GLOSE – ACTUALITÉS DE DROIT JUDICIAIRE PRIVE – Bull. Sept.-Oct. 2001

 

par 

Julien MAROTTE

 

RUBRIQUES

 __________

·         I - ORGANISATION JUDICIAIRE ET COMPETENCE
            A - Juridiction
            B - Auxiliaires de justice

·         II - ACTION ET INSTANCE

·         III - JUGEMENTS, TRANSACTIONS ET VOIES DE RECOURS

·         IV - PROCEDURES CIVILES D’EXECUTION


 

I - ORGANISATION JUDICIAIRE ET COMPETENCE

__________

A - JURIDICTION

· Civ I, 2 octobre 2001, Bull. n° 235, Pourvoi 00-10-404

® Art. 14 Code civil ; Conv. franco-marocaine du 10 août 1981

® La règle de compétence édictée au profit du demandeur français par l'article 14 du Code civil s'impose au juge français et ne peut être écartée, si son bénéficiaire ne renonce pas à s'en prévaloir, que par un traité international. La Convention franco-marocaine du 10 août 1981 qui ne concerne pas les actions relatives à la filiation, ne permet donc pas d’écarter l'application de l'article 14 du Code civil dont bénéficie le demandeur à une action en recherche de paternité naturelle, dont la nationalité française, est seule prise en considération par les tribunaux français.

 

· Civ I, 2 octobre 2001, Bull. n° 236, Pourvoi 00-11-369

® Art. 14 et 15 Code civil ; Art. 11 Conv. franco-marocaine du 10 août 1981

® Les règles indirectes de compétence édictées par l’article 11 de la convention franco-marocaine du 10 août 1981 sont, au stade de la reconnaissance, exclusives de l'application des articles 14 et 15 du Code civil. Ainsi, le juge français ne peut refuser de reconnaître le jugement marocain de divorce de deux époux de nationalité française, dont le dernier domicile commun se situait au Maroc.

 

· Civ I, 2 octobre 2001, Bull. n° 242, Pourvoi 99-15-962

® Art. 809 al. 1 N.C.P.C.

® L'autorisation de transfert du permis de construire n'est pas, en cas de désaccord sur ce point entre coïndivisaires, une mesure conservatoire ou de remise en état. Excède ainsi ses pouvoirs la cour d’appel qui décide, en référé, que le refus de certains coïndivisaires de transférer le permis de construire cause un trouble manifestement illicite aux autres coïndivisaires, qui s’étaient engagés à ce transfert à l’égard de l’acquéreur.

 

· Civ I, 9 octobre 2001, Bull. n° 247, Pourvoi 99-11-897

® Art. 47 N.C.P.C., 174 et s. Décr. 27 nov. 1991

® Les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats ne peuvent être réglées qu’en recourant à la procédure des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991. Cette procédure spéciale, qui permet de soumettre ces contestations successivement au bâtonnier de l’Ordre des avocats auquel appartient l’avocat concerné, puis au premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle l’Ordre est établi, échappe, par sa nature, aux dispositions de l’article 47 du N.C.P.C. (compétence territoriale dérogatoire lorsqu’un auxiliaire de justice est partie à la procédure).

 

· Civ I, 16 octobre 2001, Bull. n° 254, Pourvoi 99-19.319

® Principe de « compétence-compétence » de l’arbitre

® La juridiction de l’Etat saisie d’un litige destiné à l’arbitrage soit se déclarer incompétente, sauf nullité ou inapplicabilité manifeste de la convention d’arbitrage. La seule constatation d’une indivisibilité du litige ne suffit pas à faire obstacle au jeu de la clause d’arbitrage.

 

· Civ II, 18 octobre 2001, Bull. n° 155, Pourvoi 00-16-597

® Art. 530, 530-1 et R. 49-8 Code de proc. pén., 1315 Code civil

® Seul le ministère public, sous le contrôle du tribunal de police, apprécie la recevabilité d'une réclamation formée par un contrevenant et, par voie de conséquence, la validité du titre exécutoire servant de fondement aux poursuites. Dès lors, le juge de l’exécution ne peut prononcer la suspension des poursuites dont le contrevenant est l’objet, au motif que le comptable public n’a pas formulé de prétentions aux termes desquelles les réclamations du contrevenant n'auraient pas été motivées ou seraient tardives ou n'auraient pas été accompagnées des avis.

 

· Civ III, 26 septembre 2001, Bull. n° 108, Pourvoi 99-14-330

® Art. L. 311-12-1 C.O.J., 848 N.C.P.C.

® Le juge des référés n’est pas compétent pour ordonner, sur la demande du propriétaire d’un fonds, la condamnation sous astreinte du propriétaire du fonds voisin à rétablir les limites de propriété établies par un jugement définitif, le paiement d’une provision pour résistance abusive, et la désignation d’un expert pour matérialiser les bornes telles que fixées par ce jugement. Le juge de l’exécution dispose d’une compétence exclusive pour statuer sur les difficultés relatives à l’exécution d’une décision de justice.

 

· Soc, 2 octobre 2001, Bull. n° 294, Pourvoi 99-44.808

® Art. R. 517-1 Code du travail, Art. 2 Conv. franco-monégasque 13 sept. 1950 relative à la faillite et à la liquidation judiciaire

® L’article 2 de la Convention franco-monégasque du 13 sept. 1950, qui ne concerne que l’ouverture de la procédure collective et les contestations nées de cette procédure, ne modifie pas les règles de compétence édictées par l’art. R. 517-1 du Code du travail, applicables dans l’ordre international aux différends qui s’élèvent à l’occasion du contrat de travail. Les juridictions françaises sont donc compétentes pour connaître des instances introduites par les salariés d’une société monégasque, dès lors que leur travail s’exécutait en France.

 

· Soc, 9 octobre 2001, Bull. n° 312, Pourvoi 99-43.288

® Art. R. 517-3 Code du travail

® La clause compromissoire insérée dans un contrat de travail international n'est pas opposable au salarié qui a saisi régulièrement la juridiction française compétente en vertu des règles applicables, peu important la loi régissant le contrat de travail.

 

 

 

 

 

 

B - AUXILIAIRES DE JUSTICE

·

 

 

II - ACTION ET INSTANCE

__________

· Avis, 8 octobre 2001, Bull. n° 5, N° 01-00.006

® Art. L. 151-1 et s. C.O.J. et 1031-1 et s. N.C.P.C.

® Il n’y a pas lieu à avis lorsque la demande d’avis porte sur l’interprétation d’un texte inapplicable à l’espèce.

 

· Ass. plén., 26 oct. 2001, Bull. n° 12, Pourvoi 99-60.559

® Art. 625 N.C.P.C.

® La juridiction de renvoi après cassation n’est tenue de répondre, dès lors qu’une partie comparaît et conclut devant elle, qu’aux prétentions et moyens formulés devant elle, alors même que la procédure est orale. Il ne peut donc lui être reproché de n’avoir pas répondu aux moyens soulevés devant le tribunal initialement saisi.

 

· Civ I, 2 octobre 2001, Bull. n° 237, Pourvoi 99-13-461

® Art. 16 N.C.P.C.

® Le juge ne peut faire application d'office de la convention de Vienne du 11 avril 1980, sans inviter les parties à un débat contradictoire sur ce point.

 

· Civ I, 9 octobre 2001, Bull. n° 244, Pourvoi 98-14-991

® Art. 1382 Code civil

® Une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel.

 

· Civ III, 3 octobre 2001, Bull. n° 110, Pourvoi 00-11-690 99-18-080

® Art. 3, 6 et 7 loi 21 juill. 1865

® Le défaut de publication, dans le délai d'un mois, de l'extrait de l'acte d'une association syndicale libre régie par la loi du 21 juin 1865, n'a pas pour effet d'annuler l'acte lui-même. Ainsi dès que la publication a eu lieu, même après le délai d'un mois, l'association syndicale libre bénéficie des droits énoncés à l'article 3 de la loi du 21 juin 1865, et notamment de la capacité à agir en justice.

 

Com, 9 octobre 2001, Bull. n° 160, Pourvoi 98-21-987

® Art. 2-3° décr. n° 87-849 19 oct. 1987, 6.1 CESDH

® Le demandeur en annulation d’une décision du conseil de la concurrence n'ayant exposé les moyens d'annulation tirés de la présence du rapporteur au délibéré ni lors de sa déclaration de recours, ni dans les deux mois suivant la notification de la décision, n’est pas recevable à le faire pour la première fois devant la Cour de cassation. La cour d'appel n'était pas tenue de relever d'office ce moyen.

® Art. 6.1 CESDH

® Lorsque le Conseil de la concurrence s'est prononcé sur le caractère prohibé d'une partie des faits qui lui étaient dénoncés dans une procédure de mesures conservatoires, il ne peut, dans une formation comportant des membres ayant statué dans cette procédure, statuer à nouveau au fond, sans manquer objectivement au principe d'impartialité.

 

Com, 16 octobre 2001, Bull. n° 167, Pourvoi 98-12-568

® Art. 6.1 CESDH

® L'impartialité du juge se présume jusqu'à preuve contraire. Il appartient au demandeur de démontrer en quoi la présidence, par le juge-commissaire, de la formation de jugement, justifie objectivement ses appréhensions sur le défaut d'impartialité de la juridiction.

 

 

 

 

 

 

 

III - JUGEMENTS, TRANSACTIONS ET VOIES DE RECOURS

__________

· Civ I, 2 octobre 2001, Bull. n° 241, Pourvoi 00-04.149 (2 arrêts)

® Art. 607 et 608 N.C.P.C.

® Le jugement qui, statuant sur recours d’un créancier contre la décision de la commission de surendettement, déclare recevable une demande de traitement d’une situation de surendettement, et qui ne procède pas d'un excès de pouvoir, ne met pas fin à la procédure. Il ne peut être frappé de pourvoi indépendamment du jugement sur le fond.

® Art. 607 et 608 N.C.P.C.

® Lorsque le juge de l'exécution, saisi, par la commission de surendettement d'une demande de vérification des créances à la suite de la contestation de leur montant par le débiteur surendetté, écarte une créance, il met fin à l'instance à l'égard de ce créancier. Le pourvoi de ce dernier est, dès lors, recevable.

 

· Civ I, 9 octobre 2001, Bull. n° 251, Pourvoi 00-04-095

® Art. R. 331-12 Code conso.

® Aux termes de l'article R. 331-12 du Code de la consommation, la vérification de la validité et du montant de la créance est opérée pour les besoins de la procédure et afin de permettre à la Commission de poursuivre sa mission. Il s'ensuit que lorsque la procédure de surendettement est clôturée sans qu'ait été prise l'une quelconque des mesures de redressement prévues par les articles L. 331-6 à L. 331-7-1 du Code de la consommation, l'ordonnance portant vérification d'une créance, qui n'a pas autorité de chose jugée su principal, est frappée de caducité. Le pourvoi formé contre la décision du juge d’instance qui a statué sur la vérification des créances est donc sans objet.

 

· Civ II, 4 octobre 2001, Bull. n° 149, Pourvoi 00-14-705

® Art. 642 N.C.P.C.

® Viole l’art. 642 du N.C.P.C., en ajoutant une condition qu’il ne prévoit pas, l’arrêt qui, pour déclarer l’appel irrecevable comme tardif, retient qu'il appartenait à l’appelant de démontrer qu'il n'avait pas été en mesure de régulariser son recours avant la fermeture du greffe le dernier jour du délai, en raison d'un obstacle invincible, dès lors que l’appelant démontrait, par un acte d'huissier de justice produit aux débats, que le greffe était fermé le dernier jour du délai à 19 heures, de sorte que n'ayant pu faire enregistrer son appel en temps utile, il était recevable à le régulariser le lendemain.

 

· Civ II, 18 octobre 2001, Bull. n° 156, Pourvoi 00-16-572

® Art. 528-1 N.C.P.C.

® Les dispositions de l’article 528-1 du N.C.P.C. ne s’appliquent pas aux sentences arbitrales. Est donc recevable le recours en annulation d’une sentence formé plus de deux ans après son prononcé.

 

· Civ II, 18 octobre 2001, Bull. n° 157, Pourvoi 00-13-650

® Art. 536 et 473 N.C.P.C.

® La qualification inexacte d'une décision par les juges qui l'ont rendue étant, en vertu de l'article 536 du nouveau Code de procédure civile, sans effet sur le droit d'exercer un recours, le moyen qui se borne à critiquer les énonciations de l'arrêt par lesquelles la cour d'appel a qualifié le jugement de réputé contradictoire, est irrecevable faute d'intérêt.

 

· Civ II, 18 octobre 2001, Bull. n° 158, Pourvoi 98-17-475

® Art. 170 N.C.P.C.

® Les dispositions de l'article 170 du nouveau Code de procédure civile concernent l'exécution d'une mesure d'instruction et ne sont pas applicables aux décisions qui se prononcent sur une demande de changement d'expert, contre lesquelles l’appel est donc recevable indépendamment du jugement sur le fond.

 

· Civ III, 31 octobre 2001, Bull. n° 116, Pourvoi 99-12-181

® Art. 625 N.C.P.C.

® La cassation, en toutes ses dispositions, d’un arrêt désignant un expert pour évaluer l’étendue d’un préjudice entraîne de plein droit la nullité de l'expertise qui en est l'exécution.

 

· Com, 9 octobre 2001, Bull. n° 158, Pourvoi 99-10-485

® Art. 583 N.C.P.C.

® Les juges du fond apprécient souverainement l’intérêt d’une banque, garante à première demande, à exercer tierce-opposition d’une ordonnance de référé ayant interdit au contre-garant d’exécuter sa garantie, cette décision lui faisant courir le risque de devoir elle-même s'exécuter.

 

Com, 16 octobre 2001, Bull. n° 169, Pourvoi 99-10-097

® Art. 380 N.C.P.C., L. 621-43, al 3 Code de commerce, 74 décr. n° 85-1388 du 27 déc. 1985

® L'appel du receveur des impôts, créancier du débiteur en redressement judiciaire, exercé contre la décision de sursis à statuer qu’il prétend rendue en méconnaissance des dispositions de l'article 50, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-43, alinéa 3, du Code de commerce, est recevable en vertu de l'article 74 du décret du 27 décembre 1985, cet appel n'étant pas soumis aux dispositions de l'article 380 du nouveau Code de procédure civile.

 

· Soc, 16 octobre 2001, Bull. n° 323, Pourvoi 99-40.249

® Art. 984 N.C.P.C.

® L’absence de pouvoir spécial à la date de la déclaration de pourvoi en cassation en matière dispensée peut être réparée par la production ultérieure d’un pouvoir spécial régulier, dès lors que cette production intervient dans le délai du pourvoi.

 

· Soc, 17 octobre 2001, Bull. n° 325, Pourvoi 00-41.055

® Art. 984 N.C.P.C.

® L’absence de pouvoir spécial à la date de la déclaration de pourvoi en cassation en matière dispensée ne peut plus être réparée par la production ultérieure d’un pouvoir spécial régulier, lorsque cette production intervient après expiration du délai requis pour former le pourvoi.

 

 

 

 

 

IV - PROCEDURES CIVILES D’EXECUTION

__________

 

· Civ II, 4 octobre 2001, Bull. n° 150, Pourvoi 00-11-609

® Art. 43, 45 et 46 loi  9 juill. 1991, 1244-1 Code civil

® Le juge de l'exécution ne peut accorder des délais de paiement au débiteur saisi par la voie d’une saisie-attribution, cette voie d’exécution ayant pour effet de transmettre la propriété des fonds saisis au créancier. Le paiement fait au créancier ne peut donc pas être remis en cause.

 

· Civ II, 4 octobre 2001, Bull. n° 151, Pourvoi 99-19-986

® Art. 215 décr. 31 juillet 1992

® L'engagement d'une procédure de vérification de comptabilité du débiteur saisi à titre conservatoire par l’administration fiscale vaut assignation au fond de ce débiteur. Dès lors que l’ouverture de cette procédure a été notifiée au débiteur dans le mois suivant la mesure conservatoire, l’apparence de la créance est confirmée par le créancier.

 

· Civ II, 4 octobre 2001, Bull. n° 152, Pourvoi 99-20-653

® Art. 44 loi 9 juill. 1991, 59 et 60 décr. 31 juill. 1992

® La sanction rigoureuse qui frappe le tiers saisi négligent appelle en contrepartie de la part de l'huissier de justice instrumentaire un soin particulier dans la conduite de son interpellation. A défaut, le tiers saisi a un motif légitime à ne pas répondre ou à répondre avec un certain retard. Lorsque l'huissier de justice a eu conscience qu'il n'avait pas eu affaire à une personne compétente pour répondre, la réponse du tiers saisi, donnée dans un délai administratif raisonnable, doit être considérée comme intervenue de manière légitime.

 

· Civ II, 18 octobre 2001, Bull. n° 159, Pourvoi 00-12-369

® Art. 808 du Code civil, 990 Code de procédure civile, 43 et 45 loi 9 juill. 1991

® Lorsque des créanciers opposants se sont manifestés auprès du notaire chargé du règlement d’une succession, et ont été nommément cités dans un acte aux termes duquel les héritiers bénéficiaires ont déclaré leur abandonner tous les biens de la succession, la créance de la succession contre un tiers est devenue indisponible en application des articles 808, premier alinéa, du Code civil et 990 du Code de procédure civile. Dès lors, la saisie-attribution de cette créance ne peut emporter d'effet attributif, si bien que le tiers saisi qui en refuse le paiement au créancier saisissant n’engage pas sa responsabilité à l’égard de ce dernier.