais surtout, les deux doivent y contribuer en vertu de clauses non
léonines[68]. Il est
évident que la situation personnelle de chacun est appréciée pour définir la
qualité de léonine d’une clause de participation et de ce fait, la mutualité
des apports sous-entend également que chacun le fait en fonction de ses propres
facultés. Toute clause d’équité est justifiée en matière de relations
patrimoniales.
Il est utile de conseiller aux parties de
prévoir dans le contrat initial la part de chacun aux charges relatives à la
vie commune. Si les parties se réfèrent aux seules dispositions de la loi, sans
établir de façon plus précise ce que sera l’aide mutuelle et matérielle, leur
accord restera vague, à l’image de la loi qui est elle-même floue sur ce point,
et cela peut s’avérer source de litige en cas de rupture.
Que recouvre cette notion
d’aide ? Le texte ne vise qu’une aide « matérielle » ; à
première vue, ceci exclut tout ce qui n’est pas matériel, c’est-à-dire l’aide
non pécuniaire, comme l’assistance morale ou psychologique, devoir des époux
qui se doivent assistance. On peut se demander à ce propos si le législateur
n’avait pas voulu clairement distinguer l’aide mutuelle de l’aide
matérielle ; l’aide matérielle serait l’aide patrimoniale, et l’aide
mutuelle inclurait un devoir moral des partenaires l’un envers l’autre. Elles
ne peuvent toutefois pas être deux obligations distinctes. Il n’existe qu’une
seule et unique obligation, avec deux conditions cumulatives : qu’elle
soit mutuelle d’une part et matérielle d’autre part. Le contrat devient ainsi
synallagmatique, avec des engagements à la charge de chacune des parties.
L’aide mutuelle et
matérielle représente donc ce que chacun
des partenaires va apporter au ménage, au « pot commun », ceci
aussi bien au début du partenariat qu’au cours de la vie commune. Il peut
s’agir d’un apport en argent, en travail, en biens. Tout est admis dès lors que
les rapports ne sont pas déséquilibrés. Il n’est pas exclu que les parties
prévoient la prise en charge commune de dépenses qui seraient purement
personnelles à l’un des partenaires. Les salaires constituent souvent
l’essentiel de l’apport, avec mise en commun de cet argent pour couvrir les
dépenses ; si l’un n’exerce aucune activité professionnelle, sa
participation à l’activité professionnelle de l’autre ou sa contribution active
à l’entretien du ménage, de la maison, des enfants (s’il y en a) est un apport.
La répartition de la contribution de chacun aux charges du ménage pourrait être
aussi prévue.
En utilisant la notion
d’aide, est-ce que le législateur ne sous-entend pas que l’obligation de chaque
partie n’existe que si l’autre est dans le besoin ?
La réponse à cette
question est négative. L’obligation
d’aide entraînera deux conséquences : la participation pécuniaire de
chacun à la vie commune, ce qui s’apparente à l’obligation de chaque époux aux
charges du ménage prévue par l’art. 214 C.Civ, et ceci n’exige pas que l’autre
partenaire soit dans une situation de besoin. Le deuxième aspect de l’aide est
l’assistance matérielle de celui qui serait dans le besoin, ce qui est le
parallèle du devoir de secours entre les époux.
Il est un principe
acquis : les contractants sont tenus à cette aide ; si rien n’était prévu
dans le contrat, les parties y seraient quand même tenues, et devraient, en cas
de litige, s’accorder sur la façon d’exercer cette obligation ou saisir le
tribunal d’instance pour définir les modalités d’exécution. En cas de litige,
si l’une des parties refuse d’exécuter
ses obligations ou désire les exécuter à d’autres conditions, une condamnation
judiciaire est possible. Le juge supplée au silence en fonction de la situation
respective des parties.
Les dispositions sur la
participation pécuniaire obligatoire de chacun des partenaires vont plus loin
que le simple concubinage, dans lequel les concubins ne sont pas tenus de
contribuer aux charges de leur vie commune, puisqu’il n’existe aucune
obligation légale de partage des dépenses, d’entretien commun, d’aide mutuelle.
Par ailleurs, ce n’est pas aussi précis que ce qui est prévu pour le mariage,
car en dépit du cadre légal, ce sont quand même les partenaires qui définissent
les modalités.
b- La définition
allemande d’obligation pécuniaire entre partenaires
En Allemagne, les
partenaires sont tenus de la même façon à une obligation mutuelle
« d’entretien convenable », ou Lebenspartnerschaftsunterhalt (Art.1 §5 LPartG). Le législateur n’en donne
pas de définition, mais renvoie aux §§ 1360a et 1360b BGB, qui prévoient
l’étendue de cette obligation alimentaire lorsqu’elle concerne les époux. Ces
dispositions, même si elles visent les conjoints, sont applicables aux
partenaires, puisque le législateur s’y réfère expressément. Paradoxalement, le
législateur allemand ne fait pas référence à la définition de cette obligation
alimentaire établie dans le §1360 BGB ;
néanmoins, il convient de la reprendre car la définition qu’elle édicte
est intimement liée aux paragraphes 1360a et 1360b, qui sont applicables. En
vertu de cet article, les partenaires sont obligés, de façon réciproque, à
subvenir de façon appropriée aux besoins de la famille, en mettant à
contribution leur travail ou leur patrimoine. Lorsque l’un n’exerce pas
d’activité rémunérée, il apporte sa contribution en gérant le ménage ou en se
chargeant de l’éducation des enfants (le législateur n’a pas non plus repris,
pour les partenaires, les règles du §1356 BGB, selon lesquelles les époux
agencent la conduite du ménage d’un commun accord; ces dispositions doivent
néanmoins être appliquées aux partenaires[69]).
Il faut d’une part
retirer de cette définition la notion de réciprocité de l’obligation
alimentaire, qui comme en France, conduit à ce qu’ils y contribuent de façon
non déséquilibrée, en fonction de leurs propres facultés, c’est-à-dire de façon
proportionnelle à leurs propres revenus.
Cet entretien raisonnable
de la famille englobe les frais du ménage, les exigences personnelles des époux
et le minimum vital des enfants communs (notons qu’en appliquant cette
définition aux partenaires, la notion « d’enfant commun entretenu »
est élargie à la notion d’enfant vivant au sein du ménage, même s’il n’est pas
commun aux partenaires). Mais surtout, cette obligation alimentaire recouvre ce
qui est raisonnablement nécessaire. Ce qu’ils doivent apporter «au pot commun»
se mesure non seulement en fonction de leur capacité contributive propre, mais
aussi en fonction de ce qui peut être attendu d’eux d’après les besoins
raisonnables de l’autre. D’ailleurs, le §1360b BGB ajoute en ce sens que si l’un
des partenaires verse, pour l’entretien de la famille, plus d’argent qu’il ne
le devrait, il est présumé qu’il n’en demandera pas remboursement. La
convenabilité de la participation et l’adéquation avec les besoins sont les
seuls critères d’appréciation.
Cette obligation
d’entretien assure la sécurité du partenariat, et elle est la conséquence
directe des liens étroits créés par les §1 et §2 Art.1 LPartG.
Même si les notions sont
identiques, le champ d’application de l’obligation pécuniaire des partenaires
est plus étendu en Allemagne, dans la mesure où, en se référant aux §1360 a et
b BGB, elle inclut l’entretien de la famille, alors qu’en France, l’obligation
d’aide mutuelle et matérielle ne concerne que les partenaires ; l’obligation
d’un « pacsé » français a pour destinataire pur et simple l’autre
partenaire, tandis que l’obligation d’un Lebenspartner allemand a pour
destinataire tous les membres potentiels du ménage. C’est en quelque sorte une
« familiarisation » légale de l’obligation pécuniaire des
partenaires. Toutefois, en France, les fonds provenant de l’un ou de l’autre
des partenaires serviront aussi dans les faits à l’entretien de la famille au
complet, constituée par les partenaires et les enfants éventuels, si tenté que
l’on puisse parler d’une famille ! D’ailleurs, une clause d’entretien des
enfants pourrait être insérée. En France, les obligations à l’égard des enfants
sont conventionnelles, tandis qu’elles sont légales en Allemagne. Par ailleurs,
comme on le verra dans le chapitre II en ce qui concerne la solidarité des
« pacsés», ceux-ci sont solidaires pour les dettes contractées pour les
besoins de la vie courante (art.515-4 C.Civ), et celles-ci incluent les
dépenses faites pour les enfants qui vivent au sein du partenariat.
Les relations
patrimoniales à l’intérieur du couple sont également divergentes du point de
vue du régime de gestion des biens des partenaires.
L’obligation alimentaire
entre partenaires (Unterhaltpflicht) a un champ d’application plus large
en Allemagne, non seulement parce qu’elle inclut l’entretien de la famille,
mais aussi car elle est maintenue en cas de séparation de fait des partenaires.
La séparation de fait ou Getrenntleben[70]
est une option légalement permise aux parties allemandes, et elle est
précisément réglementée par le législateur (sur le modèle de celle qui concerne
les époux, §1361 BGB). Une telle option serait impensable en France, dans la
mesure où le pacte existe entre autres parce que les partenaires sont obligés à
une communauté de vie.
Au cours de la séparation
de fait, le lien entre les partenaires n’est pas rompu, il existe mais de façon
atténuée. Dans cette mesure, l’obligation alimentaire est maintenue, mais elle
obéit à des règles propres (Art.1 §12
Abs.1 LPartG). En vertu de ces dispositions, l’un des partenaires est en
droit d’attendre de l’autre une pension alimentaire convenable (Angemes-senen
Unterhalt). Le concept d’obligation alimentaire est alors différent de
celui qui existe en matière de vie commune. En effet, cette obligation devient
unilatérale alors qu’elle était réciproque au cours de la vie commune. Cela est
justifié par le fait que les rapports de dépendance sont moins forts entre les
partenaires à ce moment[71].
Dans la mesure où cette obligation devient unilatérale, il convient de préciser
lequel des partenaires peut attendre de l’autre cette obligation. Il s’agit de
celui qui, d’après les acquisitions réalisées au cours du partenariat et les
biens qu’il possède, est en mesure de fournir à l’autre l’entretien convenable.
D’après cette définition, la possibilité de solliciter des aliments n’est pas
explicitement liée à un état de besoin. C’est le plus fortuné qui aidera
l’autre; néanmoins il le fera toujours dans la mesure du raisonnable.
Ce droit subit cependant
une limite : le bénéficiaire sans activité professionnelle peut être
contraint d’en exercer une pour s’assumer lui-même, à moins que cela ne puisse
être attendu de lui, en raison notamment de la durée du partenariat et des
relations économiques qui le liaient à l’obligé.
Une autre limite est
apportée, fondée sur l’équité : un droit à aliments doit être refusé,
diminué dans son montant ou limité dans le temps, dès lors que la mise à
contribution de l’obligée serait injuste. Le législateur, dans la loi du 16
février 2001, ne précise malheureusement pas cette notion d’injustice.
L’appréciation en reviendra-t-elle entièrement au tribunal saisi ? Une
analogie se fait avec les dispositions concernant le droit des époux, notamment
le §1579 BGB qui donne la définition de l’injustice grave (bien que le
degré de l’injustice exigée doive être plus élevé lorsque c’est un époux qui
l’invoque, la définition de l’injustice grave doit s’appliquer aux
partenaires). Selon ce texte, il s’agit des cas où les partenaires n’avaient
pas établi des relations assez fortes pour justifier l’octroi d’aliments
pendant la Getrenntleben (courte durée du partenariat par exemple),
lorsque le bénéficiaire a gravement porté atteinte à l’obligé ou à ses proches
(crime, délit grave intentionnel) ou lorsqu’il a volontairement provoqué son
indigence. L’article ouvre une autre cause d’indignité, qui permettra une libre
appréciation par les tribunaux, puisqu’il s’agit « de tout autre motif
aussi grave que ceux énumérés » (il s’agit d’une clause de dureté).
Comme les partenaires
français, qui ne peuvent écarter
l’obligation d’aide mutuelle et matérielle, les Lebenspartner ne peuvent
exclure ce devoir d’entretien pendant la séparation de fait[72].
B.
Des
régimes de gestion de biens différents
Les régimes de gestion
des biens présentent des caractéristiques propres dans chaque système(1),
spécificités qui se retrouve dans les limitations à la gestion individuelle des
biens qui servent au ménage (2).
1. Les
caractéristiques des régimes de gestion de biens
Le problème de la
reconnaissance d’un type particulier de couple hors mariage entraîne la
question du statut des biens d’un tel couple, qu’ils aient été acquis au cours
du partenariat ou antérieurement à sa conclusion.
Le droit français y
apporte une réponse, en distinguant suivant le moment de l’acquisition, et la
catégorie du bien en question, se référant à un procédé du droit des
biens : la technique de l’indivision (art. 515-5 C.Civ ). Le droit
allemand a également une solution, mais s’inspire en revanche du droit des
régimes matrimoniaux (Art.1 §6 et §7 LpartG ).
L’art. 515-5 C.Civ
envisage le sort des biens acquis à titre onéreux au cours du partenariat, et
établit un système de présomption de propriété indivise de ces biens ; a
contrario, les biens acquis avant la conclusion du pacte ou à titre gratuit au
cours du partenariat ne sont pas soumis aux présomptions établies par la loi,
mais restent la propriété exclusive du partenaire qui les a acquis. Les biens pour lesquels il n’est pas prouvé qu’ils
appartiennent en propre à l’un ou à l’autre sont soumis à cette
présomption d’indivision.
Les
meubles meublants sont présumés indivis par moitié, sauf si le pacte en prévoit
autrement, les autres biens sont également soumis à une présomption d’indivision
par moitié, dès lors que l’acte
d’acquisition ou de souscription n’en prévoit pas autrement (art. 515-5 C.Civ).
Il est important de préciser à ce stade que l’exclusion d’un bien meuble
meublant du régime de l’indivision ne peut se faire dans l’acte d’acquisition
de ce bien. Les meubles meublants sont ceux qui meublent le logement commun des
partenaires (lit, table, Hi fi, appareils ménagers…). Les « autres
biens » sont les meubles non meublants et immeubles. Qu’en est-il des
gains et salaires ? En appliquant à la lettre l’art. 515-5 al 2 C.Civ qui
fait référence aux biens résultant d’un acte d’acquisition ou de souscription,
les gains et salaires ne sauraient tomber dans la masse indivise. Il est de ce
fait utile de conseiller aux partenaires d’annexer au contrat une liste des
biens qui appartiennent à chacun d’eux afin d’éviter qu’ils ne tombent sous le
coup de la présomption d’indivision.
L’indivision est un
système de propriété collective dans lequel chacun des partenaires est
pleinement et entièrement propriétaire
des biens indivis, et chacun possède les mêmes droits sur ces biens. Ce régime
est en adéquation avec les faits, les parties devant avoir des droits égaux sur
leurs biens (c’est un système qui protège chacun des partenaires des créanciers
de l’autre). Concernant la gestion des biens indivis, les deux partenaires sont
obligés de collaborer dans la mesure où tout acte d’administration ou de
disposition sur le bien indivis requiert le consentement de tous les
indivisaires (art.815-3 C.Civ.) Echappent à cette obligation de concertation
les actes conservatoires. La nécessité d’obtenir l’accord unanime des
indivisaires pose problème, notamment lorsque les règles de l’indivision sont
confrontées à la règle de paiement solidaire des dettes (ceci sera expliqué
ultérieurement.)
La présomption d’indivision peut avoir des conséquences
fâcheuses : elle s’appliquera même si le bien a été acquis par l’un des
partenaires sans que l’autre ne soit au courant[73].
Par ailleurs, comme le souligne Madame Boutin[74],
le régime de l’indivision est générateur de difficultés, dans la mesure où il
place les tiers dans l’incertitude (seront-ils toujours au courant de
l’existence de l’indivision quand ils traitent avec les
« pacsés » ?), et qu’en outre il existe un doute quant à la fin
de l’indivision. Est-elle concomitante de la fin du PACS ? En l’absence de
dispositions spécifiques dans la loi, il faut se référer au droit commun de
l’indivision : elle prendra fin par partage, et ne résultera pas de
manière automatique de la fin du PACS. Celle-ci privera l’indivision de
fondement mais n’en provoquera pas pour autant le partage. La fin de
l’indivision peut aussi résulter de la vente par un indivisaire de sa
quote-part. Il est des cas où cela s’avère dangereux, par exemple lorsque le
bien indivis est le logement commun, et que le partenaire décide de vendre sa
quote-part à un tiers (il n’existe aucune règle de protection du logement commun, comme en matière de
mariage), quand bien même l’autre partenaire aurait un droit de préemption (
art.815-14 C.Civ).
Une autre difficulté est
liée à la rédaction de la loi : celle-ci distingue différents régimes
applicables suivant le type de biens concernés (meubles meublants et autres),
ce qui est manifeste d’une absence d’unification. Enfin une dernière
incertitude est mise en avant par Madame Boutin, concernant le régime de
l’indivision : est-il supplétif ou impératif ? Le Conseil
Constitutionnel n’apporte aucune réponse claire à ce propos et se
contredit ; il adopte, dans ses considérants 88 et 32 des positions
divergentes, se prononçant une fois en faveur du caractère impératif et une
autre fois en faveur du caractère supplétif. La jurisprudence se prononcera,
mais la lettre de l’art. 515-5 C. Civ suppose le caractère supplétif de
l’indivision. Les parties peuvent l’écarter, choisir une autre proportion que
la moitié ou même opter pour l’indivision conventionnelle des articles 1873-1
et suivants du Code Civil[75] .
Les parties n’ont néanmoins pas la possibilité de choisir, pour gérer leurs
biens, un des régimes matrimoniaux prévus pour le mariage. D’ailleurs, un tel
choix, plus judicieux, car porteur de simplicité, est strictement refusé par le
législateur. Les partenaires seraient trop proches des époux, ce que redoute le
législateur français (à la différence du législateur allemand.) Il a en outre
voulu doter les partenaires de mêmes droits sur les biens qu’ils utilisent en
commun, et pour lesquels ils participent dans la plupart des cas ensemble à
l’acquisition. Les partenaires vont profiter tous deux de l’enrichissement,
comme par exemple des loyers d’un immeuble indivis commun.
En revanche, le droit
allemand opte non seulement pour l’ouverture aux partenaires de régimes de
biens comparables aux régimes matrimoniaux, mais encore, il bannit toutes
formes de présomption trop incertaines pour assurer la sécurité des relations
juridiques ; en effet, le choix d’un régime de gestion des biens (Vermögenstand)
est une formalité obligatoire de constitution de partenariat[76]
(Art.1 §6 LPartG). Les partenaires peuvent opter pour ce qui est le régime
légal (Ausgleichsgemeinschaft), qui est la copie du régime légal de
participation aux acquêts (Zugewinngemeinschaft) des paragraphes 1363 et
suivants du BGB (une simple convention l’indiquant suffit). S’ils ne
choisissent pas ce régime, les régimes conventionnels s’offrent à eux
(séparation de biens ou Gütertrennung, communauté de biens ou Gutergemeinschaft,
communauté d’acquêts). Ce choix ne peut se faire que par contrat notarié,
et les parties devront expliquer son contenu au moment de la déclaration de
volonté constitutive du partenariat (devant les autorités compétentes.)
Le régime légal présente
deux caractéristiques essentielles : les patrimoines des partenaires
restent séparés (que les biens aient été acquis avant ou après la conclusion du
partenariat) ; tout compte bancaire reste personnel à celui qui l’a ouvert
en son nom ; les dettes restent personnelles. Chacun gère ses propres
biens (des limites existent mais elles seront exposées ultérieurement), et il
n’y a pas de biens communs. La seconde caractéristique consiste en la
répartition, à la fin du partenariat, des gains faits par chaque partenaire, et
de façon égalitaire entre eux. Le législateur français permet aussi aux
partenaires de participer en quelque sorte aux gains réalisés au court du
ménage ; ils participent ensemble à l’enrichissement commun en qualité
d’indivisaire, la présomption d’indivision y contribue. L’Art.1 §6 LPartG
expose le cas où la déclaration du régime choisi ne produit pas d’effet :
les partenaires sont dans ce cas considérés séparés de biens (ce serait par
exemple le cas si le contrat notarié n’était pas valable, ou si le régime
choisi était fictif). En France, si la clause d’exclusion de la présomption
d’indivision (contenue dans le Pacte ou l’acte d’acquisition du bien non meuble
meublant) s’avérait inefficace, la présomption d’indivision
s’appliquerait ; le législateur n’ayant pas prévu de régime de
substitution.
En Allemagne, si les
parties veulent choisir un autre régime que le régime légal, un contrat notarié
doit être établi par écrit en présence des deux partenaires, et le régime
choisi ne peut pas être fondé sur un droit étranger ou obsolète (l’Art. 1 §7
LPartG rend applicable le §1409 BGB).
Il serait judicieux de la part des parties de solliciter un conseil notarié,
quand bien même elles opteraient pour le régime légal.
Les deux systèmes
juridiques établissent toutefois des garde-fous dans le but de préserver le couple
et ses biens d’un éventuel excès de l’un ou l’autre.
2. les limites de gestion individuelle des
biens qui servent au ménage
La protection française
repose sur le régime de gestion de l’indivision, et la protection allemande se sert
de la réglementation des régimes matrimoniaux. Rappelons qu’en Allemagne,
chacun gère ses biens de manière individuelle. Or, deux articles du BGB (rendus
applicables par la loi du 16 février 2001) restreignent la gestion
individuelle. La première limite résulte du §1365 Abs.1 BGB : l’un des
partenaires ne peut engager l’ensemble de ses biens sans l’accord de l’autre
(quel que soit le régime choisi)[77].
C’est une protection forte de la « famille », qui ne doit pas être
menacée dans sa subsistance par un acte inconsidéré du partenaire. Cette
protection est la traduction de l’obligation de cogestion du ménage détenue par
les Lebenspartner en vertu de
l’Art. 1 §2 LPartG, elle s’applique même s’ils vivent séparés de fait. Les
débats au Bundestag avaient parlé dans ce cas d’une volonté de protection du
droit à aliments[78].
Que se passerait-il en
France si l’un des partenaires engageait la totalité de ses biens
propres ? La loi est muette ; l’autre pourrait éventuellement engager
sa responsabilité civile contractuelle sur le fondement du non-respect de
l’obligation d’aide mutuelle et matérielle, dès lors qu’il ne serait plus en
mesure de l’assurer en raison de l’aliénation. La jurisprudence pourrait
décider de se baser sur l’art. 1429 C.Civ, qui prévoit que si l’un des époux
met en péril les intérêts de la famille (notamment en dissipant ou détournant
les revenus qu’il retire de ses biens propres) son conjoint peut demander qu’il
soit dessaisi des droits d’administration et de jouissance (reconnu par l’art.
1428 C.Civ). C’est une assimilation trop forte des partenaires aux époux, que
la jurisprudence n’est peut-être pas encore prête à accepter.
Une autre question a
surgi : les actes obligationnels conduisant à accomplir ensuite un acte de
disposition font-ils partie des actes pour lesquels le consentement de son
partenaire est exigible ? Il faut considérer que le consentement du
partenaire est nécessaire si l’acte fait baisser de façon considérable et
effective le patrimoine de l’obligé dans sa quasi-totalité[79].
La deuxième limite est établie par le §1369 BGB : l’un des partenaires ne
peut disposer des biens ménagers lui appartenant que si l’autre partenaire lui
a donné son consentement. Cette disposition vise, comme la première, à protéger
les partenaires.
Dans tous les cas,
refuser d’accorder son consentement n’est pas un droit discrétionnaire du
partenaire, la preuve étant que le tribunal des tutelles peut donner son accord
à la place du conjoint (si celui-ci refuse sans raison valable d’en donner
l’explication, à cause d’une maladie ou d’une absence et qu’un danger est
encouru du fait du retard). Dans ce deuxième cas, le mandat domestique du §1357
BGB ne constitue pas une exception à l’exigence de cet accord.
En France ce sont les
règles de l’indivision qui permettent à un partenaire d’apporter des
restrictions au pouvoir de l’autre de disposer des biens indivis, dans la
mesure où tout acte d’administration ou de disposition sur un tel bien
nécessite l’accord unanime de tous les indivisaires (art. 815-3 C.Civ). Le partenaire
est protégé avant tout en tant qu’indivisaire ; en Allemagne, il l’est en
tant que partenaire à proprement parler.
Les rapports patrimoniaux
au cours d’un partenariat allemand ne se limitent pas au cas où les partenaires
vivent ensemble ; ils trouvent application également lorsque les
partenaires vivent séparés de fait, mais les obligations ainsi prévues sont
différentes de celles qui existent au cours de la vie commune.
C. La séparation de fait des partenaires allemands ou_« Getrenntleben »
Ces dispositions
attestent de l’extrême précision du législateur allemand, qui va jusqu’à régler
les conséquences d’une « rupture passagère », alors que le
législateur français ne réglemente même pas la rupture définitive (dont il
laisse la gestion des conséquences patrimoniales aux parties).
En ce qui concerne la
distribution de l’équipement domestique, chacun est en droit d’attendre de
l’autre la restitution des biens qui lui appartiennent, sauf si celui-ci les
utilise pour mener un ménage distinct, et que cela n’est pas contraire à
l’équité (l’Art.1 §3 LPartG est la copie du §1361a BGB qui concerne les époux).
Les biens domestiques qui appartiennent aux deux en commun sont partagés entre eux sur le fondement de
l’équité (un partenaire qui n’utilise manifestement pas le bien ne peut le
revendiquer). Le tribunal a la possibilité de prévoir une rémunération
convenable de celui qui, en étant privé, ne les utilise pas. Toutefois, les
rapports de propriété restent inchangés tant qu’il n’en est pas conclu autrement.
De même, l’attribution de
la possession du logement n’est pas
laissée au hasard (Art.1 §14 LPartG) : l’un peut attendre de
l’autre qu’il lui laisse l’utilisation privative du logement commun (ou d’une
part de celui-ci) tant que cela lui est nécessaire pour éviter une situation
difficile. Le partenaire privé de l’utilisation du logement commun est en droit
d’attendre de l’autre une indemnité convenable dans la limite de l’équité. Ce
paragraphe est inspiré du §1361b BGB. Cette action nécessite l’intervention du
« tribunal de la famille » (Familiengericht) et manifeste
l’exclusion légale d’un partenaire de son droit de jouissance ou de propriété,
mais est justifiée et admissible quand le demandeur ou ses enfants sont en
danger. Le logement reste néanmoins le « logement du partenariat » (Lebenspartnerschafts-wohnung).
Les rapports patrimoniaux
se créent donc au cours du partenariat, mais ils doivent être également
envisagés après dissolution de celui-ci, lorsqu’il s’agit entre autre de
liquider le régime.
§2: Les rapports à la fin du
partenariat, des obligations aux fondements différents
Le
partenariat prend fin par rupture ou Aufhebung
en Allemagne, qui y est l’équivalent du divorce (A). Le partenariat prend
également logiquement fin par la mort de l’un ou des deux partenaires (B). Les
rapports patrimoniaux ne sont pas identiques selon la cause de la dissolution.
Chaque cas a des conséquences patrimoniales propres.
A.
Fin du partenariat par rupture (Aufhebung)
La
rupture est suivie de plusieurs conséquences. Les partenaires doivent régler le
sort des biens qu’ils ont pu acquérir au cours du ménage et qu’ils utilisaient
conjointement. L’organisation de la séparation peut s’avérer complexe lorsque
les parties ont créé au cours de leur vie commune des liens économiques
étroits, avec confusion de patrimoine. L’étude nous montrera que les deux
systèmes gèrent l’organisation de la rupture de façon tout à fait opposée,
ainsi que le sort de l’obligation d’aide matérielle qui est à la charge des
partenaires. Il n’est enfin pas exclu que ceux-ci se quittent en mauvais
termes, l’un ayant causé un préjudice à l’autre. Se pose dans ce cas la
question de l’engagement de la responsabilité du fautif.
1.
Le
sort de l’obligation alimentaire et de l’aide mutuelle et matérielle à la fin
du partenariat
L’aide
mutuelle et matérielle, légalement prévue au cours du partenariat, relève du
régime obligatoire du PACS. Son sort en cas de rupture n’est pas prévu par le
législateur, qui fait de cette obligation post-PACS une obligation totalement
facultative. D’ailleurs, l’art. 515-7 C.Civ reconnaît la liberté des parties de procéder elles-mêmes à la
liquidation des droits et obligations résultant du pacte. Les parties peuvent
donc prévoir l’introduction dans le contrat initial de clauses incluant que
l’aide pécuniaire se poursuit après rupture.
En
Allemagne, l’obligation alimentaire (Unterhaltspflicht) ne s’éteint pas
au moment de la rupture du partenariat, car elle est la conséquence de la
conclusion « à vie » de celui-ci (Art.1 §16 LPartG). Elle reste une
obligation légale pour les Allemands alors qu’elle n’est que conventionnelle en
France. Dès lors qu’un partenaire ne peut plus assumer seul son entretien et ne
peut exercer d’activité professionnelle convenablement rémunérée (en particulier
en raison de son âge, de sa maladie, ou d’une infirmité), l’autre peut être contraint de lui
fournir une créance alimentaire convenable. Le principe posé est celui de la
prise en charge individuelle par chacun de ses propres besoins. Toutefois si
l’un est dans une situation de détresse car dans l’impossibilité, pour des
raisons pertinentes, de se prendre en charge, il peut légitimement attendre que
l’autre le fasse. Le principe de nécessité du §1569 BGB (valable entre époux)
est ici reproduit. Comme en matière de séparation de fait, la créance
alimentaire acquiert un caractère unilatéral, mais elle devient une exception.
Notons qu’il s’agit en Allemagne de la protection de la partie économiquement
faible, plus que d’un palliatif au déséquilibre de revenus entre les deux
partenaires (caractéristique de la prestation compensatoire en France.)
Le §16
LPartG renvoie à des dispositions sur le droit de la créance alimentaire après
le divorce des époux. En premier lieu, selon l’Art.1575 BGB, cette obligation
alimentaire doit couvrir l’ensemble des besoins des créanciers, et doit être
déterminée dans son montant en fonction de la situation
« partenariale » antérieure (le créancier doit continuer à vivre
comme il le faisait au cours du partenariat.) C’est une créance qui tient
compte à la fois des besoins du créancier, mais aussi et surtout de la capacité financière du débiteur (selon le §1581
BGB, le débiteur doit avoir des capacités financières (Leistungsfähigkeit)
suffisantes, sinon il sera autorisé à ne verser qu’une somme mensuelle
équitable).
Les
besoins couverts sont ceux essentiels pour l’homme (logement, nourriture, frais
médicaux), mais aussi l’assurance maladie, la formation professionnelle ou
scolaire, la formation continue, la reconversion professionnelle et même le
coût d’une assurance vieillesse ou invalidité.
Bien
qu’elle ait un caractère légal, les parties peuvent tout à fait y renoncer au
moment de la conclusion du partenariat (d’après le principe de l’autonomie de
la volonté), mais il faut leur conseiller de le stipuler dans un contrat
séparé, car rappelons que le Lebenspartnerschaft ne peut être conclu
sous condition (Art.1 §1LPartG). Cette renonciation n’est néanmoins pas
efficace lorsque, au moment de la conclusion du partenariat, les parties
étaient conscientes de la situation de besoin ( en aides sociales) de l’un des
partenaires ou lorsqu’elle est imposée
à l’une d’elle.
En
outre une clause « d’équité négative » s’applique, selon laquelle
toute créance alimentaire doit être déniée, diminuée dans son montant ou
limitée dans le temps lorsque l’obligation du débiteur serait « gravement
inéquitable » (grob unbillig), notamment quand le partenariat
a été de courte durée, le créancier est coupable d’un crime ou d’un délit grave
contre la personne du débiteur, le créancier a délibérément provoqué son état
de besoin, ou qu’il existe un motif aussi grave que ceux mentionnés (§1579
BGB). Cette obligation prend la forme d’une rente mensuelle (§1585 BGB).
Le
législateur pousse très loin la précision, puisqu’il établit un ordre entre les
différents débiteurs alimentaires du partenaire dans le besoin. Le partenaire
sollicité doit répondre d’une obligation alimentaire envers son ancien
compagnon. S’il ne le peut pas ce sont les parents du partenaire dans le besoin
qui y subviendront (§1584 BGB). Par ailleurs, l’Art.1 §16 Abs.3 LpartG prévoit
un ordre entre les divers créanciers du partenaire obligé à une pension
alimentaire post-rupture, dès lors que celui-ci est redevable de plusieurs
créances d’aliments ; il s’agit, dans cet ordre, des ayants droits légaux
(enfants, conjoints s’il y en a eu), le partenaire d’un premier
partenariat déjà rompu, les partenaires
plus récents, et enfin les autres parents.
La
créance alimentaire n’est plus due dans plusieurs cas : quand son
bénéficiaire se marie, conclut un autre pacte[80]
ou quand il décède (§1586 BGB). D’après cet article, on peut étendre cette
extinction par conclusion d’un pacte aux pensions alimentaires résultant de mariages
précédents. La créance alimentaire disparaît également lorsque celui qui la
reçoit n’est plus dans le besoin. Toutefois en cas de mort du débiteur, cette
obligation passe à la succession en tant que passif successoral, mais les
héritiers ne sont pas garants pour une somme qui est supérieure à la part
héréditaire qui aurait du revenir à l’ayant droit si la rupture n’avait pas été
prononcée (§1586b BGB). Il est intéressant de s’interroger à ce stade sur le
sort d’une obligation alimentaire française (prestation compensatoire ou
pension alimentaire) lorsqu’un pacte est conclu par le bénéficiaire. Il n’est
pas impossible qu’une personne divorcée, créancière d’une telle
obligation, s’engage, non plus dans
les liens d’un mariage, mais dans les « liens d’un PACS ». Le
législateur français ne réglemente pas la situation quand un PACS est
conclu ; en revanche, il prévoit qu’un remariage met fin au versement de
la pension alimentaire allouée au divorcé, à présent jeune marié (art. 283
C.Civ). La justification se trouve dans le fait que, en tant que nouveau marié,
l’individu bénéficie d’un devoir de secours de la part de son conjoint, prenant
ainsi le relais du devoir de secours résultant du premier mariage, matérialisé
par la pension alimentaire. Dans la mesure où l’aide mutuelle et matérielle est
à rapprocher du devoir de secours qui existe entre époux, il est logique de
tenir le même raisonnement qu’en matière de mariage, et d’estimer que la
signature d’un PACS met fin au versement de la pension alimentaire touchée par
le « pacsé ». Qu’en est-il d’une prestation compensatoire ? La
situation est plus controversée et moins claire qu’en matière de pension
alimentaire. Un doute existe que la jurisprudence règlera peut-être en matière
de PACS. Enfin, imaginons une dernière situation qui pourrait se produire en
France, encore une fois ignorée par le législateur : que devient une
obligation alimentaire post-rupture que des partenaires auraient prévue par
convention, quand le partenaire bénéficiaire se marie ou conclut un
nouveau partenariat ? Est-il admissible qu’une « nouvelle union »
modifie ce que des parties ont contractuellement prévue ? La réponse à
cette question doit être négative, et seule une nouvelle convention des parties
pourrait y mettre fin. Toutefois, la question reste ouverte, et la
jurisprudence l’appréciera peut-être.
Enfin,
en Allemagne, la compensation des droits à pension de retraite (Versorgungsausgleich)[81],
qui existe pour les époux, n’a pas été reprise pour les partenaires, et
ceci pour des raisons inexpliquées. Est-ce un oubli ? Est-ce la volonté de
distinguer au moins sur ce point le partenariat du mariage, afin qu’il ne soit
pas taxé de l’étiquette « mariage homosexuel », et qu’il ne risque
pas d’être considéré comme contraire à l’Art.6 de la Loi Fondamentale ?
Se
pose en outre le problème de l’organisation de la rupture, au travers de la
liquidation des droits et obligations.
2.
La
liquidation des droits et obligations au moment de la rupture
Rien n’est
laissé au hasard pas le législateur allemand, tandis que le législateur
français s’en remet à la liberté des partenaires (art.515-7 al.8 C.Civ). Mais
cette formule consacrant la liberté des partenaires d’organiser
patrimonialement leur séparation est floue ; le législateur
n’offre aucun mécanisme juridique à ces partenaires qui, rappelons-le, ne
seront pas toujours des professionnels du droit. C’est pourquoi, le législateur
envisage la possibilité de recourir au juge pour régler la rupture et la liquidation
des droits et obligations des partenaires lorsque ceux-ci ne parviennent à
aucun accord. Il est vraisemblable qu’en pratique, le juge soit fortement
sollicité.
La
seule disposition légale concernant le partage des biens fait référence à
l’attribution préférentielle de l’art.832 C.Civ qui concerne les époux et les
héritiers (art.515-6 C.Civ). Cette disposition offre aux partenaires la
possibilité d’obtenir, au moment du partage, l’attribution préférentielle de
l’entreprise (commerciale, industrielle ou artisanale) à laquelle il a
participé ou de la propriété ou du droit au bail du local qui lui servait
d’habitation.
Qu’en
est-il alors des biens indivis ? Les parties doivent liquider
l’indivision, dans la mesure où elle ne prend pas fin automatiquement avec la
rupture du PACS. Les indivisaires ne sont pas contraints d’attendre la fin du
partenariat pour liquider l’indivision, ils peuvent le faire à tout moment
(art.815 C.Civ). Les parties doivent nécessairement recourir au partage amiable
ou judiciaire, et il faut leur conseiller de le faire le plus tôt possible dès
la rupture du PACS, afin que des situations litigieuses soient évitées. Si le
logement commun est en indivision, il sera géré par ces règles. Il paraît en
outre utile que les parties incluent dans le pacte des dispositions concernant
la liquidation de leurs droits et obligations, pour éviter la naissance de
litiges lors de la rupture du contrat. En outre, aucune règle relative aux
remplois et récompenses ne s’applique automatiquement au PACS. Il faut la
prévoir. Il pourrait être question d’une clause relative aux créances entre
partenaires (qui s’inspirerait du système des récompenses[82]
entre époux) pour faciliter l’action en enrichissement sans cause.
Si les
parties n’ont rien prévu dans leur pacte, et que l’une s’estime lésée au moment
de la rupture, considérant qu’elle s’est appauvrie au cours du partenariat en
faveur de son partenaire, elle dispose d’un certain nombre de techniques pour
rétablir la situation[83].
Le partenaire qui s’estime appauvri pourra agir sur le fondement de
l’enrichissement sans cause ou recourir à la notion de société de fait. La
première technique vise le cas où un des partenaires s’est enrichi au détriment
de l’autre, en ayant par exemple moins participé que lui aux dépenses de la vie
courante. Cette action est possible dès lors qu’il n’existe aucun autre moyen
d’obtenir une indemnité, notamment par le recours à la société de fait. Cette
seconde technique suppose des conditions d’action précises qui sont : une
volonté de la part du demandeur de s’associer dans une entreprise, des apports
respectifs de chacun (en biens, argent ou travail) et une vocation à participer
aux bénéfices et aux pertes. Elle suppose en outre que le demandeur n’ait rien
reçu en contrepartie de sa collaboration. La jurisprudence a eu l’occasion de
rappeler que les conditions cumulativement exigées doivent être toutes réunies,
une simple cohabitation ne suffisant pas à l’établir[84]
(même si les concubins sont sous le régime de l’indivision conventionnelle) et
la preuve devant être apportée par le demandeur[85].
Ces
techniques sont également offertes aux concubins en Allemagne, mais les
partenaires s’y réfèreront peu en pratique dans la mesure où le régime légal de
gestion de leurs biens conduit au partage de tout gain effectué par l’un ou
l’autre. Le législateur allemand a précisément organisé la séparation. D’une
part, le sort des biens gérés au cours du ménage est réglé par l’application
des règles concernant le régime de participation aux acquêts : chaque
partenaire conserve ses biens propres, et les gains faits par chacun d’eux sont
répartis égalitairement entre eux (§1363 BGB). Le gain est la plus-value
réalisée, différence positive entre la valeur du patrimoine de départ et celle
du patrimoine final.
En ce
qui concerne le traitement particulier du logement et des biens du ménage, la
loi laisse les parties libres de s’accorder, et de trouver un arrangement
convenable (Art.1 §17 LPartG). La partie faible est protégée : une clause
non équitable ne doit pas lui être imposée. Si elles ne s’entendent pas, le
tribunal de la famille intervient en réglant la répartition des biens du ménage
et l’attribution du logement commun[86].
Il doit non seulement tenir compte de la relation des parties à l’égard des
biens en question (une partie qui se sert de façon habituelle d’un bien est en
droit de l’obtenir), mais aussi des besoins de chacune d’elles (un partenaire
qui aurait une autre maison n’aurait pas besoin de disposer du logement
commun).
Le §18
LPartG traite de l’attribution de ce logement commun lors d’un litige. S’il est
en location, le tribunal déterminera lequel des partenaires peut disposer du
logement indépendamment du fait qu’il en soit locataire ou non. Un partenaire
peut tout à fait obtenir le droit au bail alors que l’autre en était le
titulaire ; il « prend sa place ». De la même manière, si le
logement appartient à un partenaire, le tribunal peut accorder au partenaire
non-propriétaire le droit de rester dans le logement en tant que locataire.
Cette attribution doit néanmoins se justifier par le caractère
exceptionnellement dur que revêtirait pour lui la perte du droit à rester dans
le logement commun. Cette technique est proche de celle de l’attribution
préférentielle accordée à un partenaire par l’art.515-6 C.Civ (qui renvoie à
l’application de l’art. 832 du Code civil). Le partenaire survivant peut
obtenir l’attribution préférentielle de la propriété ou du droit au bail du
local qui lui sert d’habitation et dans lequel il a sa résidence au moment du décès.
Il
n’est pas exclu que la rupture soit génératrice d’un préjudice pour l’un ou
l’autre des partenaires. Comment s’effectue alors sa réparation ?
3.
Le
problème de l’engagement de la responsabilité d’un partenaire
Ni la
législation française, ni l’allemande ne règlent l’éventuelle réparation du
dommage subi par l’un des « pacsés », mais ils ne sont pas pour
autant désarmés.
En
France, les partenaires peuvent fonder leur requête sur le droit commun de la
responsabilité et le Conseil Constitutionnel vise la responsabilité civile
délictuelle de l’art.1382 du C.Civ (il explique que « l’affirmation de la
faculté reconnue au partenaire auquel la rupture est imposée, notamment en cas
de faute tenant aux conditions de cette rupture, d’agir en responsabilité met en
œuvre l’exigence constitutionnelle posée par l’art.4 de la Déclaration des
droits de l’homme et du citoyen de 1789 dont il résulte que tout fait de
l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est
arrivé à le réparer[87] »).
Les parties ne peuvent exclure ce droit à réparation en cas de rupture
unilatérale, et toute clause en ce sens serait réputée non écrite.
Le
Conseil Constitutionnel vise la responsabilité civile délictuelle. Or, n’a-t-il
pas, dans cette même décision, fermement affirmé la nature contractuelle du
PACS ? Tout manquement à une obligation contractuelle peut donner lieu à
l’engagement de la responsabilité civile contractuelle de celui qui en est
l’auteur. Partant de ce présupposé, un problème se pose ; en vertu du principe
de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, il est
impossible pour toute partie à un contrat d’engager la responsabilité
délictuelle de la partie qui lui a causé un dommage par le non-respect de
prescriptions contractuelles. L’action doit se fonder sur la responsabilité
contractuelle. Le Conseil Constitutionnel a néanmoins opté pour la
responsabilité délictuelle de celui qui cause un préjudice à l’autre en raison
de la rupture. Par conséquent, la faute donnant lieu à réparation ne peut se
réduire à la seule méconnaissance d’une obligation contractuelle. L’existence
d’une faute de la part du partenaire qui prend l’initiative de la rupture est
déterminée par son comportement au moment de celle-ci (comportement brutal,
grossier, dégradant…), la faute ne consiste pas en la rupture. Des auteurs
préconisent l’insertion par les parties de clauses selon lesquelles la rupture
donne droit à indemnisation[88]
ou même d’une clause pénale prévoyant le paiement d’une somme à titre de
dommages-intérêts par l’une des parties lorsqu’elle n’exécute pas le contrat[89].
Le problème de l’engagement de la responsabilité contractuelle n’est pas exclu
pour autant : il s’applique lorsqu’une partie manque à l’une de ses
obligations. Ce qui est exclu, en revanche, est que ce manquement soit une
faute permettant l’attribution de dommages-intérêts au partenaire délaissé
(ceci sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle).
La
législation allemande n’évoque pas non plus le cas où l’une des parties subirait un préjudice lors de la rupture
unilatérale. L’unique cas qui pourrait se présenter est celui où l’un des
partenaires se marie alors qu’il est toujours lié par un partenariat. Quel
serait le fondement des réparations ? La responsabilité civile délictuelle
s’impose, le Lebenspartnerschaft n’étant pas un contrat ; ce serait
certainement la responsabilité civile délictuelle pour faute du droit commun.
La partie victime invoquerait le §823 I BGB (quiconque agissant
intentionnellement ou par négligence porte atteinte illégalement à la vie, au
corps, à la santé, à la liberté, à la propriété, ou à tout autre droit d’autrui
est tenu à la réparation du préjudice qui en résulte). Ce paragraphe protège
l’atteinte aux droits de la personnalité, qui sont inclus dans le concept
« tout autre droit ». La victime pourrait alors invoquer la violation
du droit à sa dignité (Art.6 I GG). Mais la jurisprudence devra corroborer ce
raisonnement.
Ces
règles ne se retrouvent pas lorsque le partenariat prend fin par la mort d’un
partenaire.
B.
Fin du partenariat par la mort d’un partenaire
La
création d’un lien juridique entre deux personnes par la conclusion d’un PACS
soulève la question d’une éventuelle vocation successorale entre ces deux personnes,
fondée sur l’existence du lien juridique ainsi créé. La réponse à cette
question est sans équivoque : le PACS en lui-même n’ouvre aucune vocation
successorale au profit du partenaire du de cujus (à l’inverse des époux qui
acquièrent qualité d’héritiers légaux en même temps que le statut de conjoint.)
Cette non-vocation successorale ne saurait être justifiée par la présence
d’autres héritiers du de cujus puisque même en leur absence, le partenaire
n’acquiert pas par défaut la qualité d’héritier.
Afin
de réserver toutefois un certain nombre de biens à son partenaire, l’autre
dispose des techniques habituelles de gratification d’un bien à une personne
(testament ou donation). Les règles classiques du droit des libéralités
s’appliquent avec pour règle d’or le respect de la réserve des héritiers
réservataires du de cujus (ascendants et descendants).
Le
pacte civil de solidarité instaure simplement des avantages fiscaux en matière
de droit de mutation (cette question sera abordée dans le cadre des relations
entre tiers et partenaires).
La
conclusion d’un PACS ne saurait valoir testament et il ne faut pas confondre le
contrat de PACS et testament. La loi du 15 novembre 1999 n’exclut toutefois pas
que les partenaires puissent prévoir des dispositions testamentaires ou
instituer des donations dans le pacte. Les conditions du droit commun de
formation d’un testament ou d’établissement d’une donation doivent être
respectées. La jurisprudence aura peut-être à se prononcer sur le sujet, et
pourra émettre une réticence car un testament ne peut avoir qu’un seul auteur,
un testament commun à deux personnes n’est pas possible (art.968 C.Civ)[90].
Or le pacte est signé par les deux partenaires. Un doute est possible lorsque
les deux partenaires instaurent des dispositions à cause de mort dans le pacte.
En
revanche, toute donation doit être faite par acte notarié. Or, pour conclure un
pacte les parties rédigent et signent elles-mêmes une convention produite en
deux exemplaires originaux (art.515-3 C.Civ). Cette exigence suggère que l’acte
notarié, établi en un seul original, ne peut valoir pacte (ni même une copie
certifiée conforme). Pour établir une donation par PACS, celui-ci doit être
rédigé par acte notarié en brevet, délivré en original directement aux
intéressés[91].
La
situation des partenaires allemands en matière successorale est tout à fait
différente. L’Art.1 §10 LPartG institue le partenaire héritier légal, comme le
conjoint, et reçoit d’ailleurs la même proportion qu’eux (§1931 BGB pour la
vocation successorale entre époux). La proportion de la succession qu’il reçoit
est variable suivant les héritiers appelés à la succession : un quart si
des héritiers du premier ordre sont présents (descendants), la moitié en
présence des grands-parents ou d’héritiers du second ordre (parents, frères et
sœurs). Si aucune de ces personnes n’est présente, il reçoit la totalité de la
succession, passant avant d’autres héritiers plus éloignés. Cette vocation
successorale se justifie par le lien familial créé entre les deux partenaires
par l’Art.1 §11 LPartG.
Le
partenaire n’est pas un simple héritier : il est héritier réservataire au
même titre que les conjoints (Art.1 §10 Abs.6 LPartG). Notons immédiatement que la notion de réserve est
divergente en droit allemand. Dans la législation française, l’héritier
réservataire ne peut être exclu de la succession. En Allemagne, la réserve
héréditaire (Pflichtteil) confère simplement à son bénéficiaire une
créance à l’encontre des héritiers, qui n’est pas un droit réel et qui ne lui
assure pas automatiquement un droit à la succession. Par conséquent, le
bénéficiaire peut être évincé par le défunt (par testament). En perdant la
qualité d’héritier, il perd son droit à demander sa part de réserve. Celle-ci
est fixée à la moitié de sa part légale.
L’Art.1
§10 Abs.3 LPartG ordonne l’exclusion du partenaire de la succession dans
plusieurs hypothèses qui révèlent, au moment de la mort du de cujus,
l’affaiblissement des liens qui l’unissaient à lui, ce qui justifie
l’exclusion. La première hypothèse concerne le cas dans lequel les conditions
d’une rupture (prévues par l’Art.1 §15 Abs.2 Nr.3 LPartG) sont remplies et que le de cujus avait
sollicité la rupture ou y avait donné son assentiment. La seconde hypothèse
vise le cas où le de cujus avait déposé une demande en vue de la rupture
(lorsque la continuité du partenariat est pour lui d’une dureté exceptionnelle)
et que la demande est fondée. Seul compte ici le fait qu’il voulait se séparer,
l’exclusion de la succession n’étant pas conditionnée par le prononcé de la
rupture par le tribunal (ce prononcé supposant l’achèvement d’un délai de un ou
trois ans).
Cette
part qu’il reçoit est le droit successoral proprement dit. S’y ajoutent
d’autres droits : le droit à un préciput et le droit à la vocation successorale.
Le
partenaire peut recevoir un préciput légal (Voraus du §10 Abs.1 LPartG).
Il s’agit d’un droit aux objets ménagers (qui servent à la vie commune du
couple et qui ne sont pas les accessoires d’un bien foncier) et aux cadeaux
offerts lors de la conclusion du partenariat, qui appartiennent au de cujus.
Pour en bénéficier, le partenaire doit avoir été appelé à la succession en tant
qu’héritier légal, ne doit pas avoir renoncé à cette succession (§10 Abs7
LPartG) ni n’avoir été exhérédé par le de cujus. Le préciput est variable
suivant les héritiers appelés à la succession : le partenaire en concours
avec les héritiers du second ordre reçoit la totalité des biens en
question ; s’il est en concours avec
les enfants du de cujus, il n’a droit qu’aux biens qui lui sont nécessaires
pour la conduite convenable d’un nouveau ménage.
La
solution successorale (erbrechtliche Lösung) est une somme forfaitaire,
qui obéit à des règles spéciales tenant au régime de gestion des biens adopté
(§ 1371 BGB, auquel renvoie l’Art.1 §6 Abs.2 LPartG). En cas de participation
aux acquêts (régime légal des partenaires), il n’y a pas calcul de la créance
de participation (les gains réalisés ne sont pas partagés comme ils le sont en
matière de rupture par décision judiciaire), mais le partenaire reçoit un quart
supplémentaire, pris sur la part des autres héritiers. Il importe peu que les
partenaires aient réalisé au cours du partenariat un accroissement de leurs
patrimoines respectifs.
Comme
en droit français, le de cujus peut gratifier son partenaire par testament ou
en lui faisant des dons. Toute disposition testamentaire tombe dans le cas où
le partenariat est dissout avant la mort du disposant, et même si les délais
légaux au terme desquels le tribunal prononce la rupture ne sont pas expirés,
d’après le §2077 BGB, rendu applicable par le §10 Abs.5 LPartG. La volonté
du testateur prévaut s’il a expressément maintenu les dispositions, même après
rupture (§2077 Abs.3 BGB). Par ailleurs, les partenaires disposent d’une liberté
de tester (Testierfreiheit) telle, qu’ils peuvent s’instituer héritiers
réciproques par le biais d’un testament commun (Berlinertestament, §2269
BGB). Si l’un révoque des dispositions établies au profit de l’autre, les
dispositions réciproques prises par l’autre partenaire tombent en conséquence.
C’est un avantage certain par rapport au testament « simple » :
si deux partenaires s’instituent réciproquement héritiers par deux testaments
distincts, et que l’un révoque les dispositions qu’il a prises, à l’insu de
l’autre, celui-ci sera privé et les dispositions par lesquelles il gratifie
l’autre ne tombent automatiquement, laissant subsister un legs qui n’a plus
lieu d’être.
Il
existe en outre des avantages fiscaux en matière de droit de mutation, mais ils
sont traités par la loi qui n’a pas encore reçu l’assentiment du Bundestag.
La
situation du partenaire allemand est nettement favorable à celle du partenaire
français, car encore une fois plus protectrice des intérêts du survivant. Le
droit successoral entre « pacsés » est un volet totalement occulté
par la législation française, à l’image d’autres thèmes pourtant importants
(des obligations morales implicites, une aide alimentaire qui est ignorée après
rupture). Il y a une raison majeure à ces lacunes : le législateur veut
éviter de reproduire le mariage, et même de donner l’impression qu’il s’en
inspire. Paradoxalement, pour tous ces points où le législateur français n’ose
établir une réglementation, la législation allemande est d’une précision
extrême, ne se cachant pas de reproduire pour les partenaires ce qui existe
pour les conjoints : le partenaire est héritier légal réservataire comme
le conjoint, bénéficie d’une part identique à lui. Il en va entre autre de même
pour les obligations morales qui fondent le régime obligatoire du Lebenspartnerschaft.
La force des relations entre les partenaires allemands est manifeste, et
résulte de la précision avec laquelle le législateur s’emploie à les régler, et
en outre du fait qu’ils sont institués membres de la même famille. Les
dispositions sont en conformité avec le but de la loi : lutte contre la
discrimination entre homosexuels et hétérosexuels, car elles mettent conjoints
et partenaires sur un même plan. Les relations entre les partenaires français
sont plus hésitantes, et largement ouvertes, du fait de l'indétermination du
concept même de couple de « pacsés », à une intervention
jurisprudentielle. A la liberté du législateur d’établir les relations d’un
nouveau couple se substitue la liberté des parties de l’organiser elles-mêmes,
seul un cadre leur étant fourni.
Les
relations avec les tiers exigent en revanche une sécurité juridique, le
partenariat ne doit pas être menacé par les conséquences fâcheuses de relations
incertaines, dès lors que les droits et les obligations des partenaires sont en
correspondance avec des droits et obligations réciproques de tiers. L’objet du
chapitre deux est l’étude des relations qui lient les tiers au couple, en terme
de droits et obligations des partenaires.
CHAPITRE
II
LES
DROITS ET OBLIGATIONS
VIS-A-VIS
DES TIERS AU COUPLE
U |
n acte juridique
n’oblige que les parties qui y ont pris part : le principe est établi. En revanche, un tiers peut toujours invoquer
le partenariat pour que ses droits soient garantis (en tant que créancier par
exemple), et même en demander la nullité dès lors que ses intérêts sont
touchés. Cependant, pour cela, l’acte doit non seulement leur être opposable,
mais les tiers doivent aussi pouvoir prendre connaissance des informations qui
le concernent.
Le pacte civil de
solidarité devient opposable aux tiers à partir de son inscription sur un
registre au greffe du TI du ressort géographique de la résidence des deux
partenaires, cette inscription donnant date certaine au contrat (art.515-3
C.Civ et art.1er du décret n° 99-1089 du 21 décembre 1999[92]),
elle n’est pas une formalité de constitution du pacte. La législation organise
parallèlement d’autres enregistrements : sur un registre tenu au greffe du
TI du lieu de naissance de chacun, et si l’un est né à l’étranger, au greffe du
TI de Paris.
En Allemagne,
les Lebenspartner doivent, pour créer le partenariat, faire
une déclaration conjointe de volonté devant les « autorités compétentes »,
expliquant qu’ils veulent établir un Lebenspartnerschaft. A ce moment,
l’autorité qui a reçu la déclaration l’inscrit sur un registre approprié (Lebenspartenerschatfsbuch, dont la
création et l’organisation sont laissées à la compétence des Länder qui
établissent les lois d’application), et le partenariat est opposable aux tiers.
Il convient, avant
d’entamer la présentation des relations personnelles (section 1) et
patrimoniales (section 2) qui lient les partenaires aux tiers, de faire une
remarque préliminaire au sujet de l’accès des tiers aux informations
enregistrées concernant les partenariats. Cette nécessaire publicité du pacte civil de solidarité pose
en effet en France un problème d’intrusion des tiers dans la vie privée
sexuelle des partenaires, dans la mesure où, en ayant accès librement aux
informations enregistrées qui concernent l’identité des partenaires, les tiers
peuvent savoir si le partenariat est homosexuel ou hétérosexuel. Le Conseil
Constitutionnel, saisi à ce propos, a estimé que ces dispositions ne devaient
pas être annulées, puisqu’elles sont utiles aux tiers : il a néanmoins
émis des réserves que le gouvernement a dû régler.
Le gouvernement
français a adopté un décret en réponse à la décision du Conseil
Constitutionnel, après avis de la Commission Nationale de l’informatique et des
libertés qui préconise une publicité limitée. Ce décret[93]
limite le nombre de personnes ayant accès aux informations privées et
nominatives figurant sur les registres et restreint les situations dans
lesquelles ces informations peuvent être demandées et obtenues. Les personnes
autorisées sont les signataires du pacte, les autorités judiciaires et
fiscales, les personnes qui interviennent dans le cadre de procédures de
liquidation de succession, liquidation judiciaire ou procédure d’exécution
contre un partenaire (notaire, huissier, administrateur judiciaire et
mandataire liquidateur) ; enfin, ce sont aussi les administrations
débitrices de prestations à l’égard des partenaires. En outre, le créancier
d’un « pacsé » peut avoir accès à certaines informations lorsque les
partenaires sont solidairement tenus, mais toute connaissance nominative du
partenaire du débiteur est impossible. De la même manière, ces personnes
pourront avoir accès aux informations exclusivement parce que l’accomplissement
de leur mission l’exige (le notaire lorsqu’il règlera la succession, par
exemple). Le droit à l’accès des tiers aux informations sur les partenaires
contenues dans le registre n’est donc pas absolu, et la publicité, chère au
juriste, perd ici quelque peu sa force dans un souci de protection de la vie
privée.
Ce problème n’a pas
été soulevé par les détracteurs du Lebenspartnerschaft en
Allemagne. L’atteinte à la vie privée sexuelle ne s’y poserait pas de la même façon,
dans la mesure où le partenariat n’y est réservé qu’aux couples homosexuels.
Section 1 : Les
relations personnelles entre tiers et partenaires
Les relations des
partenaires avec les tiers doivent être abordées différemment suivants le
« statut » du tiers en question, statut qui est commandé par le lien
affectif ou familial qui unit ce tiers
au couple. Il faut distinguer deux catégories de tiers: ceux qui sont
considérés comme les « proches » des partenaires (§1) et les
autres, qu’ils soient déterminés (bailleur, employeur, §2), ou indéterminés
(§3).
§1 : Les relations
avec les « proches » des partenaires
Les proches sont les
enfants élevés au sein du couple de partenaires (A), et les membres des
familles respectives de chaque partie au partenariat (B).
A. Relations avec les enfants
L’absence d’enfants dans
un couple de partenaires conduit à s’interroger, dans la mesure où le couple
désire avoir une descendance, sur le droit des partenaires à l’enfant, avec, au
cœur des débats, le problème de la parentalité homosexuelle ou
« homoparentalité »[94].
C’est une question particulièrement présente, et les homosexuels ne cessent de
revendiquer un droit à la parentalité; le thème de la « Gay
Pride » ou « parade gay » qui s’est déroulée à Paris le 23 juin
2001 en atteste : homoparentalité et revendication d’un droit à l’adoption
pour les couples de même sexe.
Parallèlement, la
présence d’enfant au sein d’un tel couple suscite, elle aussi, plusieurs
interrogations résumées par la notion de droit de l’enfant[95].
Il est intéressant de s’interroger sur son statut au sein de cette
« famille », surtout lorsqu’elle est recomposée. Par ailleurs, qu’en
est-il de son éducation, de son droit à recevoir des soins, et de l’autorité
parentale exercée à son égard ? Qui supporte ces différents devoirs dont
doit bénéficier tout enfant ?
1. Un droit à l’enfant ?
La revendication des
couples d’un droit à l’enfant concerne majoritairement les couples homosexuels,
au travers du problème de l’adoption et de la procréation médicalement assistée
(PMA). Toutefois, ni la loi allemande, ni la loi française, n’abordent ces
questions, et aucune n’ouvre expressément la possibilité aux couples de
partenaires d’adopter un enfant ou d’avoir recours aux techniques de la PMA.
Par ailleurs, les lois sur les partenariats enregistrés ne modifient pas les
textes qui y sont relatifs. La phobie à l’encontre de la parentalité
homosexuelle a nettement influencé le choix des législateurs.
A défaut de dispositions spécifiques, le
droit commun de l’adoption et de la PMA s’applique.
a- L’application du
droit commun de l’adoption
En France, l’adoption est
régie par la loi n° 96-604 du 5 juillet 1996, qui ne réserve la possibilité d’adopter
qu’à un couple marié non séparé de corps (art.343 C.Civ) ou à une personne
seule (art.343-1 C.Civ) ; l’adoption n’est en conséquence pas ouverte à un
couple non marié, tel les « pacsés ». L’art. 346 C.Civ souligne
effectivement que « nul ne peut être adopté par plusieurs personnes, si ce
n’est par deux époux ». L’adoption peut être demandée par toute personne
(seule) âgée de plus de vingt-huit ans, sans distinction d’orientation
sexuelle, mais un agrément administratif est nécessaire, afin de s’assurer que
la personne demanderesse est apte à accueillir l’enfant, eu égard à l’intérêt
et aux besoins de celui-ci. Toutefois, dans les faits, ce droit subit des
limitations ; les célibataires homosexuels en sont souvent exclus, au
motif que l’épanouissement de l’enfant qu’ils pourraient adopter et élever est
menacé. L’administration, chargée d’octroyer l’agrément précité, fonde dans la
plupart des cas son refus sur l’exigence du modèle traditionnel homme-femme nécessaire à l’éducation de
l’enfant, remettant en cause l’aptitude des homosexuels à offrir un cadre
d’accueil idéal au développement de l’enfant.
En Allemagne, l’adoption
est réglementée par la loi du 2 juillet 1976, entrée en vigueur le 1er
janvier 1977. Le §1741 Abs.2 BGB ouvre l’adoption au couple, à condition qu’il
soit marié et à une personne seule, qui sera l’unique titulaire de la qualité
d’adoptant. Comme en France, l’adoption est par conséquent exclue pour des
couples qui ne seraient pas unis par le mariage, tels des frères et sœurs, des concubins, et a fortiori des
homosexuels, même unis dans un partenariat. Quiconque sollicite une adoption
doit pouvoir offrir à l’enfant un cadre de vie propice à son épanouissement, et
le bien de l’enfant (Kindeswohl) est nécessairement pris en compte pour
le prononcé de l’adoption. Celle-ci pourrait être refusée à une personne
homosexuelle, dès lors que le tribunal des tutelles chargé de la prononcer
considèrerait que l’homosexualité de l’adoptant n’est pas favorable à l’intérêt
de l’enfant. De ce point de vue, les législations sont claires et
identiques : les couples homosexuels ne peuvent adopter d’enfants.
L’adoption par l’un des
membres du couple de l’enfant de l’autre est une hypothèse envisageable, à
propos de laquelle les lois relatives aux partenariats sont tout autant
muettes ; ce n’est pourtant pas un cas d’école. La loi française autorise
l’adoption plénière par un époux de l’enfant de son conjoint, mais à certaines
conditions strictes (l’art.345-1C.Civ) ; pourrait-on ouvrir cette possibilité
aux partenaires d’un pacte civil de solidarité, en leur appliquant par analogie
l’art. 345-1 C.Civ ? La jurisprudence aura peut-être la possibilité de se
prononcer à ce sujet ; néanmoins une réponse négative est à prévoir, dans
la mesure où l’art.345-1 C.Civ ne vise que les époux. Par ailleurs, le
législateur, s’il octroyait cette possibilité aux couples hétérosexuels
« pacsés », devrait l’accorder de la même façon aux
homosexuels soumis au même statut ; or, ce serait paradoxal d’admettre
conjointement pour l’enfant un lien à
l’égard des deux partenaires homosexuels (lien de filiation adoptive à l’égard
de l’un, lien de filiation légitime ou naturelle à l’égard de l’autre), alors
que l’adoption commune leur est refusée.
De la même façon en
Allemagne, un époux a la possibilité d’adopter l’enfant de son conjoint (§1741
Abs.2 S.3 BGB) ; c’est l’hypothèse de la Stiefelternadoption.
Pourrait-il en être de même pour les partenaires homosexuels ? Comme en
France, la réponse à cette interrogation est négative. L’adoption par un
partenaire de l’enfant d’un premier lit de l’autre répond à un but
précis : générer une parenté commune (§1754 Abs.1 BGB), traiter
juridiquement l’enfant comme commun aux deux partenaires[96].
Ceci ne peut être admis, puisque l’adoption commune, qui répond au même
objectif, est refusée. Un partenaire pourrait certes adopter l’enfant de
l’autre, le prendre à sa charge, avec l’accord des parents, mais cet enfant
acquérrait le statut d’enfant adoptif du partenaire adoptant, et perdrait ainsi
le lien qu’il possède à l’égard du partenaire qui est son auteur (§1754 Abs.2
BGB)[97].
En matière d’adoption,
les législateurs ont voulu faire de l’intérêt de l’enfant le critère décisif à
prendre en compte pour accorder ou non un droit d’adoption à un
homosexuel ; c’est à cette occasion que se manifeste le caractère encore
hésitant de la reconnaissance de l’homoparentalité. L’opinion publique, qu’elle
soit française ou allemande, n’est pas prête à accepter la parentalité commune
de deux homosexuels, et cela se perçoit aussi en matière de PMA, pour laquelle,
rappelons-le, les lois sur les partenariats sont aussi muettes. Les partenaires
peuvent-ils pour autant être exclus de la PMA en vertu du droit commun ?
b- L’application du
droit commun de la PMA
La loi n° 94-654 du 29
juillet 1994 régit la procréation médicalement assistée en France. Cette
technique n’est réservée qu’aux couples formés d’un homme et d’une femme,
mariés ou pouvant prouver une vie commune d’au moins deux ans, à certaines
conditions strictes édictées par l’art. L152-2 CSP ( la PMA doit soit permettre
de remédier à une infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement
diagnostiqué, soit d’éviter la transmission à l’enfant d’une maladie d’une
particulière gravité). Les couples homosexuels sont exclus. Pour résumer, les
« pacsés » hétérosexuels peuvent avoir recours à la PMA, alors que
les « pacsés » homosexuels s’en voient refuser l’accès. Il y a une
divergence de traitement entre les couples à l’intérieur du même statut, mais
cette différenciation est fondée sur une nécessité de réalité biologique : alors que des
hétérosexuels pourraient, par un processus naturel, engendrer, les couples
homosexuels ne le peuvent pas.
En Allemagne, la loi sur
la protection de l’embryon du 13 décembre 1990 aborde la procréation
médicalement assistée en établissant son cadre juridique, mais aucune
réglementation précise et uniforme concernant les bénéficiaires de cette
technique n’est précisée : est-elle réservée aux seuls couples
hétérosexuels, comme en France ? Des directives de l’Ordre fédéral des
Médecins ont été édictées, et des lois éparses existent dans les Länder.
Certaines admettent la PMA pour les couples homosexuels, d’autres la leur
refusent. Un élément de réponse peut toutefois être apporté en se basant sur la
loi de 1989 sur l’entremise en matière d’adoption : cette loi interdit la
gestation pour le compte d’autrui. En outre, la loi de 1990 sur la protection
de l’embryon prohibe le don d’embryon et le don d’ovocyte. Ces considérations
conduiront à refuser la procréation assistée à des couples homosexuels
masculins, qui ne pourraient, pour procréer, recourir qu’à ces techniques
interdites. La jurisprudence nous donnera peut être des éléments de réponse
dans le futur.
Outre ces considérations
sur le droit des partenaires à avoir des enfants, il est un constat qui ne doit
pas être éludé : des enfants d’un premier lit peuvent être amenés à vivre
avec le couple de partenaires, et ils doivent disposer comme tous les enfants
d’un droit à être nourris, élevés et entretenus[98],
et d’un droit à être éduqués[99],
que les parents aient été mariés ou non
au moment de la naissance.
2. Les droits de l’enfant
Les rapports des partenaires à l’égard des enfants qui vivent au sein de
leur foyer sont différents selon que l’enfant est commun aux deux partenaires
ou qu’il est l’enfant de l’un seulement.
a- Les droits de l’enfant commun aux partenaires : une hypothèse
purement française
Lorsque l’enfant né au cours du partenariat a pour parents les deux
partenaires (cela ne concerne que les partenaires français puisque le Lebenspartnerschaft
n’est pas ouvert aux hétérosexuels), les droits dont il bénéficie à leur
encontre ne découlent pas du statut de « pacsés » de
ceux-ci. Le PACS est sans effet sur les règles de la filiation[100],
puisqu’il se contente de régler les rapports entre les partenaires, ignorant
purement et simplement les enfants. En ce qui concerne le soin, l’éducation des
enfants, et l’autorité parentale, le droit commun de la filiation trouve
application, et les dispositions qui concernent la filiation naturelle voient
leur champ d’application élargi aux « pacsés »[101].
Il est pertinent de se
demander si, en comparaison avec le mariage (qui légitime un enfant naturel né
antérieurement à sa conclusion) la passation d’un PACS change le statut de
l’enfant né avant que ses parents ne se «pacsent». La réponse est simple :
ce contrat n’ayant aucune incidence sur la filiation, l’enfant ne verra pas son
statut modifié. Est-ce alors à dire qu’un enfant né de relations adultérines
restera adultérin, quand bien même ses parents « officialiseraient »
leur relation en se « pacsant »[102]
? La situation est paradoxale mais sans réponse, la jurisprudence n’ayant pas
encore eu l’occasion de se prononcer. En outre, puisque la loi du 15 novembre
1999 se borne à ignorer l’enfant, pourrait-on admettre que le pacte civil de
solidarité, par analogie avec le mariage, inclut une présomption de paternité à
l’égard du partenaire de la mère ? En l’absence de précision expresse à ce
sujet, et d’autant plus que le PACS concerne aussi les couples homosexuels, il
serait déraisonnable d’admettre une telle présomption dans le cadre du PACS.
Par ailleurs, les partenaires n’étant pas soumis à une obligation légale de
fidélité, l’exclusion de la présomption de paternité se justifie. Une évidence
s’impose toutefois : dans le cadre d’une action en recherche de paternité
naturelle, le pacte qui aurait lié la mère à un homme au moment de la
conception de l’enfant pourrait être considéré comme « un indice
grave » au sens de l’art. 340 C.Civ, suffisant pour pouvoir établir
l’existence de relations sexuelles au moment de la conception, facilitant
l’action en recherche de paternité naturelle.
Lorsque l’enfant a pour parent
un seul des partenaires, et qu’il vit avec lui au sein du partenariat, le droit
français et le droit allemand gèrent différemment la relation
« enfant / beau-parent ».
b- Les droits de
l’enfant de l’un seulement des partenaires
Alors que le législateur français se refuse
purement et simplement à réglementer le lien qui les unit[103],
le législateur allemand innove en créant
en faveur du partenaire du parent de l’enfant une « petite autorité
parentale » ou kleines Sorgerrecht (Art.1 §9 LpartG), qui lui confère un certain nombre de
droits à l’égard de l’enfant. La distinction nettement visible entre le droit
français et le droit allemand souligne de façon marquée le caractère lacunaire
du texte français qui ne laisse aucune place aux enfants, alors que la réalité
est tout autre. Une fois encore, le législateur a redouté la parentalité
homosexuelle. En effaçant totalement l’enfant de la loi, et en ne trouvant
aucune situation médiane comme l’a fait le législateur allemand avec le kleines
Sorgerrecht, le législateur français a calmé les esprits
« horrifiés » par cette idée d’homoparentalité, au détriment d’un
enfant qui pourtant est bien présent[104].
La législation allemande
instaure donc au profit du partenaire homosexuel d’un parent qui exerce seul
l’autorité parentale, et en accord avec celui-ci, un pouvoir de décision
conjointe concernant les affaires de la vie de tous les jours de l’enfant[105],
et l’autorisation d’effectuer en cas de péril imminent[106]
tous les actes indispensables au bien de l’enfant (Art.1 §9 Abs.1 et 2
LPartG). Le kleines Sorgerrecht est conféré au partenaire du parent par
la conclusion du Lebenspartenerschaft, mais peut être limité ou exclu
par le tribunal de la famille, dès lors que l’intérêt de l’enfant l’exige
(Art.1 §9 Abs.3 LPartG). Par ailleurs, ce n’est pas un droit automatique pour
le partenaire en question, dans la mesure où le parent doit y donner son
accord. Il doit en outre être informé en cas de décision urgente
(Art.1 §9 LPartG). La motivation du législateur allemand est avant
tout d’assurer le bien de l’enfant, pour permettre son libre développement, et
un épanouissement optimal, le droit des parents passant en seconde position.
Ce droit conféré au
partenaire d’intervenir légalement dans les affaires qui concernent l’enfant de
son partenaire est la traduction légale des relations qui existent dans les
faits, mais doit, avant d’être perçu comme un droit du partenaire, être
considéré comme un devoir à l’égard de l’enfant. Le principe de
l’éducation des enfants dans la famille a une valeur institutionnellement
protégée par la Loi Fondamentale, beaucoup plus que toute forme collective
d’éducation. Le législateur allemand assimile quasiment le partenaire au
parent. En réalité, la notion de « personne qui élève l’enfant » se
substitue peu à peu à la notion de parent en matière d’éducation.
Le Congrès des Notaires
de France avait, en 1999, émis l’idée que des tiers (intervenant dans
l’éducation de l’enfant) se voient conférés par acte authentique le pouvoir
d’accomplir des actes de la vie courante de celui-ci, dans les mêmes conditions
que le devoir de soin attribué au
partenaire dans la loi allemande du 16 février 2001. Il désire symboliser
des liens de « solidarité familiale », sans qu’un lien de filiation
ne soit créé entre l’enfant et le « mandataire ».
Le devoir conféré au
partenaire d’intervenir en cas d’urgence implique un pouvoir de représentation
de l’enfant (mais qui se limite aux seuls actes qui sont utiles au bien de
l’enfant). Néanmoins, le partenaire est dans ce cas précis assimilé aux parents
qui, eux, disposent de l’autorité parentale. En effet, le §9 II est la
copie du §1629 Abs.1 S.4 BGB, qui offre ce même droit d’action aux époux en cas
d’urgence. C’est un raisonnement logique de la part du législateur allemand,
dans la mesure où le bien de l’enfant ne doit pas être limité à un quelconque
lien de filiation. Ce pouvoir de représentation ponctuel est considérable,
puisque le parent (celui qui ne vit pas avec l’enfant et qui ne dispose pas de
l’autorité parentale) se voit opposer par le partenaire de l’autre parent des
décisions qui concernent son enfant.
Le législateur allemand
pousse plus loin la légalisation des liens que le partenaire homosexuel
entretient avec l’enfant qui vit au sein du couple, rapprochant l’entité
« partenaires/enfants » de la famille au sens traditionnel du terme.
En effet, en cas de
rupture du partenariat le législateur offre au partenaire le droit de maintenir
des relations avec l’enfant ou Umgangsrecht (ce qui englobe un droit de
visite), à condition que l’enfant ait vécu pendant longtemps au sein du ménage
formé par les Lebenspartner (le §1685 Abs.2 BGB concernant les époux est
rendu applicable en matière de partenariat par l’Art.2 Nr.12 LPartG). Ce droit
du partenaire qui avait contribué à l’éducation de l’enfant est établi sans
préjudice du droit des parents à entretenir eux aussi des relations avec leur
enfant ( §1684 Abs.1 BGB), et n’est pas conditionné par l’attribution de
l’autorité parentale, mais sera permis dès lors que cela contribue au bien de
l’enfant. Le législateur allemand passe ici outre la vérité biologique à
laquelle il est tant attaché, pour favoriser la réalité affective et
sociologique. Il tient compte du vécu de l’enfant, de sa relation avec le
partenaire de son auteur, évitant une situation potentiellement catastrophique
pour l’enfant en cas de rupture du couple qui l’élève: se voir privé d’une
personne qui l’a, dans les faits, élevé et qu’il considère comme son
« deuxième papa » ou sa « deuxième maman », pour la seule
raison qu’il ne vit, avec elle, que des liens affectifs, et non juridiques.
Enfin, le législateur
allemand applique aux Lebenspartner le §1682 BGB relatif au lieu de
résidence de l’enfant (Art. 2 Nr.11 LPartG). En vertu de ce paragraphe, modifié
par la loi du 16 février 2001, le tribunal de la famille peut décider du
maintien de l’enfant avec le partenaire homosexuel de son parent (décédé par
exemple), dès lors que l’autre parent (qui pourrait alors décider seul du lieu
de résidence de l’enfant) veut le retirer au partenaire en question. Le
tribunal doit se décider de la sorte dès lors qu’il en va de l’intérêt de
l’enfant, qui a vécu pendant longtemps avec le partenaire en question, et dont
le bien physique ou moral serait mis en danger par son transfert chez le parent
qui en est demandeur. Notons que la seule condition, outre le fait qu’il en va
de l’intérêt de l’enfant, est qu’il ait vécu pendant longtemps au sein du
ménage formé par son parent et le partenaire de celui-ci. La notion de longévité
n’est pas plus explicitée par le législateur, et cela laisse une porte ouverte
à l’appréciation au cas par cas du tribunal de la famille qui va pouvoir, en
ayant égard à la relation dont il sera question, considérer que l’enfant a vécu
pendant une durée assez longue pour fonder le droit au maintien avec son
« beau-parent », ou en revanche estimer que ce n’est pas le cas. Les
tribunaux, s’ils font preuve de trop de rigueur, risqueront de briser ce que la
loi a établi en faveur du partenaire homosexuel.
C’est une concession
importante qui est faite par le législateur allemand aux Lebenspartner,
pour assurer le bien de l’enfant. Le pas est franchi : la totale
reconnaissance du couple homosexuel, traduite par la place qui lui est faite
dans l’éducation de l’enfant, s’est substituée à son ignorance. Le législateur
allemand n’en est pas resté à ce stade : il a créé par ailleurs certains
liens familiaux.
B. Relations avec la
famille : un concept absent de la législation française mais
fondateur des relations allemandes
La loi allemande met
en place un lien de parenté entre les ascendants de chaque partenaire (désignés
par le terme Verwandten) et l’autre partenaire (Art.1 §11 Abs.2
LPartG) ; ils seront considérés comme des alliés, ce que le législateur a
établi avec l’expression «sie gelten als verschwägert ». Ce lien
n’est pas détruit par la dissolution du Lebenspartnerschaft qui y a
donné naissance. Il existe une particularité que le juriste français peut
soulever : en cas de dissolution du partenariat, les liens juridiques
unissant les partenaires sont totalement détruits, alors que la parenté liant
chaque partenaire avec la famille de l’autre survit. Elle ne dépend plus du
lien « d’alliance » qui unit les partenaires. Serait-elle devenue un
élément de la personnalité, comme le nom ? Ces dispositions sont les
copies conformes de ce qui est prévu par le §1590 BGB en matière de mariage.
En revanche, en
France, le pacte civil de solidarité ne crée aucune relation familiale entre un
des « pacsés » et la famille de l’autre. Le PACS a pour but essentiel
l’organisation de la vie commune des partenaires, et les relations familiales
n’en font pas partie. Il faut remarquer en outre qu’un pacte est, pour le
législateur, bien plus un contrat qu’une Institution à l’image du Mariage. La
création de tout lien de parenté serait paradoxale avec sa nature de contrat.
Le législateur, en
Allemagne, veut préserver la famille et l’instauration du lien de parenté va permettre
la protection des partenaires; en effet, en vertu du lien créé, les alliés
pourront refuser de témoigner les uns contre les autres dans une procédure, ce
qui ne peut être le cas en France pour un partenaire à l’égard de la famille de
sa compagne (ou compagnon). Ce droit survivra après la fin du partenariat.
Les relations avec les
autres tiers sont tout à fait différentes : la spécificité conditionnée
par les liens affectifs disparaît, laissant majoritairement la place à des
droits au profit des partenaires.
§2 : Les relations avec les autres tiers
Les « autres
tiers » sont ceux qui ne sont pas considérés comme des proches des
partenaires. Ceux-ci pourront invoquer des droits à leur égard, et cela
concerne les relations contractuelles en matière de bail (A) et les relations
contractuelles avec l’employeur (B). Les partenaires sont certes créanciers
d’un droit à leur égard, mais le droit invoqué ne sera pas une dette d’argent.
A. Relations contractuelles en matière de bail ;
une protection analogue des partenaires dans les deux systèmes, mais des
conditions d’octroi différentes
Les
relations en matière de bail se rapportent à deux cas de figure : d’une
part, les relations des partenaires à l’égard de leur bailleur, et d’autre part
les relations d’un partenaire bailleur à l’égard de ses locataires.
1. Les droits des partenaires à
l’égard du bailleur
C’est à
l’égard du logement commun que la situation des concubins homosexuels était
particulièrement critique, les tribunaux refusant de leur accorder le transfert
du bail en cas de décès du concubin titulaire du contrat de bail (et les
tribunaux français ne leur octroyant pas non plus le droit de continuer le bail
en cas d’abandon du domicile par le locataire). Aujourd’hui, les dispositions
des lois du 15 novembre 1999 et du 16
février 2001 accordent ce droit aux partenaires « pacsés » (quelle
que soit leur orientation sexuelle) ou unis par un Lebenspartnerschaft.
La protection du partenaire « survivant » est donc assurée selon une
même technique en France et en Allemagne, mais les conditions de l’octroi de ce
droit présentent une petite différence dans les deux pays.
L’art.14 de loi du 15
novembre 1999 a modifié la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 relative aux rapports
locatifs, et notamment son art.14, qui prévoit le transfert du contrat de
location à certaines personnes qui vivent avec le locataire (conjoint,
descendants, personnes à charge) au moment du décès de celui-ci. A présent, le
«pacsé » survivant non partie au contrat de location bénéficie lui aussi
d’un droit au transfert du contrat de location à son profit. Pareillement, en
vertu de ces nouvelles dispositions, le partenaire pourra continuer le contrat
de location en cas d’abandon brusque du domicile par le partenaire locataire[107].
La notion de continuation du bail en cas
d’abandon du domicile familial est inconnue en tant que telle en Allemagne,
aussi bien en matière conjugale que pour les partenaires. Ils ne sont pas pour
autant désarmés : les dispositions concernant « l’affectation du
logement familial » (Wohnungszuweisung) en cas de séparation
de fait des partenaires (Art.1 §14 LPartG) seront appliquées.
En revanche, en cas de
décès du titulaire du bail, le législateur allemand a établi un droit de
substitution du Lebenspartner survivant à la place du locataire décédé
qui vivait avec lui (Art.2 Nr.3 LPartG qui modifie le §569 BGB relatif aux
rapports locatifs). Le droit allemand évoque un droit « d’entrée »
dans le contrat de location (Eintrittsrecht in der Mitvertrag). Un
principe important est respecté : en cas de décès du locataire, les
rapports locatifs doivent passer à la succession ; or, le Lebenspartner
étant institué héritier légal, il est normal qu’il poursuive le contrat de
location en cette qualité. Qu’en est-il alors s’il est exhérédé ? La
jurisprudence est muette, elle se prononcera peut-être en matière de
partenariats. Ce droit n’est toutefois pas absolu, dans la mesure où le
bailleur peut, dans un délai donné, résilier le bail à l’encontre du Lebenspartner
nouveau preneur, pour des raisons importantes qui relèvent de la personne du
locataire ( §569 Abs.4 nouveau BGB).
Toutefois, la loi
allemande soumet l’attribution de ce droit à une condition plus restrictive que
la simple vie commune (qui est la seule condition en France). Afin que le Lebenspartner
se substitue à son partenaire décédé, il doit avoir « conduit avec lui un
ménage commun » (« Gemeinsamen Haushalt führen ».) La
LPartG ne définit pas ce que signifie cette obligation de gestion d’un ménage
commun. Elle ne renvoie pas non plus au
§1356 BGB, qui traite du Haushaltsführung ou « gestion du
ménage », et qui la définit comme l’ensemble des activités
extrapatrimoniales qui consistent à s’occuper du foyer commun, des tâches de
gestion du ménage commun, et qui sont réglées d’un commun accord par les époux.
Néanmoins, même en l’absence d’un renvoi exprès à cette définition, son contenu
doit s’appliquer aux partenaires, un « ménage » relevant de la même
définition que ceux qui le tiennent soient
homosexuels ou hétérosexuels. D’ailleurs, pour la jurisprudence, un
ménage commun suppose des liens internes entre les partenaires, une prise en
charge mutuelle, avec une communauté de logement et une communauté économique.
Ces caractéristiques se retrouvent en matière de partenariat.
Ni la loi française ni la
loi allemande ne mettent à la charge des partenaires une condition de durée de
vie commune dans les lieux pour avoir le droit d’y être maintenu.
Enfin, en Allemagne,
le partenaire est préféré à d’autres personnes qui vivent dans le logement, en
ce qui concerne l’attribution du droit au bail en cas de décès du locataire.
Cependant, si des enfants du locataire vivent dans le logement, il est mis sur
le même plan qu’eux, et sera titulaire du bail avec eux (§569 Abs.2
nouveau BGB).
En France, le
« pacsé » pourra bénéficier du transfert du contrat de location dès
lors que des descendants du locataire ne vivaient pas dans le logement depuis
au moins un an à la date du décès (art.14 al 2 de la loi du 6 juillet 1989.) Le
droit français est plus sévère que le droit allemand, car il fait passer les
enfants avant le partenaire. C’est la preuve de l’attachement du législateur
français à la famille, dont il exclut les « pacsés », à la différence
du législateur allemand qui justement les en rapproche.
En ce qui concerne le
droit au bail, il est intéressant de conclure sur une réforme prévue en
Allemagne (Mitrechtsreform) qui doit entrer en vigueur le 1er septembre
2001, et qui instaure expressément en faveur des homosexuels, indépendamment de
l’existence d’un Lebenspartnerschaft, le droit de continuer le contrat
de bail de leur concubin homosexuel qui décède (à condition qu’il y ait eu une
vie commune dans le logement)[108].
Les Lebenspartner disposeront par conséquent de deux moyens d’action
pour bénéficier du transfert du bail du partenaire décédé, mais leur statut de Lebenspartner
leur confèrera un rang plus favorable que le rang de simple concubin dès lors que
d’autres personnes (outre les enfants) vivent dans le logement.
2. Les droits d’un partenaire bailleur à l’égard de ses
locataires
Le bailleur dispose en
France du droit de délivrer un congé-reprise à son locataire (art.15 de la loi
du 9 juillet 1989) dès lors qu’il veut habiter lui-même dans les lieux loués,
ou y loger ses proches ( conjoint, concubin notoire, descendants…). La loi du
15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité ajoute à cette liste de
bénéficiaires le partenaire du bailleur, auquel il est lié par un PACS.
La loi allemande
n’établit pas de disposition analogue.
Les tiers sont aussi les
employeurs avec lesquels l’un des partenaires a conclu un contrat de travail.
B. Relations avec l’employeur
Il existe en France
une situation spécifique à certains fonctionnaires, qui, du fait de leur statut
d’époux, bénéficient de priorités d’affectation afin que soit facilité le
rapprochement familial. Simultanément, certains avantages sont accordés à des
salariés, fonctionnaires ou non, également grâce à leur statut d’époux. La loi
sur le pacte civil de solidarité étend le bénéfice de ces avantages aux
partenaires liés par un PACS.
Les partenaires, en
Allemagne, devraient eux aussi bénéficier de droits à l’égard de leur
employeur, particulièrement en ce qui concerne le statut des fonctionnaires et
les promotions du travail. Ces dispositions ne trouvent pas encore application,
dans la mesure où elles figurent dans la loi qui n’a pas reçu l’assentiment du
Bundesrat. Notons seulement qu’un premier pas a été franchi en matière de lutte
contre la discrimination dont sont victimes les homosexuels dans le monde du
travail. En effet, un élargissement de la loi sur l’organisation du travail
dans les entreprises est à l’étude au Bundestag, qui aura pour conséquence
l’introduction d’une nouvelle interdiction en matière de discrimination :
l’interdiction de la discrimination en raison de l’orientation sexuelle.
L’art.8 de la loi du
15 novembre 1999 rend applicable aux partenaires d’un PACS les articles L
223-7, L226-1 et L 784-1 du Code du Travail.
En vertu de l’art. L
223-7 C.trav, l’employeur doit tenir compte, pour déterminer l’ordre des
départs en congé de ses salariés (à condition que cet ordre ne résulte pas des
stipulations des conventions ou accords collectifs de travail ou des usages) de
leur situation familiale, notamment des
possibilités de congé du conjoint. La conclusion d’un pacte civil de solidarité
relève donc de la situation familiale à laquelle doit se référer l’employeur,
au même titre que le mariage. Le choix de la terminologie est paradoxal, dans
la mesure où en matière civile, les partenaires ne sont pas considérés comme
membres de la même famille.
Les partenaires qui
travaillent dans une même entreprise ont droit à des congés simultanés.
L’art. L 226-1 C.trav
est relatif aux congés pour évènements familiaux. En application de ce texte,
tout salarié bénéficie notamment d’une autorisation d’absence de quatre jours
lorsqu’il se marie, d’une autorisation d’absence de trois jours lorsqu’une
naissance survient dans son foyer ou en cas d’adoption, et d’une absence deux
jours lors du décès de son conjoint ou d’un enfant. Les auteurs sont divisés
quant à la transposition de ces permissions d’absence en faveur des salariés
partenaires d’un PACS. Certains estiment entre autres que
l’autorisation d’absence de quatre jours doit leur être accordée pour la
conclusion d’un PACS, comme l’exige le législateur[109] ;
d’autres au contraire refusent l’application de ces quatre jours en matière de
partenariat[110]. Il reste
à souhaiter que la jurisprudence apporte une réponse, mais ne pourrait-on pas
considérer que la volonté du législateur a bien été de transposer tous les
délais concernés par l’art. L 220-6 C.trav, et qu’aucune distinction
n’est à faire puisque le législateur ne l’a pas expressément prévu.
Enfin, l’art. L 784-1
C.trav rend le code du travail applicable au salarié conjoint du chef
d’entreprise, dès lors qu’il exerce son activité sous son autorité, qu’il
participe effectivement à l’entreprise ou à l’activité de son époux à titre
professionnel et habituel, et qu’il reçoit une rémunération horaire minimale
égale au salaire minimum de croissance.
Les dispositions du code du travail (sur le salarié et sa protection,
les congés payés) concerneront par conséquent également le partenaire
« pacsé » du chef d’entreprise, lorsque toutes les conditions de
l’art. L 784-1 C.trav sont remplies.
En outre, les
« pacsés » fonctionnaires bénéficient des priorités d’affectation de
la fonction publique, qu’il s’agisse de la fonction publique de l’Etat[111],
de la fonction publique territoriale[112],
ou de la fonction publique hospitalière[113] ;
ces priorités d’affectation ont pour but d’assurer le rapprochement du
fonctionnaire et de son partenaire « pacsé ». Cela concerne
majoritairement les cas où le fonctionnaire a dû s’éloigner pour des raisons
professionnelles, et qu’il fait une demande de mutation dans le but de se
rapprocher de son partenaire. Beaucoup de concubins hétérosexuels se
« pacsent » pour bénéficier des avantages que sont les priorités
d’affectation, et les PACS blancs risquent d’être nombreux pour ces motifs. Le
Conseil Constitutionnel a validé l’octroi de priorités d’affectation aux
« pacsés », au motif qu’il n’y a aucune rupture d’égalité entre
« pacsés » et concubins, les situations différentes dans lesquelles
ils sont placés exigeant un traitement différent.
Les partenaires ont
des droits à l’égard de ces tiers parce qu’ils sont déterminés dans une
relation juridique (contrat de travail ou contrat de location). Mais les
partenaires peuvent invoquer le partenariat à l’égard de tiers, indépendamment
d’un contrat. C’est la question du statut juridique des partenaires étrangers
§3 : L’incidence des
partenariats sur le statut des étrangers
Il n’est pas interdit de
se « pacser » avec une personne qui n’aurait pas la nationalité
française. Il est, de la même façon, impensable de refuser la conclusion d’un Lebenspartnerschaft
entre un ressortissant allemand et une personne qui ne le serait pas. La
conclusion d’un partenariat n’est dans aucune loi conditionnée par la
nationalité, ce serait une discrimination. La question qui se pose est de
savoir dans quelle mesure un partenariat enregistré va influencer le statut de
cet étranger, quels sont les avantages que cela va lui apporter, si cela va lui
permettre d’invoquer le droit de rester sur le territoire national. Toutes ces
questions concernent les droits des partenaires avec les tiers, dans la mesure
où ce sont des droits qu’ils vont revendiquer à l’encontre des autorités
administratives compétentes. Les droits ainsi acquis vont être opposés à tous
tiers.
La conclusion des partenariats influence dans
une certaine mesure « l’intégration » sur le territoire national des
étrangers (A), et cela a pour contrepartie le risque de conclusion de
partenariats blancs (B).
A.
Les
avantages accordés ou refusés aux étrangers
La législation française ne confère pas automatiquement la nationalité
française à l’étranger qui a conclu un pacte civil de solidarité avec un
ressortissant français. Il peut invoquer une naturalisation, mais devra suivre
la procédure légale, c’est à dire justifier d’une résidence habituelle en
France de cinq ans au moins au moment de sa demande.
En Allemagne, l’Art.3 §1
LPartG modifie le §9 I StAG (loi relative à la nationalité). Le partenaire
étranger est soumis aux mêmes conditions que l’époux étranger pour être
naturalisé allemand. Plus qu’en France, le partenariat allemand ouvre des
facilités pour la naturalisation. Il en va de l’unité familiale chère au
législateur allemand.
Le pacte a d’autres
conséquences favorables pour l’étranger en France : il s’avère utile pour
l’obtention d’un permis de séjour sur le territoire français.
L’art.12bis de
l’ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 autorise la délivrance de plein
droit d’une carte de séjour d’un an portant la mention « vie privée et
familiale ». L’alinéa 7 ce cet article ouvre ce droit à « l’étranger
dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d’autoriser
son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une
atteinte disproportionnée au regard des motifs de refus ». Ainsi, même si
la loi du 15 novembre 1999 ne permet pas automatiquement l’attribution d’une
telle carte de séjour, la conclusion d’un PACS s’avère être un élément
d’appréciation des liens personnels créés en France par cet étranger (art.12 de
la loi du 15 novembre 1999). Cet élément doit être corroboré par l’existence
d’une communauté de vie affective des partenaires[114],
renforcé par la justification du caractère notoire et relativement ancien de la
relation de couple en France, et de l’impossibilité de poursuivre une telle
relation à l’étranger. La jurisprudence française a eu pour la première fois à
se prononcer sur l’incidence de la conclusion d’un PACS sur le droit des
étrangers en matière de reconduite à la frontière
En l’espèce, un ressortissant
de nationalité algérienne avait conclu un pacte civil de solidarité avec un
homme français le 29 novembre 1999, alors qu’il était arrivé en France le 8
septembre 1998 muni d’un visa de court
séjour. Il a fait l’objet d’un arrêté du préfet du Rhône de reconduite à
la frontière le 9 mars2000, ce qu’il a contesté au motif que cet arrêté porte
atteinte au respect dû à sa vie privée et familiale que lui assure l’art.8 de
la Convention Européenne des Droits de l’Homme et que cette atteinte est
disproportionnée par rapports aux buts en vue desquels il a été pris. Saisi
d’une demande en annulation, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu’il n’était porté aucune atteinte à sa vie
privée et familiale, dans la mesure où « le caractère récent des liens
noués dans le cadre du pacte civil de solidarité était manifeste, compte tenu
de la durée et des conditions de séjour de l’intéressé » (TA Lyon, 6
avril 2000, JCP éd. G 2000 II, 10 349, Note Fulchiron).
En Allemagne, le Lebenspartnerschaft
joue un rôle à la fois en matière d’autorisation d’entrée sur le territoire et
en matière d’autorisation de résidence. Une autorisation d’entrée est délivrée
à un partenaire si l’autre est allemand (§23 AuslG). Si les deux partenaires
sont étrangers, le §27a AuslG s’applique, identique aux dispositions qui
concernent le rapprochement familial : une demande fondée sur le
rapprochement peut être accueillie si les relations existaient avant l’entrée
en Allemagne du premier partenaire, qu’elles présentent une certaine
persistance, même dans le cas où le partenariat n’est pas encore conclu (mais
doit l’être). L’octroi est laissé à l’appréciation du service des étrangers (Ausländer
Behörde), il s’agit d’un pouvoir discrétionnaire de l’administration. Par
ailleurs, si l’étranger possédait déjà une autorisation de séjour sur le
territoire allemand, et qu’il a connu son partenaire actuel pendant ce séjour,
il n’est attendu de lui aucun séjour d’un an à l’extérieur du territoire
allemand pour l’octroi d’une nouvelle autorisation de résidence afin d’établir
le partenariat.
Le Lebenspartnerschaft
favorise l’obtention de permis de travail pour l’étranger, sans délai d’attente
lorsque son partenaire est allemand ou citoyen européen ; un délai
d’attente s’impose dans les autres cas (de un an à six ans).
B.
Le risque
de partenariats fictifs
Les partenariats sont
pris en compte pour le droit des étrangers à établir un lien (nationalité,
résidence) avec le territoire national allemand ou français, mais les
législations prennent soin de limiter la force des partenariats en la matière,
exigeant toujours que la relation qu’ils matérialisent ne soit pas fictive. Ces
dispositions (délais à respecter, preuve de l’existence réelle de relations
affectives) visent à lutter contre les « PACS blancs » et les « Scheinpartnerschaften »
(partenariats fictifs) qui risquent de se multiplier. Le partenariat fictif
est celui conclu dans le seul but d’avoir une autorisation d’entrée ou de
séjour, et dans lequel les partenaires n’ont aucune volonté d’être soumis aux
droits et obligations légales. Ils ne désirent bénéficier que des avantages,
sans les inconvénients. En Allemagne, un tel partenariat est frappé
d’inefficacité (Art.1 §1 LPartG), en France, il serait nul. Cette nullité est
soumise à une double condition : que le partenaire français ait
connaissance du motif qui animait l’étranger, et qu’un tiers agisse, car il ne
peut pas invoquer sa propre turpitude.
Le partenariat doit être
une fin en soi, en aucun cas un moyen d’accéder à ces seuls avantages. Les
partenaires bénéficient de ces droits s’ils en acceptent en contre partie les
obligations. Ces obligations sont entre autre contenues dans les relations
patrimoniales qui complètent les rapports personnels.
Section 2 : Les
relations patrimoniales entre tiers et partenaires
La relation
patrimoniale entre tiers et partenaires suppose des transferts de biens ou d’argent,
les uns ayant la qualité de créancier, les autres celle de débiteur. Chaque
partenaire est investi d’un pouvoir de gestion (sur les biens du ménage en
Allemagne, sur les biens indivis en France) et chacun peut traiter avec les
tiers mais en principe en accord avec l’autre partenaire. Il existe néanmoins
des cas difficiles où l’un peut être dans l’impossibilité de donner son
consentement (il est hospitalisé par exemple) et un consensus ne peut de ce
fait être obtenu. La situation ne doit pas pour autant rester bloquée.
En Allemagne, les
partenaires ont une obligation générale d’assistance mutuelle (Beistand)
et de ménagement (Rücksicht), qui ne cesse pas si l’un des partenaires
est dans l’impossibilité d’exprimer sa volonté. En revanche, cette obligation
va permettre à l’autre de prendre des décisions au nom des deux , ne
serait-ce que dans les actes de la vie courante ; la possibilité pour le
partenaire d’agir seul à l’égard des enfants de l’autre en cas d’urgence en est
la preuve.
Contrairement à la
législation allemande, aucune mesure n’est spécifiquement prévue en cas de
situation difficile pour les partenaires français, qui autoriserait l’un à
gérer seul les biens du couple et ceux de l’empêché. Un seul moyen est offert
aux partenaires, préservant les biens indivis seulement ; c’est une
technique du droit des biens : les indivisaires peuvent établir en faveur
de l’un un mandat général d’administration, ou même un mandat spécial
(art.815-3 C.Civ)[115],
en vertu duquel il peut agir sans le consentement des autres (leur consentement
est tacite par l’effet du mandat). En outre, si l’un des indivisaires est
« hors d’état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter
par la justice à le représenter, d’une manière générale ou pour certains actes
particuliers, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixée
par le juge » (art.815-4 C.Civ).
Cette technique est
offerte aux partenaires parce qu’ils ont la qualité d’indivisaire, et non sur
le fondement de leur qualité de partenaire. Il n’existe aucune disposition
analogue aux articles 217 et 219 du code civil, grâce auxquels un des époux
peut être autorisé à passer seul un acte pour lequel le concours de son
conjoint est nécessaire, quand celui-ci est hors d’état de manifester sa volonté.
Les relations juridiques
avec les tiers sont source de droits et obligations pour les partenaires. Ils
ont des droits en tant que créanciers (A) et des obligations en tant que
débiteurs de tiers (B).
§1 : Les partenaires
créanciers
La conclusion d’un
partenariat a deux types d’incidences quant au statut des partenaires en
matière de dettes : soit elle leur confère la qualité de créancier (A),
soit elle la leur retire (B).
A. Acquisition de la qualité de créancier en vertu de la conclusion
du partenariat
Les droits créés sont
essentiellement de nature sociale et tiennent compte en Allemagne de la
situation patrimoniale du partenaire non assuré et en France, de la qualité
d’ayant droit du partenaire non assuré. Peu importe le fondement, le résultat
est le même : la volonté d’assurer à ce partenaire des prestations
minimums, en particulier quand il ne peut lui-même l’assurer. La volonté de
préserver le partenaire lorsque l’autre décède est une préoccupation présente,
particulièrement importante en France puisque le partenaire est exclu de la
succession. L’un des partenaires peut-il invoquer une qualité de créancier
d’aliments à l’égard de la succession de son partenaire décédé ?
1.
Situation en
matière de Sécurité Sociale
L’art. L 161-14 CSS,
modifié par l’art.7 de la loi du 15 novembre 1999 permet au partenaire
« pacsé » qui est à la charge effective totale et permanente de son
partenaire assuré social de bénéficier de la qualité d’ayant droit de celui-ci
pour « l’ouverture du droit aux prestations en nature des assurances
maladie et maternité », dès lors qu’il ne peut être couvert à titre
personnel, et ceci automatiquement dès la conclusion du pacte. Les conditions
de preuves pour l’octroi de cette prestation sont cumulatives ; il s’agit
d’attester le fait d’être à la charge de l’assuré[116],
de ne pas relever d’un régime obligatoire d’assurance ; par ailleurs
aucune condition de durée du partenariat n’est exigée.
En Allemagne, la
conclusion d’un partenariat entraîne l’intégration du partenaire sans revenus
propres et de son enfant dans « l’assurance familiale », c’est-à-dire
celle dont son partenaire est le souscripteur. Il recevra, dès lors qu’il n’a
pas de revenus, et sans même avoir besoin de verser lui-même les cotisations,
des prestations d’assurance maladie légales ou Krankenversicherung (Art
3 §52 Nr.4 LPartG modifie en ce sens le §10 I S.1 et S. 3 de la cinquième
partie du Sozialgesetzbuch), et
des prestations d’assurance santé[117]
(Art 3 §56 Nr.6 LPartG modifie le §25 I, II, III de la partie précitée). Les
partenaires sont mis sur un plan d’égalité avec les époux, le mariage conférant
les mêmes droits aux époux. Le fait que les partenaires soient responsables et
garants l’un de l’autre justifie ces prestations.
2.
Le droit à un
capital décès
En Allemagne, les
ayants droit de l’assuré décédé ont un sort encore incertain, puisque les
dispositions qui concernent l’obtention d’un « capital décès » (Hinterbliebenenversorgung)
pour les ayants droit de l’assuré figurent dans la loi qui n’a pas encore été
votée au Bundesrat. Cela n’est donc pas exclu, mais en attente.
En France, le but d’un
capital décès est d’apporter une aide immédiate et ponctuelle à ceux qui
étaient à la charge effective, totale et permanente de l’assuré au moment du
décès ; c’est une allocation de secours. Dès lors que plusieurs personnes
remplissent ces conditions, la loi instaure un ordre de priorité entre elles,
plaçant le conjoint ou le partenaire de l’assuré social en tête, avant même les
enfants. Ces dispositions résultent de l’art. L361-4 CSS, modifié par l’art.9
de la loi relative au PACS.
Il est intéressant de
souligner que l’ouverture du droit à des prestations sociales, en France, est
non exclusivement conditionnée par l’existence d’un partenariat ; les
simples concubins peuvent bénéficier de ces prestations, dès lors qu’ils sont à
la charge effective, totale et permanente de l’assuré. Or, la qualité de
« pacsé » confère un meilleur rang puisqu’un ordre est établi entre
les ayants droits (art. L 361- CSS) ; elle permet surtout à un partenaire
homosexuel d’accéder à des droits qui lui seraient refusés en tant que concubin
(ces droits nécessitant que l’ayant droit mène une vie maritale avec l’assuré
(art. L161-14 CSS par exemple), notion que refuse la jurisprudence aux
couples homosexuels).
Le survivant
acquiert-il la qualité de créancier de la succession du partenaire
décédé en vertu de sa qualité de partenaire?
3.
Le partenaire
est-il créancier de la succession du partenaire décédé ?
En France, dès lors
qu’il est considéré que l’aide mutuelle et matérielle s’apparente au devoir de
secours qui existe entre époux, alors cette obligation peut être transmise aux
héritiers, comme c’est le cas en matière de mariage. Pour éviter toute
incertitude à ce sujet liée à la liberté d’un tribunal d’en décider ainsi ou
non, les parties auraient tout intérêt à le prévoir contractuellement.
En Allemagne, la
situation ne se règle pas conventionnellement, mais légalement : l’appartenance
familiale instituée par l’Art.1 §11 LPartG entraîne l’application aux
partenaires du §1969 BGB, qui autorise le conjoint déshérité, donc
également le partenaire, à demander à la succession une créance alimentaire
pendant les trente jours qui suivent la mort du conjoint (ou du partenaire),
ceci parce qu’il est membre de la famille du de cujus. Une condition doit être
remplie : que les partenaires aient vécu ensemble jusqu’à la mort du de
cujus (condition qui paraît logique si on admet comme condition du Lebenspartnerschaft
que les partenaires vivent ensemble). Encore une fois, les droits créés en
Allemagne sont certains, le partenaire même déshérité ne doit pas rester dans
le besoin.
La qualité de
créancier peut malheureusement être perdue du fait de la conclusion d’un
partenariat.
B. Perte de la qualité de créancier en raison de la conclusion du
partenariat
Il existe un certain
nombre d’aides ou d’allocations dont le versement est conditionné par
« l’isolement » de la personne bénéficiaire. Dès lors que celle-ci
conclut un partenariat, elle perd cette qualité de « personne
isolée », et par la même le droit d’être créancière de ce type
d’allocation. En ce qui concerne les prestations familiales et assimilées, les
partenaires d’un pacte civil de solidarité se voient appliquer les dispositions
relatives aux personnes vivant en concubinage (art. R. 553-2 CSS)[118].
Ainsi, l’allocation de soutien familial versée au parent qui assume seul la
charge d’un enfant n’est plus accordée à celui-ci s’il se « pacse »
(art. L 523-2 CSS modifié par l’art. 10 de la loi de 1999.) Il en est de même
pour l’allocation veuvage, versée au conjoint survivant d’un assuré social
(art. L 356-3 CSS modifié par l’art. 11 de la loi de 1999). Enfin l’allocation de parent isolé (art. L 524-1
CSS) cesse d’être versée quand son bénéficiaire conclut un partenariat. En
effet, « toute personne isolée résidant en France et assumant seul la
charge d’un ou plusieurs enfants bénéficie d’un revenu familial dont le montant
varie avec le nombre d’enfants », et « est considérée comme isolée la
personne veuve, divorcée, séparée de droit ou de fait, abandonnée ou
célibataire, sauf si elle vit maritalement ». La personne en question n’est
logiquement plus « isolée » lorsqu’elle se « pacse ».
Il existe d’autres
allocations dont la perte n’est pas conditionnée par la conclusion d’un pacte,
mais qui peut en être favorisée. En France, les allocations considérées comme
minima sociaux (minimum invalidité, minimum vieillesse, allocation de
solidarité spécifique, revenu minimum d’insertion, aide au logement…) ne sont
versées que lorsque les ressources du bénéficiaire auxquelles se cumulent
celles de son conjoint n’atteignent pas un certain plafond. Aux conjoints sont
maintenant assimilés les partenaires, ainsi leurs ressources sont prises en
compte pour l’appréciation du dépassement ou non de ce plafond.
En Allemagne, la même
logique s’applique pour l’attribution d’aides sociales aux personnes sans
emploi (Arbeitslosenhilfe établie par la troisième partie du Sozialgesetzbuch) :
cette allocation prend en compte les revenus du partenaire du chômeur, et elle
ne sera pas versée si un certain plafond est dépassé.
L’attribution d’une
allocation logement ou d’autres aides sociales (par modification de la loi sur l’aide
sociale étatique) sont prévues dans la loi qui n’a pas encore été votée.
Les partenariats
n’octroient pas que des avantages : certes, ils favorisent l’acquisition
d’un certain nombre de prestations par les partenaires, mais ils contribuent
aussi souvent à la perte de la qualité de créancier ; surtout ils
instaurent une obligation fondamentale au partenaire d’un débiteur.
§ 2 : Les partenaires débiteurs
Lorsqu’un des
partenaires a la qualité de débiteur, il est légitime de permettre à son
créancier d’être protégé de façon certaine contre son éventuelle insolvabilité.
La conclusion d’un partenariat modifie le rapport d’obligation dans la mesure
où le créancier n’a plus un seul et unique débiteur, mais deux débiteurs
solidaires : les partenaires (A). Il existe des cas où les partenaires
sont débiteurs d’un créancier particulier (l’Etat) et les règles sont en
l’espèce particulières (B).
A. La solidarité passive des partenaires
Cette solidarité
passive est la conséquence logique de l’obligation d’aide pécuniaire réciproque
que les partenaires doivent s’apporter : unis dans la créance, unis dans
la dette. Les deux prennent en charge les dépenses qui les concernent
mutuellement, quand bien même l’un seulement l’aurait contractée. Néanmoins,
cet engagement de l’un par les actes de l’autre ne doit pas être sans limite.
1.
Les cas
d’engagement de la solidarité des partenaires et les exclusions : des
systèmes analogues
a- Les cas
d’engagement de la solidarité
En établissant une telle
solidarité, le législateur a en 1999 construit un second type de solidarité
ménagère d’origine légale (le premier étant la solidarité des époux.)
Les créanciers des
partenaires sont favorisés par rapport aux créanciers des simples concubins,
car ceux-ci ne sont débiteurs solidaires que si une clause de l’opération
donnant naissance à la dette le prévoit[119].
Les créanciers sont certes favorisés, encore faut-il qu’ils aient connaissance
de l’existence du pacte.
L’art.515-4 al 2 pose
le principe de solidarité des partenaires en matière de dettes, ceci à deux
conditions cumulatives : la dette doit avoir été contractée par l’un au
moins des partenaires[120],
et pour les besoins de la vie courante ou pour les dépenses relatives au
logement. Lorsque la solidarité joue, le créancier peut saisir l’un ou l’autre
des partenaires pour la totalité de la dette contractée (même si elle l’est par
l’un seulement). Le parallèle est ici clairement établi avec la solidarité des
époux de l’art.220 C.Civ[121].
Toutefois le législateur n’a pas repris
la formule consacrée aux époux alors que le but de la solidarité est le même
dans les deux cas. La voie est ouverte à deux interprétations : soit le
législateur a totalement voulu ignorer le régime légal de solidarité des époux,
soit il s’en inspire sans juger utile de le reprendre textuellement, laissant
la possibilité aux tribunaux saisis d’un litige d’appliquer les principes
connus à propos des époux.
Les notions de dettes
contractées pour les besoins de la vie courante et pour les dépenses relatives
au logement méritent explications.
La loi ne donne aucune
définition des besoins de la vie courante. De manière stricte, le terme
« besoin » renvoie à ce qui est nécessaire, tout ce qui ne le serait
pas absolument étant exclu. Avec « besoins de la vie courante », le
législateur désigne les dépenses de la vie quotidienne, qui ne sont pas de
luxe. Certains auteurs parlent de dépenses fréquentes[122].
Notons toutefois que c’est une notion fluctuante, qui varie d’un couple à
l’autre, en fonction de leurs revenus, de leur train de vie, de l’importance de
la dette et de son utilité. Cette notion couvre entre autre l’achat de
nourriture, de meubles, et de choses
destinées uniquement à l’un des partenaires (comme des vêtements). Deux types
de dépenses soulèvent des difficultés. L’une est liée au silence de la loi,
l’autre à l’association de la solidarité et de l’indivision.
La première difficulté
concerne les dépenses relatives à des enfants qui, contrairement à ce que veut
penser le législateur, peuvent tout à fait grandir au sein du couple. Avec cet
oubli, le législateur place le PACS loin de la notion de « famille »,
laissant a priori au seul parent la charge de son enfant. Cet
« oubli » du législateur peut
être contourné, dans la mesure où les dépenses liées à l’éducation des
enfants sont susceptibles d’entrer dans le registre des dépenses contractées
pour les besoins de la vie courante (les besoins scolaires, médicaux). La porte
est laissée ouverte à l’interprétation de la jurisprudence qui pourrait
considérer qu’en excluant l’éducation des enfants du champ légal de la
solidarité, le législateur n’a pas du tout voulu les y faire entrer.
La seconde difficulté
est liée à l’association légale d’indivision et de solidarité. Considérons
l’achat par les partenaires d’un meuble meublant (un réfrigérateur par exemple)
et admettons que les parties aient exclu dans le pacte la présomption
d’indivision pour de tels biens. Le bien appartient alors à celui qui l’a
acheté en propre ; il s’agit d’une question de propriété du bien acheté.
Or, dans le PACS, le paiement d’un bien acheté n’est pas lié à la propriété.
L’achat du bien meuble meublant entre dans les dépenses relatives aux besoins
de la vie courante pour lesquels les partenaires sont tenus solidairement. On
aboutit à la situation paradoxale où le partenaire non-acquéreur n’est pas
propriétaire mais est néanmoins tenu au paiement de la dette, situation
d’autant plus injuste lorsqu’il n’a pas été mis au courant de l’achat. La
solidarité dans ce cas s’explique comme la contrepartie de l’utilisation du
meuble meublant par les deux partenaires.
Le législateur
envisage la solidarité des « pacsés » pour les dettes contractées pour le
logement commun, lieu où habitent ensemble les partenaires. Les dépenses ainsi
visées n’exigent pas, d’après l’art.515-4 C.Civ, le caractère utile de la
dépense contractée alors que celles relatives aux besoins de la vie courante
impliquent cette utilité. L’ajout de cette précision par le législateur n’est
donc pas superflu.
Les partenaires sont
tenus de la même façon qu’ils soient tous les deux locataires ou propriétaires
du logement, ou que l’un des deux seulement en ait la qualité. Lorsque les
partenaires sont propriétaires, les charges de copropriété ainsi que l’achat du
logement commun sont considérés comme une telle dépense, même si les avis sont
partagés (certains l’excluent, car l’achat d’un logement commun est une
opération d’investissement n’entrant pas dans le cadre de l’art.220 C.Civ qui
vise au contraire les opérations de consommation; puisque c’est exclu pour les
époux, cela peut l’être par analogie pour les partenaires; pour S. Pierre, qui
s’en tient à la lettre du texte, il ne faut pas exclure l’achat du logement de
la solidarité). Lorsque les partenaires sont locataires, les « dettes
contractées pour le logement commun » sont les loyers, les charges
locatives, les dettes d’amélioration du logement, les dépenses accessoires du
logement commun (entretien et rénovation), et les factures (eau, électricité, chauffage).
De façon récurrente se
pose le problème de la confrontation des règles de l’indivision et de la
solidarité. Un exemple sera parlant. Les travaux d’entretien dans le logement
commun indivis, comme la pose d’un
nouveau papier peint, sont des actes d’administration, qui requièrent le
consentement de tous les indivisaires (art.815-3 C.Civ). L’action sans l’accord
de l’autre se solde normalement par la nullité de l’acte entrepris ; il
est dans la plupart des cas simplement inopposable au partenaire récalcitrant.
Par ailleurs, en vertu de l’art.515-4 C.Civ, les partenaires sont
solidairement tenus pour les dépenses relatives au logement commun (que l’un
l’ait fait avec ou sans l’accord de l’autre). Une situation paradoxale voit
encore une fois le jour. Le partenaire sera solidaire d’une dépense dont l’acte
générateur lui est inopposable. Quel droit faut-il dans ce cas appliquer ?
Le problème se situe dans les rapports créancier/partenaire du débiteur ;
il faut donc appliquer les dispositions relatives à cette relation c’est à dire
celles de l’art.515-4 C.Civ ; la solidarité joue.
En Allemagne, l’Art.1
§8 Abs.2 LPartG renvoie à l’application du §1357 BGB qui énonce la théorie du
mandat domestique entre époux (Schlüsselgewalt). Cette théorie habilite
chaque partenaire à passer envers l’autre les actes destinés à satisfaire de
façon appropriée les besoins de la famille, et
de tels actes font naître des droits et obligations à l’égard des deux
partenaires, sauf s’il en va autrement des circonstances (§1357 S.1 BGB). Aujourd’hui
ce mandat domestique concerne les deux époux, alors qu’auparavant il était
édicté en faveur du seul époux (souvent la femme) qui avait la charge du ménage
et qui était amené à passer des actes nécessaires à ce foyer.
De tels actes font
naître des doits et des obligations à l’égard des deux partenaires, ce qui
signifie que les deux sont tenus solidairement, et la notion de solidarité des
partenaires est la même qu’en France[123].
Les actes destinés à
satisfaire de façon appropriée les besoins de la famille sont ceux qui sont
d’une part nécessaires aux besoins de la famille et d’autre part qui y
répondent de façon convenable. C’est comme en France (sauf pour les dépenses
relatives au logement commun) la nécessité et l’utilité de l’acte qui commandent
la solidarité des partenaires. Les besoins de la famille sont ceux de chacun
des partenaires et des enfants qui vivent avec eux (que le législateur n’ignore
pas par sa référence à la « famille »). Entrent dans cette définition
les actes d’entretien de la famille, les besoins de consommation (nourriture,
vêtements, meubles) ainsi que les besoins du logement (eau, électricité,
rénovation…). Sont exclus les actes qui déterminent les conditions de vie de la
famille ou qui entraînent des changements fondamentaux dans celle-ci (l’achat
d’un logement). C’est un moyen d’assurer la participation de chaque partenaire
aux besoins vitaux minimum de la famille. Tout ce qui a été dégagé de la
définition française doit ici s’appliquer, les « besoins de la famille »
étant la traduction allemande de « besoins de la vie courante et dépenses
relatives au logement ».
Une difficulté est
liée à l’acte générateur de solidarité, qui découle à la fois de la formulation
du §1357 BGB (création de « droits et obligation ») et du caractère
dualiste de la notion d’acte juridique en Allemagne : il peut être acte
obligationnel (qui crée des obligations à l’égard des parties et qui relève du
droit des obligations) ou acte de disposition (par lequel un droit est
transmis, modifié ou grevé, qui relève du droit des biens). Ces deux types
d’acte permettent-ils la création de « droits » tels que visées par
le §1357 BGB ? La Cour Fédérale de justice[124]
avait décidé que « le §1357 BGB ne développe aucun effet en droit des
biens, c’est à dire que l’époux qui n’a pas passé personnellement l’acte ne
participe pas à l’acquisition du droit réel correspondant, sauf si la volonté
des parties au contrat a été exprimée en ce sens lors de l’aliénation »[125].
C’est une position contestable dans la mesure où le §1357 parle « droits
et obligations ». La jurisprudence pourra se prononcer en matière de
partenariat.
Il est impossible
d’évoquer la solidarité sans prévoir des garde-fous.
b- Les limites à la
solidarité
Dans les deux systèmes,
l’exclusion de la solidarité résulte de la rédaction des articles. En France,
l’absence de disposition légale explicite limitant la solidarité a suscité des
doutes. Le Conseil Constitutionnel a
bien vite précisé que : « l’instauration de la solidarité ne saurait
toutefois faire obstacle, en cas d’excès commis par l’un des partenaires, à
l’application de règles de droit commun relatives à la responsabilité
civile ». C’est certes un remède, mais cela n’empêchera pas la solidarité
de jouer. Elle reste le principe. C’est dangereux pour les partenaires, et
sévère pour celui qui veut se faire indemniser parce qu’il aurait été contraint
de verser, du fait de la solidarité, une somme élevée pour lui. En effet, il
supportera la charge de la preuve d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de
causalité, sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code Civil.
Or, à l’examen de
l’article 515-4 C.Civ, la solidarité pour les besoins de la vie courante
comporte ses propres limites ; la solidarité exige, comme il l’a déjà été
précisé, des dépenses qui au regard du train de vie des partenaires ne sont pas
excessives. Cette limite ne concerne pas d’après la lettre de l’art. 515-4
C.Civ les dépenses engendrées pour le logement commun. Les parties sont
néanmoins libres d’inclure dans le contrat une clause fixant par exemple une
somme au-delà de laquelle la dépense serait excessive.
De la même façon en
Allemagne, le législateur restreint la solidarité aux actes absolument
nécessaires aux besoins de la vie de la famille. La notion de nécessité est
appréciée exactement comme en France. Il existe des limitations supplémentaires
au jeu de la solidarité en Allemagne, qui ne sont pas implicites. Tout d’abord
le §1357 Abs.2 BGB dispose « qu’un époux (ou partenaire) peut limiter ou
exclure le pouvoir de l’autre de passer des actes produisant des effet à son
égard ». C’est une limitation conventionnelle qui, pour être opposable aux
tiers, exige qu’ils en aient connaissance. Ensuite, elle est écartée quand «les
circonstances exigent qu’il en soit autrement » ( §1357 BGB). C’est
par exemple le cas où l’un des partenaires est mandataire de l’autre et informe
son cocontractant qu’il ne souhaite pas lui-même s’engager. Enfin, les
partenaires ne sont pas solidaires quand ils vivent séparés de fait (§1357
BGB). A ce propos, la jurisprudence française a précisé que « la
séparation de fait laisse subsister les obligations nées du mariage »,
mais elle est dans l’ensemble hésitante. Qu’en sera-t-il des
« pacsés » ? La question de l’application de la jurisprudence
sur le mariage est ouverte.
Concernant la fin de la
solidarité, la loi du 15 novembre 1999 ne prévoit rien, ni même la loi
allemande. Il faut admettre que la solidarité cesse lorsque la fin du PACS est
opposable aux tiers, ceux-ci ne pouvant plus l’exiger à l’encontre des
partenaires à ce moment. En matière de mariage la solidarité prend fin entre
époux quand le jugement de divorce a été transcrit sur les actes de l’état
civil. La fin du PACS est opposable aux tiers quand la déclaration de rupture
est transcrite sur l’acte de PACS.
En Allemagne, la
solidarité ne joue pas quand les partenaires vivent séparés de fait. C’est très
protecteur et la solidarité prend fin avec la rupture du partenariat. La
législation allemande lie solidarité à effectivité de la vie commune.
Quand se pose la
question de la solidarité, se pose immanquablement la question des biens
saisissables par le créancier en la faveur duquel joue la solidarité. Un
partenaire peut en outre être débiteur à titre individuel et non solidaire d’un
créancier ; sur quel bien se fera le paiement ?
2.
Les biens
saisissables par les créanciers
Les créanciers des partenaires solidaires sont traités de la même façon
en France et en Allemagne : les partenaires solidaires répondent chacun de
la dette sur leurs biens personnels. En France, les biens saisissables sont les
biens propres de chacun, et les biens indivis.
La même logique guide
le législateur allemand et le créancier des partenaires solidaires a des droits
sur les biens propres de chacun (il n’existe pas, tout au moins dans le régime
légal de gestion des biens, de masse de biens communs).
En revanche, les
créanciers personnels de l’un des partenaires sont favorisés en Allemagne, par
l’instauration d’un système de présomption en leur faveur, système qui découle
directement du partenariat. L’Art.1 §8 Abs.1 LPartG présume que les choses
mobilières qui sont en possession de l’une des parties ou des deux
appartiennent au débiteur. C’est une présomption favorable au créancier de l’un.
Normalement, celui-ci ne peut saisir que les biens propres de son
débiteur ; mais il n’est pas toujours facile de prouver la propriété
notamment celle des biens meubles corporels quand ils servent à l’usage des
deux et qu’aucun acte d’acquisition n’en atteste la propriété[126].
Cette présomption est
exclue quand les partenaires sont séparés de fait, ce qui est logique
puisqu’elle est liée à l’usage commun du bien en question. Sont exclus de la
présomption les biens qui se trouvent en la possession de celui qui n’est pas
débiteur car il n’y a, dans ce cas, aucun doute sur la propriété du bien ;
la chose est présumée appartenir à celui qui s’en sert.
Il n’est pas admis en
France que le créancier personnel d’un partenaire (pour une dette née après la
conclusion du pacte) puisse saisir la part de son débiteur dans les biens
indivis, le bien indivis lui-même, ni les biens propres du partenaire non
débiteur. Le législateur allemand, avec le paragraphe 8, veut régler une
situation parce qu’elle génère un doute à propos de la propriété du bien, ce
qui conditionne sa saisie ou non. Le législateur français a réglé ce doute en
instaurant la présomption d’indivision : tout bien pour lequel il n’est
pas prouvé qu’il appartient personnellement à l’un tombe en indivision. Alors
que la présomption allemande favorise le créancier personnel d’un des
partenaires, la présomption française protège d’avantage le partenaire débiteur
à titre individuel : le bien dont on ne peut prouver la propriété tombe en
indivision, échappant au créancier de ce partenaire.
Les partenaires
français sont également solidaires pour le paiement de l’impôt de solidarité
sur la fortune (art. 1723 ter 00-B CGI), de l’impôt sur le revenu et de la taxe
d’habitation (art. 1685 CGI). Examinons
plus particulièrement la situation des partenaires en matière d’impôts et de
droits de mutation à titre gratuit.
B. Les partenaires débiteurs en matière d’impôts et de droit de
mutation
Le lien qui se crée
entre les partenaires ne peut être
ignoré en matière fiscale : les partenaires sont obligés durant leur vie
commune de s’apporter des aides
financières et sont solidaires pour les dettes de la vie courante. Toutes ces
obligations doivent avoir pour contrepartie des avantages en matière
d’imposition. Les législateurs leur ont donc créé des statuts fiscaux
s’inspirant des couples mariés.
En Allemagne, les
dispositions fiscales prévues figurent dans la loi qui, n’ayant pas encore reçu
l’assentiment du Bundesrat, ne peut être appliquée. Pour les résumer
brièvement, il s’agit d’un alignement des partenaires sur la situation des
époux en matière d’imposition successorale (Erbschaftssteuer) et
d’impôts sur les donations (Schenkungssteuer). En matière d’imposition
sur le revenu, le partenariat est tout autant pris en compte, car il permet
entre autre des abattements fiscaux, instaurés en compensation de l’obligation
alimentaire que les partenaires se doivent.
En France, une
imposition commune et un système spécifique d’imposition en matière de droits
de mutation à titre gratuit fondent le statut des « pacsés ».
1.
L’imposition
commune des partenaires d’un PACS
La loi du 15 novembre
1999 modifie le Code Général des Impôts, en y introduisant les
« pacsés » : la loi prévoie une imposition commune des
partenaires au titre de l’impôt sur le revenu et au titre de l’impôt de
solidarité sur la fortune.
L’imposition commune
des revenus n’est pas immédiate dès la conclusion du pacte : elle
s’applique à compter de l’imposition des revenus de l’année du troisième
anniversaire de l’enregistrement du contrat (art 6-1 al. 3 CGI). Un tel
délai est nécessaire pour lutter contre les « PACS blancs »,
certaines personnes ne voulant bénéficier que de ces avantages considérables
sans en supporter les inconvénients. Le délai de trois ans qui conditionne
l’imposition commune atteste de la réalité des relations.
L’imposition sera
établie au nom des deux partenaires et ils ne constituent plus qu’un seul foyer
fiscal. C’est une disposition impérative à laquelle les partenaires ne peuvent
déroger en établissant deux déclarations séparées.
À la fin du
partenariat, chacun redevient imposable personnellement sur les revenus obtenus
pendant l’année de déclaration de cette rupture (art 6-7 al.1er CGI,
ajouté par l’art. 4 II de la loi du 15 novembre 1999). Ceci admet une
exception : quand le PACS prend fin par mariage des deux partenaires,
l’imposition commune est maintenue. Si le contrat prend fin par décès d’un
partenaire le survivant est personnellement imposable pour la période
postérieure au décès.
Les mécanismes fiscaux
d’imposition sont maintenus car l’art. 4 III de la loi du 15 novembre 1999
stipule que « les règles d’imposition et d’assiette, les règles de
liquidation et de paiement de l’impôt sur le revenu et des impôts directs
locaux ainsi que celles concernant la souscription des déclarations et le
contrôle des mêmes impôts prévus par le Code Général des Impôts et le livre des
procédures fiscales… s’appliquent aux partenaires liés par un pacte civil de
solidarité qui font l’objet d’une imposition commune. »
En ce qui concerne
l’impôt de solidarité sur la fortune, les partenaires y sont soumis dès la
conclusion du pacte, aucune condition de durée du partenariat n’étant exigée
(art. 885 A modifié par l’art. 6 I de la loi relative au PACS).
Une instruction fiscale
du 30 décembre 1999 a étendu des époux aux « pacsés » l’imposition commune en matière de taxe
d’habitation relative à leur habitation principale. L’imposition, l’assiette,
la liquidation, et le contrôle de la taxe concernant les époux s’appliquent aux
partenaires.
Il est pertinent de
s’interroger sur les avantages accordés par l’imposition commune aux
partenaires, par rapport à la situation qui aurait été la leur s’ils étaient
restés concubins. À certains égards elle permet aux « pacsés » de
réaliser des économies d’impôts, dès lors qu’ils ont des revenus très
disproportionnés ou que l’un a des revenus imposables que l’autre n’a pas.
Les partenaires liés
par un pacte bénéficient en outre d’une réduction du taux des droits de
mutation à titre gratuit.
2. Le régime fiscal propre
aux partenaires en matière de libéralités
La réduction du taux
des droits de mutation à titre gratuit reste quand même bien moins avantageuse
pour les partenaires que celle frappant les époux. Les mesures accordées
concernent les abattements conférés, et les taux d’imposition favorables (par
rapport à la situation des concubins).
L’art. 5 III de la loi
du 15 novembre 1999 complète l’art. 799 CGI : « Il est effectué un
abattement de 300 000 Fr. pour la perception des droits de mutation à titre
gratuit et ceci sur la part du partenaire lié au donateur ou au testateur par
un PACS ». Pour les mutations à titre gratuit entre vifs consenties par
actes passés à compter du 1er janvier 2000 et pour les successions
ouvertes à compter de cette date, le montant de l’abattement est de 375 000 Fr.
L’abattement ne s’applique qu’aux donations consenties après le deuxième
anniversaire de la date d’enregistrement du pacte. En revanche, le partenaire
bénéficie de l’abattement prévu dès l’ouverture de la succession, même si
celle-ci s’ouvre moins de deux ans après l’enregistrement du pacte.
En ce qui concerne les
taux d’imposition s’appliquant à une libéralité consentie à un partenaire
(après abattement), l’art. 5 I de la loi du 15 novembre 1999 insère un art. 777
bis dans le Code Général des Impôts. Cet article dispose que : « la
part nette taxable revenant au partenaire lié au donateur ou au testateur par
un pacte civil de solidarité… est soumise à un taux de 40 % pour la fraction
n’excédant pas 100 000 Fr. et un taux de 50 % pour le surplus ». Il
s’agit d’un véritable avantage par rapport aux concubins qui sont taxés à 60 %,
sans distinguer en fonction du montant de la fraction de part nette taxable. En
revanche, les époux sont mieux lotis en la matière : le taux de 40 %
s’applique à eux au-delà de 11 200 000 Fr.
Le partenaire
bénéficie en outre du « non rappel » des donations consenties depuis
plus de dix ans, cela signifie que lorsqu’un délai de dix ans sépare deux donations
ou une donation et l’ouverture de la succession, l’abattement prévu peut de
nouveau s’appliquer (art. 784 CGI) pour le paiement des droits de
mutation.
C’est en conséquence
un statut favorable qui est conféré aux partenaires, certes moins avantageux
que celui des époux, mais non négligeable puisque les concubins quant à eux ne
disposent d’aucun abattement et d’un taux d’imposition nettement plus élevé.
Le Conseil
Constitutionnel a validé ces multiples dispositions, justifiant cela par le
fait que les avantages accordés sont la contrepartie du régime obligatoire
contraignant de l’aide mutuelle et matérielle ou de la solidarité.
C’est néanmoins un
texte flou à certains égards que le
législateur a produit en France. Face à ces manques, la jurisprudence choisira-
t-elle d’établir un régime uniforme valable quel que soit le couple,
« pacsé » ou marié, hétérosexuel ou homosexuel (en matière de
solidarité par exemple) ? Choisira-t-elle de consacrer les
différences ? La première solution est plus favorable, notamment aux
créanciers qui seraient protégés de la même façon face à un couple de
« pacsés » ou face à un couple marié.
CONCLUSION
u |
ne constatation s’impose : quel est finalement le bilan à tirer des débats parlementaires houleux, des critiques doctrinales, des attaques à l’égard de la constitutionnalité de la loi française ou de la conformité de la loi allemande à la Loi Fondamentale ?
La conclusion est uniforme, ne laisse pas la place à l’hésitation : les lois ont bénéficié d’un accueil favorable dans l’opinion publique, d’autant plus paradoxal en France qu’il est certain que la loi y est incomplète.
Les sondages effectués aussi bien en France qu’en Allemagne en attestaient déjà avant le vote des lois. Une enquête SOFRES, réalisée par le magazine TETU, montre que 70% des Français sont favorables au pacte civil de solidarité, dont 27% très favorables[127]. En Allemagne, 54% de la population est en faveur d’un partenariat enregistré[128], 86% de la population est prête à accepter l’assimilation des partenaires aux époux pour le droit au bail et 72% de l’opinion consent à l’assimilation des partenaires aux conjoints en matière de droit successoral[129].
Le succès de la loi allemande est incontestable, le nombre de partenariats enregistrés le jour même de l’entrée en vigueur de la loi le prouve : cent partenariats auraient déjà été enregistrés dans toute l’Allemagne (mis à part en Bavière)[130]. Dans certains Etats, il était prévu que 600 partenariats soient conclus au mois d’août 2001[131]. En France, l’accueil de la loi du 15 novembre 1999 a été tout aussi considérable. D’après le Ministère de la Justice, 6211 PACS ont été signés en fin d’année 1999, et plus de 19 000 PACS ont été conclus entre le 15 novembre 1999 et le 30 juin 2000, dont 75 % par des couples homosexuels[132]. Ils ne cachent pas leur joie, ces textes expriment pour eux l’égalité retrouvée, l’espoir de reconnaissance plus forte. Certains l’écrivent aux députés défenseurs de la loi[133] en faisant référence au problème du sida.
Les droits et les obligations des partenaires s’apprécient en fonction de l’intérêt qu’ils tirent du statut qui leur est conféré, leurs prérogatives doivent être certaines. Les avantages offerts aux partenaires ne laissent aucun doute en matière d’obligations pécuniaires entre eux : une contribution réciproque réelle existe, composante principale du régime légal obligatoire, en France tout au moins. Cette prise en charge pécuniaire commune se double d’un devoir de soutien affectif et moral en Allemagne, volet important de la loi. Envers les tiers, les avantages pécuniaires sont certains : les partenaires ont des droits sociaux et fiscaux non négligeables.
Du recul doit nécessairement être pris par rapport à ces lois trop neuves pour qu’une conclusion définitive soit tirée. Tous droits se doublent d’obligations, et tout texte créateur d’un statut, parce que contraignant, n’a pas que des côtés positifs. La solidarité des partenaires peut s’avérer injuste, surtout si celui qui n’a pas contracté personnellement la dette n’en est pas au courant. En France, les principaux litiges résulteront essentiellement du caractère trop flou de la loi, et la liberté contractuelle des parties instaurée par le législateur comme un palliatif aux manques dont il a conscience ne règle pas tout. Les incertitudes ne manqueront pas quand le PACS sera rompu, car les droits et obligations ne sont pas suffisamment définis par la loi : des obligations financières existent sans leur contrepartie morale ; les partenaires ne sont pas forcément au courant de leurs obligations à l’égard des tiers : qui pensera à exclure l’indivision en bloc pour les meubles meublants dans l’acte d’institution du PACS ? Qui pensera à l’exclure pour les « autres meubles » dans l’acte d’acquisition ? Les partenaires français devront être vigilants lors de la conclusion d’un pacte civil de solidarité, d’autant plus que l’assistance d’un professionnel du droit n’est pas requise pour la validité de l’acte conclu.
En Allemagne, ces questions ne se poseront pas : les parties, obligées de déterminer un régime de gestion de leurs biens, sont conscientes des obligations qui leur incombent. Si elles n’optent pas pour le régime légal, l’intervention d’un notaire est exigée, facilitant la rédaction de la convention.
Par conséquent, le Lebenspartnerschaft mérite son qualificatif de statut juridique des couples, car les droits et les obligations qu’il instaure sont très précisément réglés. Elles le sont à un tel point que l’autonomie de la volonté des parties tient une faible place dans l’organisation de leurs relations. La preuve en est que le partenariat ne doit pas être fait sous condition, et que, dans le doute, toute clause conventionnelle non strictement séparée de l’acte de partenariat entraînerait son inefficacité. En revanche, par comparaison avec le statut instauré en Allemagne, le statut français apparaît comme lacunaire ; la seule base qui relève d’un statut est le caractère obligatoire des relations pécuniaires. Les enjeux politiques du PACS ont conduit à une loi incomplète, caractérisée par de prudents mais lourds silences, des manques incontournables pourtant (les enfants sont ignorés). Le législateur a voulu traiter deux problèmes bien différents dans une même loi : celui des couples qui ne veulent pas se marier et celui de ceux qui ne le peuvent pas ; cela a conduit aux défaillances du texte législatif. Pour un auteur, ces compromis politiques ont donné naissance à un «camouflage législatif»[134], que le Conseil Constitutionnel a dû préciser, se faisant «législateur bis».
Le choix de l’évocation ou non des enfants en matière de couple hors mariage soulève une question majeure : l’union hors mariage fonde t-elle une famille ? Mais, qu’est-ce que la famille ? Est-ce uniquement le couple formé par les parents et leurs descendants ? Les descendants doivent-ils être communs aux deux ? La notion est aujourd’hui controversée en France. Elle l’est d’autant plus avec l’instauration d’une entité qui y ressemble : les partenaires vivant avec leurs enfants. En Allemagne, c’est une notion strictement protégée par la Cour Constitutionnelle Fédérale : la famille implique potentialité de reproduction, c’est à dire l’homme, la femme et leurs enfants. La notion traditionnelle de famille est quelque peu bouleversée par la loi sur les partenariats : les partenaires homosexuels ne peuvent avoir d’enfants communs, le partenariat ne crée pas une famille, mais les relations qu’il instaure sont familiales. Une précision de la notion de famille s’impose.
La question de la réforme de la notion de famille est en réalité plus vaste, car elle conduit à évoquer la réforme du droit lui-même de la famille, en chantier actuellement en France. Le législateur français entreprend aujourd’hui ce que le législateur allemand a réalisé depuis quelques années déjà : faire de la famille un lieu de construction et de repère pour l’enfant (quelles que soient les circonstances de la naissance), rendre le droit plus adapté aux modes de vie (notamment lorsque des familles sont recomposées), et assurer l’équilibre entre l’évolution des mœurs, la liberté individuelle et l’organisation nécessaire de la société. Pour assurer cela, le législateur français entend entre autre définir un droit commun de tous les enfants, déjà institué par le législateur allemand depuis quelques années ; il entend aussi par exemple admettre un aménagement de l’accouchement sous X et un accès encadré aux origines personnelles, pour ne pas priver l’enfant de son histoire. Le droit à la connaissance de ses origines affirmé en 1989 par la Cour Constitutionnelle Fédérale allemande obéit aux même fondements. Le législateur français, avec la réforme du droit de la famille, s’inspire grandement de la législation allemande en la matière.
Finalement, les droits ne sont pas enfermés dans des carcans opaques : ils se ressemblent, ils sont divergents, ils s’inspirent les uns des autres, et sont constamment en corrélation. Pour preuve, la presse relatait récemment « Union franco-allemande ; le député allemand Volker Beck a annoncé son intention de s’unir avec son ami français Jacques Kaufmann, scellant les premières noces homosexuelles du Bundestag »[135]. Le droit international privé n’est pas loin…
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages français
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2001 ; p.151 : C. Dorsel, « Grundzüge des neuen
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http://www.sospapa.net/articles
http://www.gruene-fraktion.de
http://www.justice.gouv.fr/presse/reffam.htm
http://www.lsvd.de
TABLE DES MATIERES
Section I : L’état des lieux avant l’adoption d’une réglementation sur les
partenariats enregistrés______________________________________ 7
§1 : Le constat d’un manque___________________________________________ 7
§2 : Les difficultés rencontrées et les propositions qui se sont succédées_________ 9
Section II : L’adoption de loi du 15 novembre 1999 relative au PACS et de la loi du
16 février 2001 relative à la fin de la discrimination à l’égard des
concubins de même sexe (Lebenspartnerschaft ou partenariat de vie)__11
§1 : Bref exposé des deux lois__________________________________________ 12
§2 : Le problème de la conformité des lois aux Constitutions respectives________ 15
obligations des partenaires_________________________ 18
Section 1 : Les rapports non patrimoniaux entre les partenaires________________18
§1 : L’obligation de vie commune, fondement des partenariats________________ 18
A : Des textes équivoques_________________________________________ 18
B : Les constituants de la vie commune______________________________ 19
§2 : Les devoirs moraux des partenaires, des notions divergentes_______________ 21
légaux en Allemagne__________________________________________ 21
B : Une
répudiation libre en France, une rupture
encadrée en Allemagne________________________________________ 23
1. Les modes de rupture en France : absence de
considération de la personne de l’autre_________________ 23
2. La rupture encadrée en Allemagne,
preuve
de l’engagement moral________________________ 25
C : L’appartenance familiale en Allemagne___________________________ 27
§3 : Le nom commun des partenaires : légal en Allemagne, ignoré en
France_________________________________________________________ 28
Section 2 : Les rapports patrimoniaux entre les partenaires____________________ 30
§1 : Les rapports au cours du partenariat__________________________________ 30
A : Les obligations pécuniaires des
partenaires :
une notion plus large en Allemagne qu’en France__________________ 31
1. Définitions_______________________________________ 31
a. La définition française d’obligation pécuniaire entre partenaires_____________ 31
b. La définition allemande d’obligation pécuniaire entre partenaires____________ 33
2. Champ d’application_______________________________ 34
B : Des régimes de gestion de biens différents_________________________ 35
1. Les caractéristiques des régimes de gestion de biens______ 35
2. Les limites de gestion individuelle des
biens qui servent au ménage________________________ 38
C : La séparation de fait
des partenaires allemands
ou Getrenntleben_____________________________________________ 40
§2 : Les rapports à la fin du partenariat, des obligations
aux fondements différents__________________________________________ 40
A : Fin du partenariat par rupture (Aufhebung)_______________________ 40
1. Le sort de l’obligation alimentaire et de l’aide mutuelle
et matérielle à la fin du partenariat___________________ 41
2. La liquidation des droits et obligations au moment
de la rupture____________________________________ 43
3. Le problème de l’engagement de la
responsabilité d’un partenaire_______________________ 45
B : Fin du partenariat par la mort d’un partenaire_____________________ 47
Chapitre II : Les droits et les
obligations vis-à-vis
des tiers au
couple____________________________ 51
Section 1 : Les relations personnelles entre tiers et partenaires________________ 52
§1 : Les relations avec les « proches » des partenaires_______________________ 52
A : Relations avec les enfants_____________________________________ 52
1. Un droit à l’enfant ?_______________________________ 53
a. L’application du droit commun de l’adoption___________________________ 53
b. L’application du droit commun de la PMA_____________________________ 55
2. Les droit de l’enfant_______________________________ 56
a. Les droits de l’enfant commun aux partenaires : une hypothèse
purement française_______________________________________________ 56
b. Les droits de l’enfant de l’un seulement des partenaires___________________ 57
B : Relations avec la
famille : un concept absent de la
législation
française mais fondateur des relations allemandes__________________ 59
§2 : Les relations avec les autres tiers____________________________________ 60
A :
Relations contractuelles en matière de bail ; une protection
analogue des partenaires dans les deux systèmes, mais
des conditions d’octroi
différentes_______________________________ 60
1. Les droits des partenaires à l’égard du bailleur___________ 60
2. Les droits d’un partenaire bailleur à l’égard
de ses locataires___________________________________ 62
B : Relations avec l’employeur____________________________________ 62
§3 : L’incidence des partenariats sur le statut des étrangers___________________ 64
A : Les avantages accordés ou refusés aux étrangers___________________ 65
B : Le risque de partenariats fictifs_________________________________ 66
Section 2 : Les relations patrimoniales entre tiers et partenaires________________ 67
§1 : Les partenaires créanciers__________________________________________ 68
A : Acquisition de la qualité de
créancier en vertu
de la conclusion du partenariat_________________________________ 68
1. Situation en matière de Sécurité Sociale________________ 68
2. Le droit à un capital décès___________________________ 69
3. Le partenaire est-il créancier de la succession
du partenaire décédé ?______________________________ 69
B : Perte de la qualité de créancier en raison
de la conclusion du partenariat_________________________________ 70
§2 : Les partenaires débiteurs__________________________________________ 71
A : La solidarité passive des partenaires____________________________ 71
1. Les cas d’engagement de la solidarité des partenaires et
les exclusions : des systèmes analogues________________ 71
a. Les cas d’engagement de la solidarité__________________________________ 71
b. Les limites à la solidarité____________________________________________ 75
2. Les biens saisissables par les créanciers________________ 76
et de droit de mutation_______________________________________ 77
1. L’imposition commune des partenaires d’un PACS_______ 77
2. Le régime fiscal propre aux partenaires
en matière de libéralités_____________________________ 78
Conclusion______________________________________________ 80
Bibliographie___________________________________________ 83
Table des matières______________________________________ 86
Annexes (non jointes à ce document en raison de leur volume)
[1] Les premières revendications datent des années 80, et sont dues à l'action d'associations de lutte contre le sida, qui réclament l'élaboration de droits civils et sociaux en faveur des homosexuels.
[2] NIEMEYER,Wirtschaft und Statistik, 1994,
p.504 et suivantes.
[3] Berliner Zeitung, 1er août
2001.
[4] D 1998, jurisprudence, p111, note
Weber.
[5] JCP éd. G, 1998 II 10093, note A.
Djigo.
[6] TGI Belfort, 25 juillet 1995, JCP édition générale, 1996 II 22724, note Paulin.
[7] Cour Fédérale de Justice, 13 janvier 1993, (BGHZ 121, 116)
[8]« Le PACS entre haine et amour », Roselyne BACHELOT-NARQUIN.
[9] Loi n°99-944 du 15 novembre 1999.
[10] Gesetz zur Beendigung der Diskriminierung
gleichgeschlechtlicher Gemeinschaften : Lebens- partnerschaften, vom 16. Februar 2001 (Bundesgesetzblatt 2001
Teil I Nr 9).
[11] « Entwurf eines Gesetzes zur
Einführung des Rechts auf Eheschliessung für Personen gleichen
Geschlechts », du 25 octobre 1995.
[12] « Entwurf eines Gesetzes zur
Regelung der Rechtsverhältnisse nichtehelicher Lebensgemeinschaften », du
14 mars 1997.
[13] « Entwurf eines Gesetzes zur
Durchsetzung des Gleichbehandlungsgebotes des Artikels 3 Grundgesetz
(Gleichbehandlungsgesetz) » du 9 mars 1998.
[14] « Eingetragene Partnerschaft »,
le 10 juillet 1998.
[15] « Entwurf eines Gesetzes zur Beendigung
der Diskriminierung gleichgeschlechtlicher Gemeinschaften: Lebenspartnerschaft
–LPartG-. »
[16] « Bundestag hat das folgende
Gesetz beschlossen ».
[17] Par exemple, les Etats de Berlin, de Bremen ou de Hamburg ont opté pour la compétence de l’officier d’état civil; les Etats de Brandenburg ou de la Sarre ont laissé aux communes la compétence d’organiser les modalités en question.
[18] Le partenariat légal enregistré entre homosexuels, établi par la loi du 16 février 2001, sera désigné dans les développements qui suivront par « Lebenspartnerschaft ».
[19] J. Carbonnier, « Droit et passion du droit sous la Vème République ».
[20] Ces droits fondamentaux s'imposent au pouvoir législatif, exécutif et judiciaire en tant que droits directement applicables (art 1er al 3 GG). La puissance publique doit respecter les droits fondamentaux lors de l'adoption des lois.
[21] Les partenaires doivent expliquer en même temps et en présence l'un de l'autre, devant les autorités compétentes pour recevoir cette déclaration de volonté, qu'ils veulent mutuellement s'engager dans un Lebenspartnerschaft, et ceci de façon perpétuelle (§ 1 LPartG). C'est la quasi-copie des § 1310 et 1311 du BGB, qui concernent la formation du lien matrimonial. De plus, le § 10 Abs 1 LPartG fait référence aux cadeaux reçus lors de la conclusion du partenariat, comme les cadeaux de mariage.
[22] « Kindschaftsrecht-Reformgesetz »
du 16 décembre 1997.
[23] « Le centenaire du BGB : le droit de la famille face aux exigences du raisonnement politique, de la constitution, et de la cohérence du système juridique. », R. Frank, RIDC, 4 avril 2000, p.819.
[24] R. Scholz, « Eingetragene
Lebenspartnerschaft und Grundgesetz, NJW
6 2001, p.393; ou encore
D.Schwab, « Eingetragene Lebenspartnerschaft. Ein
Überblick. »,FamRZ, 48. Jahrgang, Heft 7, 1. April 2001, p. 385-398.
[25] Bundesverfassungsgericht, 1 BvQ 23/01 vom
18.7.2001, Absatz-Nr. (1-36),
http://www.bverfg.de/entscheidungen/frames/qs20010718_1bvq002301.
[26]
« Eilige Güterabwägung », Süddeutsche Zeitung. Nr. 157. p.2.
[27] V. Beck, « Die
verfassungsrechtliche Begründung der Eingetragene Lebenspartnerschaft »,
NJW 27 2001, p.1894.
[28] S. Dibos-Lacroux « PACS: le guide pratique »,Prat mars 2000.
[29] Décision 99-419 DC du 9 novembre 1999 du Conseil Constitutionnel, JO 16 novembre 1999.
[30] Th. Revet, RTDCiv. janvier-mars 2000, p.173.
[31] « Sur le PACS », Droit de la famille, décembre 1999, hors série p.30.
[32] L’obligation naturelle est une obligation dont l’exécution n’est pas juridiquement sanctionnée, et qui ne contraint qu’en conscience ; son exécution spontanée vaut paiement. (Lexique de termes juridiques Dalloz).
[33] « Eilige Güterabwägung »,
Süddeutsche Zeitung Nr. 157, p.2.
[34] Bundesverfassungsgericht, 1 BvQ 23/01 vom
18.7.2001, Absatz-Nr. (1-36),
http://www.bverfg.de/entscheidungen/frames/qs20010718_1bvq002301
[35] « Lebenspartnerschaftsgesetz kann in
Kraft treten », Pressemitteilung Nr 76/2001 vom 18.7.2001,
http://www.bverfg.de/bverfg_cgi/pressemitteilungen/frames/bvg76-01
[36] Ce terme désignera les partenaires d’un partenariat allemand (« Lebenspartnerschaft »).
[37] « Die Ehegatten sind einander
zur ehelichen Lebensgemeinschaft verpflichtet ».
[38]
« Eine Partnerschaft auf Lebenszeit führen zu wollen ».
[39] Abschnitt 3, § 12, §13, §14.
[40] D. Kaiser, « Das Lebenspartnerschaftsgesetz », JZ, 12, 15. Juin 2001, p. 617.
[41] Cette exigence traduit la volonté d'éviter les PACS de pure complaisance.
[42] « Mariage et famille en question , Allemagne », H.A Schwarz-Liebermann von Wahlendorf.
[43] J. Rubellin-Devichi, « Présentation de la loi adoptée le 13 octobre 1999 relative au PACS », JCP éd. G, 1999, aperçu rapide, p.1909.
[44] Pour Mme Bachelot, le PACS n'exclut pas l'existence de relations sexuelles, mais ne l'implique pas non plus, car cela relève « d'un choix strictement privé ». Pour Mme Guigou, le pacte civil de solidarité implique la communauté de lit (discours à l'Assemblée Nationale le 30 mars 1999, www.justice.gouv.fr).
[45] Die
Lebenspartener sind einander zur Fürsorge und Unterstützung...verpflichtet.
[46] D.
Schwab, „Eingetragene Lebenspartnerschaft. Ein Überblick“, FamRZ 7,
avril 2001, p.385.
[47]
BGH, NJW 1988, 2032.
[48]
D. Schwab, « Eingetragene Lebenspartnerschaft. Ein
Überblick », article précité.
[49]
R. Scholz, « Eingetragene Lebenspartnerschaft und Grundgesetz »,
NJW, 6, 5 février 2001, p. 393.
[50] Art. 515-4, selon lequel les partenaires s’apportent une aide mutuelle et matérielle.
[51] J. Carbonnier, « Droit Civil. La famille, l’enfant, le couple », Thémis, éd. 1999.
[52] J. Hauser, « Statut civil des partenaires », JCP éd. N. n° 9-3 mars 2000, p 411.
[53] CA Bordeaux, 4 janvier 2000, note H. Lécuyer, Revue Droit de la famille, mars 2000, p. 17.
[54] V. Beck, « Die verfassungsrechtliche
Begründung der Eingetragene Lebenspartnerschaft », NJW, 27, 2001, p. 1900.
[55] R. Cabrillac, « Les réformes du droit de la famille et le PACS »,Revue Droit de la famille juin 2000, p. 4.
[56] Le Conseil Constitutionnel a en effet expliqué que : « si le contrat est la loi commune des parties, la liberté qui découle de l’art.4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de1789 justifie qu’un contrat de droit privé à durée indéterminée puisse être rompu unilatéralement par l’un ou l’autre des contractants, l’information du contractant ainsi que la réparation du préjudice éventuel résultant des conditions de la rupture devant être garanties ».
[57] La rupture du Lebenspartnerschaft (ou Aufhebung ) correspond au divorce en matière de mariage.
[58] D. Kaiser, « Das
Lebenspartnerschaftsgesetz », JZ, 12, juin 2001, p.621.
[59] D. Schwab, « Eingetragene Lebenspartnerschaft. Ein Überblick », article précité.
[60] La Cour entend par famille uniquement l’entité qui a vocation à la procréation.
[61] Ces divers
droits sont reconnus aux conjoints, et ont pendant longtemps été revendiqués
par les concubins, pour lesquels des cas de conscience pouvaient aussi se
présenter du fait de leur relation proche et intime avec l’autre concubin. Mais
ils ne leur ont pas été accordés. (V.
Hohloch, « Das Recht der Nichtehelichen Lebensgemeinschaft », Handlbuch,
1999, p.115 et suivantes).
[62] Décision du 9 novembre 1999 précitée : « …prévoir…en faveur des personnes liées par un pacte civil de solidarité…un régime fiscal plus favorable que celui qui régit les donations et successions entre personnes non parentes… »
[63] En revanche, le législateur fait de cette détermination du nom commun une obligation pour les époux, l’expression « Die Ehegatten sollen einen gemeinsamen Familiennamen (Ehenamen) bestimmen » en atteste (§ 1355 I s.1BGB). Toutefois, dans les faits, ils n’y sont pas contraints.
[64] Paris, 17 avril 1989, D 1989, IR, p.160.
[65] Les partenaires ne pourraient pas choisir un nom purement fantaisiste. Le nom de naissance est le nom porté à la naissance, et doit être distingué du « nom porté au moment de la conclusion du partenariat », qui peut être le nom d’un précédant mari ou partenaire.
[66] Le Conseil Constitutionnel avait été saisi à ce propos, le législateur se voyant reprocher de ne pas avoir exercé la compétence qu’il tient de l’article 34 de la constitution dans la mesure où il ne prévoit ni le contenu ni l’étendue de l’aide mutuelle et matérielle.
[67] En Allemagne, c’est le législateur lui-même qui précise le caractère fondamental d’obligations qui entrent dans ce qui peut être considéré comme le régime légal obligatoire (il s’agit des obligations morales).
[68] Ali Aoun, « le PACS ».
[69] La raison de ce renvoi est la référence constante dans la loi de février 2001 à des dispositions où il est question de l’organisation de la gestion du ménage par les partenaires ( §1357 BGB, §1369 BGB).
[70] La séparation de fait est le stade entre la vie commune et le divorce. Ses conditions sont précisées par le § 1567 Abs.1 S.1 BGB : il ne doit plus y avoir de communauté de vie entre les époux, et l’un au moins ne veut pas la rétablir, il la refuse car elle n’est plus possible. Elle ne nécessite pas l’intervention d’un juge.
[71] C. Dorsel, « Grundzüge des Neuen
Lebenspartnerschaftsgesetz », RnotZ, Heft 4, 2001, p. 151.
[72] D. Schwab, « Eingetragene
Lebenspartnerschaft », FamRZ, 7, avril 2001, p. 385.
[73] « Pacte civil de solidarité », revue Droit de la Famille, mars 2001, p. 22 n°27.
[74] B.Beignier, « Pacte civil de solidarité et indivision ; visite aux enfers »,Defresnois, n°10/00,article 37 175.
[75] F. Granet et H. Lécuyer refuse la possibilité de choix du régime conventionnel (Juris-Classeur, « Pacte civil de solidarité »,2001 fasc.10, art.515-1 à 515-7 C.Civ).
[76] Toutefois, la sanction de l’omission d’une telle déclaration n’est pas l’inefficacité du partenariat, ce serait trop excessif.
[77] Il peut s’agir de la disposition d’un seul de ses biens personnels par le partenaire en question, dès lors que ce bien constitue la quasi-totalité de son patrimoine.
[78] BT-Drudks, 14/3751.
[79] Grever un immeuble d’un droit réel d’habitation, si cela s’en suit des conséquences décrites, nécessite l’accord du partenaire. La jurisprudence a refusé la nécessité du consentement pour un engagement de payer comme le cautionnement.
[80] Lorsque le partenariat qui a mis fin
à l’obligation alimentaire est dissout, la créance alimentaire du premier
partenaire ne se recrée pas, car le §1586a (qui prévoit la renaissance d’un
aliment après divorce) n’est pas transposé en matière de partenariat.
[81] Cette compensation permet à l’époux qui a cessé d’exercer une activité professionnelle (de façon définitive ou pour un temps limité), afin de s’occuper der enfants ou du ménage, d’avoir une pension de retraite qui ne soit pas amoindrie du fait de la cessation d’activité.
[82] La récompense est une indemnité due par un époux à la communauté lors de la liquidation de cette communauté, lorsque le patrimoine personnel de celui-ci s’est enrichi au détriment de la communauté.
[83] Ce sont les techniques qui sont offertes aussi aux concubins qui s’estiment de la même manière lésés.
[84] CA Riom, 4 juillet 2000, Revue Droit de la Famille, décembre 2000, p.12.
[85] CA Grenoble, 10 janvier 2000, Revue Droit de la Famille, décembre 2000, p.12.
[86] le tribunal doit prononcer un jugement « juste » (§17 LPartG)
[87] Ce principe de réparation est élevé au rang de principe à valeur constitutionnelle par le Conseil Constitutionnel.
[88] M. Monteillet-Geoffroy, « Le Notaire et le contentieux » du PACS, JCP éd. N., n°15-16, 13 avril 2001, p.744.
[89] J. Hauser, « Statut civil des partenaires », JCP éd. N., n°9, 3 mars 2000, p. 411.
[90] Le droit Allemand en revanche le permet (§2265 à 2273 BGB) .
[91] M. Monteillet-Geoffroy, doctrine précitée.
[92] Ce décret est relatif à la déclaration, à la modification et à la dissolution du pacte civil de solidarité.
[93] Décret n° 99-1090 du 21 décembre 1999, relatif aux conditions dans lesquelles sont traitées et conservées les informations relatives au pacte et autorisant la création d’un traitement automatisé des registres.
[94]« Homoparentalité » est un néologisme créé en 1996, à partir des mots « parentalité » et « homosexualité » (F. Leroy-Forgeot, « Les enfants du PACS : réalités de l’homoparentalité »). Ce terme désigne entre autres la relation entre un enfant, son ou ses parents biologiques, et le nouveau couple formé par un de ses parents avec un partenaire de même sexe.
[95] Un sondage BPS réalisé en janvier 1997, pour le magasine Têtu, montre que 11% des lesbiennes et 7% des gays ont un enfant.
[96] D. Kaiser « Lebenspartnerschaftgesetz »,
JZ, 15 juin 2001, p. 624.
[97] D. Kaiser parle à ce propos de « permutation de parent » (doctrine précitée).
[98] Ce à quoi est obligé tout couple marié qui a des enfants, en vertu de l’art. 203 C.Civ.
[99] L’art. 213 C.Civ dispose que les époux « pourvoient à l’éducation des enfants et préparent leur avenir », et l’article 6 II de la Loi Fondamentale dispose qu’ « élever et éduquer les enfants sont pour les parents un droit naturel et leur premier devoir ».
[100] Le Conseil Constitutionnel a précisé que : « la loi n’a aucune incidence sur les questions relatives à l’état civil, à la filiation, à la filiation adoptive, et l’autorité parentale », ni même sur les conditions d’application de ces dispositions.
[101] L’autorité parentale est exercée en commun si les parents d’un enfant naturel, l’ayant tous les deux reconnu avant qu’il ait atteint l’âge d’un an, vivent en commun au moment de la reconnaissance concomitante ou de la seconde reconnaissance (art.372 C.Civ).
[102] Il faut, dans cette hypothèse, admettre comme présupposé que les parents en question ne sont plus mariés à des tiers au moment où ils concluent le pacte civil de solidarité, sinon ce pacte serait nul, en application de l’art. 515-2 C.Civ.
[103] Le partenaire parent exercera juridiquement une fonction parentale à titre individuel.
[104] La place du beau-parent est toutefois actuellement discutée dans le cadre de la réforme du droit de la famille, notamment avec le rapport Dekeuwer-Défossez, qui préconise la considération du beau-parent au travers de la construction d’un statut du tiers, qui assumerait la charge de l’enfant. (http://www.sospapa.net/articles/art/t5.htm.).
[105] Les décisions prises dans les affaires de la vie courante de l’enfant sont, en application du § 1687 BGB, celles qui concernent la prise en charge et l’entretien quotidien de l’enfant qui n’ont pas d’effet significatif sur son développement, comme des préoccupations scolaires ou médicales habituelles.
[106] Un péril imminent, au sens de la loi, menace l’enfant lorsque son intégrité physique ou morale est en danger, que son développement ou ses biens sont menacés. La situation doit être tellement urgente que le partenaire ne puisse pas attendre d’en discuter avec le parent ; l’urgence médicale pourrait engendrer un péril imminent (D. Schwab, « Familienrecht »).
[107] Un abandon de domicile n’est pas un départ concerté ; c’est un départ subit et imprévisible, imposé à l’autre.
[108]
« Gleichberechtigung für Schwule und Lesben », http://
www.gruene-fraktion.de
[109] A. Aoun, « Le PACS ».
[110] S. Dibos-Lacroux, « PACS. Le guide pratique ».
[111] Art. 60 et 62 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, modifiés par l’art. 13 I et II de la loi sur le PACS.
[112] Art. 54 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, modifié par l’art. 13 II de la loi sur le PACS.
[113] Art. 38 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, modifié par l’art. 13 IV de la loi sur le PACS.
[114] Ces précisions sont apportées par une circulaire du Ministre de l’Intérieur du 10 décembre 1999, relative aux modalités d’application des nouvelles dispositions relatives au PACS.
[115] Le mandat spécial est nécessaire pour tout acte qui n’entre pas dans la gestion normale du bien indivis, pour la conclusion et le renouvellement des baux.
[116] Pour F. Monéger, la charge doit être effective, totale et permanente d’après la lettre de l’article (JCP éd. N, n°10, mars 2000, p.452); J. Rubellin-Devichi estime, en revanche, que ces trois caractéristiques ne sont pas nécessaires (JCP éd. N, n°43-27, octobre 1999, p.1909).
[117] Il s’agit de sommes allouées à un invalide ayant besoin de l’assistance d’une tierce personne.
[118] Le décret n° 2000-97 du 3 février 2000 concernant les prestations familiales et assimilées en dispose ainsi.
[119] « Chacun des concubins doit, en l’absence de volonté expresse à cet égard, supporter les dettes de la vie courante qu’il a exposées » (Cass. 1ère civ., 19 mars 1991, Bull civ I n°92.)
[120] Le législateur utilise la formule « dette contractée. » La question de la nature d’une telle dépense avait agité la jurisprudence en matière de solidarité conjugale. Les auteurs ont admis qu’elle ne s’applique pas aux seules dettes d’origine contractuelle, mais qu’elles concernent également les dettes d’origine légale ou quasi-contractuelle ( paiement des cotisations retraites, invalidité ; gestion d’affaire.)
[121] Toute dette contractée par l’un des époux pour l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants oblige l’autre solidairement.
[122] S. Dibos-Lacroux, ouvrage précité.
[123] Notons que le législateur utilise l’expression « produire effet à l’égard de l’autre ». Cela signifie que celui qui n’a pas passé l’acte est non seulement débiteur solidaire mais aussi créancier solidaire de la dette née de l’acte.
[124] 12ème civ, 13 mars 1991, FamRZ 1991, p.923.
[125] F. Ferrand, Droit Privé Allemand.
[126] C’est une disposition copie du §1362 BGB, qui institue une telle présomption en faveur des créanciers d’un époux.
[127] La voix du Nord, 14 novembre 2000.
[128] Der Tagesspiegel, 18 novembre 2000.
[129] Der Spiegel, 17 juillet 2000.
[130] Taz Nr.6512, 2 août 2001.
[131] Berliner Zeitung, 1er août
2001.
[132]
www.justice.gouv.fr
[133] Des lettres de remerciements ont été adressées à Madame Bachelot (R. Bachelot, « Le Pacte entre haine et amour »)
[134] S. Pierre, « La solidarité passive des partenaires du PACS », Revue de Droit de la Famille, juillet-août 2000, p.8.
[135] Le Républicain Lorrain, 23 juillet 2001.