1.    L’autonomie de la cession, de la négociation et de la subrogation. La transmission conventionnelle des créances ou, plus largement, la transmission des créances, appartient à première vue aux institutions consacrées par le droit positif. La doctrine regroupe déjà la cession de créance [1], la négociation [2] et la subrogation [3] sous cet intitulé [4]. Mais cette classification n’emporte pas de conséquences. Elle demeure un cadre artificiel à l’intérieur duquel chaque mode de transmission conserve son autonomie.

L’appartenance de la cession de créance, de la négociation et de la subrogation à une même catégorie juridique se justifie principalement par l’histoire [5]. A l’intransmissibilité de la créance, sous l’ancien droit, succède sa transmissibilité, à partir du Code civil. “ L’obligation est constituée par le fait promis, apprécié au point de vue de sa valeur pécuniaire ” [6]. Ce dénominateur commun à l’objet de la cession, de la négociation, et de la subrogation [7] renferme le germe de leur éloignement. La transmission des créances perd en effet son originalité lorsque la créance est assimilée à un bien [8]. Comme les autres biens, la créance se transmet par l’effet des conventions. La doctrine recherche alors la nature de la cession, de la négociation, et de la subrogation dans l’intention des parties [9] et en déduit une différence de régime.

Un esprit différent animerait chacun de ces modes de transmission. Selon la doctrine classique, la cession, consentie en contrepartie d’un prix, poursuit une finalité spéculative alors que la subrogation, consentie en contrepartie du paiement de la dette d’autrui serait un service d’ami [10]. La négociation transmet la créance plus rapidement et avec une plus grande sécurité que la cession [11] ; cette sécurité, liée à la forme du titre, se justifie pour certains par la notion d’acte abstrait [12]. Mais ces différences s’estompent. L’opposition classique entre la cession de créance, une opération spéculative, et la subrogation, un service d’ami, ne convainc plus [13]. La doctrine s’accorde pour ne plus analyser la subrogation comme une fiction dérogeant à l’effet extinctif du paiement, tout en refusant de l’assimiler sans réserve à la cession de créance [14]. Les auteurs se résignent à justifier la négociation par les impératifs de sécurité et de rapidité du commerce alors que ce mode de transmission est sorti du cadre des relations commerciales sans perdre son efficacité.

Les doutes entourant la nature juridique des modes de transmission contrastent avec les différences fermement établies entre leur régimes [15]. La cession se caractérise par l’opposabilité des exceptions ; le cédé peut opposer au cessionnaire les mêmes exceptions qu’au cédant. Le régime de la négociation se distingue par l’inopposabilité des exceptions ; le débiteur ne peut pas opposer au nouveau créancier les exceptions qu’il pouvait opposer à l’ancien créancier. L’opposabilité des exceptions rapproche la subrogation de la cession, mais la subrogation se caractérise par l’exigence d’un paiement qui détermine notamment le moment et l’ampleur de la transmission.

Finalement, de la vision objective de l’obligation assimilée à un bien, ressort une pluralité de modes autonomes de transmission des créances.

2.    L’unité des modes de transmission. En revanche, l’unité renaît en adoptant une conception subjective de l’obligation. La créance désigne le côté actif d’un lien de droit entre deux personnes. La transmission des créances introduit un tiers, l’ayant cause [16], dans le lien d’obligation [17]. Lorsque la transmission est issue d’une convention entre l’auteur et l’ayant cause, la force obligatoire de ce contrat ne suffit pas à justifier l’atteinte à l’effet relatif de l’obligation [18]. En effet, bien que le débiteur ne consente pas à l’opération [19], celle-ci opère un changement de créancier [20]. L’effet caractéristique de la transmission conventionnelle des créances ne se situe donc pas dans les rapports entre les parties [21], mais dans les rapports respectifs de celles-ci avec le débiteur.

Les différences entre la cession, la négociation, et la subrogation occultent leurs traits communs qui se déduisent de leur appartenance à la catégorie plus vaste formée par la transmission conventionnelle des créances. En raison de sa source, la transmission conventionnelle des créances présente l’originalité de déroger à l’effet relatif du lien d’obligation sans augmenter le poids de la dette à la charge du débiteur. Cette exception à l’effet relatif du lien d’obligation ne se justifie que dans la mesure où la substitution de créancier ne nuit pas au débiteur et se distingue ainsi de la cession de contrat [22]. Par l’effet de la transmission conventionnelle des créances, seul le créancier change alors que la créance se conserve. La transmission conventionnelle des créances se distingue ainsi des opérations attributives telles que la délégation créant nécessairement une nouvelle obligation en raison d’un accord entre le créancier et le débiteur de la nouvelle obligation. Elle se distingue également du mandat qui ne peut opérer un changement de créancier.

Chaque mode de transmission se caractérise par une atteinte à l’effet relatif du lien d’obligation opérant un changement de créancier sans modifier l’étendue de l’engagement du débiteur. Chaque mode de transmission surmonte différemment l’obstacle de la relativité du lien d’obligation. La cession de créance étend la force obligatoire de la convention entre le cédant et le cessionnaire afin d’imposer au cédé la substitution de créancier. La négociation déroge également à la relativité du lien d’obligation car il n’existe pas d’accord de volonté entre chaque porteur du titre et le débiteur. Par l’effet d’une clause à ordre ou au porteur ou par l’émission d’un titre nominatif, le débiteur accepte par avance de reconnaître la qualité d’ayant cause à la personne qui lui sera désignée conformément aux stipulations du titre négociable. La clause investit un tiers, l’ayant cause, du droit d’exiger l’exécution de l’obligation. Enfin, la subrogation occulte l’atteinte à la relativité du lien d’obligation inhérente à la transmission conventionnelle des créances. La subrogation affecte la créance du subrogeant au remboursement du subrogé qui s’acquitte de son montant. Par l’effet de cette affectation, la créance se transmet au subrogé qui peut ainsi exercer une action récursoire contre le débiteur.

Ainsi, la cession, la négociation et la subrogation présentent les caractéristiques essentielles de la transmission conventionnelle des créances en dérogeant à la relativité du lien d’obligation afin d’opérer un changement de créancier sans augmenter l’engagement du débiteur. Dès lors, la question se pose de savoir s’il faut maintenir l’autonomie de la cession, de la négociation et de la subrogation ou reconnaître l’existence de la transmission conventionnelle des créances.

3.    Un rapprochement récent. Actuellement, un rapprochement entre la cession, la négociation et la subrogation se dessine en législation, en doctrine et en pratique.

Le législateur favorise ce rapprochement. La loi du 2 janvier 1981, codifiée à l’article L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier, a ainsi créé une cession [23] produisant des effets comparables à l’endossement de la lettre de change. Lorsque le cédé accepte la cession de créance professionnelle, le cessionnaire jouit de la même protection que celle reconnue au porteur d’une lettre de change acceptée [24]. L’inopposabilité des exceptions n’est plus l’apanage des titres négociables.

En doctrine, un rapprochement entre la cession, la négociation et la subrogation se constate également. Les études portant sur des principes ou des institutions plus vastes révèlent des caractéristiques communes. Tel est par exemple le cas de la thèse de Monsieur Larroumet sur les opérations juridiques à trois personnes [25], du cours de Raynaud sur “ les conventions ayant pour objet une obligation ” [26] ou des thèses récentes sur l’opposabilité des conventions ou de leur effet relatif [27]. Le rapprochement se perçoit également à l’occasion des études portant sur certains aspects de la transmission conventionnelle des créances. Ainsi, la thèse de Madame Pardoel [28] sur les conflits de lois en matière de cession de créance englobe la subrogation consentie par le créancier. Il ressort de la comparaison du droit français et allemand entreprise par Madame Cashin-Rithaine [29]. Il apparaît enfin dans le domaine voisin des garanties conventionnelles sur créances étudiées par Monsieur Legeais [30]. Le rapprochement entre les modes de transmission se perçoit surtout à l’occasion des monographies sur la négociation ou la subrogation. Ainsi, Monsieur Causse qualifie la transmission des titres négociables [31] de cession de contrat, après avoir établi de nombreux rapprochements avec la cession de créance. Quant à Monsieur Despaquis [32], il justifie le régime de l’obligation cambiaire par un équilibre entre le droit commun des obligations et l’apparence. Enfin, Monsieur Endréo [33] analyse la transmission de la provision d’une lettre de change à l’aide de la cession de créance. En dernier lieu, la récente thèse de Monsieur Nizard [34] confirme que le titre négociable n’est pas un simple instrumentum, mais qu’il permet, en échappant aux lourdes formalités de l’articles 1690 du Code civil, de faciliter le transport simplifié du droit qu’il constate. A propos de la subrogation, Monsieur Mestre [35] a fermement établi que ce procédé ne repose pas sur une fiction permettant exceptionnellement la survie de la créance éteinte par le paiement du subrogé [36]. La subrogation, comme la cession, réalise une transmission de la créance. A partir de ce rapprochement, Monsieur Mouloungi [37] conteste l’interdiction du profit dans la subrogation, l’une de ses différences par rapport à la cession.

En pratique, le rapprochement entre la cession, la négociation et la subrogation se constate également. Le choix du mode de transmission dépend moins de sa nature ou de ses effets caractéristiques que d’un “ bilan coût‑avantage ” [38]. L’affacturage offre un exemple où la subrogation se substitue à une cession. L’affacturage réalise une opération de crédit lorsqu’un client transmet ses créances à terme à son affactureur, en contrepartie d’un paiement immédiat. A cette fin, l’affactureur utilise la subrogation, alors que cette transmission d’une créance en contrepartie de l’obligation d’en payer le prix caractérise normalement la cession de créance. La subrogation s’avère cependant plus avantageuse. L’opposabilité de la transmission aux tiers ne requiert pas l’accomplissement des formalités onéreuses de la cession de créance régie par le Code civil. Cependant, la subrogation présente l’inconvénient de limiter l’ampleur de la transmission au montant du paiement effectué par le subrogé. L’affactureur ne pourrait pas se rémunérer du crédit consenti à son client en lui versant une somme inférieure à la valeur nominale de la créance transmise. La pratique a néanmoins remédié à cet inconvénient. L’affactureur s’acquitte du montant total de la créance mais impute immédiatement une commission [39]. Ainsi, il est subrogé dans la totalité de la créance en ne décaissant qu’une partie de son montant.

4.    Un rapprochement utile. Ce rapprochement amorcé entre la cession, la négociation et la subrogation mérite d'être systématisé. En effet, une théorie générale des modes de transmission répond aux interrogations actuellement suscitées par leur mutation. Les procédés récemment créés par la loi comportent des zones d’ombre, faute de s’insérer parfaitement à l’intérieur de l’un des trois modes de transmission connus [40]. Les procédés plus anciens évoluent. La dématérialisation des valeurs mobilières, imposée par la loi, remet en cause l’inopposabilité des exceptions traditionnellement liée à l’instrumentum en papier des titres négociables [41]. La dématérialisation des effets de commerce, souhaitée par la pratique [42], semble difficilement réalisable. Le “ droit cambiaire est peu compatible avec les nouvelles technologies ” note Monsieur Bonneau à l’occasion d’un arrêt de la Cour de cassation qui refuse d’assimiler une clé informatique à la signature d’un effet de commerce [43].

Par ailleurs, une théorie générale des modes de transmission complète le régime de la cession, de la négociation et de la subrogation en précisant le principe et les limites de la transposition des règles dégagées à l’occasion de chacun de ces modes de transmission. Autrement dit, la catégorie juridique de la transmission conventionnelle des créances établit un droit commun de la cession, de la négociation et de la subrogation [44].

5.    L’inadaptation de la cession de créance. Mais la présence de plusieurs techniques pour atteindre le même objectif surprend. Elle révèle l’inadaptation de la cession de créance régie par le Code civil. Ce jugement de valeur contribue pourtant à la compréhension de la transmission conventionnelle des créances dont l’étude implique une rupture épistémologique entre le droit et sa connaissance [45].

Le droit se présente formellement comme une pyramide de normes [46]. Chaque norme édicte un impératif hypothétique dont la validité se déduit du rattachement à l’ordonnancement juridique. La conformité de la norme aux valeurs fondamentales légitime la contrainte exercée [47]. L’ensemble forme un système autonome vis-à-vis des autres systèmes sociaux, bien qu’ils évoluent chacun sous l’influence de leurs actions réciproques [48]. La procédure démocratique devrait assurer la régulation du système juridique par rapport aux autres systèmes sociaux, et garantir ainsi sa rationalité et sa légitimité [49]. Mais ce schéma idéal reflète imparfaitement le droit positif. Les normes reposent sur des valeurs nécessairement relatives et imparfaites [50]. En outre, la modification de l’ordonnancement juridique requiert une décision ; rien ne garantit la régulation du système juridique. Face à l’inaction du législateur, l’interprète ne jouit que d’une liberté encadrée ; “ au-delà du Code civil, mais par le Code civil ” [51].

La connaissance du droit se heurte à des obstacles qui lui sont propres [52]. D’une part, le droit se présente apparemment sous la forme d’un ensemble organisé de propositions[Rédac1] . D’autre part, des organes habilités disposent du monopole de la création et de l’interprétation des normes à l’issue d’une procédure qui en garantit la légitimité. Au monopole de la contrainte légitime répondrait le monopole de la connaissance légitime [53]. Tel n’est pas le cas. Le droit se distingue de sa connaissance. Le droit est l’objet de la science juridique. La connaissance du droit construit une explication rationnelle qui ne préjuge pas de la cohérence du phénomène juridique [Rédac2] [54], mais impose au contraire d’en douter[Rédac3]  [55]. L’objectivité naît de la rupture entre l’objet et le sujet, autrement dit, entre le droit et sa connaissance[Rédac4]  [56]. Si la pratique du droit est un art, sa connaissance n’en demeure pas moins une science[Rédac5] . La rupture entre le droit et sa connaissance n’impose cependant pas d’abandonner le raisonnement juridique traditionnel ; le droit connaît déjà une rigoureuse méthode d’analyse, même si cette méthode, tournée vers l’application des normes, n’appréhende que partiellement la complexité du système juridique [57] ; la loi n’exprime pas tout le droit. La diversité des sources du droit autorise la multiplication des points de vue et des approches [58]. En proposant une explication rationnelle du phénomène juridique, la connaissance du droit rejoint ainsi, par d’autres voies, les préoccupations des acteurs de la scène juridique à la recherche de cohérence et de prévisibilité.

Ces prémices dictent la méthode retenue pour étudier la transmission conventionnelle des créances. La cohérence du système juridique supposerait qu’à l’unité de la nature de la transmission conventionnelle des créances corresponde l’unité de son régime. A priori, les dispositions du Code civil régissant la cession de créance se présentent comme le droit commun de la transmission conventionnelle des créances. Mais l’opposabilité de la cession de créance exige une signification ou une acceptation par acte authentique. Ces formalités anachroniques, onéreuses, et inadaptées à la sauvegarde des intérêts qu’elles sont censées protéger forment un obstacle injustifiable à la transmission conventionnelle des créances. L’article 1690 du Code civil, directement inspiré de l’ancien droit, n’a jamais été réformé à la différence de son homologue belge [59]. L’adaptation du système juridique a emprunté d’autres voies : accessoirement, par la multiplication de dispositions législatives écartant ponctuellement le régime du Code civil, principalement, par le recours à deux autres modes de transmission, la négociation et la subrogation, permettant d’atteindre le même objectif que la cession de créance tout en échappant aux formalités de l’article 1690 du Code civil.

6.    L’existence et le régime de la transmission conventionnelle des créances. La cession, la négociation et la subrogation appartiennent ainsi à une catégorie plus vaste, la transmission conventionnelle des créances. La seule justification de la distinction entre les modes de transmission est la nécessité d'échapper aux contraintes du droit commun de la cession de créance. Ni l’histoire, ni la fonction de la cession, de la négociation ou de la subrogation n’autorise d’autres différences entre les modes de transmission. En revanche, la cession, la négociation et la subrogation présentent une nature juridique commune et un régime commun déduit de l’adage nemo plus juris… (nul ne peut transmettre à autrui plus de droit qu’il n’en a [60]). En effet, l’inopposabilité des exceptions fréquemment associée à la négociation n’est pas liée au mode de transmission, mais à l’engagement souscrit par le débiteur qui forme l’objet de la transmission. L’apparence renforce par ailleurs la protection des tiers. Ainsi, l’inopposabilité des exceptions est liée à la nature de la créance transmise et non au mode de transmission. L’engagement du débiteur n’est jamais aggravé sans son consentement [61]. Ainsi, la cession, la négociation et la subrogation poursuivant et réalisant le même objectif peuvent utilement être rassemblées.

Ainsi, à l’existence de la catégorie formée par la transmission conventionnelle des créances (Première partie), correspond un régime  transcendant la diversité des modes de transmission (Seconde partie)[Rédac6] .

 



[1] La cession désigne la convention par laquelle un créancier (le cédant) transmet à son contractant (le cessionnaire), la créance sur le débiteur (le cédé).

[2] La négociation, transmet la créance avec le titre qui la constate. La transmission du titre désigne au débiteur son nouveau créancier.

[3] La subrogation désignera exclusivement dans ces développements la subrogation consentie par le créancier (le subrogeant) qui transmet la créance au contractant (le subrogé) sur le fondement d’un paiement.

[4] Cette classification a pour la première fois été proposée par Gaudemet (Théorie générale des obligations, Sirey, 1965, réimpression de l'édition de 1937, p 449 et s.).

Elle est généralement reprise par la doctrine contemporaine qui distingue le plus souvent à l’intérieure de la cession, la cession régie par le Code civil et la cession dont les formalités sont simplifiées, notamment la négociation : v. notamment : A. Bénabent, Droit civil, Les obligations, Montchrestien, 7e éd., n° 721, p 449 et s. ; J. Carbonnier, Droit civil, t.4, Les obligations, PUF, 22e éd., 2000, n° 314, p 555 et s. ; Larroumet, Les obligations, t. 4, par J. François, 2000, n° 337 ; G. Marty et P. Raynaud, Droit civil, Les obligations, Sirey, 1989, n° 348 ; F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 7e éd., 1999, n° 1173, p 1063 et s.

[5] V. notamment  E. Gaudemet, Théorie générale des obligations, Sirey, 1965, réimpression de l'édition de 1937, p 449.

Comp. E. Fraud, La notion de transfert de créance, Rev. rech. juri. 1998-3. 817. Il établit un rapprochement entre ces modes de transmission en constatant qu’ils ne modifient pas la cause de l’obligation transmise. Mais il est dès lors obligé de considérer que l’acceptation d’une lettre de change est une renonciation et non un nouvel engagement.

[6] R. Saleilles, Etude sur la théorie générale de l’obligation d’après le premier projet de Code civil pour l’empire Allemand, Paris. 3ème éd. 1925, n° 80.

Sur la propriété des créances V. notamment le débat entre et J. Dabin, Une nouvelle définition du droit réel, Rev. trim. dr. civ. 1962. 20 et S. Ginossar, Pour une meilleure définition du droit réel et du droit personnel, Rev. trim. dr. civ. 1962. 573.

[7] A. Bénabent, op. cit., Montchrestien, 7e éd., n° 721, p 449 ; J. Carbonnier, op. cit., PUF, 22e éd., 2000, n° 314, p 555 ; G. Marty et P. Raynaud, op. cit., 1989, n° 348 ; M. Planiol et G. Ripert, op. cit., n° 1105 ; F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, op. cit., Dalloz, 7e éd., 1999, n° 1173, p 1063.

[8] F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, op cit., 7e éd., 1999, n° 1173, p 1063. Ils notent que l’obligation envisagée comme un bien ne mériterait pas une étude particulière si ce n’est par référence aux difficultés qui furent posées pour sa transmission. La cession de créance est fréquemment étudiée à l’occasion des contrats spéciaux. Lorsqu’elle est étudiée dans le régime général de l’obligation, le regroupement des techniques de transmission débute alors par un rappel historique de l’opération.

[9] V. A propos de la distinction entre la cession et la subrogation C. Demolombe, op. cit., n° 385, p 330 : “ Ce n’est donc pas au sens littéral des termes, que l’on doit s’attacher. C’est la commune intention des parties, révélée par le caractère intrinsèque de l’opération… Ce qu’il faut rechercher surtout, c’est si l’opération a été faite dans l’intérêt du créancier, ou dans l’intérêt du débiteur. Dans le premier cas, on doit être porté à penser que l’acte a le caractère d’une cession ; tandis que c’est le caractère d’un payement avec subrogation, qui doit être présumé dans le second cas ”. E. Gaudemet, op. cit., p 471 : “ c’est là une délicate question d’interprétation de volonté ”.

[10] C. Aubry et C. Rau, Cours de droit civil français, t. 4, Paris, 5e éd., par G. Rau et Ch. Falcimaigne, 1878, § 321. Le but principal de la subrogation est la libération du débiteur envers le créancier originaire. Alors que celui de la cession serait la vente et l’acquisition de la créance. C. Demolombe, op. cit., n° 323, p 269. F. Mourlon, op. cit., p VIII. “ Le payement avec subrogation n’est pas une spéculation ; c’est un bon office ” et p 178 si “ le payement est fait par un tiers dans son intérêt particulier et avec subrogation aux droits du créancier : l’opération n’est plus un payement ; ce n’est même pas un payement avec subrogation ; c’est une cession déguisée sous l’apparence trompeuse d’un payement subrogatoire ”. M. Planiol et G. Ripert, op. cit., p 655, n° 1245. “ L’opposition fondamentale d’ordre économique établie entre la cession et la subrogation, si elle répond à la réalité dans un certain nombre de cas, que la loi a considérés comme typiques, n’est pas commandée par la situation de fait. L’esprit de système est venu ici déformer l’aspect véritable des choses ” ; mais, au n° 1520, p 579, “ la cession de créance nous apparaît comme un acte de spéculation, tandis que la subrogation est l’auxiliaire d’un bienfait ; elle facilite la réalisation d’une pensée généreuse, en garantissant au capitalise, qui vient au secours d’un débiteur obéré, le remboursement de son avance ”.

[11] J. Carbonnier, op. cit., n° 317, p 563 ; Ph. Malaurie et L. Aynès, Cours de droit civil, Les contrats spéciaux, Cujas, 10e éd., 1997, n° 1250, p 749 ; G. Marty, P. Raynaud et P. Jestaz, op. cit., n° 371 ; F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, op. cit., Dalloz, 7e éd., 1999, n° 1201, p 1084.

[12] J. Bouteron et L. Lacour, Précis de droit commercial, t. 2, Dalloz, 3e éd., 1925, n° 1171bis, p 14 “ L’obligation cambiaire est une obligation littérale ou formelle ”, “ la lettre de change n’est pas seulement un titre formel : c’est aussi un titre abstrait, autonome, qui se suffit à lui-même, sans qu’il y ait lieu d’en rechercher la cause ”. M. Jeantin, P. Le Cannu, Instruments de paiement et de crédit - Entreprises en difficulté, Dalloz, 5e éd., 1999, n° 254, p 151. Le “ formalisme cambiaire créé par la loi suscite une apparence qui donne à la lettre de change une valeur qui lui est propre et est indépendante de sa cause ”. E. Putman, op. cit., n° 2, p 18. L’archétype “ des effets de commerce, la lettre de change, est formaliste et abstraite ”.

[13] V. infra note 437

[14] Au XIXe siècle, cette présentation dominait en doctrine, V. infra70.

[15] Sur la corrélation nécessaire entre le régime et la nature d’une institution V. J.-L. Bergel, Variété de nature (égale) différence de régime, Rev. trim. dr. civ. 1984. 255.

[16] Le terme d’ayant cause est la traduction littérale de l’expression latine utilisée par Dumoulin habens causam. Elle implique une succession d’une personne aux droits d’une autre (A. Weill, Le principe de la relativité des conventions en droit privé français, thèse, Dalloz, 1938, n° 60, p 107).

[17] V. Ch. Larroumet, Les opérations juridiques à trois personnes en droit privé, thèse Bordeaux, 1968, n° 7.

[18] P. Chaumette, La subrogation sans paiement, Rev. trim. dr. civ. 1986. 33, spéc. n° 6. “ La subrogation personnelle constitue une exception au principe de l’effet relatif des conventions, puisque la substitution des personnes permet à un tiers au contrat de remplacer l’un des contractants ”. Comp.  J. Ghestin, La distinction entre les parties et les tiers au contrat, JCP. 1992. I. 3628, spéc. n° 17. L’auteur préfère se référer à une extension de l’opposabilité de la convention de cession.

[19] Quel que soit le mode de transmission, le consentement du débiteur est inutile.

Lorsque la créance est transmise par une cession, le débiteur est un tiers à l’acte (article 1689 du Code civil). La signification de la cession, une notification par acte d’huissier, suffit à faire produire à la cession ses effets à l’égard du débiteur (articles 1690 et 1691 du Code civil). En ce sens A. Bénabent, Droit civil, Les obligations, Montchrestien, 7e éd., n° 727, p 453 ; J. Carbonnier, t.4, op. cit., n° 316, Ph. Malaurie et L. Aynès, Cours de droit civil, Les contrats spéciaux, Cujas, 10e éd., n° 1219, p 735 ; G. Marty, P. Raynaud et P. Jestaz, op. cit., n° 352 ; F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, Les obligations, Dalloz, 7e éd., 1999, n° 1182, p 1070.

De même, l’endossement de la lettre de change requiert seulement la signature de l’endosseur (article L. 511-8, ancien article 117 Code commerce) et sa remise à l’“ endossataire ”. L’article L. 512-3 (ancien article 185) du Code de commerce sur le billet à ordre renvoie à l’article L. 511-8 (ancien 117) du Code de commerce sur l’endossement de la lettre de change.

Quant à la subrogation consentie par le créancier, l’article 1250‑1° énumère ses conditions de validité. Il ne mentionne pas le consentement du débiteur V. par exemple Civ. I, 23 octobre 1984, Bull. civ. n° 276 ; JCP éd. E 1984. I.13955.

[20] A. Ghozi, La modification de l'obligation par la volonté des parties (Etude de droit civil français), thèse, LGDJ, 1980, préface D. Tallon ; A. Sériaux, Droit des obligations, 2e éd., PUF, Droit fondamental, 1998, n° 168, p 614. La transmission “ opère incontestablement une certaine modification du lien originaire car le débiteur n’est plus tenu envers le même créancier ”. Aussi, consacre‑t‑il un chapitre à la modification du lien d’obligation découpé en deux sections respectivement intitulées “ La modification par transmission du lien d’obligation ” et “ La modification par transformation du lien d’obligation ”.

[21] Rappr. M. Planiol et G. Ripert, op. cit., p 656, n° 1246. A propos de la distinction entre la cession et la subrogation “ les deux opérations peuvent aisément intervenir l’une et l’autre dans des situations analogues et en vue de buts très voisins, sinon identiques ”.

[22] En l’absence de dispositions contraire, le consentement du cédé est nécessaire

Rappr. Civ. I, 6 juin 2000, Bull. civ., n° 173 ; D. 2001, 1346, note D. Krajeski ; JCP 2000. IV. n° 2306 ; RTD Com. 2000, 571, obs. J. Mestre et B. Frages ; Defrénois 2000, art. 37237, n° 69. 1125, obs. P. Delebecque (Le fait qu’un contrat ait été conclu en considératin de la personne du contractant ne fait pas obstace à ce que les droits et obligations de ce dernier soient transférés à un tiers dès lors que l’autre partie y a consenti).

Contra. L. Aynés, La cession de contrat, thèse, Economica, 1984, préface Ph. Malaurie

[23] Th. Bonneau, Droit bancaire, Montchrestien, 4e éd., 2001, n° 582, p 378 et s. M. de Juglart et B. Ippolito, op. cit., n° 283 ; G. Ripert et R. Roblot, Traité de droit commercial, t. 2, LGDJ, 16e éd., 2000, n° 2428-1, p 452 ; J.-L. Rives-Lange et M. Contamine-Raynaud, op. cit., n° 526.

[24] L’article L. 313-29 du Code monétaire et financier (ancien article 6 de la loi du 2 janvier 1981) est formulé dans des termes identiques à ceux de l’article L. 511-12 (ancien article 121) du Code de commerce.

[25] Ch. Larroumet, Les opérations juridiques à trois personnes en droit privé, thèse, Bordeaux, 1968.

[26] P. Raynaud, Les contrats ayant pour objet une obligation, Cours de DEA, Les Cours de droit, 1977.

[27] F. Bertrand, L'opposabilité du contrat aux tiers, thèse, Paris II, 1979 ; J. Duclos, L'opposabilité (Essai d'une théorie générale), thèse, LGDJ, 1984, préface D. Martin ; Y. Flour, L'effet des contrats à l'égard des tiers en droit international privé, thèse, Paris II, 1977 ; J.-L. Goutal, Essai sur le principe de l'effet relatif du contrat, thèse, LGDJ, 1981, préface H. Batiffol.

[28] D. Pardoël, Les conflits de lois en matière de cession de créance, thèse, LGDJ, 1997, préface P. Lagarde.

[29] E. Cashin-Rithaine, Les cessions contractuelles de créances de sommes d’argent dans les relations civiles et commerciales franco-allemandes, LGDJ, 2000, Préface F. Ranierei, Avant-propos F . Jacquot.

[30] D. Legeais, Les garanties conventionnelles sur créances, thèse, Economica, 1986, préface P. Rémy et Avant-propos de J. Stoufflet.

[31] H. Causse, Les titre négociables (Essai sur le contrat négociable), thèse, Litec, 1993, préface B. Teyssié.

[32] J.-M. Despaquis, L'obligation cambiaire- Essai sur la nature de l'obligation cambiaire, thèse, Reims, 1996.

[33] G. Endréo, La provision, garantie du payement de la lettre de change, thèse, Nantes, 1980.

[34] F. Nizard, La notion de titre négociable, thèse, Paris II, 2000,  Dr 21, 2001, T 001 (http://www.droit21.com).

[35] J. Mestre, La subrogation personnelle, thèse, LGDJ, 1979, préface P. Kayser, n° 639 ; p 698. “ Pourquoi ne pas admettre que la subrogation personnelle, réglementée au niveau du paiement, soit en réalité une cession de créance qui s’effectue, de manière originale sur le fondement d’un paiement ? ”. Néanmoins, les “ exceptions générales que ces juges dans le silence des textes, ont apportées à l’effet translatif, loin de contredire cette analyse, viennent la renforcer, en même temps que la compléter. Elles révèlent, en effet l’originalité de l’institution quant au fondement juridique de la transmission de la créance ”.

Ce rapprochement entre la subrogation et la cession est notamment admis par Ph. Malaurie et L. Aynès, op. cit, Cujas, 10e éd., n° 1206, p 721. La subrogation “ est davantage devenue un mode de transfert de la créance, lié au paiement ”.

[36] Parmi les auteurs analysant la subrogation comme une fiction ou une exception à l’extinction de la créance après le paiement : G. Baudry-Lacantinerie et L. Barde, Traité théorique et pratique de droit civil, Des obligations, t. 12, Paris, 1902, n° 1516, p 574. “ La subrogation est une fiction juridique, par suite de laquelle une créance, payée avec des deniers fournis par un tiers et par conséquent éteinte par rapport au créancier, est réputée subsister avec tous ses accessoires au profit de ce tiers, afin d’assurer l’efficacité de son recours pour le remboursement des fonds qu’il a versés ”. C. Demolombe, Traité des contrats ou des obligations conventionnelles en général, t. 1, Paris, 1868, n° 315, p 262. La subrogation, ce “ n’est pas la vérité ; c’est la fiction. Ce n’est pas le droit pur ; c’est l’équité. Il est vrai ! ”. Gauthier, Traité de la subrogation de personnes, Paris, 1853, n° 8, p 5. Ce n’est “ que par une dérogation à la rigueur du droit que le paiement peut, en certain cas, et au moyen de la subrogation, faire revivre au profit de celui qui paie les droits du créancier originaire ”. F. Laurent, Principes de droit civil, t. 18, Paris, 3e éd. 1878, n° 6, p 16. “ La fiction établie dans l’intérêt du subrogé, consiste en ceci, c’est qu’il est censé avoir plutôt acheté la créance que l’avoir payé. La subrogation est donc une cession fictive ”. F. Mourlon, Traité théorique et pratique des subrogations personnelles, Paris, 1848, p VIII. “ Le paiement avec subrogation est une opération à double face. Entre le subrogé et le débiteur ou ses ayants cause, c’est une cession fictive par suite de laquelle le tiers dont l’argent a servi à la libération du débiteur succède à tous les droits qu’avait le créancier originaire. Entre le subrogé et le subrogeant, c’est un payement extinctif de la dette ”. M. Planiol et G. Ripert, Traité pratique de droit civil français, t. 7, LGDJ, 2e éd., avec P. Esmein, J. Radouant,1954, n° 1219, p 626. “ La subrogation est donc l’institution juridique en vertu de laquelle la créance payée par le tiers subsiste à son profit et lui est transmise avec tous ses accessoires, bien qu’elle soit considérée comme éteinte par rapport au créancier ”. Mais les auteurs écartent l’idée de fiction, la subrogation “ repose sur des besoins pratiques évidents, il vaut mieux se contenter de l’analyser ” (p 652, n° 1244).

[37] C. Mouloungi, L'admissibilité du profit dans la subrogation, thèse, LGDJ, 1995, préface F. Grua.

[38] E. Putman, Droit des affaires, t. 4, Moyens de paiement et de crédit, PUF, Thémis droit privé, 1995, n° 4.

[39] Th. Bonneau, op. cit., n° 579, p 376 ; M. de Juglart et B. Ippolito, Traité de, Montchrestien, 3e éd., par L. M. Martin, 1991, n° 294 ; J.-L. Rives-Lange et M. Contamine-Raynaud, op. cit.,  Dalloz, 6e éd., 1995, n° 585.

Comp. les doutes quant à la validité de l’opération M. Vasseur, Droit et économie bancaire, Les opérations de banque, Fasc. 1, Les cours de droit, 4e éd., 1987-1987, p 308.

[40] V. par exemple la loi du 25 juin 1999 et ses décrets du 29 juillet et 3 août 1999 organisant le refinancement des établissements accordant des prêts immobiliers. Ces textes sont codifiés aux articles L. 515 et suivants du Code monétaire et financier. Sur ce nouveau mode de mobilisation des créances : Th. Bonneau, Droit bancaire, Montchrestien, 4e éd., 2001, n° 843, p 570 et s.

[41] Sur les conséquences de la dématérialisation à l’égard de la notion de valeur mobilière A. Reygrobellet, La notion de valeur mobilière, thèse, Paris II, 1995, n° 978 et s.

[42] V. M. Vasseur, La lettre de change-relevé, de l'influence de l'informatique sur le droit, Rev. trim. dr. com. 1975. 203.

[43] Th. Bonneau, note sous Com., 26 novembre 1996, JCP éd. E, 1997. II. 906, n° 7.

[44] Elle permet ainsi d’établir un droit commun de la négociation alors que l’attention se concentre habituellement sur certaines formes réglementées de ce mode de transmission, telle la lettre de change

Sur l’utilité d’un droit commun : J. Ghestin, La transmission des obligations en droit positif français, LGDJ. 1980. in Travaux des IX Journées d'études juridiques J. Dabin. spéc. p 79. Il constate à propos des titres négociables que “ leur théorie générale reste à faire en droit français ”. Le même constat est fait pour le droit belge par M. Fontaine, La transmission des obligations de lege ferenda, LGDJ. 1980. in Travaux des IX Journées d'études juridiques J. Dabin. 611, spéc. p 639. En revanche, une telle théorie existe en Suisse (Code suisse des obligations articles 965 à 1155) et en Italie (Code civil italien articles 1992 à 2027).

[45] V. sur ces deux pôles P. Amselek, Eléments d'une définition de la recherche juridique, 297. La recherche “ se déploie dans une double direction, en vue de fonder à la fois le statut de l’objet de recherche et le statut de l’activité de recherche tourné vers cet objet ”

Les théories de la connaissance du droit suscitent un regain d’intérêt V. notamment C. Atias, Epistémologie juridique, PUF, 1985 ; X. Lagarde, Réflexion critique sur le droit de la preuve, thèse, LGDJ, 1994, préface J. Ghestin, n° 1, p 1 qui part du constat “ qu’il n’y a pas de science purement empirique du droit ” pour en déduire la nécessité de dégager les concepts nécessaires pour aborder le droit positif “ de manière scientifique ”.

Cet appel à la science à l’issue d’une réflexion sur les méthodes de la connaissance juridique n’est pas sans précédent (V. le mouvement de la libre recherche scientifique et notamment F. Geny, Science et technique en droit privé positif, Sirey, t. 1, 1914 ; F. Geny, Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif, t. 1, LGDJ, 1996, réimpression de l'édition de 1919).

[46] H. Kelsen, Théorie pure du droit, Trad de la 2e éd. De la Reine Rechtslehre par Ch. Eisenmann, Dalloz, 1962, p 299 et s.

[47] Comp. H. Kelsen se contente d’une légitimité formelle : le jugement de valeur objectif énonce “ soit qu’une conduite effective est conforme à une norme considérée comme objectivement valable et est en ce sens bonne… soit qu’une conduite effective contredit une telle norme et est en ce sens mauvaise, c’est à dire contraire à une valeur ” H. Kelsen, op. cit., p 23.

Cette vision restrictive chasse l’idée de justice que Perelman réintroduit : “ Nous sommes amenés à distinguer trois éléments dans la justice : la valeur qui la fonde, la règle qui l’énonce, l’acte qui la réalise ”. “ De même qu’un acte juste est relatif à la règle, la règle juste sera relative aux valeurs qui servent de fondement au système normatif ” (Ch. Perelman, Justice et Raison, 2e éd. Université de Bruxelles, 1972 ; B. Huisman et F. Ribes, Les philosophes et le droit - Les grands textes philosophiques sur le droit, Bordas, 1988, p 330).

[48] La théorie des systèmes est généralement attribuée au biologiste Ludwig von Bertalanffy, l’auteur de General system Theory publié en 1968. Cette théorie s’étend depuis à l’ensemble des domaines de la connaissance et spécialement à l’économie v. J.-L. Le Moigne, La théorie du système général, Théorie de la modélisation, PUF, 4e éd., 1994.

Sa transposition au droit a principalement été tentée par des auteurs allemands dont N. Luhmann (En langue française v. L’unité du système juridique, APD, 1986, p 163) et G. Teubner (Deux ouvrages sont traduits : G. Teubner, Le droit : un système autopoïétique, PUF, Trad. de l'all. par G. Maier et N. Boucquey, 1993 ; G. Teubner, Droit et réflexivité - L'auto-référence en droit et dans l'organisation, LGDJ, 1994, trad. de l'allemand par N. Boucquey). L’idée de système a également fait l’objet du tome 31 des Archives de philosophie du droit (1986), intitulé “ Le système juridique ” avec l’article de Ch. Grzegorczyk, Evaluation critique du paradigme systémique dans la science du droit, ainsi que plusieurs publications en français parmi lesquelles v. : N. Bobbio, Nouvelle réflexions sur les normes primaires et secondaires, in La règle de droit, Bruylant, 1971 ; J.-L. Le Moigne, Le systèmes juridiques sont-ils passibles d'une représentation systémique ?, Rev. rech. juri. 1985-1. 155 ; P. Orianne, Introduction au système juridique, Bruylant, 1982 ; M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et désordre, PUF, 1988, Orianne, Introduction au système juridique, Bruylant, 1982 ; M. Van de Kerchove et F. Ost, Le système juridique entre ordre et désordre, PUF, 1988.

Ces théories inspirent de nombreux auteurs comme C. Atias, op. cit., n° 86, p 168, n° 97, p 191 ; J.-L. Bergel, Théorie générale du droit, Dalloz, 1999, 3e éd., n° 8, p 8.

[49] J. Habermas, Droit et démocration - Entre faits et normes, Gallimard, NRF essais, 1992, trad. de l'allemand, 1997, Dans cet ouvrage, l’auteur applique au phénomène juridique le concept de discussion au centre de son œuvre. La légitimé de la contrainte suppose que les citoyens puissent à tout moment se concevoir comme les auteurs du droit auquel ils sont soumis.

[50] Ch. Perelman, op. cit. , 1972 ; B. Huisman et F. Ribes, op. cit., p 331. “ Toute valeur étant nécessairement arbitraire, il n’existe pas de justice absolue, entièrement fondée sur la raison ”

[51] Saleilles, Préface à F. Geny, Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif, t. 1, LGDJ, 1996, réimpression de l'édition de 1919.

[52] C. Atias, op. cit., n° 13, p 20 A propos des obstacles à la reconaissance d’une épistémologie juridique : “ Ou bien il n’y pas de connaissance du droit : ou bien cette connaissance n’a rien de scientifique ”.

[53] V. sur l’encadrement de l’enseignement du droit au XIXe : J.-L. Halpérin, Histoire du droit privé français depuis 1804, PUF, 1996, n° 24, p 49 et s. La loi du 22 ventôse an XII (13 mars 1804) donne à l’Etat le monopole de l’enseignement juridique, les professeurs prêtent un serment d’obéissance, ils exercent sous la surveillance d’inspecteurs généraux.

[54] L’expression de phénomène du droit, par opposition à science du droit, est empruntée à J. Carbonnier, Droit civil, t. 1, Introduction, PUF, 26e éd., 1999, n° 3, p 19.

[55] Friedrich A. Hayek, Droit, législation et liberté, t. 1 Règles et ordre, PUF, Quadrige, 1973, Trad. En 1980 par R. Audouin, p 6 “ Nombre d’institutions de la société qui sont des conditions indispensables à la poursuite efficace de nos buts conscients sont en fait le résultat de coutumes, d’habitudes, de pratiques qui n’ont ni été inventées, ni ne sont observées afin d’obtenir des buts de cette nature ”.

[56] Comp.  X. Lagarde, thèse précitée.

[57] Deux tendances existent en épistémologie : le réductionnisme (le centre de gravité est le sujet, le complexe peut se ramener au simple), l’antiréductionnisme (le centre de gravité est l’objet et sa structure, le complexe ne peut se ramener au simple).

L’idée de système juridique écarte une approche réductionniste. “ Il n’y a pas de phénomènes simples ; le phénomène est un tissu de relations ” (G. Bachelard, Le nouvel esprit scientifique, PUF, Quadrige, 1er éd. 1934, 5e éd. 1995, p 143).

[58] M. Carbonnier à travers les notes d’histoire, de théorie juridique, de sociologie, de politique législative et de pratique judiciaire de ses manuels de droit civil marque un net intérêt pour les “ sciences auxiliaires ” du droit.

[59] Loi du 6 juillet 1994 sur laquelle v. Rev. trim. dr. civ. 1996.

[60] Trad. H. Roland et L. Boyer, Adages du droit français, Litec, 3e éd., 1992, n° 328, p 382.